Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

vous connaîtrez que c’est un recueil de pièces écrites par des mains différentes. Il est d’ailleurs rempli de fautes d’i

... On dirait bien un commentaire à propos  du texte de réforme des régimes de retraites.

Résultat de recherche d'images pour "texte de réforme des retraites"

Pourvu que les fondations soient solides, on peut espérer

 

« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand

à Saint-Joseph

à Paris

8è octobre 1764 1

Madame de Jaucourt vous remettra, madame, le livre que vous me demandez, presque aussitôt que vous aurez reçu cette lettre. Vous verrez bien aisément quelle injustice l’on me fait de m’attribuer cet ouvrage ; vous connaîtrez que c’est un recueil de pièces écrites par des mains différentes. Il est d’ailleurs rempli de fautes d’impression et de calculs erronés qui peuvent faire quelque peine au lecteur. Il y a quelques chapitres qui vous amuseront, et d’autres qui demandent un peu d’attention. Si vous lisez le catéchisme des Japonais, vous y reconnaîtrez aisément les Anglais . Vous y verrez d’un coup d’œil que les Breuxhé sont les Hébreux ; les Pipastes, les papistes ; Therlu et Vincal, Calvin et Luther ; et ainsi du reste.

Je vous exhorte surtout à lire le catéchisme chinois, qui est celui de tout esprit bien fait.

En général, le livre inspire la vertu, et rend toutes les superstitions détestables. C’est toujours beaucoup dans les amertumes dont cette vie est remplie, d’être guéri d’une maladie affreuse qui ronge le cœur de la plupart des hommes, et qui conduit au tombeau par des chemins bordés de monstres.

J’ai été si malade depuis deux mois, madame, que je n’ai pu aller une seule fois chez madame de Jaucourt. Je crois vous avoir déjà mandé que j’avais renoncé à tout ce qu’on appelle devoirs 2, comme à tout ce qu’on appelle plaisirs.

Je prie M. le président Hénault de souffrir que je ne le sépare point de vous dans cette lettre, et que je lui dise ici que je lui serai attaché jusqu’au dernier moment de ma vie. Il voit mourir tous ses amis les uns après les autres ; cela doit lui porter la tristesse dans l’âme, et vous devez vous servir l’un à l’autre de consolation.

Un redoublement de mes maux, qui me prend actuellement, me remet dans mon lit, et m’empêche de dicter plus longtemps combien je suis dévoué à tous deux. Recevez ensemble les protestations bien sincères de mes tendres sentiments, et conservez-moi des bontés qui me sont bien précieuses. 

V.»

1 L'édition de Kehl, d'après la copie Beaumarchais, donne Florian pour Jaucourt en début de lettre .

2 Voir les lettres du 20 juin 1764 et du 1er juillet 1764 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2019/08/02/riez-d-une-caricature-qui-ressemble-assez-6167971.html

et : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2019/08/23/j-ai-trouve-que-la-liberte-valait-encore-mieux-que-la-sante-6171586.html

Le 29 septembre 1764, Mme Du Deffand demande à V* des explications sur son refus d'écrire au président Hénault au sujet de la mort de son ami d'Argenson . Voir aussi la lettre du 20 octobre à Hénault : « Je ne pus alors écrire ni à vous , son illustre ami, ni à MM. de Paulmy et de Voyer . Quelque temps après, […] je vous adressai sept ou huit lignes un peu à la hâte, mais c'était mon cœur qui les dictait . »

Lire la suite

27/11/2019 | Lien permanent

Ma destinée est d’être écrasé, persécuté, vilipendé, bafoué, et d’en rire

... Nos ministres et président ont -ils, eux, la capacité, je dirais même la qualité d'en rire ? Le doute m'habite . Ils se prennent trop au sérieux .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

18è avril 1764

Nous élevons nos cris à nos anges, du sein des mers qui submergent nos vallées, entre nos montagnes de glace et de neige. Nous offrons volontiers à notre curé la dîme de tout cela ; mais pour la dîme de nos blés, Dieu nous en préserve !

Après nos dîmes, l’affaire la plus intéressante est que mes anges aient la bonté de nous envoyer nos Roués. J’y ai fait tant de corrections, tant de changements, j’y en ferai tant encore, qu’il faut absolument que je fasse porter sur votre copie tous les petits cartons qu’il y faut faire. Voyez-vous, je cherche, par un travail assidu, à mériter vos bontés. Le Chimène a beau me trouver décrépit, je veux que mes anges me trouvent jeune ; je veux que la conspiration à la tête de laquelle ils sont réussisse. Jamais rien ne m’a tant réjoui que cette conspiration. Mettez tout votre esprit, mes anges, toute votre adresse, toute votre politique, pour conduire à bien cette plaisante aventure le plus promptement que vous pourrez. Je vous renverrai votre copie, la première poste après celle où je l’aurai reçue.

Les frères Cramer ont envoyé à Paris les Contes de Guillaume Vadé, avec quelques autres pièces qu’on pourrait très bien brûler comme un mandement d’évêque 1. Vous pensez bien que ces pièces ne sont pas de moi. Lesdits frères Cramer se sont imaginé très mal à propos qu’ils vendraient mieux leurs denrées s’ils y mettaient mon nom. Ils ont fait imprimer un titre qui est très ridicule. Ils intitulent ce volume de contes de Guillaume Vadé, Suite de la Collection des Œuvres de V. 2, etc. J’en ai été indigné . Ils m’ont promis de supprimer cette impertinence ; j’ai tout lieu de croire qu’ils ne l’ont pas fait : en ce cas, je vous demande en grâce de vous servir de tout votre crédit pour faire saisir l’ouvrage. J’en écrirai moi-même à M. de Sartine avec une violente véhémence, et je me vengerai de cet horrible attentat d’une façon exemplaire. Je voudrais que mon nom fût anéanti, et que mes œuvres subsistassent. J’aime les Contes de Guillaume Vadé ; mais je voudrais qu’on ne parlât jamais de moi. Je voudrais n’être connu que de mes anges, et je prétends bien que je serai entièrement ignoré dans notre belle conspiration ; mais je vous avertis qu’il faudra absolument un nom ; car si on ne nomme personne, on me nommera ; il faudra au moins dire que c’est un jeune jésuite, par exemple celui au derrière duquel  Pompignan marchait à la procession 3, ou bien quelque abbé qui veut être prédicateur du roi.

Que voulez-vous que je dise à M. de Richelieu, quand il me mande qu’il a arrangé tout avec ses camarades les premiers gentilshommes ? Je ne crois pas que, de ma petite métairie des Délices, en pays genevois, je puisse lutter honnêtement contre quatre grands-officiers de la couronne. Ma destinée est d’être écrasé, persécuté, vilipendé, bafoué, et d’en rire . Pour me dépiquer, je mets sous les ailes de mes anges le petit mémoire ci-joint pour la Gazette littéraire. Je n’ai encore rien reçu d’Italie et d’Espagne. Je tire de mon cerveau ce que je peux, mais ce cerveau est bientôt desséché, il n’y a que le cœur d’inépuisable. »

1 Formule toute faite chez V* ; elle paraît encore , vers cette époque dans Pot-Pourri, dans un chapitre sur Rousseau (chap. VIII : https://fr.wikisource.org/wiki/Pot-pourri ) que V* a finalement supprimé des édition parues de son vivant .

2 On ne rencontre guère d'exemplaires portant ce faux titre, mais il a dû pourtant être imprimé, comme le montre la lettre du même jour à Cramer .

3 Voir la Lettre de M. de L’Écluse, 1763 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5624263f/f2.texteImage

Lire la suite

17/05/2019 | Lien permanent

Son malheur ne lui [a] peut-être pas laissé assez de netteté dans l’esprit pour répondre catégoriquement à toutes les qu

... C'est ce que je pense en voyant les reportages lors de catastrophes telles que celle de Beyrouth , cyclones et incendies . Les rescapés, à des questions souvent oiseuses, donnent des versions parfois bien étranges, et là je pense particulièrement à ces Beyroutins qui font un lien direct entre le son d'un avion qu'ils ont entendu, mais non vu, et les mortelles explosions subies . Un peu de folie ne doit pas étonner dans ce pays complètement désaxé depuis trop longtemps . Explosion = attentat !

Radio-trottoir vit encore . Alors :

https://www.youtube.com/watch?v=AfpSRnahQig

 

 

« A Jean-Baptiste-Jacques Élie de Beaumont

19è avril 1765 à Ferney

Protecteur de l’innocence, vainqueur du fanatisme, homme né pour le bonheur des hommes, je crois que vous avez toutes les pièces nécessaires pour agir en faveur de la pauvre famille Sirven, que vous voulez bien prendre sous votre protection. Vous avez, je crois, au bas de la sentence du juge du village, l’extrait de l’arrêt du parlement de Toulouse, authentiquement certifié sur papier timbré. Vous savez que ces arrêts par contumace s’appellent délibération dans la langue d'Oc, et ce mot de délibération doit se trouver au bout de votre pancarte. Sirven a perdu, par cette aventure, tout son bien qui consistait dans un fonds de dix-neuf mille francs, outre quinze cents livres de rentes net que lui valait sa place. Voilà toute une famille expatriée, couverte d’opprobre, et réduite à la plus cruelle misère. Le procès qu’on lui a fait me paraît absurde, l’enlèvement de sa fille affreux, la sentence un attentat contre la justice et contre la raison. S’il s’agissait de comparaître devant tout autre tribunal que celui de Toulouse, j’enverrais cette malheureuse famille se remettre à la discrétion de ses juges naturels ; mais je crains que les juges de Toulouse ne soient plus ulcérés que corrigés. Qui peut répondre que sept ou huit têtes échauffées ne se vengeront pas sur les Sirven du triomphe que vous avez procuré aux Calas ? J’attends votre décision. Je voudrais que vous puissiez sentir à quel point je vous révère, je vous admire, et je vous aime.

Mille respects à votre digne compagne.

V.



P.S. – Je reçois dans ce moment, monsieur, votre lettre pour moi, et le paquet pour les Sirven 1. Je vais envoyer chercher cet infortuné père. Son malheur ne lui [a] peut-être pas laissé assez de netteté dans l’esprit pour répondre catégoriquement à toutes les questions que vous pourrez lui faire. Nous tâcherons cependant de vous fournir des éclaircissements. Quelque tournure que prenne cette affaire, elle ajoutera bien des fleurons à votre couronne. Vous êtes trop bon d’avoir bien voulu répondre au petit mémoire à consulter sur une maison. Je vous en remercie tendrement. L’affaire fut accommodée dès que j’eus envoyé mon mémoire. Les juifs qui faisaient ces étranges difficultés n’osèrent pas les soutenir, et les principaux intéressés n’ont pas balancé un moment à faire tout ce qui était convenable. Votre nom est tellement en vénération dans ce pays-ci, qu’on n’oserai[t] pas faire une chose désapprouvée par vous. »

1 La lettre du 11 avril 1765, partiellement citée : voir http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/07/31/j... . Élie de Beaumont y avait joint une lettre et un mémoire destinés à Sirven en demandant à V* de « lui dire de faire la plus grande diligence . »

Lire la suite

07/08/2020 | Lien permanent

Je me préparerai à tout en faisant mes Pâques dans ma paroisse; je veux me donner ce petit plaisir en digne seigneur châ

... Et auparavant je me ferai sonner les cloches .

 

DSC04314 sonner les cloches.png

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ARGENTAL.
22 décembre [1759].
Ma dernière lettre 1 était déjà partie, et mon cœur avait prévenu le vôtre, mon respectable ami, avant que je reçusse les dernières marques de votre amitié et de votre confiance. Vous me confirmez tout ce que j'avais imaginé, votre douleur raisonnable, et les consolations de M. le duc de Choiseul. Il me semble que sa belle âme était faite pour la vôtre. En qui peut-il mieux placer sa confiance qu'en vous? N'y a-t-il pas de la modestie à lui à penser que c'est le ministère d'Angleterre qui jette les premiers fondements de la paix? Mais n'y a-t-il pas aussi un peu d'insolence à moi à penser que je crois savoir que c'est M. le duc de Choiseul lui-même qui a tout préparé, et que c'est sur une de
ses lettres, envoyée certainement à Londres, que M. Pitt s'est déterminé? M. le duc de Choiseul lui-même ne m'ôterait pas de la tête qu'il est le premier auteur de la paix que toute l'Europe, excepté Marie-Thérèse, attend avec empressement. Cependant si Luc pouvait être puni avant cette heureuse paix! Si le chemin de la Lusace et de Berlin étant ouvert par le dernier avantage du général Beck, quelque Haddick 2 pouvait aller visiter Berlin! Vous voyez, divin ange, que, dans la tragédie, je veux toujours que le crime soit puni. On parle d'une grande bataille donnée le 6 entre Luc et l'homme à la toque bénite 3 ; on la dit bien meurtrière. Trois lettres en parlent; il n'y a peut-être pas un mot de vrai; nous ne le saurons que dans deux jours. Je m'intéresse bien vivement à cette pièce. Dès que les Autrichiens ont un avantage. M. le comte de Kaunitz 4 dit à Mme de Bentinck : « Écrivez vite cela à notre ami. » Dès que Luc a le moindre succès, il me mande : « J'ai frotté les oppresseurs du genre humain. » Cher ange, dans ces horreurs, je suis le seul qui aie de quoi rire ; cependant je ne ris point, et cela à cause des culs noirs, des annuités, des loteries, et de Pondichéry : car sempre temo per Pondichery .5
Pour nos Chevaliers 6, ils sont à vos ordres. Il faudra s'attendre aux insultes de ce polisson de Fréron, aux cris de la canaille.
Je me préparerai à tout en faisant mes Pâques dans ma paroisse; je veux me donner ce petit plaisir en digne seigneur châtelain.
Et ce M. d'Espagnac ! quel homme! quel grand chambrier ! quel minutieux seigneur! Il ne finira donc jamais? Mais, à propos, je vous prépare des gantelets, des gages de bataille pour Pâques.
Et pourquoi ne pas jouer Rome sauvée sur votre vaste théâtre cet hiver 7? pourquoi ne pas entendre les cris de Clytemnestre 8 ? ne faut-il rien hasarder?

Mille tendres respects à Mme Scaliger.

V. »

2 Le feld-maréchal autrichien ,comte de Haddick, entré à Berlin les 16 et 17 octobre 1757, avec quatre mille hommes seulement, y avait levé, au nom de Marie-Thérèse, une contribution de 800 000 fr. le comte Gottlieb-Heinrich Tottleben, général russe, l'un des généraux d'Élisabeth, exécuta un semblable coup de main sur Berlin le 9 octobre 1760.

3 Daun.

4 Venceslas de Kaunitz-Rietberg, qui porta plus tard le titre de prince. Il avait beaucoup contribué au traité de 1756, si funeste à la France.

5 Je crains toujours pour Pondichéry ; V* s'intéresse particulièrement aux Indes , où il a des intérêts, plutôt qu'au Canada .

6 Tancrède.

7 Cet hiver est ajouté au-dessus de la ligne . Rome sauvée ne fut reprise qu'en février 1762 .

8 Dans la tragédie d'Oreste qui ne fut reprise qu'en juillet 1761 .

 

 

Lire la suite

30/12/2014 | Lien permanent

Il est un peu fâcheux pour la nature humaine, j'en conviens avec vous, que l'or fasse tout, et le mérite presque rien ;

... Rien de nouveau sous le soleil vert !

 

 

« A Jean-François de Bastide

[vers 1760 ?] 1

Je n'imagine pas, monsieur le spectateur du monde 2, que vous projetiez de remplir vos feuilles du monde physique . Socrate, Epictète et Marc Aurèle laissaient graviter toutes les sphères les unes sur les autres, pour ne s'occuper qu'à régler les mœurs . Est-ce donc le monde moral que vous prenez pour objet de vos spéculations ? Mais que lui voulez-vous à ce monde moral, que les précepteurs ds nations ont déjà tant sermonné avec tant d'utilité ?

Il est un peu fâcheux pour la nature humaine, j'en conviens avec vous, que l'or fasse tout, et le mérite presque rien ; que les vrais travailleurs derrière la scène, aient à peine une subsistance honnête , tandis que des personnages en titre fleurissent sur le théâtre ; que les sots soient aux nues, et les génies dans la fange ; qu'un père déshérite six enfants vertueux, pour combler de bien un premier-né qui souvent le déshonore ; qu'un malheureux qui fait naufrage, ou qui périt de quelque autre façon dans une terre étrangère, laisse au fisc de cet État la fortune de ses héritiers .

On a quelque peine à voir, je l'avoue encore, ceux qui labourent dans la disette, ceux qui ne produisent rien dans le luxe ; de grands propriétaires qui s'approprient jusqu'à l'oiseau qui vole, et au poisson qui nage ; des vassaux tremblants qui n'osent délivrer leurs moissons du sanglier qui les dévore ; les fanatiques qui voudraient brûler tous ceux qui ne prient pas Dieu comme eux ; des violences dans le pouvoir, qui enfantent d'autres violences dans le peuple ; le droit du plus fort faisant la loi, non seulement de peuple à peuple, mais encore de citoyen à citoyen .

Cette scène du monde, presque de tous les temps et de tous les lieux, vous voudriez la changer ! Voilà vote folie , à vous autres moralistes . Montez en chaire avec Bourdaloue , ou prenez la plume avec La Bruyère ; temps perdu ; le monde ira toujours comme il va . Un gouvernement qui pourrait pourvoir à tout, en ferait plus en un an que tout l'ordre des frères prêcheurs n'en a fait depuis son institution . Lycurgue, en fort peu de temps, éleva les Spartiates au-dessus de l’humanité . Les ressorts de sagesse que Confucius imagina, il y a plus de deux mille ans, ont encore leur effet en Chine .

Mais comme ni vous ni moi ne sommes faits pour gouverner, si vous avez de si grandes démangeaisons de réforme, réformez nos vertus, dont les excès pourraient à la fin préjudicier à la prospérité de l’État . Cette réforme est plus facile que celle des vices . La liste des vertus outrées serait longue, j'en indiquerai quelques unes, vous devinerez aisément les autres .

On s'aperçoit en parcourant nos campagnes que les enfants de la terre ne mangent que fort en-dessous du besoin : on a peine à concevoir cette passion immodérée pour l'abstinence . On croit même qu'ils se sont mis dans la tête qu'ils seront plus sains en faisant jeûner les bestiaux .

Qu'arrive-t-il ? Les hommes et les animaux languissent, leurs générations sont faibles, les travaux se suspendant, et le culture en souffre .

La patience est encore une vertu que les campagnes outrent peut-être : si les exacteurs des tributs s’en tenaient à la volonté du prince, patienter serait un devoir ; mais questionnez ces bonnes gens qui nous donnent du pain, ils vous diront que la façon de lever les impôts est cent fois plus onéreuse que le tribut même . La patience les ruine, et les propriétaires avec eux .

La chaire évangélique a cent fois reproché aux grands et aux rois leur dureté envers les indigents . Cette capitale s’est corrigée à toute outrance : les antichambres regorgent de serviteurs mieux nourris, mieux vêtus que les seigneurs des paroisses d'où ils sortent . Cet excès de charité ôte des soldats à la patrie, et des cultivateurs aux terres .

Il ne faut pas, monsieur le spectateur du monde , que le projet de réformer nos vertus vous scandalise . Les fondateurs des ordres religieux se sont réformés les uns les autres .

Une autre raison qui doit vous encourager, c'est qu'il est peut-être plus facile de discerner les excès du bien que de prononcer sur la nature du mal . Croyez-moi, monsieur le spectateur, je ne saurais trop vous le dire, attachez-vous à réformer vos vertus, les hommes tiennent trop à leurs vices . »

1 La copie Beaumarchais date la lettre de 1758 ; Kehl, de la fin de la même année ; les éditions modernes de novembre 1760 ; en l'absence d'évidence on a adopté une date intermédiaire .

2 Bastide avait publié huit volumes du i. 1758-1760, que suivirent deux volumes du Monde comme il est , 1760 et deux volumes du Monde, 1761

 

Lire la suite

02/07/2015 | Lien permanent

jouer le plus beau rôle du monde, celui de pacificateur

... L'ONU, qui devrait être le modèle des pacificateurs, est, hélas, réduit à employer les armes pour séparer les belligérants . Etre "casque bleu", c'est se mettre entre le bois et l'écorce , inconfortable . Il y a longtemps qu'on ne parle plus d'eux, les armées, bandes terroristes, rebelles sanguinaires de tous acabits sont seuls mis en évidence dans nos médias . Le meurtre à la une , et à l'évidence le constat qu'on ne sait pas l'empêcher devrait nous inciter à développer des forces d'interposition suffisantes . Peut-être ce jour viendra .

https://peacekeeping.un.org/fr/where-we-operate

C'est qui les casques bleus ? -

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

13è janvier 1766

Cet ordinaire-ci, mes divins anges, sera consacré au vrai tripot, non celui de Genève, mais celui de la comédie.

Nous avons lu Virginie à tous nos acteurs ; aucun n’a voulu y accepter un rôle 1. Je ne sais pas si la troupe de Paris est plus difficile que celle de Ferney , mais on a trouvé l’intrigue froide, la pièce mal construite, sans aucun intérêt, sans vraisemblance, sans beauté . On ne peut être plus mécontent.

Il se pourrait qu’après notre jugement rendu au pied du mont Jura en Sibérie la pièce réussît à Paris, puisque le Siège de Calais a réussi ; mais je me sens de l’amitié pour M. de Chabanon, et je ne peux lui déguiser mes sentiments. Je voudrais bien ne lui pas déplaire en lui disant la vérité, et je ne peux mieux m’y prendre qu’en la faisant passer par vos mains, vous êtes fait pour rendre la vérité aimable, lors même qu’elle condamne son monde.

M. Hennin, qui est actuellement chez moi, trouve la pièce de[s] Genevois bien plus ridicule ; il est étonné qu’on fasse tant de bruit pour si peu de chose. Il faudra pourtant absolument un médiateur pour juger le procès de la belette et du lapin 2, et pour apprendre à ces animaux-là à se supporter les uns les autres ; je tremble que vous ne vouliez pas venir ; mes anges n’aiment point à courir ; cependant il me semble qu’il ne serait pas mal que vous vissiez Mme de Grosley; vous attendriez les beaux jours. Dans cet intervalle, M. Hennin vous enverrait le résultat des mesures qu’il aurait prises d’avance avec les députés de Berne et de Zurich . Vous les dirigeriez ; vous vous en amuseriez avec M. le duc de Praslin ; vous pourriez même consulter vos avocats sur ce qui concerne la législature, si vous ne vouliez pas vous en rapporter à vous-même, et vous arriveriez pour signer à Genève ce que vous auriez arrêté à Paris dans votre cabinet. Les passions aveuglent les hommes, je l’avoue ; la mienne est de mourir comme le bon vieillard Siméon3, après vous avoir vu. Pardonnez-moi donc, si je me tourne de tous les sens pour vous engager à faire un voyage qui fera le seul bonheur dont je sois susceptible ; en un mot, je ne sais rien de plus à sa place, rien de plus raisonnable, de plus agréable, que ce que je vous propose, et je ne vois pas la plus petite raison de me refuser. Songez que vous n’aurez d’autre peine que celle d’aller et revenir pour jouer le plus beau rôle du monde, celui de pacificateur. »

Lire la suite

03/05/2021 | Lien permanent

Ces premiers hommes consacrèrent les plantes que la terre avait produites . Ils les jugèrent divines, et vénérèrent ce q

... Est-ce ainsi,-- qu'inspiré par des jésuites,-- on devient végan ?

De nos jours, raisonnons un peu : https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc...

et : https://fr.slideshare.net/elsavonlicy/les-plantes-superie...

Ce qu'il Faut Savoir Avant de Passer à Un Régime à Base de Plantes -  Veganation

 

 

« A Jacob Vernes

1er septembre 1767

Voici, monsieur, les paroles de Sanconiathon :

« Ces choses sont écrites dans la Cosmogonie de Thaut, dans ses mémoires, et tirées des conjectures et des instructions qu'il nous a laissées. C'est lui qui nomma les vents du septentrion et du midi, etc. Ces premiers hommes consacrèrent les plantes que la terre avait produites . Ils les jugèrent divines, et vénérèrent ce qui soutenait leur vie, celle de leur postérité et de leurs ancêtres, etc. 1»

Au reste, mon cher monsieur, il se pourrait très bien que Sanconiathon eût dit une sottise, ainsi que des gens venus après lui en ont dit d'énormes.

L'affaire des Sirven n'a pu être encore rapportée, parce que M. d'Ormesson 2 a été malade, du moins on donne cette excuse, mais il se pourrait bien que le crédit des ennemis en fût la véritable raison.

La malheureuse aventure de Sainte-Foy sur les frontières du Périgord, vingt-quatre pauvres diables de huguenots décrétés, le fatal édit de 1724 renouvelé dans le Languedoc 3, et enfin le malheur de Sirven, qui n'a point de jolie fille pour intéresser les Parisiens, tout cela pourrait nuire à la cause de cet infortuné Sirven.

Je vous envoie, mon cher philosophe huguenot, une petite Philippique que j'ai été obligé de faire. L'ami La Beaumelle s'en est mal trouvé. Le commandant de la province l'a un peu menacé, de la part du roi, du cachot qu'il mérite. Je suis très tolérant, mais je ne le suis pas pour les calomniateurs. Il faut d'une main soutenir l'innocence, et de l'autre écraser le crime. Je vous embrasse en Jéhovah, en Knef, en Zeus , point du tout en Athanase, très peu en Jérôme et en Augustin. »

 

 



1 Ouvrage de jésuites Sanchoniathonis Historiarum Phoeniciae libros novem ; dans l'édition Wagenfeld, 1837, ce passage se trouve page 11 : « Quae omnia […] : https://books.google.fr/books?id=ghkOAAAAYAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q=11&f=false

2 Louis-François de Paule Lefèvre d'Ormesson de Noyseau était président au parlement depuis 1755; il devint premier président en 1788, et mourut le 2 février 1789. Le chevalier de La Barre était de sa famille; voir tome XXV, page 504 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome25.djvu/514

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Lef%C3%A8vre_d%27Ormesson

Sur ce d'Ormesson, voir lettre du 23 juin 1763 à Mariette : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2018/06/15/j-aurai-l-honneur-d-entrer-dans-un-plus-long-detail-avec-vou-6059650.html

et du 9 janvier 1765 à Lafargue : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/03/17/on-me-fait-esperer-que-je-ne-serai-pas-aveugle-et-alors-je-vous-verrai-de-t.html

et 14 juillet 1766 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/10/07/si-la-loi-etait-claire-tous-les-juges-seraient-du-meme-avis-6342130.html

3 Cet édit du 14 mai 1724 prive les protestants de l'exercice de certains droits civils . Tombé en désuétude, il a été remis en vigueur à la suite de l'affaire de Sainte-Foy. Voir : https://books.openedition.org/larhra/2188?lang=fr

Lire la suite

17/04/2023 | Lien permanent

à force de peines et de dépenses

 

http://www.deezer.com/listen-897499

http://www.deezer.com/listen-897507

 

manitas.jpg

 

 

Il n'y en a qu'un, Petites Mains d'Argent, Manitas de Plata , que j'ai eu le plaisir de cotoyer une soirée animée de juin 68 -(eh! oui , même à Montpellier on savait faire la fête, sans beuverie, avec juste ce qu'il faut  )- et que je réécoute quand je veux décoller la pulpe !

 

 

« A Georg Conrad Walther

libraire du roi à Dresde

 

A Berlin ce 22 janvier [1752]

 

J'ai réussi, mon cher Walther, à force de peines et de dépenses à rattraper l'exemplaire i qu'on ii m'avait volé et qu'on avait confié au sieur Lessing, étudiant en médecine à Wittemberg iii. Ainsi je vous épargne tous les mouvements que vous vous seriez donnés iv. Tous les exemplaires sont en ma possession, et en pleine sureté sans en excepter un seul . J'en confierai un si vous voulez à M. Stieven, qui est à Brunswick. C'est un honnête homme et qui est dans un poste de confiance. Je crois que vous serez bien aise d'avoir un aussi habile traducteur. Si vous avez fait quelques démarches auprès du sieur Lessing, regardez-les comme inutiles. J'espère que vous trouverez votre avantage dans le débit de l'original, et dans celui de la traduction. Je vous embrasse.

 

V. »


i Exemplaire du Siècle de Louis XIV.Walther va l'éditer : http://books.google.fr/books?id=LjgHAAAAQAAJ&pg=PR1&a...

ii  « On » = son secrétaire-copiste Richier (de Louvain).

iv Le 18, à Walther, V* demanda de « déterminer » Lessing «  à faire cette traduction » qu'il a entreprise « pour lui sur un exemplaire corrigé, complet et muni d'un grand nombre de cartons... »

 

Lire la suite

22/01/2011 | Lien permanent

comment voulez-vous que j'oublie la manière barbare dont j'ai été traité dans mon pays ?

 Barbare ! vous avez dit barbare, comme c'est étrange ...

http://www.deezer.com/listen-3516118

A découvrir, comme je viens de le faire :

http://www.deezer.com/listen-2149426

Comment être barbare ?

http://www.deezer.com/listen-291198

 Regrets et révoltes barbares de nos jours :

http://www.deezer.com/listen-4435580

... et du XVIIIè siècle :

http://www.deezer.com/listen-4183754

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

 

A Berlin ce 28 août [1750]

 

Jugez en partie, mes très chers anges, si je suis excusable. Jugez-en par la lettre [i] que le roi de Prusse m'a écrite de son appartement au mien, lettre qui répond aux très sages et très éloquentes et très fortes raisons que ma nièce alléguait sur un simple pressentiment. Je lui envoie cette lettre, qu'elle vous la montre, je vous en prie, et vous croirez lire une lettre de Trajan ou de Marc-Aurèle. Je n'en ai pas moins le cœur déchiré. Je me livre à ma destinée et je me jette la tête la première dans l'abîme de la fatalité qui nous conduit tous. Ah ! mes chers anges, ayez pitié des combats que j'éprouve et de la douleur mortelle avec laquelle je m'arrache à vous. J'en ai presque toujours vécu séparé, mais autrefois, c'était la persécution la plus injuste, la plus cruelle, la plus acharnée. Aujourd'hui , c'est le premier homme de l'univers, c'est un philosophe couronné qui m'enlève.

 

Comment voulez-vous que je résiste, comment voulez-vous que j'oublie la manière barbare dont j'ai été traité dans mon pays ? Songez qu'on a bien pris le prétexte du Mondain, c'est à dire du badinage le plus innocent (que je lirais à Rome au pape) ; que d'indignes ennemis et d'infâmes superstitieux ont pris, dis-je, ce prétexte pour me faire exiler ?[ii] Il y a quinze ans, direz-vous que cela s'est passé. Non, mes anges, il y a un jour, et ces injustices atroces sont toujours des blessures récentes. Je suis, je l'avoue, comblé des bienfaits de mon roi. Je lui demande, le cœur pénétré, la permission de le servir en servant le roi de Prusse son allié et son ami [iii]. Je serai toujours son sujet, mais puis-je regretter les cabales d'un pays où j'ai été si mal traité ? Tout cela ne m'empêcherait pas de songer à Zulime, à Adélaïde, à Aurélie [iv]. Mais je n'ai point ici les deux premières. Je comptais en partant n'être auprès du roi de Prusse que six semaines . Je vois bien que je mourrai à ses pieds. Sans vous que je serais heureux de passer dans le sein de la philosophie et de la liberté de penser auprès de mon Marc Aurèle le peu de jours qui me restent ! Mais on ne peut être heureux. Adieu, je ne vous parlerai ni de l'opéra de Phaéton,[v] ni du spectacle du combat de dix mille hommes, ni de tous les plaisirs qui ont succédé ici aux victoires. Je ne suis rempli que de la douleur de m'arracher à vous . Que madame d'Argental conserve sa santé, que M. de Choiseul, M. l'abbé de Chauvelin fassent à Neuilly des soupers délicieux, que M. de Pont de Veyle se souvienne de moi avec bonté. Adieu divins anges, adieu.

 

Il n'y a pas moyen de tenir au carrousel que je viens de voir. C'était à la fois le carrousel de Louis XIV et la fête des lanternes de la Chine. Quarante six mille petites lanternes de verre éclairaient la place, et formaient dans les carrières où l'on courait une illumination bien dessinée. Trois mille soldats sous les armes bordaient toutes les avenues, quatre échafauds immenses fermaient de tous [vi] côtés la place. Pas la moindre confusion, nul bruit, tout le monde assis à l'aise, et attentif en silence comme à Paris à une scène touchante de ces tragédies que je ne verrai plus, grâce à ... Quatre quadrilles, ou plutôt quatre petites armées, de Romains, de Carthaginois, de Persans et de Grecs, entrant dans la lice, et en faisant le tout au bruit de leur musique guerrière, la princesse Amélie [vii] entourée des juges du camp et donnant le prix . C'était Vénus qui donnait la pomme [viii]. Le prince royal a eu le premier prix. Il avait l'air d'un héros des Amadis. On ne peut pas se faire une juste idée de la beauté, de la singularité de ce spectacle, le tout terminé par un souper à dix tables et par un bal. C'est le pays des fées. Voilà ce que fait un seul homme . Ses cinq victoires et la paix de Dresde étaient un bel ornement à ce spectacle. Ajoutez à cela que nous allons avoir une compagnie des Indes [ix]. J'en suis bien aise pour nos bons amis les Hollandais . Je crois que M. de Pont-de-Veyle avouera sans peine que Frédéric le Grand est plus grand que Louis XIV. Il serait cent fois plus grand que je n'en aurais pas moins le cœur percé d'être loin de vous.

 

V. »

iLettre du 23 août 1750 à laquelle V* fera référence à plusieurs reprises lors des dissensions.

Frédéric écrit : « Comment pourrais-je vouloir l'infortune d'un homme que j'estime et qui me sacrifie sa patrie et tout ce que l'humanité a de plus cher ? », puis finit par : « Je suis fermement persuadé que vous serez fort heureux ici tant que je vivrai ... et que vous trouverez en moi toutes les consolations qu'un homme de votre mérite peut attendre de quelqu'un qui l'estime ... »

ii Allusion aux ennuis de la fin 1736 ; cf. lettre du 9 décembre 1736 à d'Argental : « qu'un ouvrage aussi innocent que Le Mondain avait servi de prétexte à quelques uns de mes ennemis, ... », à Damilaville le 8 décembre 1736 : « Faire à un homme un crime d'avoir dit qu'Adam avait les ongles longs, et traiter cela sérieusement d'hérésie ! »

NDLR : Jugez vous-même : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-epitre-le-monda...

 

iii Cf. lettre à d'Argental du 21 août.

iv Rome sauvée.

vCf. la lettre du 21 août et comparer avec celle censée être du 22 à Mme Denis.

vi Selon l'édition de Kehl ; sur le manuscrit original, deux mots sont illisibles ; le manuscrit est inaccessible.

vii Une des sœurs de Frédéric.

viii « Et Vénus qui donnait la pomme .» est le dernier vers du quatrain impromptu que V* composa à cette occasion et sera publié dans le Journal historique des fêtes que le Roi a données ... au mois d'août 1750, puis dans les gazettes.

ix Une « société marchande » doit s'établir à Emden sous la protection du roi de Prusse, avec un statut de « compagnie royale asiatique » officiellement déclarée le 22 septembre.

Lire la suite

Il n'a jamais commencé aucune de ses pièces par dire à une femme : Donnez-moi un baiser sur la bouche

Mon premier est "Non coupable !?!"

Mon second n'a jamais quitté un de ses palaces sans exiger de "baiser" une femme .

Qui est-ce ?

 

 Baiser d'un soir :

http://www.deezer.com/listen-2271410

Le prix d'un baiser  :

http://www.deezer.com/listen-570303

Mais que vaut un baiser ?

http://www.deezer.com/listen-7083431

... Forcé !?... Trois ans fermes !

 

baiser_de_rodin_detail.jpg

 

 

 

 

« A Nicolas-Claude Thieriot

 

Aux Délices le 15 juin 1759

 

Je reçois, mon ancien ami, votre seconde lettre et votre mémoire . Vous avez la bonté de m'envoyer encore quelques rogatons 1. Je suis très fâché que les idées philosophiques et les églogues de ceux qui ont pris le nom de Salomon courent le monde 2. Passent encore si c’étaient les ouvrages de mon Salomon du Nord : il est fait pour être condamné par la Sorbonne . Il n'a jamais commencé aucune de ses pièces par dire à une femme : Donnez-moi un baiser sur la bouche 3.

 

J'ai grand-peur que mes paraphrases du sage de Jérusalem ne courent d'une manière très fautive : les copistes et les commentateurs ont altéré le texte dans tous les temps .

 

Je n'ai point la foi au débarquement du Pretender 4 en Écosse, sur une flotte russe et suédoise ; cela me parait tiré des Mille et Une Nuits . A l'égard de notre descente, je fais des vœux pour elle, mais je crains furieusement les philosophes anglais, possesseurs d'environ deux cent quatre-vingts vaisseaux de guerre 5. Ce sont deux cent quatre-vingts problèmes neutoniens, difficiles à résoudre par nous autres cartésiens .

 

Pour moi, je ne m'occupe que de mon czar Pierre. J'aime les créateurs ; tout le reste me parait peu de chose . Je suis bien aise de faire voir que les héros n'ont pas la première place dans ce monde . Un législateur est à mon sens bien au-dessus d'un grenadier, et celui qui a formé un grand empire vaut bien mieux que celui qui a ruiné son royaume 6.

 

Si M. de Silhouette continue comme il a commencé 7, il faudra lui trouver une niche dans le Temple de la Gloire, tout à côté de Jean-Baptiste Colbert . Je vous en donnerai une dans le Temple de l'Amitié 8, si vous m'écrivez quelquefois . Vos lettres contiennent toujours des choses intéressantes, et font toujours grand plaisir à l'oncle et à la nièce .

 

Mandez-moi si vous êtes assez heureux pour avoir quelques actions dans les fermes générales 9. Je crois que ce sera le meilleur bien du royaume ; mais pour moi je donne la préférence à mes bœufs, à mes chevaux, à mes moutons, et à mes dindons ; et je préfère la vie patriarcale à tout . Quand vous viendrez me voir, je ferai tuer un chevreau, je répandrai de l'huile sur une pierre 10, et nous adorerons ensemble l’Éternel .

 

Le patriarche suisse . »


1 Thieriot envoie à V* des livres et des bijoux de Paris .

2 Ces sont le Précis de l'Ecclésiaste et le Précis du Cantique des Cantiques ; Mme de Pompadour avait fait demander à V* , par le duc de La Vallière, de traduire pour elle des psaumes en vers français . A Thieriot, le 11 juin , V* , avant d'exprimer ses craintes, faisait un commentaire : « l'un de ces ouvrages est tendre, l'autre est philosophique ... » ; page 257 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80034x/f262.image.r=.langFR

http://www.voltaire-integral.com/Html/09/20_Ecclesiaste.html

http://www.voltaire-integral.com/Html/09/21_Cantique.html...

3 Début du Cantique des Cantiques, et allusion aux tendances homosexuelles de Frédéric II .

4 V* pense à Charles-Edouard Stuart, dit « le jeune Prétendant », petit-fils de Jacques II, et fils de Jacques-Edouard Stuart dit « le Prétendant » ; il avait échoué en 1745 .

5 La flotte française ne put faire la « descente » prévue en Angleterre : le contre-amiral Georges Brydges Rodney entra dans la baie du Havre le 3 juillet et bombarda la place ; puis le 20 novembre, l'amiral Hawke détruisit une grande partie de la flotte de Brest .

6 Le 10 juillet à Schouvalov , V* écrit : « ... nul autre que Pierre le Grand n'a été le réformateur des mœurs, le créateur des arts, de la marine et du commerce ... », et V* veut le montrer en détail dans son Histoire de Russie . Page 269 :http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80034x/f274.image.r=.langFR

7 Silhouette commença par limiter les dépenses de la Cour, les pensions, les exemptions d'impôts ; il s'attaqua aux abus des fermiers généraux ; il fut contrôleur général des finances de mars à novembre 1759;V* changera d'avis sur son compte .

8 Rappel de deux œuvres de V* : Le Temple de la Gloire, et Le Temple de l'Amitié . http://jp.rameau.free.fr/le_temple_de_la_gloire.htm

http://www.monsieurdevoltaire.com/article-poesie-le-templ...

9Elles sont en hausse dit Thieriot .

10 Allusion biblique à la Genèse .

Lire la suite

08/06/2011 | Lien permanent

Page : 411 412 413 414 415 416 417 418 419 420 421