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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

cage à lapin - Gaza : la peine

Ah ! qu'il est réjouissant de commencer une journée en écoutant les nouvelles du monde - en guerre bien sûr - en me disant que décidément  je serai redevenu poussière d'étoile (oui, je sais un peu de folie des grandeurs cosmiques avec du Banania et du miel, ça remonte le moral !) avant qu'on cesse de faire parler la poudre ( poussière, poudre : mais où vais-je chercher des images aussi poétiques ?). Je suis donc passé allègrement de la baston israelienne-hamassienne à une question existentielle : peut-on laisser passer l'hiver dehors à un lapin mâle de neuf mois logeant sur un balcon suisse ? Réponse des surdoués de la vie des bêtes ( journaleux -vétérinaires de salon ) : est-il dans une cage homologuée ? Surtout pas de cage destinée à un chat précise-t-on. Le préserver des courants d'air et si possible lui fournir un ou une compagne . Alors là tout se complique : avec un mâle, on se retrouve comme avec mon israelien tétu et le palestinien faché (ou inversement, c'est vous qui voyez !), baston et fricassée d'oreilles ! ; avec une femelle, je ne vous fait pas de dessin ( classé XXX ). Résultat : dans les deux cas de figure Jeannot Lapin pourra chanter à la chapelle sixtine car avec un bel ensemble nos oracles radiophoniques prescrivent une opération radicale qui supprime les "choses de la vie". Dur, dur d'être un mâle en Helvétie !

 

 

 

 

 

« A Jean le Rond d’Alembert

 

         J’ai découvert, mon cher ami, que l’auteur du discours pour les prix de l’université s’appelle Belleguier, ancien avocat dans je ne sais quelle classe du Parlement [ Voltaire lui-même !!] . Son style m’a paru un peu médiocre, mais tous les faits qu’il rapporte sont si vrais et si incontestables, que je tremble pour lui.

 

         Souvenez-vous dans l’occasion de l’avocat Belleguier, et ne vous moquez pas trop de l’université, de peur qu’elle ne se rétracte.

 

         La belle Catau m’a envoyé copie de la lettre qu’elle vous a répondue [ en réponse à une lettre de d’Alembert qui s’inquiétait du sort des prisonniers de guerre français en Russie ]. J’aurai voulu qu’elle y eût joint la vôtre. Vous voyez qu’elle est bonne philosophe, et qu’elle est bien loin d’envoyer en Sibérie des étourdis de Velches qui sont venus faire le coup de pistolet pour l’honneur des dames, dans un pays dont ils n’avaient nulle idée. Vous verrez qu’elle finira par les faire venir à sa cour, et par leur donner des fêtes, à moins qu’on n’envoie encore de nouveaux Don Quichotte pour conquérir l’aimable royaume de Pologne. Pour moi, j’imagine que tout se traitera paisiblement d’un bout de l’Europe à l’autre, même qu’on payera nos rentes .

 

         Je suppose que je dois une réponse à M. de Condorcet. Il ne signe point, et je prends quelquefois son écriture pour une autre . Cette méprise même m’est arrivée avec vous, mon cher philosophe . Je crois qu’il faudrait avoir l’attention de mettre au bas de ce qu’on écrit la première lettre de son nom, ou quelque autre monogramme pour le soulagement de ceux qui ont mal aux yeux comme moi . Par exemple, je signe Raton, et Raton aime Bertrand de tout son cœur  [voir fable de La Fontaine ].

 

         Raton

         4 de janvier 1773 »

 

 

 

Raton
N'était pas content, ce dit-on.

Aussi ne le sont pas la plupart de ces princes
Qui, flattés d'un pareil emploi,
Vont s'échauder en des provinces
Pour le profit de quelque roi.

JEAN DE LA FONTAINE

http://images.google.fr/imgres?imgurl=http://environnemen...

 

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04/01/2009 | Lien permanent

Mais que dites-vous de l’injustice des méchants qui prétendent que Eriphyle est de moi et que Charles XII a été imprimé

 http://www.youtube.com/watch?v=3bzcVs0ZGws&feature=re...

http://www.youtube.com/watch?v=UPxMltWnmYQ&feature=re...

http://www.youtube.com/watch?v=8rjhXNaDPCg&feature=re...

http://www.youtube.com/watch?v=SOJSIc-tp7Q&feature=re...

minaret humour jpg_dessin-iran-monachies.jpg

Minaret !

 Modèle fourni avec ou sans prière, qui bien sûr sera la dernière !

Peu importe la langue et le dieu dur d'oreille sensé l'exaucer ? l'entendre ? l'ignorer ?

http://www.youtube.com/watch?v=F3i4nqrEsNc&feature=re...

 

 

Et pendant ce temps, Johnny ... Passons ...

 

 

 

 

Retour vers le passé où  la liberté de presse est une vue de l'esprit .

 

 

« A Jean-Baptiste-Nicolas Formont

 

Paris ce 10 décembre 1731

 

                            Grand merci de la prudence et de la vivacité de votre amitié. Je ne peux vous exprimer combien je suis aise que vous ayez logé chez vous les onze pèlerins [onze exemplaires de l’Histoire de Charles XII, imprimés clandestinement à Rouen , par Jore quand V* est à Cantelieu,et que Formont à fait parvenir à V* revenu début août à Paris ]. Mais que dites-vous de l’injustice des méchants qui prétendent que Eriphyle est de moi et que Charles XII a été imprimé à Rouen ? L’antéchrist est venu mon cher Monsieur ; c’est lui qui a fait la vérité de La religion prouvée par les faits [La Religion chrétienne prouvée par les faits, de l’abbé d’Houtteville, en 1722], Marie Alacoque [La vie de la vénérable mère Marguerite-Marie, 1729, de Jean-Joseph Languet de La Villeneuve de Gergy, dont aime à se moquer V*], Séthos [de Jean Terrasson, 1731], Œdipe en prose rimée et non rimée [ de Antoine Houdar de La Motte, 1726 ; la version non rimée n’a jamais été jouée, note V*], pour Charles XII il faut qu’il soit de la façon d’Elie, car il est très approuvé et persécuté [saisie des premiers exemplaires fin 1730, pourtant avec privilège . Edition clandestine à Rouen et dans le même temps, édition en Angleterre, chez Bowyer dès janvier, puis en mars un traduction éditée chez le même, puis deuxième édition en mai : gros succès ]. Une chose me fâche. C’est que le chevalier Folard que je cite dans cette histoire vient de devenir fou [Jean-Charles Folard qui avait assisté à la mort de Charles XII, devint un convulsionnaire du cimetère de Saint Médard ]. Il a des convulsions au tombeau de saint Paris . Cela infirme un peu son autorité : mais après tout le héros de l’histoire n’était guère plus raisonnable.

 

                            Vous devez savoir qu’on a voulu mettre Jore à la Bastille pour avoir imprimé à la tête du procès du père Girard une préface qu’on m’attribuait [On avait voulu pendre et brûler le jésuite Girard accusé d’avoir séduit Marie-Catherine Cadière par magie]; comme on a su que j’ai fait sauver Jore, vous croyez bien que l’opinion que j’étais l’auteur de la préface n’a pas été affaiblie ni dans l’ esprit des jésuites ni dans celui des magistrats leurs valets . Cependant c’était l’abbé Desfontaines qui en était l’auteur [ il affirmera à Hérault le 7 janvier 1732 qu’il s’est contenté de corriger cette préface ]. On l’a su à la fin, et ce  qui vous étonnera c’est que l’abbé couche chez lui. Il m’en a l’obligation ; je lui ai sauvé la Bastille [en mai 1725, V* est intervenu pour défendre Desfontaines accusé de sodomie et a permis sa libération ], mais je n’ai pas été fort éloigné d’y aller moi-même.

 

                            J’ai écrit à M. de Cideville pour le prier d’engager M. des Forges à empêcher rigoureusement qu’on n’imprime Charles XII à Rouen [V* en écrivant à Cideville le 20 novembre tente de faire empêcher une contrefaçon de l’Histoire de Charles XII à Rouen par  Machuel (« Mazuel »]. Je crois que les Mazuel en ont commencé une édition. M. le premier président ferait un beau coup de l’arrêter. Mais Daphnis, Chloé, Antoine et Cléopatre, Isis et Argus me tiennent encore plus au cœur [personnages de pièces de Cideville]. Adieu.

 

                            Voltaire. »

 

 

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11/12/2009 | Lien permanent

Celui-là a non seulement perdu les yeux, mais les mains. J’entends les mains avec lesquelles on donne : car pour celles

... Il me semble bien que ça me rappelle quelqu'un qui prétend obtenir la fonction présidentielle , apparemment soutenu par son ex-patron qui boit du petit lait devant cette situation : l'union de deux loosers, tableau remarquable où l'on ne sait plus lequel est le plus détestable, l'avidité de l'un égalant la servilité de l'autre prêt à courber l'échine -il en a pris l'habitude-  pour tenter de l'emporter ; vous saurez faire le casting sans peine .

 Résultat de recherche d'images pour "fillon et sarkozy"

 Looser donnant la leçon : deux faux jetons .

 

 

« A François-Achard Joumard Tison, marquis d'Argence

à son château de Dirac

par Angoulême

A Ferney 26 février 1762

Je ne savais où vous prendre, monsieur ; vous ne m’avez point informé de votre demeure à Paris . Je ne pouvais vous remercier ni de votre souvenir ni de votre excellent pâté. Je vous crois actuellement dans votre château ; le mien est un peu entouré de neige. Je crois le climat d’Angoulême plus tempéré que le nôtre ; et je vous avoue que si je m’applaudis en été d’avoir fixé mon séjour entre les Alpes et le mont Jura, je m’en repens beaucoup pendant l’hiver. Si on pouvait être Périgourdin en janvier et Suisse en mai, ce serait une assez jolie vie. Est-il vrai que vous avez des fleurs au mois de février ? pour moi, je n’ai que des glaces et des rhumatismes.

Je reçois, dans ce moment, monsieur, votre lettre du 13 Février . Je vois que je ne me suis pas trompé. Je vous tiens très heureux d’être loin de toutes les tracasseries qui affligent Paris, la cour, et le royaume. Je n’ai point encore vu le mémoire de M. le maréchal de Broglie 1, mais j’augure mal de cette division. Voici un petit mémoire en faveur des jésuites 2; j’ai cru qu’il vous amuserait . On me mande que madame de Pompadour est attaquée d’une goutte sereine 3 qui lui a déjà fait perdre un œil, et qui menace l’autre. L’Amour était aveugle, mais il ne faut pas que Vénus le soit. Il y a un autre dieu aveugle, c’est Plutus 4. Celui-là a non seulem[ent]5 perdu les yeux, mais les mains. J’entends les mains avec lesquelles on donne : car pour celles avec lesquelles on prend, il en a plus que Briarée 6. J’ai fait  une très grande perte dans l’impératrice de Russie, et je ne la réparerai pas . Elle m’accablait de bontés. Elle venait de souscrire pour deux cents exemplaires en faveur de mademoiselle Corneille. La philosophie console de tout ; et il n’y a de philosophie que dans la retraite. Jouissez de la vôtre, jouissez de vous-même, et conservez-moi vos bontés. »

1 Le 18 février 1762 le roi avait écrit au duc de Broglie : « Ayant jugé que la forme et le fond de la démarche que vous avez faite en me présentant un mémoire sur les événements de la campagne dernière étaient aussi contraires au bien de mon service que d'un mauvais exemple dans mon royaume, je vous en marque mon mécontentement en vous ôtant le commandement de ma province d'Alsace et en vous ordonnant de partir pour votre terre de Broglie [...] » . Voir la Correspondance secrète du comte de Broglie avec Louis XV, 1956, éditée par D. Ozanam et M. Antoine . En fait la décision communiquée par le roi représentait la victoire de la faction Soubise sur le clan des Broglie , à l'occasion de sa brouille avec le maréchal d'Estrées .

3 La goutte sereine est une maladie qui prive de la vue par la paralysie du nerf optique .

5 Le papier a été abimé par le cachet .

 

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16/02/2017 | Lien permanent

environ 400 livres au plus pour payer la chambre des comptes de Dijon à qui il faut que je donne de l'argent parce que M

... La moutarde me monte au nez !

Mais nom de Zeus, aujourd'hui, comme hier , à quoi servent ces prélèvements de bandits, ces vols légaux lors d'achats immobiliers, d'héritages ?

Qu'ont ils fait pour mériter une part du bien d'autrui ?

On est loin des rapports gagnant/gagnant !

ô , naïf James, ne sais-tu pas qu'il y a quelques millions de fonctionnaires à nourrir, garder au chaud l'hiver, au frais l'été et avec la sécurité de l'emploi en tout temps ? Alors grattons jusqu'à l'os les contribuables avec l'aide d'huissiers et notaires et percepteurs , véritables Rapetouts .

 

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« A Jean-Robert Tronchin

Délices 21 juillet [1759]

Comment va la joue de mon cher correspondant ? Comment monsieur de la perruque en devant 1 s'est-il trouvé de l'énorme chaleur qu’il a essuyée dans son voyage ? Et madame ?

On m'écrit que M. l'intendant de Lyon vient à Genève et part lundi, on ajoute qu'il peut arriver après portes fermées . Et comme il n'y a point de portes dans l'ermitage des Délices, il peut me faire l'honneur de venir débarquer dans ma guinguette avec son compagnon de voyage . Il ne sera pas reçu en intendant mais en philosophe . Je prie M. Tronchin la joue, ou M. Tronchin perruque de conseiller, ou M. Camp qui n'a point de perruque, de vouloir bien offrir notre jolie guinguette à M. de La Michaudière 2.

J'avertis mon correspondant qu'au moyen de la belle muraille dont la république et nous bordons le grand chemin de Lyon, nous restons tout ouverts, ouverts à droite parce que le mur ne va pas jusqu'à la clôture, ouverts à gauche parce qu'on nous prend du terrain, qu'on nous coupe nos haies, et qu'on ne fait point de mur de ce côté, ouverts à la porte, parce qu'on nous prend la place de notre porte pour faire chemin, ouverts le long de la muraille parce qu'elle n'a que sept pieds de haut et que M. Pictet de Varembé 3 l'enjambe aisément .

[ici V* dessine un petit plan des lieux]

 Pour remédier à tant de maux, pour ne pas coucher sur le grand chemin de Lyon, pour faire à la fois un ouvrage nécessaire et agréable, il en coutera encore six cents livres, peut-être huit cents . C'est 3 ou 4 cents livres par tête pour le propriétaire et pour l'extraordinaire locataire . Je ménagerai certainement la bourse de l'un et de l'autre suivant les sages lois de l'académie de lésine . J'attends les ordres du propriétaire et je lui suis tendrement attaché ainsi qu'à toute sa famille et à son associé .

Le fermier des Délices V.

Je compte que messieurs Tronchin et Camp recevront une petite lettre de change de moi d'environ 400 livres au plus pour payer la chambre des comptes de Dijon à qui il faut que je donne de l'argent parce que M. de Boisy m'a vendu sa terre . Belle raison !

Le roi de Prusse a trouvé une grosse pucelle, une Jeanne d'Arc qui marche au nom de Dieu à la tête des troupes 4 . Nous verrons si les Russes la feront brûler .

Je reçois dans ce moment la lettre de M. Tronchin 5. J'enverrai dans quelques jours la lettre de change de vingt mille livres ou plutôt une de douze et une de huit . Elles seront payables si on veut à quinze jours, si on veut à une usance 6, si on veut à vue, ad libitum . »

1 Jallabert ; voir lettre du 21 décembre 1757 à Jean Jallabert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/23/m...

et : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Jallabert

2 Jean-Baptiste de La Michodière , intendant de lYon depuis 1757; les registres du Conseil mentionnent le fait qu'il dina chez V* le 25 juillet 1759 . Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Baptiste_de_La_Michodi%...

et : http://www.cgb.fr/ile-de-france-villes-et-noblesse-jean-b...

3 François-Pierre Pictet (1728-1798) dit « le géant », à ne pas confondre avec le professeur Pierre Pictet (1703-1768).

Voir : http://www.archivesfamillepictet.ch/bibliographie/documen...

et : http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F25551.php

4 Dans une lettre du 2 juillet 1759, Frédéric II nomme Mme de Pompadour le « d'Amboise en fontange » du roi ; les « habits écourtés » valent les « talons rouges , les pelisses hongroises et les justaucorps verts de Oursomanes » ; et grâce à une « pucelle plus brave que Jeanne d''Arc », « divine fille née en pleine Westphalie », il vaincra « les trois catins »... Voir page 135 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6514333b/f147.image...

5 Elle ne nous est pas parvenue

6 L'usance est le terme fixé par la coutume pour le paiement des lettres de change, soit habituellement un mois .

 

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20/08/2014 | Lien permanent

Vous avez sans doute lu, monsieur, le mémoire historique de la négociation avec l'Angleterre

... Avant ou après le Brexit ?

Si c'est avant, Monsieur le président, vous n'avez eu aucune influence . Si c'est seulement après, vous n'avez eu aucune clairvoyance .

Toujours est-il que personnellement, je rejoins Voltaire dans sa vision des rapports de force à avoir face à ces fichus Britanniques .

Voir : http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2016/06/27/31002-2016062...

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« A Pierre-Michel Hennin

Au château de Ferney en Bourgogne ,

par Genève , 26 octobre 1761 1

Pardon , monsieur, de vous remercier si tard du souvenir dont vous m'honorez, et de ne vous pas répondre de ma main . Mes yeux souffrent beaucoup, et mon corps bien davantage . Je ne ressemble point du tout à vos seigneurs polonais qui vont dîner à trente lieues de chez eux . Il y a bien longtemps que je ne suis sorti d'un petit château que j'ai fait bâtir à une lieue des Délices . J'y achève tout doucement ma carrière ; et parmi les espérances qui nous bercent toujours, je me flatte de celle de vous revoir à votre retour de Pologne ; car j'imagine que vous ne resterez pas là toujours . Ni M. le marquis de Paulmy ni vous n'avez l'air d'un Sarmate . L'abbé de Châteauneuf 2, qui était trois fois gros comme vous deux ensemble, disait qu'il avait été envoyé en Pologne pour boire . Je ne pense pas que vous soyez des négociateurs de ce genre là .

Quand M. de Paulmy voudra tourner ses pas vers le midi, je lui conseillerai de faire comme monsieur son beau-père 3, qui a eu la bonté de venir passer quelques jours dans mon ermitage . Je présenterai requête à son gendre pour obtenir la même faveur . Nous lui donnerons la comédie sur un théâtre que j'ai fait bâtir, et nous lui feront entendre la messe dans une église que j'achève, et pour laquelle le Saint-Père m'a envoyé des reliques . Vous voyez que rien ne vous manquera ni pour le sacré, ni pour le profane .

Je vous avoue que j'aimerais mieux que vous fussiez à Berne qu'à Varsovie, mais M. le marquis de Paulmy a eu la rage de se faire sclavon 4; il faut lui pardonner cette petite mièvreté 5.

Vous avez sans doute lu, monsieur, le mémoire historique de la négociation avec l'Angleterre, imprimé au Louvre 6. Quelque honorable que soit cette négociation pour notre cour, j'aimerais mieux un mémoire imprimé de cent vaisseaux de ligne, garni de canons, et arrivés à Boston ou à Madras . Vos Polonais ne sont pas du moins dans le cas d'avoir perdu leur marine ; il est vrai qu'ils sont un peu les très humbles et très obéissants serviteurs des Russes ; mais aussi ils ont leur liberum veto, et du vin de Tockai . Je suis fâché pour la liberté, que j'aime de tout mon cœur, que cette liberté même empêche la Pologne d'être puissante . Toutes les nations se forment tard ; je donne encore cinq cents ans aux Polonais pour faire des étoffes de Lyon et de la porcelaine de Sèv[r]es . Adieu , monsieur, conservez-moi vos bontés, et soyez persuadé du tendre et respectueux attachement avec lequel je serai toute ma vie, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire . »

1 Hennin avait écrit le 10 septembre 1761, de Varsovie où il est allé à la suite du marquis de Paulmy : « Quelque idée que les allemands aient tâché de vous donner des Polonais, je puis vous assure[r] que cette nation est beaucoup pus susceptible des sentiments agréables que la tudesque . Il ne manque ici que des encouragements . Varsovie est déjà une grande ville, elle augmente tous les jours et se rapproche à beaucoup d'égards des autres capitales . Dans le reste du pays, les mœurs et les usages tiennent encore beaucoup du Sarmate, et si le gouvernement ne change, tout doit rester longtemps dans le m^me état . Les grands seigneurs sont forcés d'errer à la manière des princes arabes pour aller manger les denrées de leurs terres qui sans cela ne seraient d'aucun produit . L'expérience leur a appris à suppléer dans ces voyages à toutes les commodités sédentaires , aussi font-ils souvent vingt ou trente lieues pour aller rendre une visite et dîner avec un ami . Je suis fâché, monsieur, que les circonstances ne vous aient pas porté du côté de la Pologne . Il me semble que rien n'aurait été plus intéressant pour un historien philosophe, que d'approfondir les causes de l'affaiblissement extrême de cette nation, d'examiner comment une anarchire peut subsister sans des malheurs éclatants, et de prévoir comment, quand et par qui un peuple qui n'a plus ni lois stables ni puissance, sera anéanti ou rétabli dans son ancien lustre . »

3 Claude-Philippe Fyot de La Marche .

4 Littré ne donne pas ce latinisme pour slave, non plus que slavon .

5 Le mot est enregistré par Alexis François dans l'Histoire de la langue française .

6 Le 25 juillet 1761, Pitt avait envoyé un ultimatum à la France, dans lequel il exigeait notamment l'abandon de toutes les colonies tombées en la possession des Anglais . La signature du pacte de famille, en août , ayant renforcé la position de la France, Choiseul répliqua par un ultimatissimum, dans lequel il insistait notamment sur les droits de la France concernait Saint-Pierre-et-Miquelon ; voir lettre du 11 octobre 1761 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/10/11/je-n-ai-nulle-part-a-la-tumefaction-du-ventre-de-mlle-hus-je.html

 

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25/10/2016 | Lien permanent

le plan du petit château de Ferney que je viens de faire bâtir moi tout seul

... Et qui demande plus de temps à rénover et mettre aux normes qu'à bâtir du temps de Voltaire . Amoureux de Voltaire et de son château, prenons notre mal en patience jusqu'en 2018 .

 

« Au comte Francesco Algarotti

[septembre 1760]

No, no, no, caro cigno di Padua, non o ricevuto le lettere sopra la Russia 1, e me ne dolgo 2. Car si je les avais vues j'en aurais parlé dans une très facétieuse préface où je rends justice à tous ceux qui parlent bien de ce qu'ils ont vu, et où je me moque beaucoup de ceux qui parlent à tort et à travers de ce qu'ils n'ont point vu .

Basta . Ce sera pour l'antiphone 3 du second volume, car vous saurez que n'ayant point encore reçu les mémoires nécessaires pour le complément de l'ouvrage je n'ai pas encore été plus loin que Pultava .

Or su bisogna sapere che vi sono due valenti banchieri a Milano, chiamati Bianchi et Ballestrino 4, e quegli rinomati banchieri sono li correspondanti d'un valente mercante o mercatante di Genevra chiamato Le Fort di quella famiglia di Le Fort la quale ha dato alla Russia il gran' consigliere d'el' gran' Pietro .

Le lettere sopra la Russia non si smarisanno, quando saranno indirizzate d'al Bianchi a un Le Fort . Prenez donc cette voie caro cigno . Godete la vostra bella patria 5. Je vais adresser incessamment à Venise le premier volume russe, par le signor Bianchi . Je serais tenté d'y joindre le plan du petit château de Ferney que je viens de faire bâtir moi tout seul . Les Allobroges me disent que j'ai attrapé le vrai goût d'Italie . Sed non ego credulus illis 6. Mais j'ai bâti aussi une tragédie à l'italienne qu'on joue actuellement à Paris 7. La scène est en Sicile, c'est de la chevalerie, c'est du temps de l'arrivée des seigneurs normands à Naples ou plutôt à Capoue . Il y est question d'un pape 8 qui est nommé sur le théâtre . Cependant les Français n'ont point ri, et les Françaises ont beaucoup pleuré .

Je tiens toujours mes bons parisiens en haleine de façon ou d'autre . J'amuse ma vieillesse . Il n'y a guère de moments vides . Vous êtes , vous, dans la force de l'âge et du génie . Je ne marche plus qu'avec des béquilles et vous courez, et vous allez ferme . E la dame e le muse vi favoriscono a gara . Vive beatus . Have you read Tristram Shandy ? T'is a very unaccountable book ; an original one . They run mad about it in Engalnd .9

Les philosophes triomphent à Paris . Nous avons écrasé leurs ennemis en les rendant ridicules . Vivez beatus 10 vous dis-je .

V. »

 

1Voir lettre du 15 août 1760 au comte Algarotti ; http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/08/15/ridero-in-fino-alla-morte-c-est-un-bien-qui-m-est-du-car-apr-5754723.html

V* accusera réception de l'ouvrage le 28 novembre 1760 .

2 Non, non,non, cher cygne de padoue, je n'ai pas reçu les lettres sur la Russie, et je m'en afflige .

3 Le mot transpose l'italien antifona, en français antienne « hymne qu'on chante avant », c'est-à-dire préface ; voir , en français, le mot antiphonaire .

4V* a écrit en marge ici no-- ma Ballestrerio .

5Or, il faut savoir qu'il y a à Milan deux braves banquiers , nommés Bianchi et Ballestrino, les quels banquiers renommés sont les correspondants d'un franc marchand ou négociant de Genève appelé Le Fort de cette famille des Le Fort qui a donné à la Russie le grand conseiller du grand Pierre . Les lettres sur la Russie ne se perdront pas quand elles sont adressées par un Bianchi à un Le Fort . Prenez donc cette voie , cher cygne . Jouissez de votre belle patrie .

6Mais je ne les en crois pas trop ; Bucoliques, IX, 34, de Vurgile .

7Tancrède avait été créée le 3 septembre 1760 ; la treizième et dernière représentation eut lieu le 4 octobre . la pièce devait être reprise le 26 janvier 1761 et en mars de la même année . Mme du Deffand écrivait le 5 septembre à V* qu'elle y avait « pleuré à chaudes larmes . »

8 Ce pape est Léon IV ; voir Tancrède , a. I, sc. 1 ; on a ici un exemple des « audaces » par lesquelles V* pensait rénover la trégédie classique .

9Et la dame et les muses vous favorisent à l'envi . Vivez heureux . Avez-vous le Tristram Shandy ? C'est un livre impayable, un livre original . Ils en sont tous fous en Angleterre . [Il s'agit de Laurence Sterne , La Vie et les opinions de Tristram Shandy , traduites par M. Joseph-Pierre Frenais, 1760]

10 Heureux .

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15/09/2015 | Lien permanent

Vous pouvez en croire un homme qui n’a pas la réputation de déguiser ce qu’il pense, qui n’a nulle raison de le déguiser

... Ami Voltaire, tu es un/mon modèle .

 

 

« A Alexandre-Frédéric-Jacques Masson, marquis de Pezay

9è mars 1767, à Ferney 1.

Je vous répondrai, monsieur, ce que j’ai répondu à M. Dorat, que je ne connais en aucune manière les vers dans lesquels il est maltraité, que personne au monde ne m’a rien écrit sur ce sujet ; et j’ajoute que je consens que vous me regardiez comme un malhonnête homme si je vous trompe. Je vous dirai plus : je n’ai jamais montré à Ferney ni les vers que M. Dorat avait faits contre moi, ni aucune des lettres qu’il m’écrivit depuis, et dans lesquelles la bonté de son cœur réparait, par son repentir, le tort que son imagination m’avait pu faire. Je n’ai pas seulement laissé voir la jolie épître qu’il vient d’adresser à sa muse ; je me suis contenté de goûter la satisfaction de voir avec combien de grâces il guérissait les blessures qu’il avait faites.

Ni Mme Denis, ni M. et Mme Dupuits, ni M. et Mme de La Harpe, qui sont chez moi depuis quatre mois, ni mes deux neveux, conseillers au parlement et au grand conseil, n’ont vu aucune de ces pièces. Les affaires qui regardent Rousseau sont ici trop sérieuses pour qu’elles puissent être des sujets de pure plaisanterie ; et de plus, monsieur, ces plaisanteries étaient trop cruelles pour qu’elles servissent de matière à nos conversations. M. Dorat, sans me connaître, m’avait traité de bouffon dans son Avis aux sages ; il m’avait exposé aux rigueurs du gouvernement en disant qu’on a brûlé des ouvrages qu’on m’attribue ; il finissait enfin par dire qu’il fallait avoir des mœurs.

Des outrages si odieux ne devaient pas être manifestés par moi-même ; j’aurais trop rougi devant la petite-fille du grand Corneille, devant mes amis, et devant ma famille. J’ai dévoré toujours cette injure, et j’ai caché aussi la rétractation.

J’aurais souhaité, sans doute, que M. Dorât rendît cette rétractation publique, comme l’outrage l’avait été. Cette réparation publique était digne d’un homme qui a le cœur bon et sensible, et qui voit qu’il a été trompé, qui revient de son illusion, et qui corrige, avec une noblesse courageuse, l’erreur où il est tombé.

Si quelque homme de lettres de Paris, indigné du tort que l’Avis aux sages pouvait me faire dans la situation critique où se trouvent aujourd’hui les gens de lettres, a repoussé les injures par des injures : si, ne sachant pas que M. Dorat avait réparé entièrement son tort avec moi, il s’est laissé emporter à un zèle indiscret, je désavoue ce zèle, et je vous jure sur mon honneur que je n’en ai rien appris que par M. Dorat lui-même.

Vous sentez bien que, si j’avais écouté les premiers mouvements de mon cœur ulcéré, rien ne m’aurait empêché de faire le public juge de ce différend, et que je pouvais me servir des mêmes armes qu’on avait employées contre moi ; mais je n’en ai pas même eu la pensée ; et il est impossible que cette idée me soit venue après les lettres de M. Dorat, qui m’ont touché sensiblement, qui m’ont fait tout oublier, et qui m’ont inspiré le désir d’avoir son amitié.

Voilà, monsieur, la vérité la plus entière et la plus exacte. M. Dorat doit voir quels fruits amers produisent de pareils écarts. Toute satire en attire une autre, et fait naître souvent des inimitiés éternelles. M. de Pompignan attaqua tous les gens de lettres dans son discours à l’Académie 2; il en a été payé. Je ne connais aucune satire qui soit demeurée sans réponse. Les familles, les amis, entrent dans ces querelles ; c’est le poison de la littérature. J’ai combattu hardiment dans cette arène, et je n’ai jamais été l’agresseur. Mais je vous jure encore une fois que, dans cette affaire-ci, je ne me suis pas seulement défendu ; je vous répète que j’ai été trop content du repentir de M. Dorat, pour avoir sur le cœur le moindre ressentiment. Vous pouvez en croire un homme qui n’a pas la réputation de déguiser ce qu’il pense, qui n’a nulle raison de le déguiser, et qui d’ailleurs est dans un âge où l’on voit de sang-froid tous ces petits orages de la société, qui tourmentent vivement la jeunesse.

Je vous parle avec la plus grande franchise. Soyez très sûr, encore une fois, que je n’ai entendu parler des vers contre M. Dorat que par vous et par lui. Cette affaire est très désagréable, et je ne m’en suis consolé que par les assurances que vous me donnez de votre amitié et de la sienne.

J’ai l’honneur d’être, monsieur, avec les sentiments les plus vrais et les plus tendres, votre très humble et très obéissant serviteur,

V. »

1 Nous croyons que cette lettre est bien de 1767, et non, comme le dit Beuchot, de 1768. (Georges Avenel.)

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20/08/2022 | Lien permanent

Je ne publie pas cette déclaration dans l’espérance de désarmer l’envie et l’imposture ; mais je la dois à la vérité, à

... Telle est ( ou aurait dû être selon le président auteur ) la conclusion sous-titrée de la "cérémonie" [sic] des voeux qui comme toutes celles qui ont précédé ne restera pas dans l'histoire .

En musique de fond, pour résumer l'esprit du discours, j'aurais bien mis les Stones avec "Angry" : https://www.youtube.com/watch?v=_mEC54eTuGw&ab_channe...

 

 

« A François Morénas

[vers le 30 avril 1768] 2

J’ai lu, monsieur, dans votre gazette, l’histoire de ma conversion, opérée par la grâce et par un ex-jésuite, qui m’a, dit-on, confessé et traîné au pied des autels. Plusieurs autres papiers publics y ont ajouté que j’avais une lettre de cachet pour pénitence ; d’autres sont entrés dans des détails de ma famille ; d’autres ont parlé d’un beau sermon que j’ai fait dans l’église. Tout cela pourrait servir à établir le pyrrhonisme de l’histoire. Ceux qui écrivent de Paris ces nouvelles, très ignorées dans mon pays, ne sont pas apparemment mes amis, et vous savez que des succès vains et passagers dans les belles-lettres attirent toujours beaucoup d’ennemis très implacables.

Je puis assurer que l’ex-jésuite retiré chez moi n’a jamais été mon confesseur, que je n’ai jamais eu la moindre part à la foule d’écrits qu’on se plaît à m’attribuer ; que je n’ai parlé dans ma paroisse, en rendant le pain bénit, que pour avertir d’un vol qu’on faisait dans ce temps-là même à mes paroissiens, et surtout pour avertir qu’il fallait prier tous les dimanches pour la santé de la reine, dont on ignorait la maladie dans mes déserts.

Enfin, monsieur, pour vous prouver la fausseté de tout ce qu’on a imprimé dans vingt gazettes, d’après les bulletins de Paris, je me vois forcé de publier l’attestation ci-jointe 3, que j’ai eu la précaution d’accepter depuis trois ans, pour confondre les calomniateurs qui me persécutent depuis plus de trente.

 

À Ferney le 5 avril 1765.

« Nous soussignés certifions que M de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, seigneur de Ferney et Tournay, au pays de Gex, près de Genève, a non seulement rempli les devoirs de la religion catholique dans la paroisse de Ferney, où il réside, mais qu’il a fait bâtir et orner l’église à ses dépens ; qu’il a entretenu un maître d’école ; qu’il a défriché à ses frais les terres incultes de plusieurs habitants ; a mis ceux qui n’avaient point de charrue en état d’en avoir, leur a bâti des maisons, leur a concédé des terrains, et que Ferney est aujourd’hui plus peuplé du double qu’il ne l’était avant qu’il en prît possession ; qu’il n’a refusé ses secours à aucun des habitants du voisinage. Requis de rendre de témoignage, nous le donnons comme la plus exacte vérité. »



Le tout signé par deux curés, par les syndics de la noblesse et de la province, par des prêtres, des gradués, par les habitants ; collationné par un notaire royal, et déposé au contrôle de Gex.

Je ne publie pas cette déclaration dans l’espérance de désarmer l’envie et l’imposture ; mais je la dois à la vérité, à mes amis, à ma famille qui sert le roi dans ses armées et dans les premiers tribunaux du royaume, et à la charge que Sa Majesté a bien voulu me conserver auprès de sa personne.

J’ai l’honneur d’être,

monsieur

votre . »

2 Le corps de la lettre est de la main de Bigex, l'en-tête « à un gazetier d'Avignon » de celle de Wagnière, d'abord daté de 1765 puis de 1768 et finalement « avril 1768' . comme l'attestation est datée du 28 avril et qu’elle fut envoyée à l'archevêque de Genève le 29, la date du 30 avril pour la présente lettre est probablement correcte .

3 Une copie contemporaine endossée par V* collationné par devant notaire et contrôle au bailliage, signé de divers noms de familiers de V* (Gros, Sauvage de Verny, Fabry, David (prieur des Cames) , Adam, Fournier, Christin) porte ici « double » au lieu de « triple » . D'autres attestations plus complètes et plus détaillées furent aussi élaborées par les soins de V*.

Voir lettre du 29 avril 1768 à Biord : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/12/30/m-6477853je-ne-sais-quels-faux-rapports-ont-pu-m-attirer-tant-d-aigreur-de.html

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01/01/2024 | Lien permanent

Les causes de vos guerres sont toujours très-minces, et les effets abominables... On ruine cent villes, on égorge cent m

... Vos guerres, nos guerres, vos morts, nos morts, quel gâchis irréparable . Voltaire a mille fois raison d'être outré .

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« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de SAXE-GOTHA
Au château de Tournay, par Genève, 21 février [1759]
Madame, la nature nous fait payer bien cher la faveur qu'elle nous fait de changer l'hiver en printemps . Votre Altesse sérénissime a été malade, et la princesse sa fille a été attaquée de la petite vérole. Ce qui est encore très-cruel, c'est qu'on est un mois entier dans la crainte avant de recevoir une nouvelle consolante.
Vous daignez, madame, me mander, du 10 février, que j'ai à trembler pour votre santé et pour celle de la princesse 1 ; mais quand daignerez-vous rassurer le cœur qui est le plus sensible à vos bontés, et le plus attaché à votre bien-être ? Quand apprendrai-je que la petite vérole a respecté la vie et la beauté d'une princesse née pour vous ressembler, et que Votre Altesse sérénissime a recouvré cette belle santé que je lui ai connue, cet air de fraîcheur et de félicité qui l'embellissait encore ?
Pour la félicité, madame, il y faut renoncer jusqu'à la paix.
J'apprends, et Dieu veuille qu'on me trompe, qu'on foule encore vos États, et qu'on exige des fournitures pour aller faire ailleurs des malheureux. Il faut avouer que les princes chrétiens et les peuples de cette partie de l'Europe sont bien à plaindre ; on met en campagne quatre fois plus de troupes pour disputer une petite province que le Grand Turc n'en a pour conserver ses vastes États. Les causes de vos guerres sont toujours très-minces, et les effets abominables ; vous êtes le contraire de la nature, chez qui l'effet est toujours proportionné à la cause. On ruine cent villes, on égorge cent mille hommes ; et qu'en résulte-t-il ? Rien. La guerre de 1754 a laissé les choses comme elles étaient ; il en sera de même de celle-ci. On fait, on aime le mal pour le mal, à l'imitation d'un plus grand seigneur que les rois, qui s'appelle le Diable. On dit que nos Suisses sont sages : leur pays est en paix. Oui ; mais ils vont tuer et se faire tuer pour quatre écus par mois, au lieu de cultiver leurs champs et leurs vignes. Le roi de Prusse vient de m'envoyer deux cents vers de sa façon, tandis qu'il se prépare à deux cent mille meurtres. Mais que dire des jésuites Malagrida, Mathos, Jéronime, Emmanuel, qui ont fait assassiner le roi de Portugal au nom de la vierge Marie et de saint Antoine?
Profond respect, et inquiétude sur la santé de Vos Altesses sérénissimes.
Je crois que la grande maîtresse des cœurs n'a guère dormi.2 »

1 La lettre commençait par : « Je souffre de corps et d'âme, un rhumatisme fort et opiniâtre s’est emparé de mon individu et me retient au lit depuis plusieurs jours . Très souvent je ne puis me servir ni de bras ni de jambes . Ma fille ne laisse pas de m'inquiéter aussi extrêmement quoiq'uon m'assure que la petite vérole qu'elle a depuis trois jours soit des meilleures et des plus discrètes. » et concluait par : « {…] ma mauvaise écriture vous prouvera monsieur l'embarras de ma main. »

2 Surnom donné par V* à Mme de Buchwald, dame de compagnie de la duchesse avec rang officiel de « grande maitresse de la cour » qui donne naissance au calembour de V* .

Voir note 4, page 335 : http://books.google.fr/books?id=zUwA2HOSLtsC&pg=PA332&lpg=PA332&dq=Louise-Doroth%C3%A9e+de+Saxe-Meiningen,++duchesse+de+Saxe-Gotha&source=bl&ots=lY2vU-1Sqt&sig=kYQLUYKiXF1A1qeHIJ6BVaYOlTc&hl=fr&ei=bhN-TtjPJNGV0QXPmfzrDw&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=2&ved=0CCUQ6AEwAQ#v=onepage&q=Louise-Doroth%C3%A9e%20de%20Saxe-Meiningen%2C%20%20duchesse%20de%20Saxe-Gotha&f=false

Cette phrase est ajoutée en marge au bas de la lettre .

 

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30/03/2014 | Lien permanent

me chargeant de tous les hasards qu'un républicain croit toujours courir quand il négocie avec des princes

 ... Du pétrole . La satisfaction de voir poser quelques milliards d'euros sur la table fait souvent place à l'irrésistible sensation de ne plus se sentir maître de son destin . Le républicain se retrouve comme un pion dans les mains d'un prince capricieux, au mieux utilisé, au pire sacrifié . Les hasards ne sont pas imaginaires, ils sont réels .

Ô dieu dollar !

Odieux dollars !

Quelle confiance accorder à un prince (sans rire) de cet acabit ?

 Modèle de contrat léonin

 contrat léonin.jpg

 

« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha

A Schwessingen 26 juillet 1758

Madame, Votre Altesse Sérénissime honore de trop de bontés et de trop d'éloges un homme qui n'a fait que son devoir . Je serais indigne de votre bienveillance et même de mon attachement à votre personne si j'en avais usé autrement . Il n'y a pas d'ailleurs grand mérite ; il n'y a que du bonheur à vous avoir enfin trouvé à Genève ce Labat qui prête de l'argent tandis que chacun resserre le sien ou le perd . Je lui ai surtout bien recommandé, madame, de mettre dans cette affaire toute la facilité et la promptitude possible, me chargeant de tous les hasards qu'un républicain croit toujours courir quand il négocie avec des princes . Je n'ai pris ce parti , madame, que pour accélérer la remise qu'il doit faire à Vos Altesses sérénissimes . Je sais bien que je cours aucun risque, je ne suis point étonné qu'au vingt-deux juillet votre ministre m'ait point encore reçu de réponse de ce M. Labat . Depuis que je suis chez M. l’Électeur palatin je n'ai encore reçu aucune lettre de ma famille que j'ai laissée dans mes petites Délices au près de Genève . Peut-être les débordements de toutes les rivières sont-elles cause de ce retardement, peut-être ce Labat est-il dans le canton de Berne, dans sa baronnie de Grandcour qu'il a achetée . Je lui écris dans le moment pour le presser de remplir la parole qu'il ma donnée 1 . Je lui mande qu'il faut passer par dessus toutes les formalités, qu’il faut envoyer son argent sur un simple billet de Vos Altesses sérénissimes , que je me charge de tout, et qu'enfin je réponds de la valeur de vos simples promesses qui sont assurément bien au-dessus des contrats .

Dès que je serai à Genève, madame, je ne manquerai pas d'aller présenter mes respects et mes services à Mgrs les princes de Mecklembourg . Mais ce ne serait pas à Genève que j'irais, si j’étais le maître de mon temps et de mes marches, ce serait auprès de la plus vertueuse et de la plus aimable princesse de l'Europe, toujours égale dans le bonheur et dans l'adversité, toujours bienfaisante et digne surtout d'avoir toujours avec elle la grande maîtresse des cœurs 2. Je redouble mes vœux pour votre auguste famille . Je supplie Mgr le duc d'agréer mes profonds respects . Que Votre Altesse sérénissime conserve toujours ses bontés à son Suisse,

V. »

 

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25/09/2013 | Lien permanent

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