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30/06/2009

A qui doit-on être attaché ? pour qui doit –on faire des vœux ? qui doit-on aimer ?

Je suis encore sous, ou plutôt sur, le coup de l'émotion qui ce 27 juin 2009 m'a accordé un plaisir rare . Fête à Voltaire au château de Voltaire à Ferney-Voltaire et dans la ville. A peine ouvert le portail à 14 h , déjà de nombreux visiteurs passent par la petite boutique-accueil . Une belle dame s'enqiert d'un certain James auprès de moi. Mon coeur ne peut faire plus qu'un mini bond : "je suis James et vous êtes loveVoltaire !" -"Oui"... Bonheur de mon côté, je la vois et je lui parle en vrai, celle dont j'admire le blog depuis quelque temps, et je ne suis pas le seul.

http://www.monsieurdevoltaire.com/

Vous voyez, je ne vous mens pas !

Elle me remet un conte de Volti illustré de photos . Je ne vous en donne pas le titre ; ça reste entre nous deux (ou plutôt trois, je le crois) , bande de curieux !

Plaisir de la guider dans ce château qu'elle mérite plus que tout autre de visiter, je vous l'assure !

Tristesse de ne pouvoir que lui faire un petit signe de la main lors de son départ .

Fan de Volti, oui et c'est peu de le dire.

Je dois l'avouer -même sans être torturé !- moi je suis fan de loveVoltaire .

Admirez son travail et celui de son "photographe préféré", les deux me laissent émerveillé. Beauté et qualité .

...Pour autant ne quittez pas mon blogounet de voltairien qui a encore beaucoup à apprendre !

 

 

 

Notre Volti , toujours capable de prouesse littéraires et épistolaires, ne nous déçoit pas ce 29 juin 1759.

 

 

 

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"Je vous envoie la chose la plus détestable de mon royaume" : Frédéric à Volti, avant de lui envoyer ce portrait.
 
 
 
 
 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse

 

 

Sire,

 

J’appelle de César à César, et de Salomon à Salomon. Il me traite comme François Ier traita Charles Quint, un démenti par la gorge, dans ses lettres patentes de Hennesdorf 8 juin [lettre publiée comme étant du 20 juin (?), de Frédéric : « Si j’étais du temps de l’ancienne chevalerie, je vous aurais dit que vous en aviez menti par la gorge en avançant en public que je vous avais écrit pour défendre mon histoire de Brandebourg contre les sottises qu’en dit un abbé en ic ou en ac… »]. Mais César se souviendra que je lui demandai il y a longtemps la permission de réfuter le livre de l’évêque du Puy [Jean-Georges Lefranc de Pompignan] et de l’abbé de Caveirac, intitulé Apologie de la révocation de l’édit de Nantes dans lequel il s’en faut de beaucoup qu’on ait rendu à Votre Majesté la justice qu’on lui doit. Elle daigna m’écrire de Breslau le 21 mars, ces propres mots [quasiment]: vous pourrez ajouter une lettre selon votre bon plaisir, quoique je sois très indifférent sur ce qu’on peut dire de moi en France. On ne me fâchera pas quand on dira que vous êtes l’auteur de mon histoire de Brandebourg.

 

 

C’est sur cette permission expresse de Votre Majesté que j’ai réfuté une partie des calomnies de ce livre [dans une note ajoutée à l’Ode sur la mort se S.A.S. la princesse de Bareith, avec la phrase suivante : « je suis en droit… »]. Je suis en droit, ai-je dit, sur une lettre du roi de réfuter quelques mensonges imprimés.

 

 

Vous m’avez donné ce droit. J’en ai usé pour confondre ceux qui en effet ont menti par leur gorge, et qui, ont osé parler de votre personne avec une malignité très outrageante. Si vous lisiez ce livre, vous verriez que j’ai bien fait d’infirmer le témoignage de l’auteur. Vous me sauriez quelque gré de mon zèle. Vous reconnaitriez celui qui vous a été longtemps si dévoué et qui le sera toujours, celui qui brave vos ennemis quand il s’agit de rendre justice à vos grandes qualités.

 

 

A l’égard du prince votre frère, j’ai rapporté mot à mot à Votre Majesté la réponse de Tronchin sans y rien changer. Il ne sort plus de Genève. Il donne ses consultations, il en use précisément comme Borave [Boerhaave]. On va chez lui comme on allait à Épidaure ; les princes malades y viennent. Il n’approuve point du tout les eaux pour les maladies de poitrine, mais il exige le changement d’air, et il est très vrai qu’on n’en peut changer d’une manière plus utile qu’en venant auprès de lui. Devrais-je donc faire autre chose que vous dire exactement ce qu’il m’a répondu en vous envoyant son avis ? [Frédéric, écrivit sèchement le 10 juin à V*, très piqué de la réponse négative de Théodore Tronchin qui refuse d’aller soigner le prince Ferdinand et transmise par V*] et en quoi ai-je mérité vos reproches lorsque je me suis occupé de vous servir ? et quel rapport, je vous prie, de cette exactitude fidèle, avec roi mon maître et avec le ridicule des vieux ambassadeurs ? [V* a rappelé à Fréderic le 19 mai qu’il avait « été le dépositaire de toutes les tentatives faites pour parvenir à la paix » en particulier de celle qu’avait faite en 57-58 le cardinal de Tencin et la margravine de Bayreuth] et avec mes pauvres terres contribuables du Bien-Aimé ? Mes petites terres, je l’avouerai à Votre Majesté, ne sont point contribuables, elles sont sur la frontière de la France, mais elles ne payent rien du tout à la France. Elles en ressortissent et c’est ce qui causa les frayeurs de ma malheureuse nièce quand nous reçûmes à Ferney en France à une lieue des Délices votre gros paquet qui paraissait avoir été ouvert. Vous savez, Sire, qu’il contenait des choses que vous seul êtes en droit de dire [entre autre ces vers de Frédéric : « Je vois leur vil assemblage / Aussi vaillant au pillage / Que lâche dans les combats /…. Quoi votre faible monarque, / Jouet de la Pompadour, / Flétri par plus d’une marque / Des opprobres de l’amour … / Au hasard remet les rênes / De son empire aux abois … »], et qui auraient pu nous perdre. On ne m’appelle à la cour de France que le Prussien [Mme de Pompadour lui avait écrit le 14 juin : « …je n’ai pensé qu’à Voltaire français, et j’ai oublié qu’il avait été prussien, je l’oublie encore dans ce moment… »]. C’est un surnom dont je me glorifie. Mais vous entrez sans doute dans la situation d’une femme accoutumée à tout craindre. Elle n’a pas voulu qu’un monument si funeste subsistât. Je vous assure que ma vie n’eût pas été en sureté s’il eût été trouvé chez moi [bien qu’ayant affirmé à Frédéric que sa nièce avait brûlé cet écrit, il avait envoyé ce paquet au duc de Choiseul]. Que la générosité naturelle de votre cœur, que votre compassion épargne donc une femme qui n’a été que trop maltraitée [allusion au traitement et sévices de Francfort en juin 1753]. Pour moi, je ne désire dans ma douce retraite que la consolation de finir ma carrière avec l’idée d’être toujours dans les bonnes grâces du grand Fédéric [le roi signe : Fédéric]. Il sait que mon cœur ne peut perdre les sentiments de respect et d’admiration que j’ai pour lui.

 

 

V.

 

 

Encore un petit mot, soit que Votre Majesté ait donné bataille ou non, daignez résoudre le problème suivant. A qui doit-on être attaché ? pour qui doit –on faire des vœux ? qui doit-on aimer ?

 

Est-ce un roi philosophe, qui cultive nos arts, qui fait honneur à l’esprit humain, qui ne persécutera jamais personne pour sa religion, qui empêchera que les jésuites ne gouvernent la terre ? ou les puissances gouvernées par le révérend père Poignardini, et par le révérend père Aconiti ?

 

Ah ! héros à faire enrager qui voulez toujours avoir raison, si votre cœur !…

 

Mais je suis si vieux, et j’ai si mal aux yeux, que je ne me soucie plus de rien. Pas même de votre cœur, si pourtant… mais non… vous n’êtes qu’un grand homme pour tout potage, un génie universel, sans indulgence, un maudit héros qui n’avez jamais aimé l’imbécile.

 

 

V.

Aux Délices 29 juin 1759. »

 

 

 

Le même jour ce filou de Volti est capable d’écrire au comte d’Argental –sincèrement cette fois, je le crois, car il parle à un vrai ami- une lettre qui se termine par ces considérations : « M. le duc de Choiseul est donc parti et déjà près de Vienne [où il est ambassadeur]. Mais battra-t-on Luc ? C’est là le grand point. Il serait bien honteux de faire avec lui une paix qui serait pour lui un triomphe. »

26/06/2009

Moi, chétif, je ne sais encore rien

Une petite réflexion du galapiat que je suis :M. Brise Heurte-à-faux vous êtes vraiment imbu de votre personne, de votre fonction, de votre rang et à mes yeux parfaitement incapable d’humour et gonflé de votre auguste personne . Ministre sinistre !

Tellement pris par votre importance, vous n’avez su que dire : « Ah ! quel manque d’élégance ! »  et de rabrouer le ou la journaliste qui, face au jeu de chaises musicales offert gracieusement par le chef de l’état et le chef du gouvernement, vous apostrophait d’un rigolo :  « Tournez manège ! » .

La vérité fait-elle peur ? Sachant qu’il a été déclaré que ce changement( ?) de personnes n’entrainait pas un changement de politique et que ça ne tiendra que jusqu’aux élections régionales prochaines … Comprenne qui peut !

M. Heurte-à-faux Brise-tout, vous avez raison , cramponnez vous à votre portefeuille, des petits malins de votre famille politique vous ont dans le colimateur …

 http://fr.news.yahoo.com/4/20090623/tts-france-gouverneme...

 

 

 

Pour revenir à des choses importantes : « Bambi » est mort, le vilain chasseur ne l’a pas manqué. Il a eu le mérite d’enchanter des millions de gens . Je ne suis pas fan, mais un certain nombre de ses chansons me plaisent vraiment, et j’ai deux de ses CD, c’est vous dire !

Qui aime bien, châtie bien : c’est idiot cette phrase . Surtout que j’ai par nature foncière envie de dire des bétises, entre autres celles qui me sont venues quand j’ai appris la mort de MAILLKEUL.

A force de se blanchir, de gris il est devenu si transparent qu’on ne le verra plus .

C’est aussi le seul qui, quand il mentait, avait le nez qui rétrécissait .

A ce sujet, il y a environ quinze jours, devant certaines informations –fondées, il faut le croire, face à la réalité du jour-  le promoteur de la tournée affirmait mordicus que le petit homme pétait la forme et qu’il n’y avait aucune inquiétude à avoir ; combien de millions de dollars avait-il intérêt à protéger ?

 

 

 

 

chat gros.jpg 

 

Maintenant il s’agit de Volti qui accompagne son Emilie chérie pour l’aider à récupérer un héritage. Bad work !

 

 

 

« A Madame de Champbonin

 

 

           Mon aimable gros chat, j’ai reçu votre lettre à Bruxelles. Nous voici maintenant en fin fond de Barbarie dans l’empire de S. A. Mgr le marquis de Trichâteau qui, je vous jure, est un assez vilain empire. Si Mme du Châtelet demeure longtemps dans ce pays-ci, elle pourra s’appeler la reine des sauvages. Nous sommes  dans l’auguste ville de Beringhem, et demain nous allons au superbe château de Ham, où il n’est pas sûr qu’on trouve des lits, ni des fenêtres, ni des portes. On dit cependant qu’il y a ici une troupe de voleurs. En ce cas ce sont des voleurs qui font pénitence ; je ne connais que nous de gens volables. Le plénipotentiaire Montors avait assuré M. du Châtelet que les citoyens de son auguste ville lui prêteraient beaucoup d’argent. Mais je doute qu’ils pussent prêter de quoi envoyer au marché. Cependant Émilie fait de l’algèbre [avec le mathématicien Koenig qu’elle a emmené], ce qui  lui sera d’un  grand secours dans le cours de sa vie, et d’un grand agrément dans la société. Moi, chétif, je ne sais encore rien, sinon que je n’ai ni principauté, ni procès [les du Châtelet font un procès à la maison de Hoensbroeck pour une « petite principauté située vers Liège et Juliers… composée de Ham et Beringhem », héritage du marquis de Trichâteau], et que je suis un serviteur fort inutile.

 

 

           P.-S. Il faut à présent, gros chat, que vous sachiez que nous revenons du château de Ham : château moins orné que celui de Cirey, et où l’on trouve moins de bains et de cabinets bleu et or ; mais il est logeable, et il y a de belles avenues. C’est une agréable situation. Mais fut-ce l’empire du Cathay, rien ne vaut Cirey. Mme du Châtelet travaille à force à ses affaires. Si le succès dépend de son esprit et de son travail, elle sera fort riche ; mais malheureusement tout cela dépend de gens qui n’ont pas autant d’esprit qu’elle. Mon cher gros chat, je baise mille fois vos pattes de velours. Adieu, ma chère amie.

 

 

           Voltaire

           De Beringhem juin 1739. »

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25/06/2009

Le révérend père Voltaire donne sa très sainte bénédiction à ses anges

« …pardon d’une lettre blog si courte. », mais les jours sont heureusement parfois trop courts pour tout faire et tout dire. Tout faire, c’est fait, en tout cas l’essentiel . Tout dire, cela reste à dire. De toute façon Volti écrit que « la meilleure façon d’ennuyer est celle de tout dire. » Je ne vous ennuie pas davantage …

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental et à Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental

 

 

           Le révérend père Voltaire donne sa très sainte bénédiction à ses anges [V* s’était permis de faire un sermon à l’église le jour de Pâques], et leur envoie le paquet ci-joint qui pourrait les faire pouffer de rire si les calomnies qui vont aux oreilles du roi n’étaient pas toujours sérieuses. On soupçonne fort un certain abbé d’Estrées, ci-devant barbouilleur de papier, devenu espion, prieur auprès de Ferney et n’étant pas encore cardinal, quoiqu’il se soit dit ici neveu du cardinal d’Estrées. On soupçonne, dis-je, ce petit maraud [d’] avoir été l’auteur de la tracasserie [V* fait déjà état de l’abbé d’Estrées en 1764].

 

 

           Le prédicateur demande à ses anges {s’] il est convenable que Mme Denis aille gronder M. le comte de Saint-Florentin respectueusement et tendrement, et lui dire qu’avant d’écrire des pouilles au nom du roi [lettre de Saint Florentin à V* le 18 juin :  « …le roi a été informé, par des plaintes qui en ont été portées à Sa Majesté, que le jour de Pâques dernier vous avez fait dans votre paroisse de Ferney une exhortation publique au peuple, et même pendant la célébration de la messe… Il n’appartient à aucun laïc de faire ainsi une espèce de sermon dans l’église et surtout pendant le service divin. » ; V* écrit à Richelieu le 29 juin :  « j’envoyai la lettre à mon curé qui fut aussi étonné que moi….Il donna sur le champ un certificat qui atteste qu’en rendant le pain bénit selon ma coutume le jour de Pâques, je l’avertis, et tous ceux qui étaient dans le sanctuaire , qu’il fallait prier tous les dimanches pour la santé de la reine dont on ignorait la maladie dans mes déserts, et je dis aussi un mot touchant un vol qui venait de se commettre pendant le service divin . La chose a été certifiée par l’aumônier du château (le père Adam), et par un notaire au nom de la communauté. »].Il n’est pas mal auparavant de s’informer si le fait est vrai. En cas que mes anges jugent la démarche convenable, je me mets à l’ombre de leurs ailes, et je les supplie d’en parler à Mme Denis le plus tôt qu’ils pourront. Je leur demande pardon d’une lettre si courte.

 

 

           Voltaire

           25 juin 1768. »

Ce Saint -Florentin à qui Volti avait écrit en 1762 pour l'affaire Calas .

http://www.culture.gouv.fr/public/mistral/caran_fr?ACTION...

letr à saint florentin pour calas.jpg

Sans doute est-ce pour ce passé là qu'il demande de le gronder "respectueusement et tendrement" !...

24/06/2009

J’ose espérer qu’on ne me lapidera pas avec de petits cailloux

"Comme, Dieu merci, je n’ai jamais fait aucun ouvrage que le clergé puisse me reprocher" , ni les laïcs ajouterais-je pour mon compte, je ne peux être en aucun cas taxé de calomnie ...

 

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Dieu merci !

 

-"Il n'y a pas de quoi, James !

-"Mais, doux Jésus, je suis votre humble serviteur.

-"Relève toi, James, tu vas me faire rougir.

-"Je voudrais bien voir ça !

-"Va tranquille, James, la France, fille aînée de ma fille l'EGLISE catholique apostolique et romaine  est menée par un homme clairvoyant qui sait changer les couches ministres incompétents déplaisants  .

-"Oui, toi, Seigneur, tu as changé l'eau en vin, mais je crains bien que ce remaniement ne soit fait en vain .

-"Plus d'allusion à ce mariage où m'a trainé ma mère - que moi-même la bénisse!- ! Je n'ai même pas été invité à celui du petit grand avec sa muse préférée.

-"Toujours est-il qu'il a pistonné un homme cultivé pour diriger le ministère de la culture . Est-ce bien raisonnable ?

-"Oui, James ! Fais toi à cette idée qu'il y a parfois du bon à remplacer une femme par un homme .

-"Euh ! mon Jésus unique et préféré, je te signale que je suis croyant jusqu'à un certain point mais non pratiquant !! Est-ce qu'un PACS peut suffire ?

-"Malgré ma science infuse, je ne vois pas ce que tu veux dire, James mon fils indigne !

-"Ah ! oui , PACS : Petite Action Solidaire , tu vois ce que je veux dire, comme dit mon collègue Hammou !

-"Oui, maintenant que tu me le rappelles, chacun doit égoïstement se faire du bien en faisant la même chose pour son semblable ; c'est ce que j'avais dit il y a déjà un bon moment.

-"Oui, environ deux mille ans mais tu as laissé la direction des travaux à des fonctionnaires mitrés.

-"J'aurais mieux fait de me casser une patte ce jour là ! La croix ce n'est plus de mon âge .

-"Un petit coup d'éternité et il n'y paraitra plus.

-"Va, James et blogge pour tes frères humains !

-"OK ! JC , I must go !

 

 

 

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

 

 

                            Le Nekre [professeur Louis Necker, amant de « la femme de Vernes le marchand, frère de Vernes le prédicant ; Vernes le marchand lui avait « sanglé un coup de pistolet » en 1760], non pas le mari de la belle Nekre [Jacques Necker, financier, mari de Suzanne Curchod], mais l’ancien amant d’un cul pourri, mais l’assassiné, le banni, qui est actuellement un bon négociant de Marseille et qui a passé par son ancienne patrie, vous rendra cette lettre, ma chère nièce. Il faut que vous sachiez que tout le clergé est déchainé. Il s’imagine que c’est moi qui ai soulevé tous les esprits, et si on  s’est saisi d’Avignon [qui appartenait au pape], s’il y a une guerre entre les catholiques et les dissidents en Pologne, j’en suis la cause. Damilaville vous aura peut-être dit que le cardinal de Choiseul, archevêque de Besançon, a oublié son nom pour se souvenir seulement qu’il est cardinal et que c’est lui qui a persécuté Fantet [libraire], l’avocat général de la chambre des comptes, et Leriche [qui a écrit un mémoire en faveur de Fantet en 1766]. Il a même, le croiriez-vous ? écrit aux fermiers généraux pour faire révoquer Leriche qui est inspecteur des domaines en Franche-Comté. Il leur a mandé qu’il remplissait la Franche-Comté de mes livres prétendus. Comme, Dieu merci, je n’ai jamais fait aucun ouvrage que le clergé puisse me reprocher, je n’ai pas voulu être la victime de la calomnie. J’ai demandé en général une lettre de recommandation à M. le duc et à Mme la duchesse de Choiseul [lettre du 27 mai à la duchesse] auprès du cardinal sans leur dire de quoi il s’agissait. Je l’ai obtenue. J’ai écrit au cardinal une lettre flatteuse et mesurée dans laquelle je me suis bien gardé d’entrer dans aucun détail, et dont il ne pourra jamais abuser, quand même il aurait la malhonnêteté de ne point répondre.

 

 

                            Le maçon qui fût repris de justice à Paris dans le temps qu’il y était porte-Dieu [évêque J.-P. Biord, qui fût vicaire de la Sainte Chapelle basse et ayant refusé d’être entendu pour une affaire de billets de confession, il fut « décrété de prise de corps » ; V* demandera à son neveu d’Hornoy d se renseigner à ce sujet], et qui est à présent à ce qu’il dit évêque et prince de Genève, a voulu remuer aussi. Je lui ai fermé la bouche par une conduite sage et nécessaire très approuvée par les Italiens adroits et blâmée à Paris par des gens de lettres qui riraient si j’étais sacrifié pour eux.

 

 

                            Si je ne peux échapper à la calomnie, j’échappe du moins à la persécution. Si Damilaville s’en tire avec six mille livres de pension, c’est un sort très heureux. Mme de Sauvigny qui avait mis dans sa tête de frustrer Damilaville de la place à lui promise [place de directeur du vingtième où il était premier commis depuis longtemps], m’avait assuré qu’elle lui ferait donner une forte pension. Je suppose qu’elle a tenu parole. Il est heureux, le voilà récompensé, et peu soupçonné. Je suis dans un cas tout différent. Mais je laisse gronder les orages uniquement occupé du Siècle de Louis XIV et de Louis XV. J’aurai bientôt achevé ce monument que j’érige à l’honneur de ma patrie sans flatterie et sans médisance. J’ose espérer qu’on ne me lapidera pas avec de petits cailloux tandis que je bâtis ce grand édifice.

 

 

                            J’ai lu par un grand hasard les Conseils raisonnables, la Profession de foi des théistes [les Conseils raisonnables à M. Bergier pour la défense du christianisme, 1768 ; les deux autres brochures sont aussi de V*], l’Épitre aux Romains, et quelques autres drogues. Je me flatte qu’on ne m’imputera pas ces bagatelles tandis que je me consume jour et nuit sur une histoire qui contient cent trente années.

 

 

                            Pour l’histoire de notre petit pays de Gex, elle sera bien courte. On n’a encore tracé ni le port ni la ville de Versoix. On n’a rien fait mais on va commencer. Si M. le duc de Virtemberg ne m’avais pas remis à deux ans pour me payer les soixante-dix  mille livres qu’il me doit, je bâtirais à Versoix une maison pour faire ma cour à M. le duc de Choiseul et je crois que ce serait un assez bon effet pour vous. On y établira la poste dans huit jours. C’est Fabry qui l’a, car il a tout englouti. On donne à Racle l’entreprise du port. Racle au moins pourra se dédommager de la perte qu’il a faite en construisant sa ridicule maison, mais j’aurai toujours perdu ce que je lui ai prêté. Vous vous en tirerez un jour, à ce que j’espère.

 

 

                            Je fus bien surpris il y a six jours quand je vis arriver chez moi M. et Mme de Vaux [sœur et beau-frère de Dupuits époux de Marie-Françoise Corneille ; Mme de Vaux est surnommée « Pâté » par V* ; Mme Denis s’inquiète de leur présence], et une grande bâtarde de M. de Vaux et le petit Vau qui est très joli et la mie du petit Vau. . Les voilà établis ici. Je m’enferme dans ma chambre avec mes deux Siècles. Je parais seulement à la fin du diner et du souper, et cependant ils restent. Leur amusement est d’aller chez Mallet et chez Racle. On ne peut quitter un pays qui fournit des plaisirs si séduisants. Il est vrai que la moisson paraît belle, c’est-à-dire qu’on pourra bien avoir quatre pour un avec la paille. Voilà notre terre de promission. Elle est admirable pour quiconque a des yeux et des jambes. Mais ceux à qui ces organes manquent doivent y périr. Nous avons manqué un marché de deux cents mille livres. Vous n’en aurez jamais cinquante mille écus. Pour moi je la quitterais demain si je n’étais retenu par mes deux Siècles.

 

 

                            On prend, comme vous savez, le train de m’envoyer garnison. Il faut soulager le paysan, fournir des lits, des draps et  des meubles à quatorze officiers et à deux cents soldats. Cela ruine et personne n’en sait le moindre gré. Il a fallu que j’achetasse du linge pour eux. Il est vrai qu’heureusement ma porte est toujours fermée, et que je suis en prison chez moi.

 

 

                            Voilà, ma chère nièce, un compte exact de la manière dont j’achève une vie que je vous ai consacrée. Je vous embrasse tendrement.

 

 

                            V.

                            De Ferney 24 juin 1768. »

 

Projet Versoix par choiseul et Volti : http://images.google.fr/imgres?imgurl=http://www.athenaeu...

 

quoique ma vieillesse et mes maladies m’aient un peu privé de la pensée et de la parole

Nouveau ministre de la culture : Frédéric Mitterrand

http://www.letelegramme.com/ig/generales/france-monde/rem...

Pour ne rien vous cacher, je dis bravo ! Non au président, non au premier ministre, mais d’abord à Frédéric .

Enfin quelqu’un qui sait de quoi il parle, qui connait le sujet, non pas par conseillers interposés, mais par lui-même.

Lui accordera-t-on les moyens nécessaires ?

Ce fichu projet de loi HADOPI mal goupillé dont il hérite est un superbe cadeau empoisonné. Trouvera-t-il l’antidote ?

Il a de l’envergure, de l’ambition pour la culture.

Je fais des vœux pour qu’il puisse faire bouger l’administration culturelle, avec une attention toute particulière pour celle du CMN (centre des Monuments nationaux) qui me tient spécialement à cœur ! Je peux vous assurer qu’il y a du travail (style « travaux d’Hercule ») pour remuer ce mastodonte qui tend à roupiller trop souvent ! Et quand il ne roupille pas, il bride ceux qui , pleins de bonnes idées et d’élans, risquent de l’empêcher de ronronner tout son saoul !!!

 

  bambinnette pigalle.jpg

 

Que fait cette bambinnette ici ? Comme sa mère Eve !!

C’est tout simplement un Pigalle, comme le Voltaire nu suivant !

 

Contraste !

Beauté !

Réalisme !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

«  A Jean Le Rond d’Alembert

 

 

                        C’est un beau soufflet, mon cher et vrai philosophe, que vous donnez au fanatisme et aux lâches valets de ce monstre. Vous employez l’art du plus habile sculpteur de l’Europe pour laisser un témoignage d’amitié à votre vieil enfant perdu, à l’ennemi des tyrans, des Ganganelli, des Pompignan, et des Fréron. Vous écrasez sous ce marbre la superstition qui levait encore la tête [projet de statue de V* par Pigalle].

 

 

                        M. le duc de Choiseul se joint à vous, et c’est en qualité d’homme de lettres, car je vous assure qu’il fait des vers plus jolis que ceux qu’on lui adresse [vers faits par Palissot à la demande de Choiseul en réponse au poème de Frédéric contre Louis XV en 1759]; et soyez très certain que sans Palissot, fils de son avocat [Choiseul a soutenu la pièce Les Philosophes , de Palissot, faite contre d’Alembert entre autres], et sans Fréron qui a été son régent au collège des jésuites, il aurait été votre meilleur ami. Je le crois entièrement revenu.

 

 

                        Pour moi je lui ai presque autant d’obligation qu’à vous. Vous savez dans quel horrible désordre est tombée cette malheureuse petite république de Genève. Les sociniens sont devenus assassins. J’ai recueilli vingt familles émigrantes [Natifs fuyant Genève suite aux violences]; j’ai établi une manufacture de montres chez moi ; M. le duc de Choiseul les a protégées et a fait acheter par le roi plusieurs de leurs ouvrages. Vous voyez si son nom ne doit pas être placé à côté du vôtre dans l’affaire de la statue.

 

 

                        A l’égard de Frédéric, je crois qu’il est absolument nécessaire qu’il soit de la partie [primitivement seuls les hommes de lettres devaient souscrire]. Il me doit sans doute une réparation comme roi, comme philosophe, et comme homme de lettres. Ce n’est pas à moi à la lui demander ; c’est à vous à consommer votre ouvrage. Il faut qu’il donne. Par quelque somme qu’il contribue, Mme Denis donnera toujours vingt fois plus que lui. Elle est au rang des artistes les plus célèbres en fait de croches et doubles croches.

 

 

                        M. Pigalle m’a fait parlant et pensant quoique ma vieillesse et mes maladies m’aient un peu privé de la pensée et de la parole [Pigalle est arrivé à Ferney le 17 juin]. Il m’a fait même sourire ; c’est apparemment de toutes les sottises que l’on fait tous les jours dans votre grande ville, et surtout des miennes. Il est aussi bon homme que bon  artiste. C’est la simplicité du vrai génie.

 

 

                        J’ai vu le dessin du mausolée du maréchal de Saxe ; ce sera le plus grand et le plus beau morceau de sculpture qui soit peut-être en Europe. Il m’a fait l’honneur de me dire avec sa naïveté dépouillée de tout amour propre qu’il avait conçu le dessein des accompagnements de la statue du roi qu’il a faite pour Reims sur ces paroles qu’il avait lues dans Le Siècle de Louis XIV : C’est un ancien usage des sculpteurs de mettre des esclaves aux pieds des statues de roi ; Il vaudrait mieux y représenter des citoyens libres et heureux. Il communiqua cette idée à M. Bertin qui en qualité de ministre d’État, et plus encore de citoyen, la saisit avec chaleur, et doubla sa récompense. Ainsi, c’est à lui que nous devons l’abolition de cette coutume barbare de sculpter l’esclavage aux pieds de la royauté. Il faut espérer du moins que cette lâcheté insultante à la nature humaine ne reparaîtra plus. Il faut espérer aussi que jamais en figurant des citoyens heureux bénissant leurs maîtres, les artistes ne mentiront à la postérité.

 

 

                        Adieu, mon grand philosophe, mon cher ami, et mon soutien.

 

 

                        V.

                        22e juin 1770 à Ferney. »

 

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22/06/2009

j’ai jeté par terre toute l’église pour répondre aux plaintes d’en avoir abattu la moitié

 

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J'ai beau être d'un naturel pacifique (si! je vous l'assure) , hier, pour les beaux reflets d'une médaille, j'ai, les armes à la main accepté deux duels. Comme nous n'allons pas jusqu'à la mort du concurrent au tir à l'arc, je n'ai été que blessé au premier duel et pour compenser j'ai occis ( d'un point durement gagné) mon deuxième adversaire; je dois avouer que celui-ci, je l'ai dans mon colimateur depuis quelque temps . 

Autosatisfaction ? oui ! Et pourquoi pas ? Petit plaisir égoïste ? yes !

C'est la petite récompense de milliers de flèches décochées à l'entrainement et la compensation de cette éternelle insatisfaction d'être imparfait -je ne parle ici que de mon imperfection en temps qu'archer, car pour le reste, vous n'en doutez pas, j'espère, ma perfection est inaltérable ! (N'importe quoi !! ce James, direz-vous, ne va plus pouvoir mettre ni chaussures ni chapeau ? Eclair de lucidité, sauvé,il me reste des godasses de clown et un grand bonnet de nuit ... )chaussure_clown.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental et à Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental

 

 

           Mes divins anges, lisez mes remontrances avec attention et bénignité.

 

 

           Considérez d’abord que le plan d’un cerveau n’a pas six pouces de large, et que j’ai pour cent toises au moins de tribulations. Le loisir fut certainement le père des muses ; les affaires en sont les ennemies, et l’embarras les tue. On peut bien, à la vérité, faire une tragédie, une comédie, ou deux ou trois chants d’un poème, dans une semaine d’hiver ; mais vous m’avouerez que cela est impossible dans le temps de la fenaison et de la moisson, des défrichements, et des dessèchements [dont un marais près du château de Ferney], et quand à ces travaux de campagne il se joint des procès, le tripot de Thémis l’emporte sur celui de Melpomène.Je vous ai caché une partie de mes douleurs ; mais enfin, il faut que vous sachiez que j’ai la guerre contre le clergé. Je bâtis une église assez jolie, dont le frontispice est d’une pierre aussi chère que le marbre. EgliseFerney_01.jpgJe fonde une école, et pour prix de mes bienfaits, un curé d’un village voisin [le curé d’Ornex, promoteur de l’évêque d’Annecy, équivalant à un procureur du roi dans les cours ecclésiastiques]qui se dit promoteur, et un autre curé qui se dit official [le curé de Gex, official = juge ecclésiastique nommé par l’évêque ; V* ne reconnaissant pas ces droits, son avocat J.-M. Arnoult l’en détrompa le 15 juin], m’ont intenté un procès criminel pour un pied et demi de cimetière, et pour deux côtelettes de mouton qu’on a prises pour des os des morts déterrés.

 

 

           On m’a voulu excommunier pour avoir voulu déranger une croix de bois [placée vis-à-vis le portail de l’église qu’il  fait bâtir et qui « en déroberait aux yeux toute l’architecture » ; V* est accusé de l’avoir qualifiée de « potence » terme qu’il dit être utilisé par les charpentiers, donc il se serait exprimé en « bon architecte »] , et pour avoir abattu insolemment une partie d’une grange qu’on appelait paroisse.

 

 

           Comme j’aime passionnément à être le maître, j’ai jeté par terre toute l’église pour répondre aux plaintes d’en avoir abattu la moitié. J’ai pris les cloches, l’autel, les confessionnaux, les fonts baptismaux ; j’ai envoyé mes paroissiens entendre la messe à une lieue.

 

 

           Le lieutenant criminel, le procureur du roi sont venus instrumenter, j’ai envoyé promener tout le monde. Je leur ai signifié qu’ils étaient des ânes, comme de fait ils le sont ; j’avais pris mes mesures de façon que M. le procureur général du parlement de Dijon [Louis Quarré de Quintin] leur a confirmé cette vérité. Je suis à présent sur le point d’avoir l’honneur d’appeler comme d’abus, et ce ne sera pas maître Le Dains [auteur du réquisitoire contre le livre de Huerne qui protestait contre l’excommunication de comédiens] qui sera mon avocat. Je crois que je ferai mourir de douleur mon évêque [Deschamps de Chaumont]  s’il ne meurt pas auparavant de gras fondu.

 

 

           Vous noterez, s’il vous plait, qu’en même temps je m’adresse au pape en droiture [Clément XIII], ma destinée est de bafouer Rome, et de la faire servir à mes petites volontés. L’aventure de Mahomet [dédié à Benoit XIV en 1742, qui en fera la louange] m’encourage ; je fais donc une belle requête au Saint-Père, je demande des reliques pour mon église , un domaine absolu sur mon cimetière, une indulgence in articulo mortis, et pendant ma vie une belle bulle pour moi tout seul, portant permission de cultiver la terre les jours de fêtes sans être damné [« après la sainte messe » écrit-il ; « dans ce climat un jour de travail perdu détruit souvent toute l’espérance d’une année » et les paysans qui ne travaillent pas « passent le temps dans la débauche et dans les rixes »]. Mon évêque est un sot qui n’a pas voulu donner au malheureux petit pays de Gex la permission que je demande, et cette abominable coutume de s’enivrer en l’honneur de saints, au lieu de labourer, subsiste encore dans bien des diocèses ; le roi devrait, je ne dis pas permettre les travaux champêtres ces jours là, mais les ordonner. C’est un reste de notre ancienne barbarie, de laisser cette grande partie de l’économie de l’État entre les mains des prêtres.

 

 

           M. de Courteilles vient de faire une belle action, en faisant rendre un arrêt du conseil pour les dessèchements des marais. Il devrait bien en rendre un  qui ordonnât aux sujets du roi de faire croître du blé le jour de saint Simon et de saint Jude, tout comme un autre jour. Nous sommes la fable et la risée des nations étrangères, sur terre et sur mer, les paysans des cantons de Berne, mes voisins, se moquent de moi qui  ne puis labourer mon champ que trois fois, tandis qu’ils le labourent quatre ; je rougis de m’adresser à l’évêque de Rome et non pas à un ministre de France, pour faire  le bien de l’État.

 

 

           Si ma supplique au pape, et ma lettre au cardinal Passionnei sont prêtes au départ de la poste, je les mettrai sous les ailes de mes anges qui auraient la bonté de faire passer mon paquet à M. le duc de Choiseul ; car je veux qu’il en rie et qu’il m’appuie. Cette négociation sera plus aisée à terminer honorablement que celle de la paix [Choiseul depuis la fin 1760 fait mener des négociations secrètes de paix entre Angleterre et France avec l’aide de l’Espagne].

 

 

           Je passe du tripot de l’Église à celui de la comédie. Je croyais que frère Damilaville et frère Thiriot s’étaient adressés à mes anges, pour cette pièce qu’on prétend être d’après Jodelle [Le Droit du Seigneur], et qui est certainement d’un académicien de Dijon [V* est académicien de Dijon]; ils ont été si discrets qu’ils n’ont pas jusqu’à présent osé vous en parler. Il faudra pourtant qu’ils s’adressent à vous et que vous les protégiez très discrètement sous main, sans vous cacher visiblement.

 

 

       Je ne saurais finir de dicter cette longue lettre sans vous dire à quel point je suis révolté de l’insolence absurde et avilissante avec laquelle on affecte encore de ne plus distinguer le théâtre de la Foire, du théâtre de Corneille, et Gilles, de Baron. Cela jette un opprobre odieux sur le seul art qui puisse mettre la France au dessus des autres nations, sur un art que j’ai cultivé toute ma vie aux dépens de ma fortune et de mon avancement. Cela doit redoubler l’horreur de tout homme pour la superstition et la pédanterie ; j’aimerais mieux voir les Français imbéciles et barbares comme ils l’ont été douze cents ans, que de les voir à demi éclairés. Mon aversion pour Paris est un peu fondée sur ce dégoût. Je me souviens avec horreur qu’il n’y a pas une de mes tragédies qui ne m’ait suscité les plus violents chagrins ; il fallait tout l’empire que vous avez sur moi, pour me faire rentrer dans cette détestable carrière. Je n’ai jamais mis mon nom à rien, parce que mettre son nom à la tête d’un ouvrage est ridicule, et on s’obstine à mettre mon nom à tout, c’est encore une de mes peines.

 

 

           J’ajouterai que je hais si furieusement maître Omer [Omer Joly de Fleury qui a fait suspendre l’Encyclopédie, condamner le Poême sur la Loi naturelle par le parlement,…]que je ne veux pas me trouver dans la même ville où ce crapaud noir croasse. Voilà mon cœur ouvert à mes anges ; il est peut-être un peu rongé de quelques gouttes de fiel, mais vos bontés y versent mille douceurs.

 

 

           Encore un mot ; cela ne finira pas de si tôt. Permettez que je vous adresse ma réponse à une lettre de M. de Nivernais [qui a souscrit à l’édition de la critique de V* sur Corneille]. L’embarras d’avoir les noms des souscripteurs pour les œuvres de l’excommunié et infâme Pierre Corneille [encore allusion au réquisitoire du batonnier Daims], ne sera pas une de nos moindres difficultés ; il y en a à tout. Ce monde-ci n’est qu’un fagot d’épines.

 

 

           Vous n’aurez pas aujourd’hui ma lettre au pape, mes divins anges. On ne peut pas tout faire.

 

 

           Je vous conjure d’accabler de louanges M. de Courteilles pour la bonne action qu’il a faite de me rendre un arrêt qui desséchera nos vilains marais.

 

 

           Voilà une lettre qui doit terriblement vous ennuyer. Mais j’ai voulu vous dire tout.

 

 

           Mme Denis et la pupille [Marie-Françoise Corneille] se joignent à moi.

 

 

           V.

           21 juin 1761. »

 

 

Petit lien sur "stance sur le retanchement des festes en 1666" : http://www.textesrares.com/poesie/b6_245.htm

 

19/06/2009

Les gens en place sont pour la plupart de grands misérables. Ils ne savent pas ce qu’on gagne à faire du bien.

Grand calme ces jours-ci au château . Trop calme.

Le beau temps est pourtant de la partie. Serait-ce un contrecoup du Bac ? Mobilisation générale des neurones, soutien accru des futures élites de la nation !

Point de distraction, fut-elle éducative, en dehors du sacro-saint « Programme » de terminale ?

La Fête à Voltaire du 27 juin se prépare gentiment, les comédiens prennent leurs marques (bisous à Pierrette !-) ) dans le parc . http://www.ferney-voltaire.net/fr/manif06.php

 

Je fais une commande spéciale de soleil dès à présent pour être sûr d’être livré à temps …

 

 

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Hier en rentrant du travail(tard), sur le poste de la Fiesta ( et non pas en rentrant de fiesta sur le poste de travail !), La Jeanne de Brassens : Ah ! que c’est beau et bon ! Profitez-en aussi : http://radio.aol.fr/music/Georges+Brassens/_/Jeanne

 

 

 

"...la première des instructions d’un ministre c’est de plaire." : reste à savoir : à qui ? A son supérieur, un divin président ou un roi de droit divin ? Aux misérables gens du peuple pour lesquels il doit trouver les lois et règlements qui feront son bonheur ? (bonheur du peuple et bonheur du ministre ne faisant pas toujours bon ménage, ne nous attendons pas à des merveilles ! )...

 

"Il est doux, ... de regarder les épreuves d'autrui ."Volti, tu n'es jamais à cours de citations qui font mouche ... Il est vrai que tu es devenu une source dans ce domaine :

http://www.dicocitations.com/auteur/4559/Francois_Marie_A...

 

 

 

 

 

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« A René-Louis de Voyer de Paulmy, Marquis d’Argenson , Conseiller d’Etat, rue de Vendôme au Marais à Paris.

 

 

           Si j’avais l’honneur d’être auprès de mon cher monarque [Frédéric], savez-vous bien, Monsieur, ce que je ferais ? Je lui montrerais votre lettre, car je crois que ses ministres ne lui donneront jamais de si bons conseils. Mais il n'y a pas d’apparence que je voie du moins de si tôt mon messie du Nord. Vous vous doutez bien que je ne sais point quitter mes amis pour les rois ; et je l’ai mandé tout net à ce charmant prince que j’appelle Votre Humanité au lieu de l’appeler Votre Majesté. A peine est-il monté sur le trône qu’il s’est souvenu de moi pour m’écrire la lettre la plus tendre, et pour m’ordonner, ce sont ses termes, de lui écrire toujours comme à un homme et jamais comme à un roi [Frédéric est roi depuis le 31 mai ; il écrit à V* le 6 juin : « Ne voyez en moi… qu’un citoyen zélé… Pour Dieu, ne m’écrivez qu’en homme, et méprisez avec moi les titres, les noms… »]. Savez-vous que tout le monde s’embrasse dans les rues de Berlin, en se félicitant sur les commencements de son règne ? Tout Berlin pleure de joie, mais pour son prédécesseur personne ne l’a pleuré que je sache [ dans ses Mémoires, V* donne des exemples de la dureté et brutalité de Frdéric-Guillaume envers son peuple et sa famille.]. Belle leçon pour les rois. Les gens en place sont pour la plupart de grands misérables. Ils ne savent pas ce qu’on gagne à faire du bien.

 

           J’ai cru faire plaisir, Monsieur, au roi, à vous, et à M. de Valori [ambassadeur de France en Prusse] en lui transcrivant les propres paroles de ce ministre dont vous m’avez fait part : il commence son règne comme il y a apparence qu’il le continuera, partout des traits de sa bonté etc. J’ai écrit aussi à M. de Valori. J’ai fait plus encore, j’ai écrit à M. le baron de Keizerling, favori du roi, et je lui ai transcrit les louanges non suspectes qui me reviennent de tous côtés de notre cher Marc-Aurèle prussien, et surtout les quatre lignes de votre lettre. Vous m’avouerez qu’on aime d’ordinaire ceux dont on a l’approbation et que le roi ne saura pas mauvais gré à M. de Valori de mon petit rapport, ni M. de Valori à moi. Des bagatelles établissent quelquefois la confiance, et la première des instructions d’un ministre c’est de plaire.

 

           Les affaires me paraissent bien brouillées en Allemagne et partout, et je crois qu’il n’y a pas que le conseil de la trinité qui sache ce qui arrivera dans la petite partie de notre petit tas de boue qu’on nomme Europe. L’empereur voudrait attaquer les Borbonides, mais sa Pragmatique le retient [la Pragmatique Sanction rendue en 1713 par l’empereur Charles VI pour assurer à sa fille Marie-Thérèse la couronne d’Autriche était garantie par les puissances européennes.]. La Saxe et la Bavière disputeront sa succession [les maris des nièces de l’empereur sont électeurs de Saxe et de Bavière]. Bergues et Juliers est une nouvelle pomme de discorde, sans compter les Goths, Wisigoths et Gépides qui pourraient danser dans cette rubrique de barbares.

 

Dulce mari magno turbantibus aequora ventis

E Terra magnum alterius spectare laborem.

[Il est doux, quand sur la vaste mer les vents soulèvent les flots, de regarder de la terre les rudes épreuves d’autrui.]

          

           Débrouille qui voudra ces fusées ; moi je cultive en paix les arts, bien fâché que les comédiens aient voulu à toute force donner cette Zulime, que je n’ai jamais regardée que comme de la crème fouettée, dans le temps que j’avais quelque chose de meilleur à leur donner [Mahomet]. J’ai eu l’honneur de vous en montrer les prémices.

 

Si me Marce tuis vatibus insere

Sublimi feriam sidera vertice.

[Si, Marcus, tu me donnes une place parmi tes poêtes, j’irai jusqu’au ciel toucher de ma tête les astres.]

 

           Mme du Châtelet vous fait mille compliments. Vous connaissez mon tendre et respectueux attachement.

 

 

           V.

           A Bruxelles ce 18 juin 1740. »

 

 

Je quitte le clavier pour aller tirer quelques flèches avant la pluie ...