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09/10/2012

Si on ne souhaite pas ma personne, je veux au moins qu'on souhaite mes ouvrages

... Dit  Dieu le père à Diderot, qui fit la sourde oreille et écrivit les misères et malheurs de La Religieuse .

... Dit Jésus, Dieu le fils à Voltaire qui botta en touche et écrivit le Traité sur la Tolérance et une prière qui vaut bien le Pater noster .

... Dit le Saint Esprit à James qui  alors remercia les deux humains précédents d'avoir eu l'esprit assez ouvert pour douter et le courage de s'engager pour la liberté et la fraternité .

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« A M. le comte d'ARGENTAL.
Conseiller du Parlement

rue de la Sourdière

à Paris

 
A Monrion près de Lausanne , 3 mars [1757].

Mon cher ange, on peut mal servir Mlle Clairon 1 sans la rater absolument. On peut être de communi martyrum, sans être de frigidis et maleficiatis 2. Ce sera à peu près le rôle que je jouerai avec elle. Je lui donnerai, quand vous voudrez, cette Zulime bien changée et sous un autre nom. Vous déciderez du temps le plus favorable quand vous serez quitte de la mauvaise tragédie de Robert-François Damiens, quand les querelles qui anéantissent le goût des arts seront apaisées, quand Paris respirera. Pour l'autre pièce, ce n'est pas une affaire prête il ne faut pas d'ailleurs être toujours ce Voltaire qui,
Volume sur volume incessamment desserre .3
Si on ne souhaite pas ma personne, je veux au moins qu'on souhaite mes ouvrages.
Béni soit Dieu qui vous donne la persévérance dans le goût des beaux-arts, et surtout du tripot de la comédie, tandis qu'on n'entend parler que des querelles des parlements et des prêtres, qu'on ne rend point la justice, que la secte des margouillistes fait de petits progrès, et qu'on assassine des rois ! Vous m'approuverez de passer mes hivers dans un petit pays où on ne vit que pour son plaisir, et où Zaïre a été mieux jouée, à tout prendre, qu'à Paris. J'ai fait couler des larmes de tous les yeux suisses. Mme Denis n'a pas les beaux yeux 4 de Gaussin, mais elle joue infiniment mieux qu'elle. On vient de trente lieues pour nous entendre. Nous mangeons des gelinottes, des coqs de bruyère, des truites de vingt livres; et, dès que les arbres auront remis leur livrée verte, nous allons à cet ermitage des Délices, qui mérite son nom.
Ne sommes-nous pas fort à plaindre? Oui, mon cher et respectable ami, nous le sommes, puisque nous vivons loin de vous.
J'ai une extrême curiosité de savoir si on envoie cent mille hommes en Allemagne 5; mais vous ne vous en souciez guère, et vous ne m'en direz rien. J'aimerais encore mieux que votre parlement se mit à rendre enfin la justice, et me fit payer de cinquante mille francs dont ce fat de Bernard 6, fils de Samuel Bernard, et fat de dix millions, m'a fait banqueroute en mourant.
Adieu, mon divin ange; jugez Damiens, et portez-vous bien. »

1 Allusion à la mésaventure de Ximenès, dont il est parlé , note 1 et 2 , page 533 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113533/f536.image....

2 Du commun des martyrs , …, impuissants et frappés de maléfice .

4 Marie-Louise Denis avait du strabisme.

5 On les envoya .

6 Voir lettre à Mme de Fontaine du 12 septembre 1754 et notes page 259 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411354g/f261.image

Si vous n'aviez été enchaîné, selon votre louable coutume, au char des jeunes et belles dames

 ...Au XVIIIè siècle ... Le pied menu et de beaux atours ,

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 ... Au XXIè ...

Thieriot, je t'ai reconnu !

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« A M. THIERIOT.

A Monrion, 3 mars [1757]

Je n'entends point parler de vous, mon ancien ami, depuis que vous lisez l'histoire des sottises humaines depuis Charlemagne. Je voudrais bien savoir aussi ce que c'est qu'un Portefeuille trouvé 1. On me met en pièces, on se divise mes vêtements, et on jette le sort sur ma robe.
Je voudrais que vous eussiez passé l'hiver avec moi à Lausanne. Si vous n'aviez été enchaîné, selon votre louable coutume, au char des jeunes et belles dames, vous auriez vu jouer Zaïre 2 en Suisse mieux qu'on ne la joue à Paris; vous auriez entendu la Serva padrona 3 sur un joli théâtre; vous y verriez des pièces nouvelles exécutées par des acteurs excellents; les étrangers accourir de trente lieues à la ronde, et mon pays romand, mes beaux rivages du lac Léman, devenus l'asile des arts, des plaisirs, et du goût; tandis qu'à Paris la secte des margouillistes 4 occupe les esprits, que le parlement et l'archevêque bataillent pour une place à l'hôpital et pour des billets de confession, qu'on ne rend point la justice, et qu'enfin on assassine un roi. Jouissez de tant de charmes et de tant de gloire, messieurs les Parisiens, et applaudissez encore au Catilina 5 de Crébillon. »

4 Terme employé dans sa lettre à J.-R. Tronchin du 19 février 1575 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/10/06/il-n-y-a-rien-dont-le-fanatisme-ne-soit-capable.html

5 Petit coup de griffe très voltairien .

Voir : http://www.mediterranees.net/histoire_romaine/catilina/crebillon/index.html

V* après avoir critiqué Crébillon ( à juste titre ) a fait jouer son Rome sauvée ou Catilina en 1756 : http://www.mediterranees.net/histoire_romaine/catilina/voltaire/avertissement.html

 

08/10/2012

Quel ouvrage plus digne de vous et quelle plume plus digne de ce héros, pour transmettre sa gloire à la postérité ?

 ... Un film documentaire, par exemple, pour toi petit Zorro Poutine !

http://www.rfi.fr/europe/20120217-russie-poutine-storytelling-russia-2012

 Attention ! méfiance, mafia .

 

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« A Monsieur de Voltaire [de la part de Fedor Pavlovitch Veselovsky] 1

 Genève le 16 février 1757

 Monsieur,

Je n'ignore pas combien un éloge de la part d'un particulier, quelque juste qu'il soit, doit peu toucher un goût aussi délicat qu'est le vôtre, particulièrement après ceux dont toute l'Europe éclairée vous a comblé ; mais quand j'aurai l'honneur de vous apprendre qu'il n'y a point de pays où votre mérite , vos talents et votre rare génie soient mieux reconnus, plus honorés et admirés qu'en Russie, ma patrie, je me flatte que cette nouvelle connaissance ne vous sera pas indifférente . J'y ajouterai encore que parmi tous vos admirateurs, il est une personne de la cour des plus distinguées par ses vertus, ses lumières et son haut rang qui en est le plus pénétré : c'est monsieur le comte Jean de Schouvaloff, chambellan et lieutenant-général de Sa Majesté impériale . Ce seigneur, zélé pour l'honneur de sa patrie et pour la gloire de Pierre le Grand, est persuadé comme moi qu'on ne pourrait rendre un service plus signalé à la Russie qu'en vous engageant, monsieur, à écrire l'histoire du règne de ce grand monarque. Quel ouvrage plus digne de vous et quelle plume plus digne de ce héros, pour transmettre sa gloire à la postérité ?

Ce seigneur ne pouvant se flatter de vous attirer dans sa patrie pour mettre la main à un tel ouvrage, espère que dans votre retraite ici vous n'aurez aucune répugnance d'entreprendre cette histoire qui ne fera qu'ajouter un nouveau lustre à votre brillante réputation et qui vous sera d'autant plus facile à exécuter que ce seigneur pourra vous envoyer tous les mémoires et tous les matériaux nécessaires ; il y a d'ailleurs une collection de médailles en or des principaux évènements du règne de Pierre le Grand qui pourrait vous aider dans cet ouvrage et qu'il m'a chargé de vous offrir , monsieur, comme une marque d'amitié et d'estime qu'il a pour vous . En vous les faisant parvenir, il serait flatté que vous les agréassiez . Je ne saurais, monsieur, vous exprimer la satisfaction que je ressens de m’acquitter d'une commission aussi flatteuse pour moi ; rien ne peut l'égaler que l'espérance que j'ai de pouvoir réussir dans ma négociation ; vous voudrez bien me faire la faveur de me marquer votre intention, et celle d'agréer les assurances des sentiments de la plus haute estime avec lesquels , j'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très humble et très obéissant » etc.

 

je dirais que tout cela est d'une création nouvelle, et j'entrerais en matière par faire connaître le créateur de tous ces prodiges

... Et si j'ajoute que l'on parle ici de la Russie, vous devinez aisément que le crateur de prodiges ne peut être que Vlad (pour les intimes, s'il en reste ) Poutine pour le reste du monde dit civilisé . 

On peut le voir en belle compagnie, le pope étant le confident/confesseur/informateur du KGB de notre Tartufe moderne .

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 A tout prendre, la poutine canadienne n'a pas le même pouvoir de nuisance, même si certains me trouvent optimiste à ce sujet .

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« A M. Fedor Pavlovitch VESELOVSKY 1

A Monrion, février [1757].

Monsieur, j'ai reçu une lettre 2 que j'ai crue d'abord écrite à Versailles ou dans notre Académie, et c'est vous, monsieur, qui me faites l'honneur de me l'adresser. Vous me proposez ce que je désirais depuis trente ans; je ne pouvais mieux finir ma carrière qu'en consacrant mes derniers travaux et mes derniers jours à un tel ouvrage.
Je ferais le voyage de Pétersbourg si ma santé pouvait le permettre mais, dans l'état où je suis, je vois que je serai réduit à attendre dans ma retraite les matériaux que vous voulez bien me promettre.
Voici quel serait mon plan. Je commencerais par une description de l'état florissant où est aujourd'hui l'empire de Russie, de ce qui rend Pétersbourg recommandable aux étrangers, des changements faits à Moscou, des armées de l'empire, du commerce, des arts, et de tout ce qui a rendu le gouvernement respectable.
Ensuite je dirais que tout cela est d'une création nouvelle, et j'entrerais en matière par faire connaître le créateur de tous ces prodiges. Mon dessein serait de donner ensuite une idée précise de tout ce que l'empereur Pierre le Grand a fait depuis son avénement à l'empire, année par année.
Si M. le comte de Schouvalow a la bonté, monsieur, comme vous m'en flattez, de me faire parvenir des mémoires sur ces deux objets, c'est-à-dire sur l'état présent de l'empire et sur tout ce qu'a fait Pierre le Grand, avec une carte géographique de Pétersbourg, une de l'empire, l'histoire de la découverte du Kamtchatka, et enfin des renseignements sur tout ce qui peut contribuer à la gloire de votre pays, je ne perdrai pas un instant, et je regarderai ce travail comme la consolation et la gloire de ma vieillesse.
La suite des médailles est inutile; elles se trouvent dans plusieurs recueils, et la matière de ces médailles est d'un prix que je ne puis accepter. Je souhaiterais seulement que M. le comte de Schouvalow voulût bien m'assurer que Sa Majesté l'impératrice désire que ce monument soit élevé à la gloire de l'empereur son père, et qu'elle agrée mes soins.
Voilà, monsieur, quelles sont mes dispositions. Je me tiendrai très-honoré et très-heureux si elles s'accordent avec les vôtres j'attendrai vos ordres et ceux de M. le comte de Schouvalow, à qui vous me permettrez de présenter ici mes respects en recevant les miens.
J'ai l'honneur d'être, monsieur, avec tous les sentiments que je vous dois, etc. »

1 Cette lettre est une réponse à une lettre de Veselovsky de Genève du 16 février 1757 . Les deux frères Veselovsky, Fedor et Avram avaient été impliqués dans l'affaire du prince-héritier Alexis , fils de Pierre 1er . Avram s'était établi à Genève et Fédor avait retrouvé la faveur impériale .

On considèra aussi, au XIXè , par erreur, que le destinataire était Michel, comte de Bestucheff-Riumin, né vers 1686, ambassadeur de l'impératrice Elisabeth à Paris de 1756 à 1760, année où il mourut .

 

07/10/2012

tous ceux qui travaillent à rendre les hommes malheureux ou à les abrutir

... Sont légions , cent fois hélas . Ne les oublions pas dans nos prières et souhaitons leur de tomber sur plus méchants ou plus retors qu'eux .

 Mon subconscient me souffle déjà un nom : Poutine ! être tête de liste, fut-elle des salopards, ne doit pas lui déplaire tant il est imbu de sa personne et faux-cul .

 Et je lui dédie ceci avec les Pussy Riot : http://www.youtube.com/watch?v=VtYw-d1CSxQ

 Gueulons contre Poutine

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“A M. DIDEROT

A Monrion, pays de Vaud, 28 février [1757].

L'ouvrage 1 que vous m'avez envoyé, monsieur, ressemble à son auteur: il me paraît plein de vertus, de sensibilité et de philosophie. Je pense, comme vous, qu'il y aurait beaucoup à réformer au théâtre de Paris. Mais tant que les petits-maîtres se mêleront sur la scène avec les acteurs, il n'y a rien à espérer.2
Le plus impertinent de tous les abus, c'est l'excommunication et l'infamie attachée au talent de débiter en public des sentiments vertueux. Cette contradiction irrite mais c'est encore une de nos moindres sottises.
J'oublie avec plaisir dans ma retraite tous ceux qui travaillent à rendre les hommes malheureux ou à les abrutir, et plus j'oublie ces ennemis du genre humain, plus je me souviens de vous. Je vous exhorte à répandre, autant que vous le pourrez, dans l'Encyclopédie, la noble liberté de votre âme. On ne mettait point Cicéron dans le donjon de Vincennes 3 pour son livre de Natura deorum 4. Notre siècle est encore bien barbare. Vale et scribe.
Tuus
V.”

1Le Fils naturel, drame, publié anonymement en 1757, ne fut représenté au théâtre qu'en 1771 à Paris :http://cesar.org.uk/cesar2/titles/titles.php?fct=edit&script_UOID=122520

et : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k55448825/f7.image

2 Vieille idée de V* et aussi une allusion à un passsage des Entretiens sur le Fils Naturel visant au même but . Il faudra attendre 1759 et la révolution “des banquettes” pour libèrer la scène de la Comédie Française des spectateurs privilégiés .

3 Allusion à l'emprisonnement de Diderot du 24 juillet au 3 novembre 1749.

4 Ouvrage de Cicéron De natura deorum (= De la nature des dieux )

 

06/10/2012

Calvin était un très-méchant homme, altier, dur, vindicatif et sanguinaire

... Et je me demande, au nom du dicton "qui se ressemble s'assemble" si tous ses disciples sont aussi détestables que ce redoutable maitre à penser, encore un gourou religieux qui a eu l'heur de plaire en promettant , lui-aussi, comme tout gourou de base, le paradis .

Luther, Calvin ! moi je préfère Claude Luter et Calvin et Hobbes pour faire mon salut plutôt que les deux protestants barbichus revêches .

http://www.youtube.com/watch?v=S9sE4B-Nm3I&feature=related

 

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 http://fr.wikipedia.org/wiki/Calvin_et_Hobbes

 

« A M. Pierre ROUSSEAU,

A Liège.

A Monrion, près de Lausanne, 24 février [1757].

C'est pour la quatrième fois que j'écris aux frères Cramer, libraires, pour leur recommander de vous envoyer l'Essai sur l'Histoire générale depuis Charlemagne jusqu'à l756. Je suis en droit d'attendre cette attention de ceux à qui j'ai fait présent de mon ouvrage. L'aîné Cramer est à présent en Hollande, et doit sans doute vous faire parvenir cette histoire. Ce sont ces frères Cramer qui m'ont déterminé à m'établir où je suis. Ils voulaient imprimer mes ouvrages, il fallait que je veillasse à l'impression; la besogne a duré près de deux ans. J'ai des amis dans ce pays-ci. J'y ai trouvé des situations plus agréables que Meudon et Saint- Cloud, des maisons commodes je me suis établi, pour l'hiver, auprès de Lausanne, et, pour les autres saisons, auprès de Genève. Mais ce que j'ai trouvé de plus commode parmi ces calvnistes, très-différents de leurs ancêtres, c'est que j'ai fait imprimer à Genève, avec l'approbation universelle 1, que Calvin était un très-méchant homme, altier, dur, vindicatif et sanguinaire. C'est ce que vous verrez dans cette Histoire générale. Genève est peut-être à présent la ville de l'Europe où il y a le plus de philosophes. Je suis très-fâché que cette Histoire générale ne soit pas encore parvenue jusqu'à vous.
A l'égard de ce Portefeuille trouvé 2, c'est une rapsodie qu'un libraire affamé, nommé Duchesne, vend à Paris sous mon nom: c'est un nouveau brigandage de la librairie. On me mande que les trois quarts de ce recueil sont composés de pièces auxquelles je n'ai nulle part, et que le reste est pillé des éditions de mes ouvrages, et entièrement défiguré.
Il n'y a pas grand mal à tout cela, et je pardonne aux misérables à qui non nom vaut quelque argent.3

1 Voyez la lettre à Thieriot, du 26 mars 1757 page 194 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411355v/f197.image

2 Voir la note 1 , page 337 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411322p/f339.image.r=.langFR

Le Portefeuille trouvé ou tablettes d'un curieux (Genève 1757) fut aussi publié la même année sous le nom de Tablettes d'un curieux, passant habituellement comme étant une compilation de Pierre-Louis d'Aquin de Château-Lyon, sans preuve ; cet ouvrage fourmille d'inexactitudes et comporte surtout divers écrits de V* . Voir : http://books.google.fr/books?id=ESY6AAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

3 Les trois quarts du second feuillet manquent .

 

05/10/2012

Il n'y a rien dont le fanatisme ne soit capable.

... Trop fatigué...

... No comment !

 

 

 

“A Jean-Robert Tronchin

Négociant à Lyon

A Monrion 19 [février 1757]

Grand merci du vin de Toulon . En voilà beaucoup mon cher Monsieur . J'aimerais mieux ma bougie et mon sucre . Je vous aurai bien de l'obligation d'avoir la bonté de vous informer de ce que sont devenues les deux caissses de bougies 1 que vous payâtes il y a près de deux mois à M. de Florian à Paris . M. Cathala 2 ne les a pas encore reçues . A l'égard du sucre nous comptons encore sur vos bons offices ; et nous braverons les Anglais qui ont la mine de nous prendre bien des vaisseaux . Dieu bénisse vos armateurs . Il faut avoir de l'argent de reste pour le mettre entre les mains . Ces messieurs d'ordinaire finissent par manger votre argent au cabaret ou par être pris . Mais je me flatte que les vôtres seront honnêtes gens et imprenables .

On confirme l'envoi de la grande armée . Je ne vois pourtant point encore de grands préparatifs .
J'attends avec impatience le mot de l'énigme de l'aventure de Pierre Damiens. On me mande qu'il y a une petite secte cachée, composée de la plus basse canaille du parti janséniste, que cette secte est appelée la secte des margouillistes 3, nom digne d'elle; que ces malheureux sont liés entre eux par des serments exécrables; qu'ils ont voulu, non pas tuer le roi, mais le blesser légèrement pour l'avertir, et qu'ils ont menacé le dauphin du poison. Il n'y a rien dont le fanatisme ne soit capable.
Le Suisse V. vous embrasse tendrement.

1 Le 23 janvier 1757 V* écritvait à J.-.R Tronchin : “... cette bougie que j'ai payée à M. De Florian et que vous m'aviez annoncée il y a pplus d'un mois en deux caisses elle ne vient point.”et “... j'attends votre sucre de Marseille avec les bougies.”

2 Henry Cathala, banquier, négociant à Genève .