22/10/2012
les billets de l'Épargne, d'État, de monnaie, d'ustensiles, de liquidation, d'emprunt, de banque, etc., etc., tous effets admirables et si beaux qu'une famille qui en aurait pour cent millions n'aurait pas de quoi acheter une demi-once de pain bis
... Propos réalistes pour qui est assez lucide devant la menace de faire fonctionner la planche à billets pour, apparemment, désendetter quelque pays que ce soit .
Voltaire ne connaitra pas cette inflation énorme (que vivra l'Allemagne du début du XXè siècle ), mais il en avait dénoncé les effets désastreux en l'absence d'un gouvernement uni .
« A M. Jean-Robert TRONCHIN, de Lyon
Monrion, 8 avril [1757].
Vingt conseillers du parlement de la Franche-Comté enlevés par lettres de cachet, force représentations de tous les parlements 1, force murmures très-injustes contre un roi justement nommé Bien-Aimé 2, la justice distributive suspendue, etc., pourraient faire craindre que tant de loteries non enregistrées 3 ne soient pas un jour bien exactement payées, et qu'il ne reste que des billets blancs 4 aux pauvres metteurs, qui les serreront bien proprement avec les billets de l'Épargne, d'État, de monnaie, d'ustensiles, de liquidation, d'emprunt, de banque, etc., etc., tous effets admirables et si beaux qu'une famille qui en aurait pour cent millions n'aurait pas de quoi acheter une demi-once de pain bis. Faites sur cela vos réflexions . Mandez-moi toujours en attendant quel est l'avantage de cette nouvelle loterie non registrée en parlement .
Ut ut est 5. Je vous prie de vouloir bien m'envoyer mon cher correspondant une cargaison énorme de meubles . Mme Denis n'a pas encore fait le mémoire . Sans cela vous auriez une belle endosse . Je rougis toujours de vous importuner à ce point . Mais Mme Denis prétend qu'une femme de vos amies pourra se donner le plaisir de visiter les boutiques de Lyon . Vous avez des affaires plus importantes .
Nous sommes à vous entièrement soit que nous échauffons en hiver les poêles de Lausanne, soit que nous goûtions en été la fraicheur de la terrasse des Délices .
V. »
1 Remontrances, du 24 décembre 1756 , au roi, au sujet des nouveaux impôts dûs pour la guerre . Voir page 256 : http://books.google.fr/books?id=allEAAAAcAAJ&pg=PA266&lpg=PA266&dq=remontrances+du+parlement+de+franche+comt%C3%A9+en+1757&source=bl&ots=56uhRdOGq2&sig=yhfwErjNOewy_oggjlWykZHbU58&hl=fr&sa=X&ei=hxOFUILQDsa90QXJ-oCIBQ&sqi=2&ved=0CB8Q6AEwAA#v=onepage&q=remontrances%20du%20parlement%20de%20franche%20comt%C3%A9%20en%201757&f=false
En fait ce ne sont que huit parlementaires qui seront « enlevés » : voir page 44 : http://books.google.fr/books?id=t6us0xFNLWQC&pg=PA44&lpg=PA44&dq=Remontrances+du+Parlement+de+Franche-Comt%C3%A9,+%C3%A0+l%27occasion+de+l%27enl%C3%A8vement+de+Messieurs+de+Nancray,...+du+1er+avril+1757&source=bl&ots=8n3DXCkkcH&sig=Es1Ybi1HRM02XfiSvOj1pwf93eo&hl=fr&sa=X&ei=XTuFUNbPOofB0QWph4HQBA&ved=0CC8Q6AEwAw#v=onepage&q=Remontrances%20du%20Parlement%20de%20Franche-Comt%C3%A9%2C%20%C3%A0%20l%27occasion%20de%20l%27enl%C3%A8vement%20de%20Messieurs%20de%20Nancray%2C...%20du%201er%20avril%201757&f=false
4 Voir lettre de la veille au même : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/10/21/il-parait-que-le-gouvernement-emprunte-beaucoup-et-que-la-na.html
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21/10/2012
J'ai l'honneur de vous donner avis que je change d'avis tout comme un autre
... Mais tout de même moins vite qu'un membre de l'UMP qui veut être le mieux placé lors de la distribution des prix après l'élection -(NB -totalement sans importance)- du nouveau président de ce parti . C'est mon avis et sur ce point je n'en changerai pas .
Allez ! tournez manège
A première vue, la chasse est ouverte, il a du plomb dans l'aile : pauvre coq ! Un candidat UMP trop connu partage et le plomb et deux lettres avec lui ; j'ai hâte de le voir tomber du haut de ses ergots (son ego va en prendre un bon coup ).
« A Charlotte-Sophie von ALTENBURG, comtesse BENTINCK
A Monrion ; 8 avril [1757]
Il y a tantôt huit mois, madame, que vous me chargeâtes de vous chercher une maison dans le voisinage de Lausanne . Je vous en trouve une mais vous pouvez avoir changé huit fois d'avis depuis ce temps-là . Ce n'est qu'une fois par mois et vous m'avouerez que ce n'est pas trop . Mais ce qui est trop, c'est huit mois de silence . Vous m'écrivez par boutade et je vous suis attaché continûment . C'est un mauvais marché que j'ai fait avec vous mais je le tiendrai . J'ai l'honneur de vous donner avis que je change d'avis tout comme un autre . Je quitte cette maison de Monrion près de Lausanne pour en prendre une beaucoup plus belle dans Lausanne même . Cette très vilaine ville m'a plu beaucoup parce qu'il y a bonne compagnie, bien de l'esprit, bien des talents . Nous y avions joué comédie, tragédie, pièces nouvelles ; on venait à nous de vingt lieues à la ronde . Me voici Lausannois pour les hivers . Voulez-vous , madame, oui ou non, une fois pour toutes ma maison de Monrion ? Le propriétaire pourra vous la laisser pour environ cent trente écus d'Allemagne par an . Il y a quatorze fenêtres de face, trois chambres entièrement meublées, commodes, table de marbre, cinq cheminées, cinq beaux poêles, belle cuisine, écurie pour huit chevaux, remise pour deux carrosses, vastes galetas, greniers, grande cave, jardin, verger, avenue, promenade . Vous pourriez y venir coucher le premier octobre, mais il faut que le bail soit fait pour le 1er juin . En voulez-vous, n'en voulez-vous pas , madame ? Plusieurs locataires s'offrent . J'ai demandé la préférence pour vous, et je vous demande une réponse prompte et décisive . Si vous ne m'écrivez pas par le premier courrier après réception de ma lettre je tiens le marché rompu . Je serai désespéré d'être privé de l'espérance de vous avoir pour voisine et je croirai fermement que vous n'êtes pas si philosophe que moi . Je me suis fait Suisse, que n'êtes vous Suissesse ! Ah madame la liberté vaut mieux que des procès !1
Recevez mes respects, mes regrets et mon attachement .
V. »
1 Allusion aux procès sans fin qu'elle a avec son ancien mari . Elle vit en ce temps là à Vienne . Elle fera un séjour aux Délices en 1758 . Voir note IV , lettre à Polier de Bottens du 28 février 1755 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/12/08/si-je-ne-peux-vous-entendre-a-l-eglise-je-vous-entendrai-a-t.html
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Il parait que le gouvernement emprunte beaucoup et que la nation paye les taxes avec une répugnance que tous les parlements semblent favoriser
... Quel pays peut s'enorgueuillir d'avoir des "happy taxpayers " ? Certainement pas la France où les élus gouvernementaux et les ministres s'accrochent à leurs chers revenus avantageux, et font plus d'envieux que de contribuables heureux de les payer grassement . Un effort de modestie est à reconnaitre pour les ministres, et aucun pour les sénateurs qui pantouflent sans discontinuer . N'oublions pas les députés européens qui ne sont pas spécialement bon marché .
Allez, du balai
« A M. Jean-Robert TRONCHIN,
de Lyon
Monrion, 7 avril [1757].
J'ai demandé, mon cher Monsieur , des billets de loterie au grand faiseur qu'en cas que cette loterie produise en effet 8% en viager aux billets blancs 1 comme le bruit en courait . Cependant si vous croyez la loterie nouvelle un peu avantageuse quoique formée sur un plan différent vous pouvez toujours acquérir pour 80 000 livres tournois de billets pour mon compte .
Je vous avoue que j'aurais mieux aimé placer en viager sur la tête de Mme Denis, et si la ville de Lyon prenait de l'argent à condition d'en faire des rentes à vie, j'aimerais bien mieux ce marché là qu'un autre .
Il parait que le gouvernement emprunte beaucoup et que la nation paye les taxes avec une répugnance que tous les parlements semblent favoriser. On est obligé d'envoyer des troupes à Besançon pour contenir les conseillers et les écoliers 2. Le parlement de Paris est plus effarouché que jamais.
Les belles déclarations de Damiens qu'il n'avait d'autres complices que tous ceux dont il avait entendu les discours dans les salles du Palais, ses aveux qu'il n'avait eu en vue que de venger le parlement et le peuple, ne rapprocheront pas les esprits. On mande que le jour de l'exécution il y avait plus de troupes dans Paris que du temps de la Fronde. On ne parle que d'un mécontentement général, qui fait un triste contraste avec le nom de Bien-Aimé que cette nation avait si justement donné à son roi. Je ne sais si tant de sottises populaires ne pourront pas à la fin donner un très grand discrédit aux effets publics .
Feu Bernard, fils de Samuel Bernard, a fait en mourant banqueroute 3, comme son père l'avait faite adroitement de son vivant. J'y suis pour environ huit mille livres de rente. Il y a six ans que cette affaire dure je pourrais en retirer quelque chose mais on me répond froidement que le parlement ne se mêle plus de rendre justice. Jugez s'il ne faudrait pas mieux avoir à faire à l'Hôtel de ville de Lyon .
Vous avez reçu, monsieur, la première caisse du libraire Briasson je vous prie d'avoir la bonté de lui faire tenir 415 livres tournois pour ce premier envoi . Je vous sera très obligé .
Je suis partagé comme vous savez entre Genève et Lausanne . Les hivers sont pour Lausanne , et les étés pour Genève . Je quitte Monrion et je prends une maison plus commode et plus belle dont la vue ressemble à celle de Constantinople sur le Bosphore 4. J'en suis le maître absolu pour neuf ans . Je la paye et je l'ajuste . Cela ma coûtera un millier de louis d'or . J'aurai probablement recours à vos bontés pour quelques ameublements .
J'envoie cette lettre à M. Cathala 5. Bonsoir mon très cher correspondant .
V. »
1 Qui sont les billets perdants ; voir : http://books.google.fr/books?id=qXCp90ED55MC&pg=PA1079&lpg=PA1079&dq=loterie+XVIII%C3%A8+si%C3%A8cle&source=bl&ots=nVrGPHk4mB&sig=XGENsrBzXhOxRQvxAQ2j_msY76Y&hl=fr&sa=X&ei=MOmDUPSNEZKZhQe9yYGIDw&ved=0CFAQ6AEwCA#v=onepage&q=loterie%20XVIII%C3%A8%20si%C3%A8cle&f=false
2 Suite à une série de remontrances adressées au roi par le Parlement de Franche-Comté, au sujet d’impôts nouveaux motivés par la guerre de Sept Ans. Le lieutenant général du roi rappelle le Parlement à la fidélité et à l’obéissance et 8 conseillers du Parlement sont condamnés à l’exil.
3 Voir lettre du 3 mars 1757 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/10/09/si-on-ne-souhaite-pas-ma-personne-je-veux-au-moins-qu-on-sou.html
et du 12 septembre 1754 à Mme de Fontaine : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/09/12/le-grand-point-est-que-l-etat-ait-la-paix-et-que-les-particu.html
4 Rue du Grand Chêne à Lausanne . Cette maison a été remplacée par un hôtel au début du XXè siècle .
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Quand je sais quelque chose, madame, j'écris; quand je ne sais rien, je me tais
... Sage décision .
Voltaire n'aurait sans doute pas encombré twitter , Fesse de bouc et autres réseaux sociaux comme on les nomme ; personnellement je les trouve parfaitement a-sociaux , manne de revenus pour publicitaires et commerçants , sans plus .
L'un sait et cancane,... l'autre va savoir
« A Madame Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg.
Près de Lausanne, 6 avril1757 .
Quand je sais quelque chose, madame, j'écris; quand je ne sais rien, je me tais. Hors la maladie dont est mort monsieur 1 Damiens, il n'est rien parvenu à ma connaissance. Si vous savez quelques bagatelles du Rhin, de l'Elbe, du Niémen, ayez la bonté d'en faire part aux solitaires des Délices. Il faut regarder tous ces événements comme une tragédie que nous voyons d'une bonne loge où nous sommes très à notre aise. Restez longtemps dans la vôtre avec votre digne amie. Conservez-moi vos bontés, et priez toutes deux pour Marie 2.
V. »
1 Quand Louis XV parlait de Damiens, dit Mme du Hausset, il le désignait par ces mots le monsieur qui a voulu me tuer. Damiens fut tiré à quatre chevaux, dans la soirée du 28 mars. V* fortement choqué par cette tentative de régicide, se permet d'ironiser ici sur le supplice de Damiens, et en soulignera l'horreur et ainsi que le voyeurisme des Parisiens .
2 Marie-Thérèse d'Autriche ; voir la lettre du 27 décembre 1756 à Mme de Klinglin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/14/quand-on-s-est-fait-a-notre-age-madame-une-retraite-agreable.html
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20/10/2012
vous ne savez peut-être pas avec quelle hauteur la plus saine partie de la nation joint les cris de l'indignation et de la pitié à ceux de toute l'Europe
... J'y suis allé et j'en ai été ravi .
Martine Jacquemet
« A M. Louis-François-Armand du PLESSIS, maréchal duc de RICHELIEU.
6 avril [1757].
Vous savez, il y a du temps, mon héros, la glorieuse victoire que l'ancien ministère anglais a remportée sur l'amiral Byng à Portsmouth 1; mais vous ne savez peut-être pas avec quelle hauteur la plus saine partie de la nation joint les cris de l'indignation et de la pitié à ceux de toute l'Europe. On cite votre témoignage comme la preuve la plus authentique de l'innocence de Byng et vous avez la gloire d'avoir vaincu les Anglais et de les faire rougir. Je m'attendais que vous ne vous en tiendriez pas là et, quoique l'exercice d'année de premier gentilhomme de la chambre soit une très-belle chose, j'espérais que les bords de l'Elbe pourraient être aussi glorieux pour vous que la Méditerranée. Le roi de Prusse parait toujours fort gai; il disait que les Français lui envoyaient vingt-quatre mille perruquiers il se trouve qu'on lui en dépêche cent mille. Il y a là de quoi se pei-
gner, à ce que disent les polissons. Pour moi, je ne me mêle que des héros de théâtre, nous avons fait à Lausanne une troupe excellente, et je vous souhaite d'aussi bons acteurs. M. d'Argental prétend toujours que la comédie est un des premiers devoirs d'un honnête homme. Le maréchal de Villars aima les spectacles jusqu'à l'âge de quatre-vingts ans faites-en autant, monseigneur; et que l'héroïsme que vous voyez à Versailles, de quelque côté que vous tourniez les yeux, ne vous fasse pas négliger les grands hommes de l'antiquité.
Les deux Suisses, plus Suisses que jamais, vous renouvellent leurs hommages. Vous connaissez le très-tendre respect du Suisse V. »
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19/10/2012
Vous êtes fait pour être toujours utile à la patrie, malgré votre goût pour la retraite
... Mais à quel homme ou quelle femme pourrait-on dire celà aujourd'hui ?
Je pense bien être incompétent, ou lucide, ou les deux, en n'étant pas capable de citer un nom . Par contre il y a pléthore d'individus des deux sexes qui devraient se retirer de la scène avant d'être des modèles d'imbécilité ; je pense dans l'instant à cet olibrius de Karl Lagerfeld qui se permet d'insulter François Hollande . Herr Karl,- depuis des années vous camouflez votre vieille peau flagada avec des cols montants et des gants en toutes saisons, cheveux peroxydés et lunettes fumées pour être hors d'âge -, votre stupidité est plus difficile à camoufler, vos neurones ont besoin de repos et vous ne manquerez pas à grand monde ; tschuss !
Utiles à la nation
« A M. Joseph PÂRIS-DUVERNEY
27 mars [1757].
Je prends d'ordinaire, monsieur, le temps où les tulipes commencent à s'épanouir dans notre petit pays romance, pour vous remercier des ornements dont vous avez embelli l'un de mes ermitages 1. Ce ne sont pas seulement des tulipes que je vous dois; j'ai depuis longtemps bien d'autres motifs de reconnaissance, et ils seront toujours chers à mon cœur 2.
Je m'imagine que vous ne vous êtes pas tenu cette année à former des officiers dans votre École militaire, et que vous n'avez pu vous refuser à diriger les subsistances de l'armée qui va vers le Rhin. Vous êtes fait pour être toujours utile à la patrie, malgré votre goût pour la retraite. Notre ami M. Darget 3 ne se doutait pas, quand j'étais avec lui à Potsdam, que la France serait en guerre contre le roi de Prusse, et que vous seriez les meilleurs amis des Autrichiens. Rien ne doit vous étonner, et rien ne vous étonne sans doute, après les changements que vous avez vus en Europe depuis que vous avez été sur la scène. Vous voyez d'un œil philosophique toutes ces révolutions, et, en servant votre patrie de vos conseils, vous jouissez d'un repos honorable que vous avez si bien mérité.
Si parmi les agréments de votre retraite de Plaisance 4, vous comptez pour quelque chose le plaisir d'avoir des amis véritablement attachés et pleins de reconnaissance, mettez-moi pour jamais dans cette liste car je serai jusqu'au dernier moment de ma vie, monsieur, avec les sentiments les plus tendres et les plus inviolables, votre très-humble et très-obéissant serviteur. »
1 Voir lettre du 26 avril 1756 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/06/28/si-les-anglais-ont-ete-assez-malavises-pour-ne-pas-prendre-d.html
2 Une part de la fortune de V* est due à sa participation aux opérations financières et commerciales des frères Pâris .
3 Darget fut à partir du 18 janvier 1746 secrétaire des commandements et conseiller du roi Frédéric II . Voir : http://friedrich.uni-trier.de/de/oeuvres/10/id/004019000/text/
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18/10/2012
la religion ne doit influer en rien dans l'état civil, si ce n'est pour nous rendre meilleurs citoyens, meilleurs parents, etc. ; ...nous devons regarder tous les hommes comme nos frères, païens ou chrétiens, hérétiques ou orthodoxes,...
... Milieu du XVIIIè siècle ! chapeau !
Rien à ajouter ni à retrancher !
Coexistence pacifique
« De M. D'ALEMBERT.
Paris [fin mars 1757 ? ]1
J'ai reçu et lu, mon cher et illustre philosophe, l'article Liturgie 2. Il faudra changer un mot dans les Psaumes, et dire: « Ex ore sacerdotum perfecisti laudem 3, Domine.» Nous aurons pourtant bien de la peine à faire passer cet article, d'autant plus qu'on vient de publier une déclaration qui inflige la peine de mort 4 à tous ceux qui auront publié des écrits tendant à attaquer la religion; mais, avec quelques adoucissements, tout ira bien, personne ne sera pendu, et la vérité sera dite. J'ai fait vos compliments à mon camarade 5, qui vous remercie de tout son cœur, et qui compte vous faire lui-même les siens en vous écrivant incessamment. Je suis charmé que vous ayez quelque satisfaction de notre ouvrage. Vous y trouverez, je crois, presque en tout genre d'excellents articles. Il y en a dont nous ne sommes pas plus contents que vous ne le serez; mais nous n'avons pas toujours été les maîtres de leur en substituer d'autres. A tout prendre, je crois que l'ouvrage gagne à la lecture, et je compte que le volume septième, auquel nous travaillons, effacera tous les précédents. Je renverrai aujourd'hui à Briasson sa Religion vengée, et je n'aurai pas le même reproche à me faire que vous, car je ne l'ouvrirai pas. Je vous recommande Garasse-Berthier, qui, à ce qu'on m'a assuré, vous a encore harcelé dans son dernier journal . Voilà les ouvrages qui auraient besoin d'être réprimés par des déclarations. Je gage que le nouveau règlement contre les libelles n'empêchera pas la gazette janséniste de paraitre à son jour 6. A propos de jansénistes, savez-vous que l'évêque de Soissons 7 vient de faire un mandement où il prêche ouvertement la tolérance, et où vous lirez ces mots « Que la religion ne doit influer en rien dans l'état civil, si ce n'est pour nous rendre meilleurs citoyens, meilleurs parents, etc.; que nous devons regarder tous les hommes comme nos frères, païens ou chrétiens, hérétiques ou orthodoxes, sans jamais persécuter pour la religion qui que ce soit, sous quelque prétexte que ce soit. » Je vous laisse à penser si ce mandement a réussi à Paris. Adieu, mon cher confrère; je vous embrasse de tout mon cœur. »
1 Cette lettre est, au plus tôt, de la fin de mars, le mandement dont on y parle étant du 21 mars 1757.
2 Voir lettre à d'ALEMBERT du 19 février 1757 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/27/unissez-tant-que-vous-pourrez-tous-les-philosophes-contre-le.html
3 « Ex ore infantium et lactentium perfecisti laudem, propter inimicos tuos,
ut destruas inimicum et ultorem. » : Psaume VIII, v. 3. : http://www.biblegateway.com/passage/?search=Psaumes+8&version=BDS
4 Le parlement demandait une loi pour punir de mort les auteurs de brochures contre les jésuites; et l'avocat général Omer Joly de Fleury attendait très-impatiemment cette loi, si digne de son aveugle intolérance. Grimm en dit un mot dans sa Correspondance littéraire du 1er mai 1757. (CL.)
6 Les Nouvelles ecclésiastiques, connues sous le titre de Gazette ecclésiastique, et rédigées alors par des jansénistes, du nombre desquels était Fontaine de La Roche. (CL.) Voir : http://dictionnaire-journalistes.gazettes18e.fr/journaliste/307-jacques-fontaine-de-la-roche
7 Fitz-James-Stuart , dont Voltaire a souvent parlé; voir page 524 :Dictionnaire philosophique : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411336j/f527.image
; voir page 104 : Traité sur la Tolérance : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113410/f107.image
et voir page 280 : Sermon du rabbin Akib : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411340m/f283.image
et 395 : Déclaration de Pierre Calas : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411340m/f397.image
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