30/09/2012
Je crois que vous avez été un peu occupé, depuis un mois, de la foule des événements, ou horribles, ou embarrassants, ou désagréables, qui se sont succédé si rapidement
... Dis-je à François Hollande , et d'ajouter "ce n'est pas fini" . Bon courage !
Et, de toit à moi, ...
... Gare à la douche froide !
“A M. le maréchal duc de RICHELIEU.
13 février [1757].
Le fragment de votre lettre sur l'amiral Byng 1, monseigneur, fut rendu à cet infortuné par le secrétaire d'État, afin qu'elle pût servir à sa justification. Le conseil de guerre l'a déclaré brave homme et fidèle 2. Mais en même temps, par une de ces contradictions qui entrent dans tous les événements, il l'a condamné à la mort, en vertu de je ne sais quelle vieille loi, en le recommandant au pouvoir de pardonner, qui est dans la main du souverain. Le parti acharné contre Byng crie à présent que c'est un traître qui a fait valoir votre lettre, comme celle d'un homme par qui il avait été gagné 3. Voilà comme raisonne la haine mais les clameurs des dogues n'empêchent pas les honnêtes gens de regarder cette lettre comme celle d'un vainqueur généreux et juste, qui n'écoute que la magnanimité de son cœur.
Je crois que vous avez été un peu occupé, depuis un mois, de la foule des événements, ou horribles, ou embarrassants, ou désagréables, qui se sont succédé si rapidement. Les gens qui vivent philosophiquement dans la retraite ne sont pas les plus à plaindre. Je crains d'abuser de vos moments et de vos bontés par une plus longue lettre il faut un peu de laconisme avec un premier gentilhomme de la chambre, qui a le roi et le dauphin à servir, et avec celui qui est fait pour être dans les conseils et à la tête des armées.
Mme Denis vous idolâtre toujours, et il n'y a point de Suisse qui vous soit attaché avec un plus tendre respect que
le Suisse VOLTAIRE.”
1 Voir lettre du 2 janvier 1757 à John Bing : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/17/m...
2 Voir lettre du 20 décembre 1756 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/07/26/s...
Bing fut condamné pour négligence de ses devoirs bien qu'acquitté du chef de lâcheté et de déloyauté . Il sera exécuté le 14 mars .
3 Théodore Tronchin avait averti V* de ce risque qui n'en tint pas compte . Voir lettre du 2 janvier 1757 à François Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/01/01/i...
20:34 | Lien permanent | Commentaires (0)
l'histoire. Ce n'est, après tout, qu'un ramas de tracasseries qu'on fait aux morts.
... D'où je conclus que je ne suis pas pressé d'entrer dans l'histoire !
Je ne suis qu'une modeste goutte qui fait des vaguelettes .
“M. Pierre-Robert le Cornier de CIDEVILLE.
A Monrion, près de Lausanne, pays de Vaud, 9 février [1757].
Mon cher et ancien ami, je souhaite que le fatras dont je vous ai surchargé vous amuse. J'ai vu un temps où vous n'aimiez guère l'histoire. Ce n'est, après tout, qu'un ramas de tracasseries qu'on fait aux morts.
Mais, à propos de Pierre Damiens, lisez le chapitre de Henri IV 1. On peut prendre et laisser le livre quand on veut; les titres courants sont au haut des pages cela soulage le lecteur; il lit ce qui l'intéresse, et laisse le reste. Notre ami le grand abbé a-t-il reçu son exemplaire? Mais a-t-on le temps de lire au milieu des belles choses dont Paris retentit chaque jour? Pierre Damiens, bâtard de Ravaillac, et ses consorts, et les lettres au dauphin, et les poisons, et les exils, et le remue-ménage, et la guerre, et les vaisseaux de la compagnie des Indes qu'on nous gobe tout cela absorbe l'attention. Les horreurs présentes ne donnent pas le temps de lire les horreurs passées.
J'ai tendrement regretté le marquis d'Argenson, notre vieux camarade. Il était philosophe, et on l'appelait à Versailles d'Argenson la béte. Je plains davantage la chèvre 2, s'il est vrai qu'on l'envoie brouter en Poitou. Les fleurs et les fruits de la cour étaient faits pour elle. Qui m'aurait dit, mon ami, que je serais dans une retraite plus agréable que ce ministre? Ma situation des Délices est fort au-dessus de celle des Ormes. Je passe l'hiver dans une autre retraite, auprès d'une ville où il y a de l'esprit et du plaisir. Nous jouons Zaïre Mme Denis fait Zaïre, et mieux que Gaussin. Je fais Lusignan le rôle me convient, et l'on pleure. Ensuite on soupe chez moi nous avons un excellent cuisinier.
Personne n'exige que je fasse de visites on a pitié de ma mauvaise santé; j'ai tout mon temps à moi je suis aussi heureux qu'on peut l'être quand on digère mal. En vérité, cela vaut bien le sort d'un secrétaire d'État qu'on renvoie.
Beatus ille qui procul negotiis 3
(Horace., Epodes, od. II, v. 1.)
La liberté, la tranquillité, l'abondance de tout, et Mme Denis, voilà de quoi ne regretter que vous.
Le roi de Prusse m'a écrit une lettre très-tendre; l'impératrice de Russie veut que j'aille à Pétersbourg écrire l'histoire de Pierre, son père mais je resterai aux Délices et à Monrion je ne veux ni roi ni autocratrice j'en ai tâté cela suffit. Les amis et la philosophie valent mieux; mais il est triste d'être si loin de vous. Voilà Fontenelle mort; c'est une place vacante dans votre coeur; il me la faut. Vale, et me ama.
Le Suisse V.”
1 Essai sur les Mœurs, Chap. CLXXIV : http://fr.wikisource.org/wiki/Essai_sur_les_m%C5%93urs/Chapitre_174
17:11 | Lien permanent | Commentaires (0)
29/09/2012
Je n'ai nulle envie d'aller à Paris, où l'on est complètement fou
... Ce qui m'est confirmé par l'auteur de ce qui suit !
Buggtoxic et L'Effet papillon
http://www.youtube.com/watch?feature=endscreen&v=RaJLLQXY7Lg&NR=1
Mais je vais volontier à Lyon ...
A M. Jean-Robert TRONCHIN, de LYON
(à Monsieur Robert Tronchin et compagnie à Lyon)
Monrion, 6 février [1757].
Voici mon cher correspondant la pancarte que vous demandez . Vous voilà donc devenu corsaire ! Pour moi je n'ai armé de vaisseaux que contre les jésuites .Celui qui a écrit une lettre chrétienne à un cardinal chrétien a une âme héroïque et sage, qui distingue la religion de ses abus. Cela est d'autant plus beau que ces abus ont été sur le point de lui coûter la vie, et ont assassiné ses prédécesseurs.
La lettre touchante que j'ai reçue du roi de Prusse, et l'invitation que l'impératrice me fait d'aller à Pétersbourg, ne me feront pas quitter les Délices. Je n'ai nulle envie d'aller à Paris, où l'on est complètement fou.
Je vous embrasse tendrement .
Permettez que je vous prie de donner cours à l'incluse .
Le Suisse V.”
23:20 | Lien permanent | Commentaires (0)
J'ai tout mon temps à moi je griffonne des histoires, je songe à des tragédies; et quand je ne souffre point, je suis heureux
... Ce que je dirai dans un peu moins d'une année, si les petits cochons ne me mangent pas .
Dès ce jour mon blogounet entame sa cinquième année, tout comme celui de LoveVoltaire (à quelques jours près), et ce sont plus de cent cinquante mille visites et plus de trois cent dix mille pages lues qui, au fond de moi, m'encouragent .
A ceux qui me sont fidèles et à ceux qui arrivent sur ce blog par hasard, je ne demande qu'une chose : lisez Voltaire avec esprit, avec coeur, vous ne le regretterez pas .)
PS (Pensée Subliminale) : Les commentaires créent du lien, usez-en, s'il te-vous plait !
Cueillons ! cueillons !
Au chateau de Voltaire, ces deux là n'ont pas froid aux ...
“A M. le comte d'ARGENTAL.
Conseiller d'honneur du Parlement
rue de la Sourdière
à Paris
A Monrion, près de Lausanne, 6 février 1757.
Moi, aller à Pétersbourg, mon cher ange . Savez-vous bien que ma petite retraite des Délices est plus agréable que le palais d'été de l'autocratrice? Si Dosmont joue la comédie, je la joue aussi ; et je fais le bonhomme Lusignan dans huit jours. Cela me convient fort,
Car à revoir Paris je ne dois plus prétendre;
Vous voyez qu'au tombeau je suis prêt à descendre.
(Zaïre, acte II, scène 3 , Lusignan.)1
Nous avons un bel Orosmane, un fils 2 du général Constant 3, qui a soupé avec vous à Argenteuil avec MIle du Bouchet 4. Votre tragédie de Robert-François Damiens, et de tant de fous, n'est donc pas encore finie Je ne sais pas pourquoi les comédiens ne hasardent pas Mahomet dans ces circonstances.
Vous avez une belle âme d'aimer toujours le tripot au milieu de toutes les atrocités qui vous entourent. Les plus sages sont assurément ceux qui cultivent les arts, et qui aiment le plaisir tandis que les autres se tourmentent.
Le roi de Prusse m'a écrit de Dresde une lettre très-touchante. Je ne crois pourtant pas que j'aille à Berlin plus qu'à Pétersbourg je m'accommode fort de mes Suisses et de mes Genevois. On me traite mieux que je ne mérite. Je suis bien logé dans mes deux retraites. On vient chez moi on trouve bon qu'en qualité de malade je n'aille chez personne. Je leur donne à dîner et à souper, et quelquefois à coucher. Mme Denis gouverne ma maison. J'ai tout mon temps à moi je griffonne des histoires, je songe à des tragédies; et quand je ne souffre point, je suis heureux. Vous m'avouerez que ce Dosmont a tort de vouloir que je quitte tout cela pour l'aller entendre à Pétersbourg. S'il avait vu mes plates- bandes de tulipes au mois de février, il ne me proposerait pas ses glaces.
On dit que Mlle Dumesnil et Lekain se sont en effet surpassés dans Sémiramis. L'abbé 5 coadjuteur de Retz n'aurait-il pas mieux fait d'aller là qu'à son abbaye ?
Adieu, mon cher et respectable ami. Il n'y a que vous de sage, j'y compte aussi les anges.
Le Suisse VOLTAIRE.”
2 David-Louis Constant de Rebecque, connu sous le nom de Constant d'Hermenches (1722-1785) : http://gw4.geneanet.org/cvpolier?lang=fr;p=david+louis;n=constant+de+rebecque
3 Samuel Constant de Rebecque (1676-1756) : http://gw4.geneanet.org/cvpolier?lang=fr;p=samuel;n=constant+de+rebecque
4 Mme d'Argental, née du Bouchet. Son mariage datait de 1737, semblait n'être pas connu de tout le monde . L'hôte doit donc être Constant l'aîné .
5 L'abbé de Chauvelin, alors exilé pour avoir donné sa démission de conseiller de la troisième chambre des enquêtes. (CL.)
20:07 | Lien permanent | Commentaires (0)
Il y a en France deux nations celle des honnêtes gens, et celle des sauvages. C'est le pays des contrastes
... Choisis ton camp, camarade !
Et que le meilleur gagne !
“A M. le président Germain-Gilles-Richard de RUFFEY 1
à Dijon
A Monrion, près de Lausanne, 6 février [1757].
Il y a quelques jours, monsieur, que j'ai fait partir à votre adresse, par Pontarlier, un paquet de quelques livres qui sont au coche ou à la messagerie, et qui vous seront rendus à votre premier ordre, en cas que quelque méprise dans l'adresse n'ait pas permis qu'on les portât chez vous. Si vous jetez les yeux sur cette histoire, vous n'y trouverez rien de plus fou et de plus atroce que ce qui se passe aujourd'hui dans Paris. Voilà la suite du jansénisme et du molinisme et des querelles des prêtres. Il y a en France deux nations celle des honnêtes gens, et celle des sauvages. C'est le pays des contrastes. J'ai bien fait de choisir le pays de l'uniformité. Si j'avais de la santé, je serais heureux et je vous écrirais de plus longues lettres. Comment va monsieur le premier président de La Marche ? Comptez que personne ne vous est plus attaché que le Suisse V. »
1 Voir entre autres : http://www.archive.org/stream/histoiresecrte00rich#page/n7/mode/2up
17:54 | Lien permanent | Commentaires (0)
28/09/2012
Il faut que je m'accoutume aux naufrages
... Dit Arnaud Montebourg, in petto, après sa piètre prestation face aux ouvriers . Et il ajouta "Sais-je encore nager quand je n'ai plus pied ?" , avant de réaliser qu'il porte un gilet de sauvetage nommé "C'est la faute à la crise" , gilet qu'il porte depuis 2010, la preuve : http://www.davidmourey.com/article-arnaud-montebourg-presente-l-ouvrage-crise-naufrage-des-economistes-53167725.html .
“A M. Jean-Robert TRONCHIN.
Monrion, 5 février [1757].
Mon cher correspondant, encore un gros vaisseau de pris . Je tremble pour notre compagnie des Indes .
Il me paraît assez sûr que l'Espagne va se déclarer 1. Le roi de Prusse vient de m'écrire une lettre très-tendre. L'impératrice de Russie veut que j'aille à Pétersbourg. Mais je vous réponds bien que je ne quitterai pas vos Délices.
Il faut que je m'accoutume aux naufrages. Ce ne sont pas seulement mes vaisseaux de Cadix qui périssent; une barque que j'envoyais de Monrion aux Délices, chargée de bois et de meubles, est allée au fond du lac. Cela ne m'empêchera pas de jouer le vieux bonhomme Lusignan dans Zaïre ce rôle me convient. On joue tous les jours la comédie à Lausanne ce n'est pas comme dans votre ville de Calvin.
Je suis bien fâché de la mort du marquis d'Argenson 2, ex-ministre philosophe. Il y avait cinquante ans que je l'aimais.
Me premettrez-vous de vous adresser les lettres ci-jointes pour épargner une partie du port à de pauvres diables ?
Les Pictet sont enchantés de Lyon et ils ont raison .
Il me revient qu'on a brûlé à Glats les magasins du roi de Prusse . C'est une perte difficile à réparer . Il y a disette de grains en Germanie .
Les deux Suisses vous embrassent bien tendrement ”
1 Certitude déçue car l'espagne ne rentrera en conflit contre l'Angleterre que le 2 janvier 1762, suite au Troisième Pacte de Famille signé avec le France le 15 août 1761. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Richard_Wall
2 Ami depuis les années de collège à Louis Le Grand . Mort le 26 janvier :Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Louis_de_Voyer_de_Paulmy_d'Argenson
17:04 | Lien permanent | Commentaires (0)
la recommandation d'un Suisse, n'est pas d'un grand poids
... A moins qu'il ne soit banquier !
Comprenne qui peut
Tag genevois : SOVAGE ?
“A M. LEKAIN
A Monrion, près Lausanne, le 4 février [1757].
Mon cher Lekain, ma recommandation, la recommandation d'un Suisse, n'est pas d'un grand poids; cependant j'ai écrit 1 comme vous l'avez voulu.
Est-il vrai que, le lendemain de cet horrible assassinat, votre camarade Dubreuil reçut une lettre adressée à un autre Dubreuil, laquelle lettre contient ces mots Fuyez, le coup est manqué ? Voilà des tragédies bien abominables. Je vous embrasse.
P. S. J'écris peu et tard mais c'est que je travaille et que je suis malade.”
1 Lettre à Richelieu du même jour : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/27/le-roi-de-prusse-vient-de-m-ecrire-une-lettre-tendre-il-faut.html
15:55 | Lien permanent | Commentaires (0)