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19/11/2020

Il y a bien des choses dans ce monde qui n'adoucissent pas l'humeur

... Comme ce projet de loi réprimant la glottophobie ! Faut-il être assez abruti pour ajouter de l'inutile au superflu de nos lois pléthoriques ! Je mets l'accent là dessus .

Même le bon sens est confiné, black(a)outé dans notre nation de clochemerles .

https://www.francetvinfo.fr/societe/cela-a-fait-rire-toute-la-salle-ces-francais-victimes-de-glottophobie-la-discrimination-par-l-accent_4185225.html

Peuchère», «dégun»... Parlez-vous le français du Sud?

Pour info : https://www.lefigaro.fr/langue-francaise/expressions-francaises/2019/02/18/37003-20190218ARTFIG00013-peuchere-degun-parlez-vous-le-francais-du-sud.php

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

12è juillet 1765 à Genève

Je ne vous écris qu'un mot, mon cher philosophe, parce que je me flatte que vous pourrez être parti pour Genève quand ma lettre sera arrivée à Paris . Mais si vous y êtes encore, je vous prie de vouloir bien faire cacheter la lettre ci-jointe 1 . C'est une réponse que je fais à M. Thieriot ; il change si souvent de logis que je ne sais plus sa demeure . Je soupçonne pourtant qu'il est gîté encore auprès de l'Arsenal . Je prends à tout hasard la précaution de mettre sur l'enveloppe que votre commis ou votre secrétaire peut l'ouvrir, en cas que vous soyez parti, et je le prie de faire parvenir par la petite poste à M. Thieriot , la lettre qui est pour lui .

Je vous attends , mon cher ami, avec une belle impatience . Nous verrons si le voyage adoucira vos amygdales . Il y a bien des choses dans ce monde qui n'adoucissent pas l'humeur . J'aurai du moins la consolation avec vous d'en parler . Vous savez que c'est presque la seule qui reste . Je vous embrasse et je vous attends . 

V.»

18/11/2020

J'ai encore à vous demander s'il vous conviendrait de me faire toucher tous les mois trois mille livres

... Petite requête de Dominic Cummings , qui vient de vider son bureau de  Downing street, et qui tient à faire vérifier le proverbe "les conseilleurs ne sont pas les payeurs" . Tu as entendu Boris ?

https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/la-grande-bretag...

Dominic Cummings, influent conseiller de Boris Johnson quitte son poste

 

 

 

« A Jacob Bouthillier de Beaumont, Banquier 1

à la Grand-Rue, près de la résidence

à Genève

J'ai, monsieur, des lettres de change pour le paiement d'août chez MM. Couderc et Passavant à Lyon . Je m'adresse à vous pour savoir si vous voudrez avoir la bonté de vous en charger, et s’il convient à vos affaires d'en garder une somme de trente mille livres en me faisant toucher le reste à votre loisir .

J'ai encore à vous demander s'il vous conviendrait de me faire toucher tous les mois trois mille livres de France que M. Laleu, secrétaire du roi, notaire à Paris, paierait au commencement de chaque [mois]2 à vos correspondants sur votre ordre .

Peut-être ne serait-il pas inutile que nous parlassions ensemble de toutes ces petites affaires ; mais ma santé qui est fort mauvaise ne me permet pas d'aller à Genève . Il vous serait bien plus aisé à vous, monsieur, qui vous portez bien, de me faire l'honneur de venir dîner à Ferney .

J'ai celui d'être avec tous le sentiments que je vous dois, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

gentilhomme ordinaire du roi.

A Ferney 3è auguste 1765. »

1 Directeur de l’hôpital de Genève .Voir : https://societe-voltaire.org/cqv/negrier.php

2 Mot omis sur l'original .

Tout sera dans l'ordre

...

 

« A Gabriel Cramer

[juillet-août 1765]

Je pense qu'il vaut mieux en effet placer toute la prose de suite dans ce 3è volume qui sera terminé par Adélaïde, La Femme qui a raison , et quelques petites pièces de poésie 1. Tout sera dans l'ordre, et les trois volumes de monsieur Caro pourront être de requise 2. »

1 Ce ne peut se rapporter qu'au troisième volume des Nouveaux mélanges . Cette phrase montre que V* se soucie de l’ordre dans lequel figurent les différentes pièces dans un volume, bien que cet ordre ne soit pas chronologique .

2 Une chose de requise est une chose rare (le mot requise n'apparait que dans cette expression ).

Tâchez de n’avoir plus besoin de médecins ; on vit et on meurt très bien sans eux

... A propos, qu'on engueule le Pr Raoult, soit, il a eu la langue mal pendue et s'est marché sur le sac en s'en prenant au reste de la profession et défendant son traitement du Covid 19 ; mais qu'on lui fiche la paix, il a traité ses patients avec attention, selon ses recherches, et je ne pense pas qu'il ait plus de morts sur la conscience que ceux des confrères ( pas du tout fraternels ! ) qui l'ont vilipendé . Conseil de l'Ordre , tu te trompes de cible .

DE LA MEDECINE GENERALE, seulement de la médecine générale: Les nouveaux  médecins généralistes (1) : Ne plus mesurer la pression artérielle.

Qui veut encore faire médecine aujourd'hui ?

Pour info : http://docteurdu16.blogspot.com/2012/10/les-nouveaux-mede...

 

 

 

« A Nicolas-Claude Thieriot

12è juillet 1765 1

Mon cher et ancien ami, vous êtes en amitié pire que les mauvais chrétiens ne sont dans leurs dévotions ; ils les font une fois l’an, et vous n’écrivez qu’une fois en deux ans. Si c’est votre asthme qui vous a rendu si paresseux, j’en suis encore plus fâché que si l’indifférence seule en avait été cause ; car, quoique je fusse très sensible à votre oubli, je le suis encore davantage à vos maux. Je croyais que vous étiez guéri pour avoir vu Tronchin. Tâchez de n’avoir plus besoin de médecins ; on vit et on meurt très bien sans eux. Il y a bientôt trois ans que je n’ai parlé de ma santé au grand docteur ; elle est détestable, mais je sais souffrir. Un homme qui a été malade toute sa vie est trop heureux, à mon âge, d’exister. J’espère que je verrai bientôt l’aimable et vrai philosophe dont les amygdales vont si mal 2. C’est une des plus grandes consolations que je puisse recevoir dans ma vie languissante.

Je ne peux guère consulter actuellement l’Esprit des lois ; j’ai le malheur de bâtir, je suis obligé de transporter toute ma bibliothèque. Vous voulez parler apparemment de la police municipale, qui paraît si favorisée dans le nouvel édit que M. de Laverdy a fait rendre. Tout le système de M. le marquis d’Argenson roule entièrement sur cette idée. On ne connaissait pas le mérite de M. d’Argenson, qui était un excellent citoyen. Un édit conforme aux opinions de ces deux hommes d’État ne peut manquer d’être bien accueilli. Il me semble que les provinces en sont extrêmement contentes. Il n’en est pas ainsi du petit libelle contre notre Archimède 3. Le peu d’exemplaires qui en sont parvenus à Genève ont été reçus avec la même indignation et le même mépris qu’à Paris. Les temps sont bien changés ; les philosophes d’aujourd’hui écrivent comme Pascal, et les jansénistes comme le père Garasse.

J’ai chez moi actuellement un jeune homme qui promet beaucoup, c’est M. de La Harpe, auteur de Warwick. Je souhaiterais bien qu’il eût autant de fortune que de talents. Il aura de très grands obstacles à surmonter, c’est le sort de tous les gens de lettres.

Adieu ; quand vous vous porterez bien, et qu’il y aura quelque ouvrage qui soit digne que [vous en]4 parliez, n’oubliez pas votre vieil ami dans sa retraite.

V. »

1 V* répond à une lettre du 3 juillet 1765 : « Il y a dix-huit mois, mon très illustre et très tendre ami, que je cours après mon bien et ma santé . Je me suis sauvé entièrement des griffes de mon banqueroutier . Il s'agissait de quatre cents livres de rentes viagères, ce qui est chose considérable dans un nécessaire borné comme le mien ; mais ce qui me touche plus que cette délivrance est celle de mon asthme sec et convulsif .[...] Vous avez vu avec quelle chaleur je m'intéressais pour Damilaville . Il vous inspirera bien vite cette même inclination quand vous le verrez .[...] Faites-vous apporter je vous prie le IIè tome de l'Esprit des lois . Lisez les chapitres 17 et 18 du 26è livre . Rappelez-vous l'édit du roi [édit financier de décembre 1764 ; voir plutôt XXII, XVII-XVIII]. Il me paraît dressé sur ces deux chapitres . Si ma découverte est juste, je sais gré à M. Laverdy d'en faire son profit, et j'en admire davantage M. de Montesquieu . Vale. »

Voir : http://classiques.uqac.ca/classiques/montesquieu/de_esprit_des_lois/partie_5/de_esprit_des_lois_5.html

et : http://classiques.uqac.ca/classiques/montesquieu/de_esprit_des_lois/de_esprit_des_lois_tdm.html#Anchor-55257

2 Damilaville .

4 Manuscrit endommagé .

17/11/2020

Les avis sont toujours des objets de dissertation qui exigent plutôt des entretiens que des lettres

...

 

« A Adrien-Michel-Hyacinthe Blin de Sainmore rue et près des Capucines

à Paris

Genève 10è juillet 1765

Vous pardonnez sans doute, monsieur, à un vieillard malade, les délais que son triste état le force de mettre à ses réponses . J'ai lu avec un extrême plaisir l'héroïde que vous avez bien voulu m'envoyer 1. Vous me demandez des avis, ils sont assez inutiles quand l'ouvrage est imprimé, et d'ailleurs vous n'en avez pas besoin . Les avis sont toujours des objets de dissertation qui exigent plutôt des entretiens que des lettres . Vous ne me parlez point de l'édition de Racine ; je souhaite que ceux qui se sont chargés de cet ouvrage aient autant de goût que vous . Pardonnez à mon triste état si ma lettre n'est pas plus longue . J'ai l'honneur d'être avec toute l'estime que je vous dois, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur .

V. »

1 Selon une note de Blin sur une copie de sa main, il s'agit d'une nouvelle édition de la Lettre de Biblis à Caunus son frère, 1765 . Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5438810d.texteImage

16/11/2020

Cette démarche est délicate ; mais je parle à des politiques, à des conjurés qui peuvent rectifier mes idées, et les faire réussir

...

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol,comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

10 juillet [1765]

Je dépêche à mes anges le dernier mot du petit prêtre tragique ; il vient de m’apporter ses Roués, et les voilà. Vous ne sauriez croire à quel point ce petit provincial vous respecte et vous aime. Je sens bien, m’a-t-il dit, que mon œuvre dramatique n’est pas digne de vos anges . Le sujet ne comporte pas ces grands mouvements de passions qui arrachent le cœur, ce pathétique qui fait verser des larmes ; mais on y trouvera un assez fidèle portrait des mœurs romaines dans le  temps du triumvirat. Je me flatte qu’on trouvera plus d’union dans le dessein qu’il n’y en avait dans les premiers essais, que les fureurs de Fulvie sont plus fondées, ses projets plus dévoilés, le dialogue plus vif, plus raisonné, et plus contrasté, les vers plus soignés et plus vigoureux. Le sujet est ingrat, et les connaisseurs véritables me sauront peut-être quelque gré d’en avoir surmonté les difficultés.

Je vous avoue que j’ai à peu près les mêmes espérances que le petit novice ex-jésuite. Si vous trouvez la pièce passable, pourrait-on la faire jouer à Fontainebleau ? Les places sont prises. Ce serait peut-être un assez bon expédient de faire présenter la pièce à M. le maréchal de Richelieu par quelqu’un d’inconnu que Lekain détacherait, ou par quelque actrice que Lekain mettrait dans la confidence de l’ouvrage, sans lui laisser soupçonner l’auteur. Cette démarche est délicate ; mais je parle à des politiques, à des conjurés qui peuvent rectifier mes idées, et les faire réussir.

J’ai reçu de quelques amis d’assez amples paquets contresignés Courteil, qui n’ont point été ouverts, et qui sont venus très librement à mon adresse. Vous avez fait enfin, divins anges, précisément ce que je demandais ; vous m’avez instruit de ce que contenait la demi-page 1. Permettez que je pousse la curiosité jusqu’à demander si le maître de la maison 2 l’a vue, où si elle n’a été que jusqu’à monsieur son secrétaire.

Je voudrais bien que M. le d[uc] de P[raslin] protégeât fortement M. d’Alembert ; il ferait une action digne de lui.

Respect et tendresse.

V. »

2 Louis XV .

15/11/2020

Vous devez être un excellent acteur, si vous êtes sur le théâtre comme à souper ; et je vous soupçonne de vous tirer à merveille de tout ce que vous voudrez faire

...

 

« A Charles Michel, marquis du Plessis Villette

Le vieux malade de Ferney présente ses très tendres respects au jeune malingre de l’hôtel d’Elbeuf. Je vois que vous vous regardez comme un homme dévoué à la médecine, et que vous passez votre temps entre les ragoûts et les drogues, cela rend mélancolique, mais cela fait aussi un grand bien, car on en aime mieux son chez soi, on réfléchit davantage, on se confirme dans sa philosophie, on fait moins de cas du monde, et dès qu’on a un rayon de santé, on court au plaisir. Une telle vie ne laisse pas d’avoir son mérite ; les malingres ont de très beaux moments.

Permettez-moi encore, monsieur, d’abuser de votre bonté, et de vous recommander cette lettre pour M. d’Alembert 1. Il faut que l’air de Ferney ne soit pas bon pour les tragédies, l’auteur de Warwick n’a pas encore fait une pauvre petite scène. Je serai bien honteux s’il sort de chez moi sans avoir travaillé. Si la pièce était prête, nous la jouerions. Je crois vous avoir mandé que madame Denis m’ayant demandé une grande salle pour repasser son linge, je lui avais donné celle du théâtre ; mais après y avoir pensé mûrement, elle a conclu qu’il vaut mieux être en linge sale, et jouer la comédie. Elle a rebâti le théâtre, et demain on joue Alzire, en attendant Warwick, et en attendant aussi mademoiselle Clairon, qui peut-être ne viendra point .2

Puissiez-vous, monsieur, visiter bientôt nos terres de Bourgogne ! Nous vous donnerons la comédie, et vous ne serez pas mécontent de Mme Denis. Je suis si vieux que je ne peux plus jouer les vieillards ; c’est grand dommage, car je vous avoue modestement que je jouais Lusignan beaucoup mieux que Sarrazin.

Lorsque vous ferez votre tournée, mandez-nous quels rôles vous voulez. Vous devez être un excellent acteur, si vous êtes sur le théâtre comme à souper ; et je vous soupçonne de vous tirer à merveille de tout ce que vous voudrez faire.3 Conservez-moi une amitié que je mérite par mes très tendres sentiments pour vous .

V.

8è juillet 1765 à Ferney »





1 Cette lettre que V* se garde bien de confier à la poste .

2 Ici, Villette introduit, dans la deuxième édition de ses « Oeuvres du marquis de Villette », un paragraphe de sa composition : « Vous me parlez avec bien de l’enjouement de mon Orphelin. J’aurais voulu la scène dans la maison de Confucius ; j’aurais voulu Zamti plus Chinois, et Gengis plus Tartare. Heureusement mon grand acte a raccommodé tout cela. »

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