19/11/2025
Vous jouirez du plaisir de voir prospérer votre pays et d'avoir contribué à son bonheur
... Ecoutez les paysans M. Macron !
« A Louis-Gaspard Fabry
12è juin 1770 à Ferney
Monsieur,
Grâce à vos bonté officieuses, la fabrique de montres prospérera . Raffo déménage déjà, et retourne en Savoie . Nous aurons incessamment les meilleurs artistes de Genève qui viendront occuper cette maison . Mais Raffo veut la louer neuf louis d'or ; cela ne serait pas juste puisque je ne loue que sept louis une maison beaucoup plus considérable avec six arpents de pré 1. Quand on donnera six louis d'or à Raffo ce paiement sera fort honnête .
Le roi a déjà acheté six montres de votre fabrique dont deux sont garnies de diamants . Vous jouirez du plaisir de voir prospérer votre pays et d'avoir contribué à son bonheur .
J'ai l'honneur d'être avec l'attachement le plus respectueux ,
monsieur,
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire . »
1 Argument personnel.
18:26 | Lien permanent | Commentaires (0)
Notre manufacture française... doit être respectée ... Je vous demande en grâce d’en parler vertement
... Entendez-vous M. Macron ? Se féliciter en se regardant le nombril n'est pas suffisant . Nos partenaires et concurrents vous suivront-ils ?
« A Pierre-Michel Hennin
Lundi au soir 11è juin 1770 à Ferney
La personne à qui nous avons proposé des grâces 1 en a tant qu’elle ne se soucie pas d’en acheter des autres. D’ailleurs, leur sexe est un empêchement dirimant 2.
Au surplus, le nommé Charles, huissier de je ne sais quels magnifiques et très honorés seigneurs 3, s’est avisé d’assigner le sieur Dufour, directeur de la manufacture royale de Ferney, naturalisé Français, protégé spécialement par le roi, et si bien protégé que le roi vient de lui acheter et de lui payer argent comptant six belles montres de sa façon, pour encourager ladite manufacture royale.
On ne voit pas de quel droit les magnifiques et très honorés seigneurs assignent le très magnifique et honoré Dufour.
Je vous prie réellement, monsieur, et raillerie à part, d’interposer votre autorité pour que dorénavant on s’abstienne de pareilles violations de territoire, sans quoi on serait obligé de traiter fort mal lesdites assignations, juridiquement parlant. Il est temps de mettre ordre à ces impertinences. Notre manufacture française, protégée par le roi, et travaillant pour le roi, doit être respectée.
Je vous demande en grâce d’en parler vertement. Vous savez que la loi est qu’on assigne à Gex ceux qui demeurent dans le territoire de Gex. Nous prévoyons que, si on ne met pas un frein à ces polissonneries, elles reviendront tous les jours ; le temps de nos artistes est précieux. Mme Denis se joint à moi pour vous prier avec la plus vive instance de soutenir les droits des Français. Vous n’avez pas besoin d’être prié.
Mille respects à madame votre sœur et à vous.
V. »
1 Note de Hennin sur le manuscrit : « Le roi de Prusse à qui M. de Voltaire avait proposé d'acheter le tableau des Grâces ». Il répondra le 12 à V* : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1770/Lettre_7919
Voltaire avait proposé au roi de Prusse, dans une lettre du 4 mai 1770, l’achat du tableau de Carle Vanloo, représentant les Trois Grâces, qui appartenait à Hennin. Le roi répondit, le 24 du même mois, qu’il n’achetait plus de tableaux depuis qu’il payait des subsides : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1770/Lettre_7893
2 Allusion claire aux mœurs de Frédéric II sur lesquelles V* s'étend dans ses Mémoires . Voir dirimant : https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/dirimant.php
3 De la république de Genève.
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18/11/2025
Les émigrants arrivent en foule et ne savent où se loger; les paysans, les maçons, les charpentiers, tout le monde augmente du quadruple le prix de toutes choses
... 1770 ou 2025 ? 1770 et 2025 ! L'histoire se répète . Trop !
Voltaire et Marie-Louise Denis
« A Louis-Gaspard Fabry, Chevalier
de l'ordre du roi et
Subdélégué
à Gex
2de Lettre du 11è Juin 1770, à Ferney 1
Nous apprenons dans ce moment que Raffo ayant affiché hier à la porte de l'église, que sa maison était à louer, a ce matin retiré l'affiche, et quand de nouveaux émigrants sont venus pour faire marché avec lui, il leur a répondu qu'elle était louée.
Les émigrants arrivent en foule et ne savent où se loger; les paysans, les maçons, les charpentiers, tout le monde augmente du quadruple le prix de toutes choses. Il est d'une nécessité indispensable de marquer des logements à la craie et d'en fixer le prix.
La maison de Raffo est surtout d'une nécessité absolue. Monsieur Fabry est prié de nous envoyer sur le champ un ordre à la requête de Mme Denis et de Mr de Voltaire pour loger les survenus chez Raffo, moyennant le prix convenable.
Nous avons été obligé de loger cette nuit plusieurs horlogers dans le corps du château, ce qui nous incommode beaucoup.
Nous écrivons dans ce moment à M. le duc de Choiseul; nous lui rendons compte de la nécessité pressante où nous sommes de loger les survenants 2 par billets dans le village de Ferney. Nous sommes sûrs qu'il approuvera tous les bons offices que Monsieur Fabry aura rendu dans cette occasion importante aux émigrants, à la fabrique de montres et à nous.
Nous présentons nos obéissances très humbles à Monsieur Fabry.
Voltaire pour moi et Mme Denis .»
1 Original signé, cachet de cire rouge en la possession de Thérèse Gabrielle Suzanne Emma de Laure , née Fabry, jusqu'à sa mort en 1913 .
2 Sur le manuscrit ce mot remplace habitants qui a, été biffé .
09:43 | Lien permanent | Commentaires (0)
17/11/2025
une excuse trop valable
... Quand ? Comment ? Pourquoi ? Pour qui ?
A vous de jouer !
« A Joseph-Jérôme Le François de La Lande
Le vieillard très malade que M. Le Français a bien voulu honorer de son attention, et des meilleurs vers qu’on ait faits depuis longtemps, lui demande bien pardon de le remercier si tard, et de ne le remercier qu’en prose : soixante-seize ans, des montagnes pleines de neige qui lui font perdre la vue, et des maladies cruelles, sont une excuse trop valable ; agréez-la, monsieur, avec la reconnaissance respectueuse que vous doit le solitaire honoré de vos bontés.
A Ferney ce 11 juin1770.1 »
1 Ed. « Réponse de M. de Voltaire » à une pièce de 28 vers par « M. Le François, ancien officier de cavalerie » commençant et finissant comme suit :
Le juste monument qu'on élève à ta gloire
Dans l'auguste séjour des filles de mémoire,
Cause à tes ennemis le plus mortel chagrin .
….........................................................
Dans l'univers entier ta gloire est répandue,
Et ce n'est qu'avec lui que périra ton nom. »
Le tout paru dans le Mercure de France de juillet 1770, II, 27 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3746630f/f26.item.r=le%20francois
17:48 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les choses nécessaires ne doivent pas être survendues; il faut un prix raisonnable au pain et aux maisons
... Que dire de plus sensé que Voltaire ? Xavier Emmanuelli lui aurait plu .
Voir et écouter cet homme qui s'est soucié de son prochain et l'a aidé : https://www.institutdiderot.fr/les-rendez-vous-de-linstit...

Quand aura-t-elle fin ?
Voltaire et Marie-Louise Denis
« à Louis Gaspard Fabry
11e juin 1770, à Ferney 1
Vraiment, Monsieur, nous avons toujours payé les vingtièmes pour toutes les pièces qui composent le territoire de l'Ermitage. Mais vous sentez bien quelle est la chicane du Genevois Vernet. Vous devez avoir vu par l'aveu du nommé Le Sage qu'il agit pour Vernet même, qu'il veut nous faire payer en détail pour les champs et prés ci-devant appartenants à Pasteur pour lesquels nous avons déjà payé en gros. Il veut faire accroire que ces pièces ne sont point de l'Ermitage acheté des Choudens, mais qu'elles appartenaient à ce Pasteur dont il a acheté pour cent écus le bien qui lui restait et qui vaut quinze mille livres à ce qu'on m'a dit.
Nous vous répétons, Monsieur, que nous avons les actes par lesquels feu Pasteur vendit aux Choudens ce pré et ce champ; et les actes par lesquels Choudens nous vendit le tout pour la somme de six mille livres.
C'est sur ces actes mêmes que le rejet est spécifiés, et c'est malgré ce rejet que Vernet fait agir le nommé Le Sage, et demande avec absurdité le paiement de la taille que nous ne devons point, et le paiement des vingtièmes que nous avons faits régulièrement.
Le ridicule de cette chicane saute aux yeux, et vous voyez assez dans quel esprit Vernet fait cette tentative. En un mot, nous ne devons rien, et nous ne souffrirons pas que des genevois aient l'insolence de nous vexer dans le royaume.
Ayez la bonté de relire les propositions du nommé Le Sage faites au nom de Vernet, et vous en serez indigné.
A l'égard du sieur Raffo vous voyez clairement, Monsieur, qu'il veut abuser de la nécessité où sont les émigrants d'être logés. Les choses nécessaires ne doivent pas être survendues; il faut un prix raisonnable au pain et aux maisons. Je suis très persuadé que vous pouvez marquer pour les émigrants le logement de Raffo, Savoyard, comme on marque des logements pour les troupes. Mr le duc de Choiseul trouve très bon actuellement qu'on loge chez Vernet, et trouvera très bon qu'on loge dans notre village avec le consentement du seigneur. Quand vous aurez donné un ordre aux émigrants de loger chez Raffo, il sera juste d'assigner un loyer proportionné au prix que lui a coûté la maison. S'il veut la vendre on pourra lui donner aussi quelque chose au delà du prix de l'achat 2.
Mais nous pensons que vous êtes en droit d'assigner cette maison aux émigrants en considération de la nécessité pressante, et l'utilité d'une fabrique qui fait déjà des progrès sensibles. Nous nous en remettons à votre prudence et à votre bonne volonté.
Nous avons l'honneur d'être avec bien de la reconnaissance
Monsieur
Vos très humbles et très obéissants serviteur et servante.
Voltaire .
Denis. »
1 Copie littérale par Théophile Dufour, qui a été suivie . L'original était en possession de Gabrielle Suzanne Emma de Laure, née Fabry, jusqu'à sa mort en 1913 . Voir : https://gw.geneanet.org/ftidzrd4w?lang=fr&n=fabry&oc=0&p=gabrielle+therese+suzanne+emma
2 Le ton à l'égard de Raffo s'est radouci deuis la lettre du 6 juin 1770 à Fabry : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2025/11/09/nous-vous-aurons-une-obligation-essentielle-si-vous-voulez-bien-nous-defair.html
17:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
Diligo probos ... J'aime les bons
... Comme l'a été Xavier Emmanuelli : https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2025/11/16/xa...
Combien sommes-nous à dire comme lui "Ça me faisait chier de voir que les gens sont à l’abandon, que ça fait partie du mobilier urbain et que c’est seulement en hiver qu’on s’en rappelle. Ça me dérange..." et puis comme lui passer à l'action ? Trop encore ne savent que s'émouvoir du sort de Sarkozy , délinquant de luxe, lui qui nage dans le superflu et ne risque rien et oublient ceux qui sont sans abri .
Où en sont nos députés à cette heure de discussion du budget et où ils pensent plus à défendre leurs partis et les subventions qui leur reviennent qu'au sort des mal nantis ?

https://www.eyrolles.com/Loisirs/Livre/au-seuil-de-l-eternite-9782226207388/
« A Pierre-Laurent Buirette de Belloy
À Ferney 11 juin [1770]
En vérité, monsieur, vous travaillez pour l’honneur de la France, en prose 1 comme en vers. Plus d’une ancienne maison du royaume vous a de très grandes obligations ; mais les lecteurs ne vous en ont pas moins. Vous avez bien mérité du public en tout genre. Les Duchesne 2 et les Dupuits 3 n’ont jamais mieux discuté que vous en généalogie. Les Coucy vous devront leur illustration par vos recherches 4 comme par votre tragédie.
Il est bien naturel, quand tous les Français vous doivent de la reconnaissance, que le maraud de Quimper-Corentin 5 soit le serpent qui ronge votre lime. Celui qui fait honneur à notre littérature doit avoir pour ennemi celui qui en fait l’opprobre. Il est bon que vous connaissiez l’extrait d’une lettre de son beau-frère 6. Vous verrez qu’un homme qui fait un métier aussi infâme ne peut être qu’un scélérat. J’aurais voulu joindre à cet extrait des anecdotes 7 qui m’ont été envoyées de Paris sur ce misérable ; je tâcherai de vous les faire parvenir bientôt. Oportet cognosci malos 8.
Le triste état de ma santé m’empêche de vous en dire davantage. Diligo probos.9 »
1 Mémoires historiques I, Sur la maison de Coucy ; II. Sur la véritable aventure de la dame de Faïel ; III. Sur Eustache de Saint-Pierre ; 1770, in-8°. Voir : https://books.google.fr/books?id=GRYYAAAAMAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
2 André Duchène qui a publié notamment de savantes généalogies de nombreuses maisons françaises importantes : https://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%C3%A9_Du_Chesne
3 V* pense apparemment à Pierre Dupuy dont les œuvres historiques n’étaient pourtant pas spécifiquement généalogiques .
4 Gabrielle de Vergy ; voir lettre du 6 décembre 1766 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/03/06/je-ferai-donc-ce-qu-on-pretend-que-disait-le-cardinal-de-ber-6369883.html
L'amant de l'héroïne de cette pièce est Raoul de Coucy .
5 Fréron .
6 Voir la lettre du 18 mars à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2025/08/31/m-6560967.html
7 Les Anecdotes sur Fréron ; voir lettre du 20 août 1760 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/11/16/continuez-a-combattre-en-faveur-du-bon-gout-et-du-sens-commu-6277712.html
8 Il faut que les méchants soient connus .
9 J'aime les bons . On a corrigé l’édition Besterman : Digilo probos .
09:53 | Lien permanent | Commentaires (0)
16/11/2025
On me mande qu’il n’aura point de suites funestes
...
« A Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
Eh ! mon Dieu, madame, je n’ai appris que par la poste du 9 de ce mois le triste accident arrivé à M. d’Argental 1. On me mande qu’il n’aura point de suites funestes ; mais on me dit que l’épaule est démise ; cela n’est que trop funeste.
Vous sentez comme je partage vos peines et vos inquiétudes ; nous ne parlons, Mme Denis et moi, que de cette inconcevable aventure. Nous ne savons jamais rien à temps dans nos déserts. Celui qui nous a écrit a supposé que nous étions informés, et n’est entré dans aucun détail. Nous vous demandons en grâce de nous faire écrire, par votre secrétaire, en quel état est M. d’Argental, et comment il s’est pu faire qu’il ait été blessé dans son carrosse. Cela fait frémir. On prétend qu’il y a eu près de trois cents personnes de mortes. Est-ce un échafaud qui est tombé ? Voilà un abominable feu d’artifice.
M. d’Argental est-il au lit ? Son épaule a-t-elle été réellement démise ? Si cela est, il a dû souffrir de grandes douleurs ; tout cela n’a pas dû raffermir votre santé. Nous vous conjurons, madame, de nous faire savoir comment nos deux anges se portent. Nous avons le plus grand besoin d’un mot qui nous rassure.
1 Aux fêtes du 30 mai1770 . Ces fêtes données en l'honneur du mariage du dauphin, suivies par le public avec une passion excessive , ont, selon la Gazette de France du 4 juin 1770 fait 132 tués et 26 blessés graves . Le même numéro mentionne que d'Argental a eu l'épaule démise .
Voir : https://www.lhistoire.fr/le-d%C3%A9sastre-de-la-rue-royale
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