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07/07/2025

Il faudra craindre les oppositions de ceux qui sont intéressés à rendre éternelle la tyrannie dont on se plaint

... Serais-je qualifié de mal pensant, médisant infect si je voyais les marchands d'armes - tous les marchands d'armes, de tous pays - comme des profiteurs intéressés à ce que les conflits n'aient point de fin , que les dictateurs règnent éternellement ? J'aimerais bien me tromper à ce sujet . But business is business every where, all the  time ! L'ONU n'est plus qu'une coquille creuse qui constate, dénonce et ne peut rien : c'est tout ; par exemple récent :  https://www.slate.fr/monde/genocide-gaza-onu-rapport-mult...

 

 

« A Charles-Frédéric-Gabriel Christin fils

Avocat en Parlement

à Saint-Claude

Le solitaire mande au petit philosophe, son ami, que l’édit pour la fondation de Versoix 1 va paraître ; alors le moment pourra être favorable pour présenter la requête 2. Je crois qu’il faudra en envoyer des copies collationnées à tous les ministres. Une affaire si délicate ne peut être jugée que dans le conseil du roi. Il faudra craindre les oppositions de ceux qui sont intéressés à rendre éternelle la tyrannie dont on se plaint. Vos ennemis sont sans doute instruits de la démarche des communautés. Il serait bon de répandre le bruit qu’on a renoncé à l’entreprise ; on frapperait le coup plus sûrement. Je désire autant que vous le succès de cette affaire.

Pour la babiole des Choudens, j’ai mandé à Balleidier 3 de faire tout ce qu’il voudrait ; je serai mort avant que cette affaire soit entièrement jugée.

J’attendrai avec bien de l’impatience que vous veniez ici faire vos pâques.

Je vous embrasse bien tendrement, mon cher ami. 

30è janvier 1770.»

1 La chute de Choiseul empêcha qu'un édit officiel ne fut rendu ; voir pourtant la Gazette de France du 5 novembre 1770, et Caussy N.

2 Pour les serfs du mont Jura, contre les privilèges des communautés religieuses du Jura, la requête Au Roi en son Conseil, rédigée par Christin, revue par V*, publiée à Genève, 1770 : https://artflsrv03.uchicago.edu/philologic4/toutvoltaire/navigate/894/1/

3 Procureur à Gex ; pour l'affaire Choudens, voir : https://journals.openedition.org/rde/6070

06/07/2025

vous savez que les mots et les idées changent souvent chez les Français, et vous vous en apercevez tous les jours

... Pas mieux !

 

« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand

À Ferney 28 janvier 1770 1

Qui  moi, madame ! que je n’aie point répondu à une de vos lettres ; que je n’aie pas obéi aux ordres de celle qui m’honore depuis si longtemps de son amitié ! de celle pour qui je travaille jour et nuit, malgré tous mes maux ! Vous sentez bien que je ne suis pas capable d’une pareille lâcheté. Tout ours que je suis, soyez persuadée que je suis un très honnête ours.

Je n’ai point du tout entendu parler de M. Craford 2. Si j’avais su qu’il fût à Paris, je vous aurais suppliée très instamment de me protéger un peu auprès de lui, et de faire valoir les sentiments d’estime et de reconnaissance que je lui dois.

Vous m’annoncez, madame, que M. Robertson veut bien m’envoyer sa belle histoire de Charles-Quint, qui a un très grand succès dans toute l’Europe, et que vous aurez la bonté de me la faire parvenir. Je l’attends avec la plus grande impatience ; je vous supplie d’ordonner qu’on la fasse partir par les guimbardes 3 de Lyon. C’était autrefois un bien vilain mot que celui de guimbarde ; mais vous savez que les mots et les idées changent souvent chez les Français, et vous vous en apercevez tous les jours.

Vous avez la bonté, madame, de m’annoncer une nouvelle cent fois plus agréable pour moi que tous les ouvrages de Robertson. Vous me dites que votre grand-papa, le mari de votre grand-maman, se porte mieux que jamais ; j’étais inquiet de sa santé, vous savez que je l’aime comme monsieur l’archevêque de Cambrai aimait Dieu, pour lui-même. Votre grand-maman est adorable. Je m’imagine l’entendre parler quand elle écrit . Elle me mande qu’elle est fort prudente . De là je juge qu’elle n’a montré qu’à vous les petits versiculets de M. Guillemet 4.

Si je retrouve un peu de santé dans le triste état où je suis, je vais me remettre à travailler pour vous. Je ne vous écrirai point de lettres inutiles, mais je tâche de faire des choses utiles 5 qui puissent vous amuser. C’est à vous que je veux plaire ; vous êtes mon public. Je voudrais pouvoir vous désennuyer quelques quarts d’heure, quand vous ne dormez pas, quand vous ne courez pas, quand vous n’êtes pas livrée au monde. Vous faites très bien de chercher la dissipation, elle vous est nécessaire comme à moi la retraite.

Adieu, madame ; jouissez de la vie autant qu’il est possible, et soyez bien sûre que je suis à vous, que je vous appartiens jusqu’au dernier moment de la mienne . 

V.»

1 Original, initiale, date et corrections autographes ; minute partiellement autographe ; éd. Kehl . Les deux manuscrits sont d'une main inconnue jusque là sauf la date du second qui est de Wagnière .

2 Ou Grawford .

3 Les voitures publiques servant ua transport des marchandises . La suite s'explique par le fait que le mot s'était employé pour désigne injurieusement des femmes de mauvaise vie .

on m’assure que ce qui pourrait trop alarmer est très sagement déguisé

... Paroles de préfet prudent face aux déclarations des organisateurs de la manifestation contre l'autoroute A69 , méfiance justifiée quand on  entend certains qui prônent la violence et la destruction : https:www.ladepeche.fr/2025/07/05/autoroute-a69-sil-faut-bruler-des-machines-on-le-fera-12808027.php

J'aimerais bien voir leur tête quand des manifestants viendront brûler leurs bagnoles , seront-ils toujours aussi stoïques ? Crétinos !!

 

 

« A Nicolas-Claude Thieriot

26è janvier 1770

Mon ancien et oublieux ami, je crois que vous vous êtes coupé la gorge et la bourse en laissant répandre un faux bruit que j’ai quelque part à cette pièce que vous m’avez envoyée 1, laquelle est, dites-vous, de l’abbé de Châteauneuf et de Raymond le Grec. Vous sentez bien que si on se borne à s’ennuyer aux ouvrages des morts, on se plaît fort à siffler ceux qui sont attribués aux vivants , mais il y a remède à tout. Je sais que vous avez une copie très informe de cette comédie. Je sais, à n’en pouvoir douter, qu’il y en a une beaucoup plus ample et beaucoup plus correcte entre les mains de M. d’Argental. C’est sur celle-là qu’il faudrait vous régler. La copie que vous m’avez envoyée n’aurait certainement pas passé à la police. Plus le monde est devenu philosophe, plus cette police est délicate . Les mots de dévotion seraient d’autant plus mal reçus que la dévotion est plus méprisée ; mais on m’assure que ce qui pourrait trop alarmer est très sagement déguisé dans l’exemplaire de M. d’Argental. Informez-vous-en : faites comme nous pourrez.

Si vous voyez M. Diderot, faites mes compliments à ce digne soutien de la philosophie, à cet immortel vainqueur du fanatisme. »

1 Le Dépositaire.

Il faut comprendre que je vous ai envoyée .

05/07/2025

Sæpe premente deo, fert deus alter opem / Souvent lorsqu’un dieu vous opprime , un autre dieu vous porte secours .

...Actuellement peut-on citer ces noms de dieux [sic] quand on est Ukrainien : Poutine vs Trump ?

 

« A monsieur

Monsieur le Président de

Ruffey

à Dijon

Germain-Gilles-Richard de Ruffey

26è janvier 1770 à Ferney

Sæpe premente deo, fert deus alter opem.1

Votre lettre, mon cher président, a servi d’antidote à celle que j’ai reçue du président de Brosses. Il persécute 2 toujours ma pauvre vieillesse, malgré tous les pardons que je lui demande de n’être pas encore mort. Il me menace même d’un petit procès dans l’autre monde. Mais comme il ne sera pas président en ce pays-là, j’espère bien lui montrer les dents, s’il m’en reste.

On m’a envoyé un petit livret d’un de vos académiciens sur les moulins économiques 3, qui m’a paru très bien fait, et j’espère que le nouveau contrôleur général 4 fera venir bientôt l’eau au moulin.

J’ai reçu aussi une introduction à l’histoire de Bourgogne, par M. Mille 5. L’auteur me paraît très instruit ; j’espère beaucoup de son ouvrage, et je m’y intéresse d’autant plus que vous m’avez fait bourguignon.

Est-ce que M. le président de La Marche n’a point d’enfant mâle 6, puisqu’il renonce à la terre de la Marche, qui est la terre de son nom ?

Quoi qu’il en soit, je me tiendrai toujours très bien entre les mains de M. de Neuilly 7 ou de monsieur son neveu. Cette famille est celle de l’honneur et de la probité. On n’en peut pas dire autant de tout le monde, mais bien de vous, mon cher président, qui avez donné tant de preuves de votre générosité.

On ne peut vous être attaché plus tendrement que je le suis, et avec des sentiments plus vrais et plus respectueux.

V. »

 

1Ovide, Tristes, I, II, 4 : Souvent lorsqu’un dieu vous opprime , un autre dieu vous porte secours .

2 Cette persécution consistait à informer Voltaire qu’on avait instruit le président de nouveaux abus de jouissance dans le bois de Tournay. (Th. F.)

3 Mémoire sur les avantages de la mouture économique et du commerce des farines en détail, par Edme Béguillet. — Dijon. 1769, in-8°.

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Edme_Beguillet

et : https://data.bnf.fr/fr/see_all_activities/15563279/page1

4 L’abbé Terray, nommé le 23 décembre 1769.

5 Il ne peut s'agir ici que d'une préface ou d'un spécimen de l'ouvrage puisque dans une lettre à Mille du 13 septembre 1771 V* vient seulement de recevoir le livre ; voir lettre : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1771/Lettre_8366

L'Abrégé chronologique de l’Histoire ecclésiastique, civile et littéraire de Bourgogne, par Mille, parut en 1772 et 1773, trois volumes in-8°. Il s’arrête à l’époque carolingienne. On ignore pourquoi la suite n’a point paru. — Antoine-Étienne Mille, écuyer, né a Dijon le 1er décembre 1735, mort à Paris le 31 janvier 1787, était avocat au parlement et au grand conseil. Son ouvrage, fort hostile aux moines, fut vivement attaqué par le continuateur de dom Plancher (dom Merle, bénédictin bourguignon) et par dom Rousseau et dom Jourdain, bénédictins de Saint-Germain des Prés. Voltaire l’en félicita par sa lettre du 13 septembre 1771 .

Voir : https://books.google.fr/books?id=B-j4s5IQwVIC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

7 Jacques-Philippe Fyot de Neuilly, frère de l'ami de collège de V* , frère de l’ancien premier président de La Marche, ancien ambassadeur à Gênes, puis premier président démissionnaire du parlement de Besançon, mort en 1774. Parmi les lettres du président de Brosses sur l’Italie, un grand nombre lui sont adressées.

04/07/2025

l’aventure de cette pauvre novice qui, en se mettant une corde au cou, apprit aux pères et aux mères à ne jamais forcer leurs filles à prendre un malheureux voile

... Entendez-vous intégristes musulmans et vous tous qui contraignez femmes et enfants à rester sous la coupe des hommes soit disant pour honorer un dieu et un prophète des contes de ma mère l'oye . Que dire aussi des sikhs qui cachent sous leurs turbans une tignasse démesurée qu'ils défendent les armes à la main, en contravention avec les saints gourous (coucou). Et tant d'autres simagrées religieuses asservissantes .

Pour mémoire , honneur à toutes ces femmes qui proclament leur liberté au prix de leurs vies : https://www.bbc.com/afrique/monde-62981497

 

 

 

« A Jean-François de La Harpe etc.

rue du Battoir

à Paris 1

26è janvier 1770 2

Dieu et les hommes 3 vous en sauront gré, mon cher confrère, d’avoir mis en drame l’aventure de cette pauvre novice qui, en se mettant une corde au cou, apprit aux pères et aux mères à ne jamais forcer leurs filles à prendre un malheureux voile 4. Cela est digne de l’auteur de la Réponse à ce fou mélancolique de Rancé 5.

Savez-vous bien que cette réponse est un des meilleurs ouvrages que vous ayez jamais faits ? On l’imprime actuellement dans un recueil qu’on fait à Lausanne 6. Savez-vous bien ce que vous devriez faire, si vous avez quelque amitié pour moi ? me faire envoyer votre école des pères et mères 7, acte par acte . Nous la lirions, Mme Denis et moi. Nous méritons tous deux de vous lire.

Je suis bien étonné que Panckoucke ne vous ait rien dit au sujet de la partie littéraire du nouveau Dictionnaire encyclopédique : mais il était engagé avec M. Marmontel, qui fera tout ce qui regarde la littérature. Peut-être donnera-t-on dans quelque temps un petit supplément 8; mais vous savez que les libraires mes voisins ne sont pas gens à encourager la jeunesse, comme on fait à Paris. Je craindrais fort que vous ne perdissiez votre temps ; et je vous conseille de l’employer à des choses qui vous soient plus utiles. Je voudrais que chacune de vos lignes vous fût payée comme aux Robertsons 9.

J’ai lu un petit ouvrage de M. de Falbaire 10 où il fait voir que, depuis les premiers commis des finances jusqu’au portier de la Comédie, tout le monde est bien payé, hors les auteurs.

Mais quand aurons-nous le Suétone 11 ? Quand nous montrerez-vous comment il faut traduire, et comment il faut commenter ?

Je viens de recevoir le Mercure. Je vous suis bien obligé d’avoir séparé ma cause de celle de mon prédécesseur Garnier 12.

Seriez-vous assez aimable pour vous charger d'une petite négociation auprès de M. de Lacombe ? Les personnes qui ont entrepris un Supplément à l'Encyclopédie voudraient au mot « critique » rendre à Catherin Fréron toute la justice qu'ils lui doivent ? J'avais demandé à Lacombe le recueil des mal-semaines de maître Aliboron 13. Il pouvait m’envoyer ce fatras par les charrettes qui doivent être la voiture de l'auteur ; je n'ai point eu de réponse et cela n'est pas bien . Il faut plus d'attention pour Fréron que notre ami n'en a .

Je vous embrasse de tout mon cœur. 

V.»

1 D'une autre main l'adresse est complétée : « au coin de la rue Hautefeuille, faubourg Saint-Germain, chez M. l'avocat Terrasson Gazette de France ».

2 Original, cachet portant « 4 L vée ; E sur PD ; H( ?) sur I dans un cercle (2 fois ) . Ed. Kehl qui omet plusieurs passages, le cinquième et le septième paragraphe en entier notamment .

3 Allusion évidente à l'ouvrage récemment publié dont Charles Bonnet annonce la parution à Théodore Tronchin dans une lettre du 14 octobre 1769 : https://obtic.huma-num.fr/elicom/voltaire/doc.jsp?id=1769-10-14_49731

Sous le titre de Dieu et les Hommes, Voltaire avait publié depuis peu un opuscule ; voir : https://www.google.com/url?sa=t&source=web&rct=j&opi=89978449&url=https://excerpts.numilog.com/books/9782072790164.pdf&ved=2ahUKEwig75aJjKGOAxXFSKQEHZ_eFawQFnoECEwQAQ&usg=AOvVaw3mDcA6HpWqS62gaL8iTjKM

4 C’est le sujet du drame de La Harpe intitulé Mélanie : https://www.theatre-classique.fr/pages/Aprogrammes/edition.php?t=../documents/LAHARPE_MELANIE.xml

Publié à Amsterdam en 1770 mais représenté en public seulement en 1791 à Caen .

6 La Réponse d’un solitaire de la Trappe à la lettre de l’abbé de Rancé est imprimée dans le tome II des Choses utiles et agréables, avec une préface de Voltaire ; voir lettre du 12 mai 1769 à Voisenon : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/11/19/un-vieux-solitaire-du-diocese-d-annecy-lui-demande-sa-benedi-6523682.html

Voir : https://www.monsieurdevoltaire.com/2015/07/satire-preface-de-m-abauzit.html

et

https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome26.djvu/577

7 Mélanie .

8 Les Questions sur l’Encyclopédie ; voir lettre du 12 janvier 1770 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2025/06/20/elle-s-en-ira-en-fumee-comme-toutes-les-affaires-qui-trainen-6552212.html

9 Auteur de l’Histoire de Charles-Quint, William Robertson, à qui est adressée la lettre du 26 février 1770 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1770/Lettre_7800

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1161024.texteImage

Son History of Charles V, 1769, lui a été payée 4500 livres . V* l'a appris par l'Avis aux gens de lettres de Fenouillot de Falbaire ( voir lettre du 12 janvier 1770 à d'Alembert ) ; lequel ajoutait qu'un libraire français se serait considéré comme généreux s'il avait donné pour le même ouvrage le huitième de ce prix .

10 L’Avis aux gens de lettres  contre les prétentions des libraires  ; voir note de la lettre du 12 janvier à d'Alembert .

12 ↑ Dans le tome II de janvier 1770 du Mercure, La Harpe avait donné un article sur la nouvelle édition des Œuvres de Sébastien Garnier ou La Henriade et la Loyssée de Sébastien Garnier, 1770. in-8° ( voir : https://books.google.fr/books?id=O-E5AAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false). L’article se terminait ainsi : « S. Garnier serait probablement fort étonné de se voir réimprimé ; c’est un honneur qu’il doit à la Henriade de M. de Voltaire, qui, peut-être, n’a jamais lu la sienne, ou ignorait même qu’elle existât. » Voir lettre du 1er janvier 1764 à Guy Duchesne : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2019/01/07/il-faut-du-temps-pour-que-les-reputations-murissent-6118853.html

Sébastien Garnier, auteur de Les Huit derniers livres de La Henriade, contenans les faicts merveilleux de Henry, roy de France et de Navarre, 1593 . Une nouvelle édition vient d'être publiée dans un volume intitulé La Henriade et la Loyssée, 1770 , et dans le compte rendu de cet ouvrage paru dans le Mercure, La Harpe par une flatterie destinée à compenser ses indélicatesses envers V* a avancé que Garnier doit tout l'honneur de cette réédition à V* .

13 L'Année littéraire ; V* parlait déjà de malsemaines à propos des Observations sur les écrits modernes de Desfontaines en 1735 . Le mot n'est pas enregistré dans les dictionnaires .

Voir : https://dictionnaire-journaux.gazettes18e.fr/journal/1092....

03/07/2025

la raison mariée à l’amour-propre : leurs enfants sont la vertu et le bonheur...On prétend encore qu’ils ne sont pas entièrement sains, et qu’ils ont toujours quelques petites maladies ; mais ils s’en tirent avec du régime

... Vertu et bonheur ! enfants de parents divorcés, bien malades en vérité, nécessitant un remède de cheval . 

 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse

[vers le 25 janvier 1770]

Mon cher Lorrain 1, je ne sais pas comment vous vous appelez aujourd’hui, mais au bout de dix-huit ans j’ai reconnu votre écriture 2. Je vois que vous avez travaillé sous un grand maître. Vous êtes donc de l’Académie de Berlin ! Assurément vous en faites l’ornement et l’instruction. Vous me paraissez un grand philosophe dans le séjour des revues, des canons, et des baïonnettes. Comment avez-vous pu allier des objets si contraires ? Il n’y a point de cour en Europe où l’on associe ces deux ennemis. Vous me direz peut-être que Marc-Aurèle et Julien avaient trouvé ce secret, qu’il a été perdu jusqu’à nos jours, et que vous viviez auprès d’un maître qui l’a ressuscité. Cela est vrai, mon cher Lorrain ; mais ce maître ne donne pas le génie.

Il faut que vous en ayez beaucoup pour que vous ayez enfin montré par votre écrit la vraie manière d’être vertueux sans être un sot et sans être un enthousiaste.

Vous avez raison, vous touchez au but. C’est l’amour-propre bien dirigé qui fait les hommes de bon sens véritablement vertueux. Il ne s’agit plus que d’avoir du bon sens ; et tout le monde en a sans doute assez pour vous comprendre, puisque votre écrit est, comme tous les bons ouvrages, à la portée de tout le monde.

Oui, l’amour-propre est le vent qui enfle les voiles, et qui conduit le vaisseau dans le port. Si le vent est trop violent, il nous submerge ; si l’amour-propre est désordonné, il devient frénésie. Or il ne peut être frénétique avec du bon sens. Voilà donc la raison mariée à l’amour-propre : leurs enfants sont la vertu et le bonheur. Il est vrai que la raison a fait bien des fausses couches avant de mettre ces deux enfants au monde. On prétend encore qu’ils ne sont pas entièrement sains, et qu’ils ont toujours quelques petites maladies ; mais ils s’en tirent avec du régime.

Je vous admire, mon cher Lorrain, quand je lis ces paroles 3 : « Qu’y a-t-il de plus beau et de plus admirable que de tirer, d’un principe même qui peut mener au vice 4, la source du bien et de la félicité publique ? »

On dit que vous faites aussi aux Welches l’honneur d’écrire en vers dans leur langue ; je voudrais bien en voir quelques-uns. Expliquez-moi comment vous êtes parvenu à être poète, philosophe, orateur, historien, et musicien. On dit qu’il y a dans votre pays un génie qui apparaît les jeudis à Berlin, et que, dès qu’il est entré dans une certaine salle, on entend une symphonie 5 excellente, dont il a composé les plus beaux airs. Le reste de la semaine il se retire dans un château bâti par un négroman 6 et de là il envoie des influences sur la terre. Je crois l’avoir aperçu, il y a vingt ans ; il me semble qu’il avait des ailes, car il passait en un clin d’œil d’un empire à un autre. Je crois même qu’il me fit tomber par terre d’un coup d’aile. Si vous le voyez ou sur un laurier ou sur des roses (car c’est là qu’il habite), mettez-moi à ses pieds, supposé qu’il en ait, car il ne doit pas être fait comme les hommes. Dites-lui que je ne suis pas rancunier avec les génies. Assurez-le que mon plus grand regret à ma mort sera de n’avoir pas vécu à l’ombre de ses ailes, et que j’ose chérir son universalité avec l’admiration la plus respectueuse. 7»

1 Minute autographe ; éd. Kehl .

Cette lettre est une réponse à l’envoi d’une lettre de Frédéric du 4 janvier 1770 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1770/Lettre_7742

Il aura réponse de celui-ci le 17 février 1770 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1770/Lettre_7786

2 Dans l'ouvrage manuscrit du roi de Prusse, sur les principes de la morale. Voltaire l’adresse à son ancien copiste Villaume, qui était au service de Frédéric depuis 1755.

Note de Wagnière : « Ce Lorrain était copiste de M. de Voltaire, il l'est à préent du roi de Prusse . Cette lettre est au roi de Prusse quoiqu’elle semble l'être à Lorrain ». Effectivement le « mémoire destiné pour l'Académie » dont il est question dans la lettre de Frédéric et dont à défaut de la lettre elle-même nous possédons l'original intitulé Discours, prononcé à l’assemblée ordinaire de l'Académie royale des sciences et belles-lettres de Prusse le jeudi 11 janvier 1770 (Berlin 1770 dans la version imprimée) est de la main de Samuel Vuillaume ; voir sur ce dernier la lettre du 11 juin 1755 à Darget : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/02/05/ce-poeme-et-la-vie-de-l-auteur-et-tout-au-monde-sont-bien-pe.html

3 C’est un passage de l’Essai sur l’amour-propre envisagé comme principe de morale, opuscule de Frédéric, publié en 1770, in-8°, et qui fait partie de ses Œuvres (primitives) : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Fr%C3%A9d%C3%A9ric_II_de_Prusse_-_%C5%92uvres_primitives,_tome_4.djvu/469

4 Correction du texte Besterman qui met vue [sic] pour au vice .

5 Au sens large du terme, usuel à l'époque classique : concert d’instruments

6 Forme ancienne du mot correspondant à la prononciation .

7 Voir lettre du 4 janvier 1770 de Frédéric : https://francs-bourgeois/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1770/Lettre_7742

On dit que vous avez une très florissante marine

... A tel point, cher Vladimir, qu'on trouve en Manche plus facilement des sous-marins , que des sardines : https://www.youtube.com/watch?v=AuZ_T7tlZZo&ab_channe...

On vous garde à l'oeil .

 

 

« A César-Gabriel de Choiseul, duc de Praslin

À Ferney, 24 janvier 1770 1

Monseigneur,

Pardon ; je tremble de fatiguer vos bontés. Voici le seul papier justificatif concernant les diamants volés par messieurs de Tunis 2. Si jamais vous daignez prendre la peine de battre ces barbares, je vous supplierai alors de faire comprendre les diamants dans les articles de paix que vous daignerez leur accorder.

J’ai toujours été émerveillé que les princes chrétiens, qui se font quelquefois la guerre de gaieté de cœur, ne s’accordassent pas à jeter Tunis et Alger dans leurs ports 3. Voilà de plaisants successeurs des Carthaginois que ces voleurs de Tunis.

On dit que vous avez une très florissante marine. Permettez à un de vos vieux courtisans de s’intéresser passionnément à votre gloire.

J’ai l’honneur d'être avec un profond respect,

monseigneur,

Votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire . »

1 Original signé ; éd. Cayrol . Le manuscrit porte les mentions de service suivantes : « M. Le Guay » ; « Levant et Barbarie : Nouvelle » ; « Éclaircissements sur la réclamation des diamants confiés au cap[mitaine] Cely » ; « Envoyer à M. de Saizieu le certificat en original et en garder au B[ure]au une copie, lui envoyer aussi le pr[emie]r mémoire joint à la p[remièr]e lettre de M. de Voltaire du 8 [dec]embre 1769 . Autre endos : « f[ait] » et « f[ait] Le 5 févr[ier] 1770 et écrit à M. de Saizieu ».

2 Voyez la lettre à d’Argental du 5 janvier 1770 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2025/06/15/on-se-fait-une-conscience-d-affliger-trop-un-pauvre-homme-qu-6551627.html

Cette petite affaire jette quelque lumière sur les opérations commerciales de V* en Méditerranée . Des diamants étaient importés des Indes par la voie de l'empire ottoman ou par celle du Cap.

3 Le vœu de V* ne fut exécuté qu'en 1830.