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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

S'il avait des yeux, il pleurerait nos désastres qui se multiplient cruellement tous les jours . Il demande si l'on se r

... La réponse est "oui", malgré tout . L'homme n'est pas fait pour rester dans le malheur . Il est de belles choses encore ...

 https://www.youtube.com/watch?v=fNU-XAZjhzA

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Offrons-leur plus que de l'espoir !

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

Ferney 5 août 1761 1

Frère V. a bien mal aux yeux, mais il les a perdus avec Corneille, et cela console ; il a été obligé de travailler sur une petite édition en pieds de mouche ; heureusement l'en voilà quitte . Il a commenté Médée, Le Cid, Cinna, Pompée, Horace, Polyeucte, Rodogune, Héraclius ; il reste peu de choses à faire, car ni les comédies, ni les Agésilas, ni les Attila, ni les Surena etc. ne méritent pas l'honneur du commentaire .

S'il avait des yeux, il pleurerait nos désastres qui se multiplient cruellement tous les jours . Il demande si l'on se réjouit encore à Paris ; si on ose aller au spectacle . Il croit ce temps-ci bien peu favorable pour Le Droit du seigneur, ou pour L’Écueil du sage . Il a écrit au jeune auteur, lequel est tout abasourdi de la prise de Pondicheri qui lui coûte juste le quart de son bien . Il n'a pas envie de rire . Je n'ai pu tirer de lui que les petites bagatelles qu'il m'envoie et que je fais tenir aux frères . Je lui ai fait part de la juste douleur de la demoiselle Dangeville qui ne joue pas le premier rôle ; il y a paru très sensible, mais il ne peut qu'y faire . Mlle Dangeville embellit tout ce qui lui passe par les mains . En un mot, voilà tout ce que je peux tirer de mon petit Dijonnais ; il est fâché, il dit qu'il veut faire une tragédie, le premier acte sera Rosbac, le dernier Pondicheri, et les vessies de cochon pour intermède . Celui qui écrit en rit , parce qu'il est né à Lausanne, mais moi qui suis Français j'en pousse de gros soupirs .

J'avais demandé à frère Thieriot les Recherches sur le théâtre 2 par un Beauchamp, point de nouvelles ? Frère Thieriot est paresseux d'écrire .

Je reviens à Mlle Dangeville . Pour la consoler, faisons-lui dire à la fin de la scène du premier acte quelques vers de plus ; mettons la chose ainsi . A folio verso 3.

Votre très humble frère vous salue toujours en Protagoras, en Lucrèce, en Épicure, en Epictète, en Marc Antonin, et s'unit avec vous dans l'horreur que les petits faquins d'Omer doivent inspirer ; que les misérables Français considèrent qu'il n'y avait aucun janséniste, ni moliniste, dans les flottes anglaises qui nous ont battus dans les quatre parties du monde ; que les polissons de Paris sachent que M. Pitt n'aurait jamais arrêté l'impression de l'Encyclopédie ; qu'ils sachent que notre nation devient de jour en jour l'opprobre du genre humain . Adieu mes chers frères .

V.

J'ai reçu la Poétique d'Aristote . Je la renverrai incessamment . Avec ce livre-là il est bien aisé de faire une tragédie détestable . »

1 Une mention sur l'original « R. le 17 ». Voir lettre du 17 juillet 1761 ; http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/06/22/je-ne-sais-plus-comment-la-nation-est-faite-5817952.html

2 Recherches sur les théâtres de France , depuis l'année onze cent soixa nte et un jusqu'à présent, de Pierre-François Godard de Beauchamps, 1735 ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre-Fran%C3%A7ois_Godard_de_Beauchamps

et : http://data.bnf.fr/11890769/pierre-francois_godard_de_beauchamps/

et : http://visualiseur.bnf.fr/CadresFenetre?O=NUMM-72185&M=notice

3 [Voir] au verso .

 

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07/07/2016 | Lien permanent

il faut vivre et mourir dans l’amour de la vérité

... No comment . Même si ce n'est pas toujours facile .

-- C'est vrai ! : https://www.youtube.com/watch?v=LdcASSiZO1w

-- Oui c'est bien vrai ça ! dit la Mère Denis ( mais pas Marie-Louise ) : https://www.youtube.com/watch?v=s4g2CVdGjj0

-- Oui c'est bien vrai de vrai ! : https://www.youtube.com/watch?v=pCnMTbLotls

... Paroles de femmes : optimistes .

-- Et puis voilà le "C'est pas vrai ! " d'un homme , réaliste, pessimiste : https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&q=c%...

... Vivent les femmes !

Chrysanthèmes : diversité de formes et de couleurs

Chrysanthèmes, symboles de la vérité constante ! Funny , is n't it ?

 

 

 

« A Charles -Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

4 septembre 1765.

Premièrement, mes divins anges sauront que c’est la chose du monde la plus aisée d’envoyer au suppliant un paquet de vers contre-signé.

Secundo, que je renverrai sur-le-champ en droiture, à M. le duc de Praslin, la pièce entière dûment corrigée, avec la préface honnête et modeste du petit ex-jésuite , et si mes anges sont contents, ils remettront le tout à Lekain, qui saisira le temps le plus favorable pour imprimer l’ouvrage à son profit, supposé qu’il puisse y avoir du profit, et que le public ne soit pas lassé de tant d’œuvres dramatiques.

Troisièmement, mes anges me permettront-ils de leur présenter la pancarte ci-jointe ?1 M. Fabry, dont il est question, a rendu en effet des services, en réglant les limites de la France, de la Suisse, et de Genève. Si mes anges ont la bonté de m’assurer des intentions favorables de M. le duc de Praslin, je serai bien content, et je ferai grand plaisir à M. Fabry.

Notre résident se porte mieux, mais M. Tronchin ne croit pas qu’il en réchappe . Il peut se tromper, tout grand médecin qu’il est. Vingt personnes demandent déjà cette place.

Je crois que M. le duc de Praslin est instruit du mérite de M. Astier, qui est employé depuis longtemps 2. Je ne le connais pas, mais je sais qu’il est tout à fait pour la bonne cause, et extrêmement circonspect.

Je suis extrêmement content de M. Damilaville ; c’est un homme d’une probité courageuse.

Il faut vous dire un petit mot de la vertu de Jean-Jacques Rousseau, qui est dans un autre goût.

Il vient d’être avéré que, pour être admis à la communion des fidèles dans le village où il aboie, il a promis, par un écrit signé de sa main, qu’il écrirait contre le livre abominable d’Helvétius . Son curé, avec lequel il s’est brouillé, comme avec le reste du monde, a été obligé de faire imprimer cette belle promesse . Il est bien triste pour la philosophie que ce misérable en ait pris le manteau pendant quelque temps , mais il ne faut pas que Platon cesse de philosopher parce que le chien de Diogène veut mordre ; il faut vivre et mourir dans l’amour de la vérité.

Je baise plus que jamais le bout des ailes de mes anges. »

1  Lettre non connue destinée sans doute à Choiseul, dans laquelle V* demande quelque distinction pour Fabry . Le 23 décembre 1768, Du Pan écrit à Freudenreich que Fabry « était allé à Paris recevoir le cordon de Saint-Michel et les ordres de M. de Choiseul. »

2 En Hollande .

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04/01/2021 | Lien permanent

J'ai payé actuellement très régulièrement quatre-vingts ou cent personnes qui travaillent pour moi . Cela continuera tan

... Avec ou sans Dieu, et ses acolytes les banquiers qui eux ne travaillent pas beaucoup pour nous, mais grâce à nous .

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« A Jean-Robert Tronchin

à Lyon

Onze avril [1759]

J'ai reçu mon cher correspondant , l'argent que vous avez bien voulu m'envoyer par M. Cathala .

J'ai reçu aussi une lettre de Mgr l'électeur palatin qui met fin d'un mot à toutes ces misères de Francfort . Je demandais simplement qu'on me fit tenir 6500 livres franc et quitte tous les six mois . Les banquiers de Francfort et d'autres me voulaient faire payer sur ces 6500 livres plus de deux cents livres de frais , ce qui était très injuste . Ni Son Altesse électorale ni moi ne savions qu'il me fallait 6555 livres 1 sur le pied des florins d'empire . C’est une chose que vous m'apprenez . Il est toujours bon de vous consulter et je vous remercie des éclaircissements que vous me donnez . J'ai toujours honte de vous faire perdre tant de temps .

J'ai donné sur-le-champ avis au baron de Beckers de la générosité avec laquelle l’Électeur palatin en a usé et je remercie même M. de Beckers qui n'y a contribué en rien 2. Ainsi vous avez très bien fait de ne lui point envoyer ma lettre qui n'est plus de saison . Voulez-vous dorénavant vous charger de recevoir tous les six mois les 5123 florins d'empire qui me reviennent ? en les tirant sur Francfort ? J'en écrirai à M. de Beckers .

J'ai payé actuellement très régulièrement quatre-vingts ou cent personnes qui travaillent pour moi . Cela continuera tant qu’il plaira à Dieu, et à vous .

Le roi de Prusse m'écrit tous les ordinaires mais il ne me fera jamais quitter mes terres pour lui . Qu'il prenne garde que cette année on ne prenne les siennes .

Est-il possible que les jésuites demeurent impunis !

Adieu .

V. »

1 V* a bien hésité avant de se décider pour ce chiffre, ce dont témoigne l'écriture sur le manuscrit .

 

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04/06/2014 | Lien permanent

Il faut avouer que Lausanne donne d'assez bons exemples à Genève.

 ... Là, je viens de me faire bien des amis (?) vaudois et du coup autant d'adversaires, les Genevois réputés grandes gueules aux yeux du reste de la Suisse ayant un certain complexe de supériorité en particulier vis-à-vis de leur voisin romand, le canton de Vaud . Mais tant pis, ce n'est pas eux qui me font vivre !

 

 

 

« A M. Pierre PICTET,

Professeur en droit.

À sa maison de Lolotte sur Saint Jean à Genève

Monrion, 27 mars [1757].

Vous voilà donc, mon très-cher voisin, dans votre charmante retraite. L'appellerons-nous Carite, Favorite, Mon-Plaisir, ou Plaisance? Il faudra bien la baptiser, et ne pas souffrir qu'un saint 1 donne son nom à notre petit canton . Pour moi, je la nommerai Lolotte. Le nom de votre fille me plaît plus que tous les noms du calendrier.
Vous avez vu à Lyon un plus beau théâtre que le nôtre, mais certainement nous avons de meilleurs acteurs à Lausanne qu'à Lyon. Je ne m'attendais pas à la perfection avec laquelle plusieurs pièces ont été jouées dans notre pays romance. Quand je parle de perfection, je parle de l'art de faire verser des larmes à des yeux qui pleurent difficilement. Une tragédie nouvelle 2 jouée à Lausanne, et peut-être mieux jouée qu'elle ne le sera à Paris, est un phénomène assez singulier. Ce qui l'est encore davantage, c'est que nous avons eu douze ministres du saint Évangile, avec tous les petits proposants 3, à la première représentation. Il faut avouer que Lausanne donne d'assez bons exemples à Genève.
Je suppose que les frères Cramer vous ont fait tenir ce faible Essai sur l'Histoire générale dont vous me faites l'honneur de me parler. Nous nous flattons de revoir incessamment les Délices, et de trouver votre maison bien avancée 4. Vale, et me ama. Tuus semper.

V. »

1 Voltaire avait substitué le nom de Délices à celui de Saint-Jean. Par la suite, fidèle à ses idées, il dédiera l'église de Ferney directement à Dieu : Deo erexit Voltaire .

2 Zulime que V* a très transformée et qui est devenue Fanime .Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-zulime---avertissement-81729398.html

3 Noms que les calvinistes donnent aux jeunes gens qui étudient la théologie pour être pasteurs .

4 L'année précédente, le 22 février 1756, V* a écrit à Pictet : “Puissiez vous bâtir dans mon voisinage

une maison digne de la belle situation que vous avez.”, ce qui sera fait pour remplacer leur maison de campagne de St Jean .Cette maison sera rasée par un promoteur immobilier au début des années 2000 .

 

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16/10/2012 | Lien permanent

Je vous adresse la lettre ci-jointe pour le chapeau rouge . Pour des coquineries, il n'y en a point; pour des douceurs,

... Eh bien ! voici une femme qui  sait parler aux princes du clergé catholique romain . A mes yeux la démission de Benoit xvi est un non évènement qui ne changera pas la face du monde, du niveau de Splash, et du gangnam style .

Vale !

C'est écrit dans le ciel, aux couleurs papales .

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« De madame Sophie-Frédérique-Wilhelmine de Prusse , margravine de BAIREUTH.

Si mon corps voulait se prêter aux insinuations de mon esprit, vous recevriez toutes les postes de mes nouvelles. Je suis, me direz-vous, aussi cacochyme que vous, et cependant j'écris. A cela je vous réponds qu'il n'y a qu'un Voltaire dans le monde, et qu'il ne doit pas juger d'autrui par lui- même. Voilà bien du bavardage. Je vois votre impatience d'apprendre les choses qui vous intéressent. Une bataille gagnée 1. Breslau au pouvoir du roi; trente-trois mille prisonniers, sept cents officiers et quatorze généraux de pris, outre cent cinquante canons et quatre mille chariots de vivres, de bagages, et de munitions, sont des nouvelles que je puis vous donner. Je n'ai pas fini. Il est resté quatre mille morts sur le champ de bataille, quatre mille blessés se sont trouvés à Breslau, et on compte quatre mille cinq cents déserteurs. Vous pouvez compter que c'est un fait non-seulement avéré par le roi et toute l'armée, mais même par une foule de déserteurs autrichiens qui ont été ici. Les Prussiens ont cinq cents morts et trois mille blessés. Cette action est unique, et parait fabuleuse. Les Autrichiens étaient forts de quatre-vingt mille hommes: les Prussiens n'en avaient que trente- six mille. La victoire a été disputée mais toute l'affaire n'a duré que quatre heures. Je ne me sens pas de joie de ce prodigieux changement de la fortune. Je dois ajouter encore une anecdote, le corps que commandait le roi avait fait quarante-deux milles d'Allemagne en quinze jours de temps, et n'avait eu qu'un jour pour se reposer avant de livrer cette mémorable bataille. Le roi peut dire comme César Je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu. I1 me mande qu'il n'est embarrassé à présent que de nourrir et de placer ce prodigieux nombre de prisonniers. La lettre que vous lui avez écrite, où vous lui demandez la relation de la bataille de Mersbourg 2, a été enlevée avec la mienne. Heureusement il n'y avait rien qui puisse vous faire du tort. Je vous adresse la lettre ci-jointe pour le chapeau rouge 3. Pour des coquineries, il n'y en a point; pour des douceurs, je n'en réponds pas.
Nous avons eu, il y a trois jours, trois secousses d'un tremblement de terre, à quatre milles d'ici; on dit que la première était forte, et qu'on a entendu des bruits souterrains. Il n'a causé aucun dommage. On n'a point d'exemple d'un pareil phénomène dans ce pays; je vous laisse le soin d'en trouver la raison. Bien des compliments à Mme Denis. Soyez persuadé de toute mon estime.

Le 27 décembre[1757].
WILHELMINE »

1 Celle du 5 décembre.

2 Ou de Rosbach.

3 Le cardinal de Tencin.

 

 

 

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28/02/2013 | Lien permanent

On a trouvé vos saucissons excellents

... Ceci n'est pas un message publicitaire pour un certain Justin B*** ou une certaine Monique R***, mais un hommage à quelques charcutiers qui faisaient bien leur métier dans le beau pays de Gex, du temps que j'y étais, et je souhaite qu'il en reste encore au moins un . Le sauc's de supermarché, on les subit plus qu'on ne les choisit, un peu comme nos députés et nos présidents !

Et pour vous prouver que j'aime la poésie :

 https://www.youtube.com/watch?v=wUabz5ggpNc

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 Oui, Bernadette, j'aime ça !

 

 

« A François-Achard Joumard Tison, marquis d'Argence

par Angoulême

En son château de Dirac

20è mai 1762, aux Délices 1

Non seulement je suis paresseux, monsieur, mais il s'est joint à ce vice une maladie qui a passé quelque temps pour mortelle . Je suis encore très faible . Je ne peux avoir l'honneur de vous écrire de ma main . On a trouvé vos saucissons excellents, pour moi, j'ai été bien loin d'en pouvoir manger, mais je vous en remercie, au nom de tout ce qui est aux Délices .

Que vous êtes sage et heureux, monsieur, d'habiter dans vos terres, et de ne point voir de près tous les malheurs de la France ! Notre seule félicité consiste à chasser les jésuites, et à conserver environ quatre vingt mille autres moines qui dévorent le peu de substance qui nous reste . Il est bien ridicule d'avoir tant de moines, et si peu de matelots . Adieu, monsieur, un malade ne peut faire de longues lettres ; je regrette toujours que les Délices et Ferney soient si loin d’Angoulême, et je vous regretterai toute ma vie . Comptez que vous n'avez point de serviteur plus inviolablement attaché que V. »

1 Le même jour, George Keate écrit à Bonnet : « A l'égard de mon livre sur votre gouvernement [ voir lettre à Keate du 10 février 1762 : ] , il [ne] me servira à rien de vous en parler davantage, dès qu'on a défendu la traduction de M. de Vol[tai]r[e] à cause de certains défauts, qu'on refuse de me communiquer . […] on s'est conduit à Genève vis-à-vis de moi avec toute la finesse possible dans l'instant que je témoignai m[on] zèle et mon attachement à votre État . Je croyais jusqu'à présent que c'était dans la république de Genève que l'erreur fut corrigée, et ceux qui s'étaient égarés furent ramenés à la vérité . Comment donc ai-je péc[hé] au delà de toute grâce d'étre excommunié, et de perdre un droit que tout le monde avait ? »

 

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08/04/2017 | Lien permanent

Je ne crois pas que nos philosophes veuillent empêcher nos vignerons et nos laboureurs d'aller à la messe, mais je crois

...hir des fripons oisifs et à pervertir des âmes faibles .

 

 

« A Antoine-Jean-Gabriel Le Bault

Au château de Ferney 2 avril 1762

Puisque vous avez la bonté, monsieur, d'abreuver notre troupe du Roman comique, je vous supplie de vouloir bien m'envoyer tout ce que pourra contenir la plus énorme charrette . Le vin d'ordinaire des vignes de Mme Le Bault sera pour les assistants et le meilleur s'il vous plait sera pour moi . Une petite futaille de ce meilleur, contenant environ deux cent quarante pintes sera mon affaire .

Imbecilla volet tractari mollius aetas 1.

Je ne crois pas que le curé de Moens tâte de votre bon vin . Ce n'est pas qu'il ne l'aime infiniment, mais il ne mérite que de l'eau du Styx, et il devrait bien aller boire avec votre fripon de curé qui m'a vendu un tonneau de mauvais vinaigre .

L'affaire du roué de Toulouse devient très problématique . On prétend que le fanatisme est du côté de huit juges qui étaient de la confrérie des pénitents blancs . Cinq conseillers qui n'étaient pas pénitents ont absous entièrement l'accusé , les autres ont voulu sacrifier un hérétique . Voilà ce que l'on écrit . Il est après tout fort étrange, qu'un père accusé d'avoir pendu son propre fils soit condamné sur des preuves si légères, que de treize juges il y en ait cinq qui le déclarent innocent . Le testament de mort de l'accusé vaut encore pour le moins trois juges . Enfin cette affaire est épouvantable de part ou d'autre . Je souhaite que votre petite tracasserie avec le roi 2 finisse bientôt et que vous réprimandiez au moins le curé de Moens, car il n'y a pas moyen de le rouer .

Si Calas et les huit pénitents blancs avaient été philosophes, notre siècle ne serait pas déshonoré par ces horreurs . Je ne crois pas que nos philosophes veuillent empêcher nos vignerons et nos laboureurs d'aller à la messe, mais je crois qu'ils voudraient empêcher les honnêtes gens d'être les victimes d'une superstition aussi absurde qu'abominable qui ne sert qu'à enrichir des fripons oisifs et à pervertir des âmes faibles . Ceux qui veulent que leurs amis pensent comme Cicéron, Platon, Lucrèce, Marc Antonin, etc.3 n'ont pas tant de tort . Pour la canaille il n'y faut pas penser .

J'ai l'honneur d'être avec bien du respect

monsieur

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire . »

 

1 Son âge tendre réclame un traitement plus doux ; Horace, Satires, II, 2, 85-86 .

2 Le différend du parlement de Dijon avec le roi . V* est depuis longtemps assez peu favorable aux parlements .

3 Etc. est ajouté au-dessus de la ligne .

 

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09/03/2017 | Lien permanent

Bonsoir, ce monde-ci est une grande table, où les gens d'esprit font bonne chère . Les miettes sont pour les sots

... Les miettes sont plutôt des scories quand on voit les épisodes de téléréalité et leurs protagonistes qui dégoulinent de crétinisme . Ah ! être "Vu à la télé" !...

 

 

« A Joseph de Menoux

11è juillet 1760, au château de Tournay

pays de Gex par Genève

En vous remerciant du discours royal 1 et de vos quatre lignes .

Mettez-moi je vous prie aux pieds du roi ad multos annos .2

Envoyez surtout beaucoup d'exemplaires en Turquie ou chez les athées de la Chine, car en France je ne connais que des chrétiens . Il est vrai que parmi ces chrétiens, on se mange le blanc des yeux pour la grâce efficace et versatile, pour Pasquier Quenel, et Molina, pour des billets de confession . Priez le roi de Pologne d'écrire contre ces sottises qui sont le fléau de la société . Elles ne sont certainement bonnes ni pour ce monde-ci ni pour l'autre .

Berthier est un fou et un opiniâtre qui parle à tort et à travers de ce qu'il n'entend point . Pour le révérend père colonel 3 avouez qu'il vous a fait rire et moi aussi . Et vous qui parlez vous seriez le révérend père colonel dans l'occasion : et je suis sûr que vous vous en tireriez très bien, et que vous auriez très bon air à la tête de deux mille hommes .

Je suis très fâché que votre palais de Nancy soit si loin de mes châteaux, car je serais fort aise de vous voir . Nous avons l'un et l'autre d'excellent vin de Bourgogne, nous le boirons au lieu de disputer .

Une dévote en colère disait à sa voisine, je te casserai la tête avec ma marmite . Qu'as-tu dans ta marmite ? dit l'autre . Un bon chapon répondit la dévote . Eh bien mangeons-le ensemble, dit la bonne femme . Voilà comme on devrait en user . Vous êtes tous de grands fous, molinistes , jansénistes, encyclopédistes . Il n'y a que mon cher Menoux de sage , il est à son aise, bien logé, et boit de bon vin . J'en fais autant, mais étant plus libre que vous, je suis plus heureux . Il y a une tragédie 4 anglaise qui commence par ces mots, mets de l'argent dans ta poche et moque toi du reste 5. Cela n'est pas tragique, mais cela est fort sensé . Bonsoir, ce monde-ci est une grande table, où les gens d'esprit font bonne chère . Les miettes sont pour les sots , et certainement vous êtes homme d'esprit . Je voudrais que vous m'aimassiez, car je vous aime .

V. »

1 De Stanislas Leszczynski, L'incrédulité combattue par le simple bon sens, 1760, sous-titré dans la seconde édition « essai philosophique, par un roi » . V* en dit son sentiment dans la lettre du 28 août 1760 à d'Argental :

2 Pour de nombreuses années .

3V* a ajouté sur la minute, au-dessus de la ligne, de mon ami Candide, non reporté sur l'autographe .

4 V* avait d'abord écrit comédie .

5 Il semble y a voir là un souvenir d'Othello, de Shakespeare, acte I, sc. 3, v. 345 .

 

 

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11/07/2015 | Lien permanent

chaque chose doit avoir son temps

...

 

« A Jacob Vernes

Lundi 14è mars 1763

aux Délices

Le parlement de Toulouse ayant condamné sur des indices Jean Calas, négociant de Toulouse, protestant, à être rompu vif, et à expirer sur la roue, comme convaincu d'avoir étranglé son fils aîné en haine de la religion catholique ; la veuve Calas et ses deux filles étant venues se jeter aux pieds du roi, un Conseil extraordinaire s'est tenu le lundi 7è mars 1763 composé de tous les ministres d’État, de tous les conseillers d’État, et de tous les maîtres des requêtes ; ce Conseil admettant la requête en cassation a ordonné d’une voix unanime que le parlement de Toulouse enverrait incessamment les procédures, et les motifs de son arrêt .1

Voilà des nouvelles bien consolantes . Je me suis flatté même que j'aurais bientôt des choses encore plus flatteuses à mander à monsieur Vernes, mais j'ai bien peur que tout ne soit détruit par les Lettres toulousaines, composées, dit-on, par M. de Court, et imprimées à Lausanne sous le nom d’Édimbourg . Si ce livre se répand en France, il fournira sans doute des armes au parlement de Toulouse. M. le comte de Saint-Florentin qui n'est déjà que trop prévenu contre les Calas, et qui n'a point voulu 2 au Conseil du 7è mars, pourra peindre au roi les protestants comme séditieux, qui attaquent indiscrètement les parlements et le Conseil du roi, dans le temps même que le roi assemble à Versailles le Conseil le plus nombreux qui se soit tenu depuis cent ans, pour rendre justice aux protestants dans l'affaire la plus capitale et la plus intéressante .

Les Lettres toulousaines nous feront surtout un grand tort en mêlant l'affaire de Sirven avec l'affaire des Calas . On verra en moins de trois mois, deux pères accusés d'avoir assassiné leurs enfants pour cause de religion . Le parlement de Toulouse persuadera au roi, que si on infirme l’arrêt contre les Calas, on rendra les protestants plus audacieux, et le roi laissera peut-être ce grand procès indécis .

Il est d'une extrême importance que les Lettres toulousaines ne paraissent point en France . Les ouvrages qu'on peut écrire sur cette matière délicate ne peuvent être confiés qu'à des personnes sûres, et qui sont en état de servir . C'est le parti que prend l'auteur du Traité sur la tolérance . On a écrit à Lausanne pour faire prier l'auteur des Lettres toulousaines de suspendre le débit de son livre , jusqu’à la définition du procès des Calas .

Si monsieur Vernes peut obtenir par ses sollicitations cette suppressions si nécessaire, il rendra un très grand service . L'auteur aura le temps de faire un second volume très intéressant, dans lequel il pourra faire valoir avec juste raison la bonté du roi, et l'équité du Conseil ; il gagnera dans ce second volume les esprits qu'il effarouche dans le premier .

Monsieur Vernes sent la nécessité de la circonspection que l'on demande, chaque chose doit avoir son temps, et assurément l'auteur des Lettres toulousaines prend bien mal le sien .

On embrasse tendrement monsieur Vernes, et on a la plus grande envie de s'entretenir avec lui . »

1 Le premier paragraphe ressemble à une lettre circulaire ; voir lettres du 15 mars 173 à Élie Bertrand, et celle à Constant de Rebecque .

2 Wagnière semble avoir oublié un mot tel que venir ou participer .

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02/03/2018 | Lien permanent

il faudrait hardiment donner La Femme qui a raison [v]. Car qu'elle ait raison ou non elle est gaie. Et la morale est bo

... Pour cela il faut attendre la levée d'écrou du théâtre, on ne sait encore quand, seule Roselyne (Bachelot, oui, oui, notre pharmacienne ) l'éclectique "Femme qui a raison" moderne, peut le supputer, si mister Covid-19 veut bien nous lâcher les basques . Le divin vaccin existe en trois versions ( la Sainte Trinité en seringue ), reste à savoir l'efficacité et les effets secondaires, et le monde est sauvé (ou presque, les pays fortunés d'abord, comme d'hab ) . A suivre ...

 

Mis en ligne le 19/11/2020 pour le 21/9/2015

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

envoyé de Parme, rue de la Sourdière à Paris

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

20 septembre 1760

Madame Scaliger, vous êtes divine, vous nous avez donc secourus dans la guerre, vous avez payé de votre personne. Vous avez pansé des blessés et mis les morts à quartier. C'est à vous que la dédicace devrait appartenir.[i]

Mes divins anges,nous jouâmes hier Alzire, nous allons rejouer Tancrède. Nous sommes à l'abri des cabales. C'est beaucoup. Nos plaisirs sont purs. M. le duc de Villars, grand connaisseur, nous encourage. Notre théâtre commence à être en réputation. Brioché n'avait pas si bien réussi chez les Suisses [ii]. Envoyez nous donc la pièce telle qu'on la joue à Paris. Vous donnez L'Indiscret [iii]. La pièce n'est-elle pas un peu froide ?

Le comique écrit noblement

Fait bailler ordinairement .[iv]

Si Tancrède avait un plein succès, il faudrait hardiment donner La Femme qui a raison [v]. Car qu'elle ait raison ou non elle est gaie. Et la morale est bonne. Il y a beaucoup de coucherie, mais c'est en tout bien tout honneur.

Il faudrait que Mme de Pompadour fût une grande poule mouillée pour craindre ma fière dédicace.[vi] Pardon , divins anges, de mon laconisme. Il faut marier demain notre résident de France [vii] dans mon petit château de Ferney. Nous sommes occupés à imaginer une façon nouvelle de dire la messe. Et je vais répéter deux rôles, Argire et Zopire [viii]. La tête me tournera si je n'y prends garde.

Je baise le bout de vos ailes humblement. »

i Cf. lettre du 8 septembre pour la « bataille » de Tancrède et dédicace à Mme de Pompadour.

ii Cf. le Pot pourri que V* commence à composer (voir lettre du 5 septembre 1760 ) . Brioché qui avait montré ses marionnettes à Soleure avait été accusé de magie par les paysans et emprisonné.

iii Pièce pour accompagner Tancrède à sa dernière représentation du 2 octobre.

iv Extrait de L'Impromptu de la folie, 1726, de Marc-Antoine Le Grand.

v Jamais jouée en public à Paris.

vi Cf. lettre du 8 septembre ; Mme de Pompadour fit supprimer quelques lignes de l'Épitre dédicatoire , elle fera demander par Choiseul que V* n'ajoute pas de préface pour ne pas être compromise.

vii M. de Montpéroux ; V* a entrepris la construction d'une nouvelle église à Ferney, et vient juste de finir les travaux de son château de Ferney.

viii Dans Tancrède et dans Mahomet.

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