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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Je suis de toutes les nations.

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Et pour les gourmands, comme Volti et moi, comme promis ci-après, une grosse pêche !

Volti a  quasiment un côté méridional par cette habitude d'exagérer la taille des poissons et même des fruits que l'on trouve à sa table .

grosse pêche et james.png

 Oui, j'ai la pêche , mais pas la grosse tête .

 

« A Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine i

A Prangins, pays de Vaud, 23 février [1755]

 
Vous avez donc été sérieusement malade, ma chère nièce, et vous avez également à vous plaindre d'un souper et d'une médecine ? Il est bien cruel que la rhubarbe ii, qui me fait tant de bien, vous ait fait tant de mal. Venez raccommoder votre estomac avec les truites du lac de Genève; il y en a qui pèsent plus que vous, et qui sont assurément plus grasses que vous et moi. Je n'ai pas un aussi beau château que M. de Prangins cela est impossible, c'est la maison d'un prince; mais j'ai certainement un plus beau jardin, avec une maison très jolie iii. Le palais de Prangins et ma maison sont dans la plus belle situation de la nature. Vous serez mieux logée à Prangins que chez moi mais j'espère que vous ne mépriserez pas absolument mes petits pénates, et que vous viendrez les embellir de votre présence et de vos dessins. Apportez- moi surtout les plus immodestes iv pour me réjouir la vue. Les autres sens sont en piteux état; je dégringole assez vite; j'ai choisi un assez joli tombeau, et je veux vous y voir. Les environs du lac de Genève sont un peu plus beaux que Plombières, et il y a tout juste dans Prangins même une eau minérale très bonne à boire,v et encore meilleure pour l'estomac. Je la crois très supérieure à celle de Forges.

Venez en boire avec nous, ma chère nièce; tâchez d'amener Thieriot. Il veut venir par le coche il serait roué, et arriverait mort. Songez d'ailleurs qu'il faut être les plus forts à Prangins. Vous y trouverez des Suisses, amenez-y des Français. Pour ma maisonnette, elle n'est point en Suisse elle est à l'extrémité du lac, entre les territoires de France, de Genève, de Suisse, et de Savoie. Je suis de toutes les nations. On nous a très bien reçus partout; mais le plus grand plaisir dont nous jouissions à présent est celui de la solitude. Nous y employons nos crayons à notre manière. Nous vous montrerons nos dessins, en voyant les vôtres nous jouirons des charmes de votre amitié ; vous verrez des gens de mérite de toute espèce, vous mangerez des pêches grosses comme votre tête, et on tâchera même de vous procurer des quadrilles; mais nous avons plus de truites et de gelinottes
que de joueurs. Enfin, venez, et restez le plus que vous pourrez . Mes compliments à l'abbé sans abbaye vi.
Belle Philis, on désespère
Alors qu'on espère toujours.
(Molière, le Misanthrope, acte I.)

Je ne vous écris point de ma main. Excusez un malade, et croyez que c'est mon cœur qui vous écrit. »

 

i Nièce de V*, soeur ainée de Marie-Louise Denis, née Marie-Elisabeth Mignot, femme de Nicolas-Joseph de Dompierre de Fontaine .

 

ii V* sera continuellement en révolte , -et en prendra en cachette,- contre le docteur Tronchin, qui préférait la casse plutôt que la rhubarbe pour « faire aller ».

 

iii Maison de Saint Jean, proche de Genève, en république genevoise, qu'il baptise Les Délices .

 

iv « immodestes » = nus ; en 1756, V* lui écrira le 8 janvier 1756: « Aimez-vous toujours à peindre de beaux corps tout nu, en attendant que le docteur Tronchin rétablisse et engraisse le vôtre ? »

www.pastellists.com/Articles/Dompierre.pdf

 

v Par la suite, V* ira prendre les eaux à Rolle, cité très proche de Prangins et de Lausanne .

 

vi Alexandre-Jean Mignot, frère de Marie-Louise et de Marie-Elisabeth, après avoir été militaire, étudiera au séminaire de Troyes en 1747 et attendra d'avoir les bénéfices d' une abbaye ; il aura Scellières où il pourra faire inhumer son oncle en juin 1778 .

 

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25/11/2011 | Lien permanent

Edifiez-vous, ma belle philosophe, tant qu'il vous plaira . Soyez toujours femme de bien

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« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay

« A la Belle Philosophe »

 

[vers le 20 mai 1759]

 

Il y a dix ans que je n'ai lu des vers de H.1 S'ils sont mauvais, sa prose ne vaut guère mieux 2. C'est un fagot vert qui donne un peu de feu, beaucoup de fumée 3. Le beau Sermon 4 est tout à fait pour votre belle âme . Edifiez-vous, ma belle philosophe, tant qu'il vous plaira . Soyez toujours femme de bien, et si vous êtes d'honnêtes gens, vous, et votre Bohémien 5, je vous donnerai votre récompense en ce monde dans quelques jours . Je vous remercie tendrement, mais votre fermier général 6 n'aime pas les belles-lettres , ou je suis trompé .

 

V. »

 

1 Helvétius.

2 Voir par exemple le jugement de V* sur ce livre De l'esprit dans la lettre du 18 octobre 1758 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/10/22/cartes-de-geographie-c-est-peut-etre-le-seul-art-dans-lequel.html

3 D'autant plus qu'il a été condamné à être brûlé le 6 février .

4 C'est le Sermon des cinquante de V*, qu'il pourrait avoir écrit dès 1749 (date mise sur la première édition) et que V* lisait à Frédéric II en 1751 et 1752 selon La Beaumelle. http://www.voltaire-integral.com/Html/24/56_Cinquante.html

5 Grimm, auteur du Petit prophète de Boemischbroda.

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14/05/2011 | Lien permanent

Mes chers frères, continuez à éclairer le monde, que vous devez tant mépriser. Que de bien on ferait, si on s’entendait

... Il est difficile de dire le contraire !

Du bien, et de l'union, il en faudra pour réparer  les énormes dégâts causés par Irma .

Irma La Douce Street Chic

Irma la douce, il t'était si facile de faire du bien, impossible de semer la terreur .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

10 octobre [1762] 1

Mes frères et maîtres 2 ont donc envoyé leur réponse à M. de Schovalof. Il est plaisant qu’un Russe favorise des philosophes français, et il est bien horrible que des Français persécutent ces philosophes. J’avais déjà assuré la cour russe de la reconnaissance [et] des refus de nos sages 3.

Mes chers frères, continuez à éclairer le monde, que vous devez tant mépriser. Que de bien on ferait, si on s’entendait ! Jean-Jacques eût été un Paul, s’il n’avait pas mieux aimé être un Judas. Helvétius a eu le malheur d’avouer un livre 4 qui l’empêchera d’en faire d’utiles . Mais j’en reviens toujours à Jean Meslier. Je ne crois pas que rien puisse jamais faire plus d’effet que le testament d’un prêtre qui demande pardon à Dieu, en mourant, d’avoir trompé les hommes. Son écrit est trop long, trop ennuyeux, et même trop révoltant ; mais l’extrait est court, et contient tout ce qui mérite d’être lu dans l’original.

Le Sermon des Cinquante, attribué à La Mettrie, à Dumarsais, à un grand prince, est tout à fait édifiant. Il y a vingt exemplaires de ces deux opuscules dans le coin du monde que j’habite. Ils ont fait beaucoup de fruit. Les sages prêtent l’Évangile aux sages ; les jeunes gens se forment, les esprits s’éclairent. Quatre ou cinq personnes à Versailles ont de ces exemplaires sacrés. J’en ai attrapé deux pour ma part, et j’en suis tout à fait édifié. Pourquoi la lampe reste-t-elle sous le boisseau 5 à Paris ? Mes frères, in hoc non laudo 6. Le brave libraire qui imprime des factums en faveur de l’innocence 7 ne pourrait-il pas aussi imprimer en faveur de la vérité ?

Quoi ! la Gazette ecclésiastique 8 s’imprimera hardiment, et on ne trouvera personne qui se charge de Meslier ? J’ai vu Woolston, à Londres, vendre chez lui vingt mille exemplaires de son livre contre les miracles 9. Les Anglais, vainqueurs dans les quatre parties du monde, sont encore les vainqueurs des préjugés . Et nous, nous ne chassons que des jésuites, et ne chassons point les erreurs. Qu’importe d’être empoisonné par frère Berthier ou par un janséniste ? Mes frères, écrasez cette canaille. Nous n’avons pas la marine des Anglais, ayons du moins leur raison. Mes chers frères, c’est à vous à donner cette raison à nos pauvres Français.

Thieriot est parti pour embrasser nos frères. Ne pourrais-je pas rendre quelque service à ce bon libraire Martin ou Merlin ? car je n’ai pu lire son nom.

J’embrasse mes frères en Confucius, en Platon, etc.

Ah ! l’infâme !

Je prie mon très cher frère de vouloir bien m'envoyer au plus vite le Dictionnaire des hérésies en deux volumes in-douze 10.

Je voudrais bien savoir ce que je lui dois .

Voici une lettre importante pour M. d'Alembert 11 sur laquelle il confèrera avec mon cher frère . »



1 Les trois derniers paragraphes de la copie Beaumarchais suivie par toutes les éditions sont remplacés par la lettre du 25 octobre 1762 à Damilaville : «Je voudrais [...] la grâce tire parti de tout . » ; voir dans : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/05/correspondance-annee-1762-partie-28.html

2 D'Alembert et Diderot .

3 Diderot écrit à V* le 29 septembre 1762 : « Non, très cher et très illustre frère, nous n'irons ni à Berlin ni à Petersbourg achever l'Encyclopédie ; et la raison, c'est qu'au moment où je vous parle, on l'imprime ici et que j'en ai des épreuves sous les yeux ; mais chut ! Assurément c'est un énorme soufflet pour nos ennemis que la proposition de l'impératrice de Russie ; mais croyez-vous que ce soit le premier de cette espèce que les maroufles aient reçu ? Oh que non ! Il y a plus de deux ans que le roi de Prusse qui pense comme nous […] leur en avait appliqué un tout pareil . Si vous avez la bonté décrire un mot en mon nom à M. de Schouvalov, comme je vous en supplie, vous ne manquerez pas de faire valoir cette conformité de vues entre la princesse régnante, et le plus grand monarque qui soit . […] Par les offres qu'on nous fait, je vois qu'on ignore que le manuscrit de l'Encyclopédie ne nous appartient pas, qu'il est en la possession de libraires qui l'ont acquis à des frais exorbitants et que nous n'en pouvons distraire un feuillet sans infidélité .[...] »

D'Alembert écrit le 2 octobre 1762 : « Oui, mon cher et illustre maître, j'ai reçu l’invitation de M. de Schouvalow, et j'y ai répondu comme vous vous y attendiez . […] je ne désire, même dans mon propre pays, ni place ni honneurs ; jugez si j'en irai chercher à 800 lieues ; mais je suis d'ailleurs de votre avis, il faut faire servir les offres qu'on nous fait à l'humiliation de la superstition et de la sottise ; il faut que toute l'Europe sache que la vérité persécutée par les bourgeois de Paris, trouve un asile chez des souverains qui auraient dû l'y venir chercher [...] »

4 De l'esprit .

5 Évangile de Matthieu , V, 15 : https://www.info-bible.org/lsg/40.Matthieu.html#5

6 En cela je ne vous loue pas .

7 Les mémorandums des avocats avaient été publiés par Le Breton ; ceux de Voltaire sont sans nom de libraire . Ils avaient apparemment été distribués par Joseph Merlin, qui semble avoir eu du goût pour les écrits séditieux ; voir : http://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?id=lyon2.1998.oferret&part=4831

8 Journal janséniste qui s'imprimait clandestinement .

10 François-André-Adrien Pluquet : Mémoires pour servir à l'histoire des égarements de l'esprit humain par rapport à la religion chrétienne ou Dictionnaire des hérésies, des erreurs et des schismes, 1762 ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois-Andr%C3%A9-Adrien_Pluquet

et : http://data.bnf.fr/12176450/francois-andre-adrien_pluquet/

 

et https://books.google.fr/books?id=a6Ysua72iugC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

et : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2098659

11Voir lettre du 12 octobre 1762 malgré la date donnée .

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08/09/2017 | Lien permanent

vous êtes dans la force de l'âge, vous serez utile aux gens de bien qui pensent comme il faut

... Bonne nouvelle pour les séro-po (comme ils disent ), parole de ministre, ils ne sont plus mis au ban de certains corps publics : https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/armee...

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

30 septembre 1767

Guérissez-donc, mon cher et digne ami, vous êtes dans la force de l'âge, vous serez utile aux gens de bien qui pensent comme il faut, et moi, je ne suis plus bon à rien. Je suis actuellement obligé de me coucher à sept heures du soir ; je ne peux plus travailler . J'avais encor un reste de vie lorsque je brochai en cinq jours cette petite pièce qui nous a beaucoup amusés à Ferney et qui n'amusera guère Paris . Je souhaite que ce brimborion soit utile à Paris mais je ne l'espère pas . Je vous recommande les changements que vous avez dû recevoir ; ils sont absolument nécessaires . Merlin d'ailleurs doit user de la plus grande diligence , s'il ne veut pas être prévenu par les libraires de province .

Voici un petit écrit sur les dissidents qui m'a été envoyé de Hollande . Je commence à bien augurer de l'affaire des Sirven . Vous en viendrez à votre honneur, surtout si si M. d'Aguesseau s'adoucit .

Bonsoir mon cher ami, je me couche et je ferme mon paquet .

Voici deux lettres, l'une pour Protagoras et l'autre pour l’exact et empressé Thieriot. »

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08/05/2023 | Lien permanent

nous sentons bien qu'on peut lui reprocher un petit manque de modestie

"... et qu’il n'est pas honnête de chanter ainsi ses louanges" !

N'est ce pas heureux(ses) candidat(e)(s) au trône républicain ?

 

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Moi aussi, j'aime bien Gluck !

Ich bin sehr glücklich !

Und Geluck, auch !

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« A Jean-Baptiste-Nicolas de Lisle

Capitaine de dragons, etc.

à Mousson

 

30è mai [1774]

 

Nous sommes tous Gluck à Ferney 1, Monsieur ; nous sommes aussi Arnould 2. Nous sommes encore plus De Lisle ; et pour vous en convaincre nous avons sauvé un pauvre diable de moine défroqué qui osait porter votre nom 3.

 

A l'égard de Mlle Arnould qui chante si bien que de grâces, que de beauté !4 nous sentons bien qu'on peut lui reprocher un petit manque de modestie, et qu’il n'est pas honnête de chanter ainsi ses louanges . Elle se tirera de cette critique comme elle pourra .

 

Pour Mme du Deffand nous ne lui pardonnons pas de s'être ennuyée à cette musique 5.

 

En vous remerciant de toutes vos bontés .

 

Il court une petite oraison funèbre de Louis XV, prononcée par un monsieur de Chambon, dans l'académie de Valence 6. Elle est courte, nous vous enverrons le premier exemplaire qui nous tombera sous la main .

V[otre] t[rès] h[umble] [et] obligé

 

Le vieux malade. »


2 Madeleine-Sophie Arnould créa les rôles d'Iphigénie et d'Eurydice dans les opéras de Gluck . http://roglo.eu/roglo?lang=fr&m=NG&n=Madeleine+Sophie+Arnould&t=PN

3 Le 6 mai, V* demandait à P.-J. Franck, banquier, de donner de sa part « dix louis d'or à M. Delille » . « C'était un moine défroqué qui avait enlevé une fort jolie fille . Ses supérieurs couraient après lui pour le faire brûler ; nous avons envoyé le moine et sa demoiselle en Russie », écrira V* le 18 juillet à De Lisle .

4 Vers chanté par le chœur (I, 5 : http://www.deezer.com/listen-695631)à l'arrivée d'Iphigénie dans Iphigénie en Aulide (musique de Gluck, livret adapté par le bailly du Roullet).

5 A la représentation d'Iphigénie en Aulide créée le 12 avril .

6 L’Éloge funèbre de Louis XV prononcé dans une académie le 25 mai 1774, de V*. http://books.google.com/books?id=jKMGAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

De Lisle dira : « M. de Chambon n'existe pas plus que l'académie de Valence » . Le 6 juin, V* envoie à Mme du Deffand « le petit ouvrage de M. de Chambon » ; « (il) m'a paru mériter que je vous l'envoie, non pas à cause de son éloquence, car je le crois un peu trop simple, ... » ; voir page 337 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f342.image.r... . Il ajoutera : « Ce M. de Chambon ne brûle pas beaucoup d'encens quand il dit sa grand-messe. »

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30/05/2011 | Lien permanent

Nous manquons d'hommes en bien des genres, mon cher ange, cela est très vrai ; mais les autres nations ne sont pas en me

... Ce qui n'est ni rassurant ni réjouissant . En ce moment, il est difficile de compter sur les "malades" bidons, grands malades des forces de police qui deviennent bien peu fiables dans leurs interventions , et répréhensibles par leurs violences inadmissibles . Le soutien à ceux d'entre eux qui dépassent les normes n'est pas sans me rappeler celui apporté à des prêtres pédophiles ; soutien de caste . Il est pourtant statistiquement banal qu'on trouve des pourris dans toutes les professions, ce sont des humains avec leur proportion de vices et folies, la police n'y échappe pas . Le "pétage de plombs" est toujours inadmissible quand des vies sont en jeu .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol , comte d'Argental

4è janvier 1768 1

Comme les cuisiniers 2, mon cher ange, partent toujours de Paris le plus tard qu'ils peuvent, et s'arrêtent en chemin à tous les bouchons, j'ai reçu un peu tard la lettre que vous avez bien voulu m'écrire le 14 décembre. Ma réponse arrivera gelée; notre thermomètre est à douze degrés au-dessous du terme de la glace . Une belle plaine de neige, d'environ quatre-vingts lieues de tour, forme notre horizon . Me voilà en Sibérie pour quatre mois. Ce n'est pas assurément cette situation qui me fait désirer de vous revoir et de vous embrasser . Je quitterais le paradis terrestre pour jouir de cette consolation. J'espère bien quelque jour venir faire un tour à Paris, uniquement pour vous et pour Mme d'Argental. Il me sera impossible d'abandonner longtemps ma colonie. J'ai fondé Carthage, il faut que je l'habite, sans quoi Carthage périrait, mais je vous réponds bien que, si je suis en vie dans dix-huit mois, vous reverrez un vieux radoteur qui vous aime comme s'il ne radotait point.

M. de Thibouville me dit qu'il faut que je vous envoie la lettre de M. le duc de Duras; je ne sais trop où la retrouver. Elle contenait, en substance, que la belle Dubois m'avait traité comme ses amants, qu'elle m'avait trompé ; que la Comédie était, comme beaucoup d'autres choses, fort en décadence ; qu'il avait établi un petit séminaire de comédiens à Versailles 3, qui ne promettait pas grand-chose ; que Lekain était toujours bien malade, et que la tragédie était tout aussi malade que lui 4.

Nous manquons d'hommes en bien des genres, mon cher ange, cela est très vrai ; mais les autres nations ne sont pas en meilleur état que nous.

M. de Chardon m'avait promis de rapporter l'affaire des Sirven avant la naissance de notre Sauveur mais les petites niches qu'il a plu au Parlement de lui faire ont retardé l'effet de sa bonne volonté. L'affaire n'a point été rapportée ; je ne sais plus où j'en suis, après cinq ans de peines. Il faut se résigner à Dieu et au Parlement.

Pour mon petit procès avec Mme Gillet, il ne m'inquiète guère . C'est une idiote qui veut quelquefois faire le bel esprit, et qui parle quelquefois à tort et à travers à M. Gillet. Elle est peu écoutée mais M. Gillet a quelquefois des fantaisies, des lubies et il y a des affaires dans lesquelles il se rend fort difficile. Il est triste d'avoir des démêlés avec des gens de ce caractère.

Je suis sensiblement touché de la bonté que vous avez de songer à redresser l'esprit de M. Gillet.

Mon pauvre Damilaville est tout ébouriffé de la crainte de n'être pas à la tête des vingtièmes. Je vous avoue que je lui souhaiterais une autre place . C'est un lieutenant-colonel dont tout le monde désire que le régiment soit réformé. »

1 La copie Beaumarchais-Kehl, suivie par toutes les éditions, annexe à la fin de la lettre le billet du 15 janvier . En outre, les mêmes éditeurs, malgré la date explicitement portée, placent cette lettre en 1767 ; erreur corrigée par Beuchot . Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/app.php/2015/07/correspondance-annee-1768-partie-1.html

2 Il faut certainement corriger ce mot en courrier, comme le suggère Charrot ; voir d'ailleurs la lettre du 9 janvier 1768 à Christin .

3 Voir les Mémoires secrets (29 octobre 1767).

4 A la date du 30 janvier 1768, les Mémoires secrets notent encore : « La Comédie -Française se délabre de plus en plus […] . Le sieur Lekain périclite. »

 

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28/07/2023 | Lien permanent

Quand les hommes sont bien occupés d’une sottise, ils ne songent pas à en faire une autre . Chaque impertinence a son te

... Un clou chasse l'autre . Et la boite à clous est sans fond .

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Superstition, quand tu nous tiens .

 

« A Etienne-Noël Damilaville

31è décembre [1763] 1

J’ignore, mon cher frère, si vous avez reçu en dernier lieu une Tolérance par Besançon, et une autre par l’adresse que vous m’avez donnée . L’un de ces deux paquets était pour frère Protagoras, à qui je vous supplie de faire rendre ce petit billet 2. Je suis un peu effarouché de ce qu’on a retenu à la poste de Paris deux paquets que frère Cramer envoyait à M. de Trudaine et à M. de Montigny. Il est très vraisemblable qu’on écrira beaucoup contre l’ouvrage le plus honnête qu’on ait fait depuis longtemps, et peut-être la précaution que j’ai prise de le communiquer à la cour avant de le livrer au public, lui nuira plus qu’elle ne lui servira.

Au reste, je pense que la fermentation au sujet des finances empêchera qu’on ne songe à la philosophie. Quand les hommes sont bien occupés d’une sottise, ils ne songent pas à en faire une autre . Chaque impertinence a son temps. Celle de votre archevêque est-elle vraie ? avait-il préparé un gros mandement dans le goût de celui du fou du Puy en Velay ? est-il vrai que le roi l’a menacé d’un petit martyre à Pierre-Encise, et que le mandement a été supprimé ?

Mais ne verrai-je point l’Anti-financier 3, qui est supprimé aussi ? Tous vos gros paquets, mon cher frère, m’arrivent, et les miens ne vous arrivent pas toujours. Il est plus aisé aux livres de sortir de France que d’y venir.

Vous ne m’avez pas dit un mot de frère Thieriot. L’amitié permet un peu de paresse ; mais il abuse de cette permission : il n’est pas tolérant, il est indifférent, et l’oubli total n’est pas d’un cœur bien fait.

A demain le premier jour de l’année 1764, qui probablement produira autant de sottises que les précédentes, sans recourir à l’Almanach de Liège.

Ecr. l’inf.

Permettez-vous que je vous adresse cette lettre 4 pour un homme très malheureux, dont le fils est plus malheureux encore ? Ne pouvez-vous pas ordonner qu’on la contre-signe dans votre bureau ? L’adresse est dedans, sur un petit morceau de papier. »

1 L'édition Correspondance littéraire est limitée à un bref extrait et sans indication

4 Lettre non connue .

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02/01/2019 | Lien permanent

Tout est bien ? Matthieu Garo ne le disait que quand il ne lui tombait qu'un gland sur le nez

 

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« A M. Élie BERTRAND.

Aux Délices, 28 novembre.

J'envoie, mon cher patron, à M. de Morancour, la réponse, 1de l'Académie française. L'édition que j'ai vue est l'ouvrage de la canaille. On a, dans Paris, le plus profond mépris pour ces manœuvres dont je me suis trop inquiété ici. Je crois qu'il faut laisser tomber ces misères dans l'oubli qu'elles méritent.

Voici la triste confirmation du désastre de Lisbonne 2 et de vingt autres villes. C'est cela qui est sérieux. Si Pope 3 avait été à Lisbonne, aurait-il osé dire Tout est bien ? Matthieu Garo ne le disait que quand il ne lui tombait qu'un gland sur le nez. Adieu, encore une fois; aimez un peu le pauvre malade, et tout sera bien pour lui. »

1 Lettre de Duclos : « DE M. DUCLOS,
en qualité de secrétaire perpétuel de l'ACADÉMIE FRANÇAISE
L’Académie est très-sensible aux chagrins que vous causent les éditions fautives et défigurées dont vous vous plaignez; c'est un malheur attaché à la célébrité. Ce qui doit vous consoler, monsieur, c'est de savoir que les
lecteurs capables de sentir le mérite de vos écrits ne vous attribueront jamais les ouvrages que l'ignorance et la malice vous imputent, et que tous les honnêtes gens partagent votre peine. En vous rendant compte des sentiments de l'Académie, je vous prie d'être persuadé, etc.
DUCLOS, secrétaire »

V* lui répondra le 21 décembre .

2 Le tremblement de terre de Lisbonne ; voir lettre du 24 novembre à Jean-Robert Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/11/21/tandis-que-quelques-sacres-coquins-brulent-quelques-fanatiqu.html

Ce fut la première nouvelle. Mais dans son Précis du Siècle de Louis XV, Voltaire ne parle que de trente mille; encore ce nombre est-il réduit de moitié par les auteurs de l'Art de vérifier les dates; voyez tome XV, page 335.

 

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20/04/2012 | Lien permanent

Je dois joindre la reconnaissance à l'estime et je vous assure que je remplis bien ces deux devoirs

... Combien de fois dans une vie peut-on dire cela ? une fois ? deux ? plus ? jamais ?

 Et à qui ?

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Estime et reconnaissance

 

 

« A Jean-Louis Aubert

Au château de Ferney le 15 juin 1761

Vous vous êtes mis, monsieur, à côté de La Fontaine, et je ne sais s'il a jamais écrit une meilleure lettre en vers que celle dont vous m'honorez . Tous les lecteurs vous saurons gré de vos fables 1, et j'ai par dessus eux une obligation personnelle envers vous . Je dois joindre la reconnaissance à l'estime et je vous assure que je remplis bien ces deux devoirs . Il y en a un troisième dont je devrais m'acquitter, ce serait de répondre en vers à vos vers charmants ; mais vous me prenez trop à votre avantage 2. Vous êtes jeune, vous vous portez bien ; je suis vieux et malade . Mon malheur veut encore que je sois surchargé d'occupations qui sont bien opposées aux charmes de la poésie . Je peux encore sentir tout ce que vous valez, mais je ne peux vous payer en même monnaie . Faites-moi donc grâce, en me rendant la justice d'être bien persuadé que personne ne vous en rend plus que moi . J'ai honte de vous témoigner si faiblement, monsieur, les sentiments véritables avec lesquels j'ai l'honneur d'être,

Votre etc. »

2 Sur l'anecdote à laquelle pense V* en employant ce tour, voir lettre du 16 août 1759 à Allamand : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/09/20/je-serais-fort-aise-d-entendre-votre-parole-quoique-ni-vous-5451443.html

 

 

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11/05/2016 | Lien permanent

Il me paraît que dans l’Europe on approuve assez mon entreprise. Il faut bien que nous ayons quelque gloire

... Bien évidemment, je ne parle pas ici de ma petite personne qui en toute modestie ne s'adresse pas seulement à l'Europe mais à l'univers entier bien sûr !

Et juste pour le plaisir, ajoutez à celui de la lecture, celui des oreilles  : http://www.clubdeutschegrammophon.com/video/eclipse-live-...

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Fanfoué , ça me rappelle quelque chose !

 

 

« A Charles Pinot Duclos

Au château de Ferney, par Genève,

13 auguste [1761] 1

Je vous supplie, monsieur, vous et l’Académie, de prendre bien à cœur Pierre Corneille et Marie Corneille. Il sera peut-être bien ennuyeux de lire mes notes sur les Horaces ; mais, avec un Corneille à la main, le plaisir de lire le texte l’emportera sur le dégoût des notes. Ne faites aucune attention à l’orthographe ; songez que nous sommes Suisses. On écrit comme on peut, et on corrigera le tout à l’impression. Trois ou quatre séances pourront amuser l’Académie, et m’éclaireront beaucoup. Si vous avez le courage d’examiner mon travail, je vous enverrai tous mes commentaires les uns après les autres.

Il me paraît que dans l’Europe on approuve assez mon entreprise. Il faut bien que nous ayons quelque gloire. Pierre nous en donnera, si l’Académie veut bien donner sa sanction aux remarques. Elles sont faites pour les étrangers, et peut-être pour beaucoup de Français.

Je vous demande en grâce de me renvoyer la préface sur le Cid et les notes sur Horace, avec un petit mot au bas qui marque le sentiment de l’Académie. Dès que vous aurez eu la bonté, monsieur, de me renvoyer ces cahiers, je vous dépêcherai le Cid.

A l’égard des souscriptions, elles iront comme elles pourront. Je travaillerai à bon compte, et, s’il le faut, je ferai imprimer à mes dépens. Je crois travailler pour l’honneur de la littérature française ; j’attends de l’Académie des lumières et de la protection.

Adieu, monsieur ; je compte sur votre zèle et sur votre bonté plus que sur tout le reste.

V. »

 

1 D'après une copie ancienne incomplète qui a été suivie par l'édition Desoer ; on a ici une copie du XIXè siècle .

 

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14/07/2016 | Lien permanent

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