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04/10/2010

dans chaque page, depuis la Genèse jusqu'au concile de Trente, vous trouvez le sceau du mensonge

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Le mensonge, sans sceau , sans sots ?

 

 

 

« A Claude-Adrien Helvétius

 

4è octobre 1763

 

Mon frère, le hasard m'a remis sous les yeux le décret de la Sorbonne, et le réquisitoire de maitre Omer [i]. Je vous exhorte à les relire pour vous exciter à la vengeance, en regardant votre ennemi. Je ne crois pas qu'on ait entassé jamais plus d'absurdités et plus d'insolences, et je vous avoue que je ne conçois pas comment vous laissez triompher l'hydre qui vous a déchiré. Le comble de la douleur, à mon gré, est d'être terrassé par des ennemis absurdes. Comment n'employez-vous pas tous les moments de votre vie à venger le genre humain en vous vengeant ? Vous vous trahissez vous-même en n'employant pas votre loisir à faire connaitre la vérité. Il y a une belle histoire à faire, c'est celle des contradictions. Cette idée m'est venue en lisant l'impertinent décret de la Sorbonne. Il commence par condamner cette vérité que toutes les idées nous viennent par les sens, qu'elle avait adoptée autrefois, non pas parce qu'elle était vérité, mais parce qu'elle était ancienne [ii]. Ces marauds ont traité la philosophie comme ils traitèrent Henri IV, et comme ils ont traité la bulle [iii], que tantôt ils ont reçue, et qu'ils ont tantôt condamnée.

 

Ces contradictions règnent depuis Luc et Matthieu, ou plutôt depuis Moïse. Ce serait une chose curieuse que de mettre sous les yeux ce scandale de l'esprit humain. Il n'y a qu'à lire et transcrire. C'est un ouvrage très agréable à faire, on doit rire à chaque ligne. Moïse dit qu'il a vu Dieu face à face [iv], et qu'il ne l'a vu que par derrière [v]. Il défend qu'on épouse sa belle-sœur [vi], et il ordonne qu'on épouse sa belle-sœur [vii]; il ne veut pas qu'on croie aux songes [viii], et toute son histoire est fondée sur des songes.

 

Enfin, dans chaque page, depuis la Genèse jusqu'au concile de Trente, vous trouvez le sceau du mensonge.

 

Cette manière d'envisager les choses est palpable, piquante, et capable de faire le plus grand effet. Ne seriez-vous pas charmé qu'on fit un tel ouvrage ? Faites-le donc, vous y êtes intéressé ; vous devez décréditer ceux qui vous ont traité si indignement.

 

Si l'idée que je vous propose n'est pas de votre goût, il y a cent autres manières d'éclairer le genre humain. Travaillez , vous êtes dans la force de votre génie ; je me charge de l'impression, vous ne serez jamais compromis [ix].

 

Adieu, soyez sûr que votre Fontenelle [x] n'eût jamais été aussi empressé que moi à vous servir. »

 

[Adresse] : [xi]

 

 

i Écrit contre le livre d'Helvétius De l'esprit, contre l'Encyclopédie et le Poème sur la loi naturelle en janvier et février 1759.

ii Un des objets de la polémique avec « le pédant Larcher » en 1767, c'est un critère que récuse V* dans la Philosophie de l'Histoire.

ix Ce jour, à Damilaville, V* demande de prier Diderot de persuader Helvétius qui « a du loisir, de la science et des richesses » : « qu'il écrive quelque chose de net, de convaincant, qu'il le fasse imprimer à ses dépens, on le distribuera sans le compromettre. Je m'en chargerai ; il n'aura qu'à m'envoyer le manuscrit ... »

x « votre héros Fontenelle » écrivait-il me 15 septembre.

xi Adresse inachevée car V* « ne sait où est Helvétius » et il confie « ce petit mot » à Damilaville.

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