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24/11/2010

vous verrez ce que peut encore un jeune homme de quatre-vingt et un ans, quand il veut vous amuser et vous plaire

 

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Blaireau des Alpes : j'ai du mal à reconnaitre en lui Volti qui n'était vraiment pas si rondouillard, ni si poilu . Par contre leur point commun est de se réfugier loin du froid, dans une tanière, fût-elle un château.

Je signale en passant que le château de Volti à Ferney-Voltaire peut se visiter en période hivernale par groupes constitués et sur réservation ( voir le lien ci-contre ). A tous ceux qui auront la chance de faire cette visite, je conseille de mettre une doudoune car souvent il fait plus chaud dehors que dans le château. Mais votre jeune guide saura vous réchauffer par sa verve.

 Gentillet, limite cucul , -comme une chanson de Patrick Sébastien-, mais bon , c'est rythmé et ça réchauffe: http://www.deezer.com/listen-7597940

Plus intello : http://www.deezer.com/listen-6685971

Réaliste ? : http://www.deezer.com/listen-2486481 (tranche de vie avec au passage un petit coup de griffes sur les curés ! promis, juré ce n'était pas prémédité !!)

Dédié à tous ceux qui ne lisent plus que Voici ou Olla et les accros des reality shows : http://www.deezer.com/listen-2635319

Et n'oublions pas que les blaireaux ne sont pas seulement européens, outre-atlantique aussi on en trouve, aucun pays n'y échappe, cette espèce à deux pattes à su s'adapter à tous les climats . J'adore cette chanson et je vous souhaite bien des rires à cette écoute : http://www.deezer.com/listen-6942894

Vous voyez/entendez que le blaireau inspire encore au XXIè siècle !

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

 

24 novembre 1774

 

Mon cher ange, il faut premièrement que madame d'Argental affermisse sa santé contre la rigueur de l'hiver ; pour moi, je ne sors de ma chambre que quatre mois. Tout ce que je crains, c'est de mourir avant que l'affaire du jeune homme si digne de vos bontés soit entamée . Il faut avoir toutes les pièces du procès sans en excepter une, après quoi on prendra le parti que votre prudence et celle des autres sages jugeront le plus convenable. J'écris à Mme la duchesse d'Anville i. Je vous prie de lui demander à voir ma lettre, et de me dire si la vivacité de ma jeunesse ne m'a pas emporté un peu trop loin. Elle pardonnera sans doute à un cœur sensible aussi pénétré de sa générosité que des abominables horreurs dont je lui parle. Je vais écrire à Mme du Deffand ii, j'écrirai aussi à M. Goltz iii. M. de Condorcet dit qu'il aura les pièces à Paris. Je fais mille efforts pour les avoir à Abbeville ; ce que j'ai n'est pas suffisant, et on ne peut rien hasarder sans ce préalable.

 

M. Turgot nous protègera et certainement nous ne le compromettrons point. J'aimerais mieux mourir (et ce n'est pas coucher gros iv) que d'abuser de son nom et de ses bontés ; il doit en être persuadé, et quand mon cher ange le verra, il le confirmera dans cette sécurité.

 

Si vous me demandez ce que je fais dans les intervalles que me laisse cette épineuse et exécrable affaire, vous le saurez bientôt, mon cher ange, et vous verrez ce que peut encore un jeune homme de quatre-vingt et un ans, quand il veut vous amuser et vous plaire v.

 

Je ne sais si d'Hornoy dans ces commencements aura le temps vi de prendre des mesures avec vous pour la résurrection de notre jeune homme vii. Rien ne presse encore ; il faut attendre que la procédure arrive. Vous croyez bien que je ne paraitrai pas m'en mêler ; mes services secrets sont nécessaires ; mais mon nom est à craindre.

 

Je voudrais bien que vous pussiez rencontrer M. le marquis de Condorcet et causer avec lui sur cet évènement infernal.

 

Quoi qu'il en arrive, cette entreprise coûtera beaucoup et a déjà coûté, mais on ne peut mieux employer son argent. Vous m'avez mis par votre attention charmante viii en état de faire ce que l'humanité exige de moi. Plût à Dieu que M. le maréchal de Richelieu voulût en user comme vous ! Il me doit beaucoup. Son intendant me mande que l'affaire de Mme de Saint-Vincent l'empêche de me soulager . Cette affaire est bien désagréable. Il valait peut-être mieux s'accommoder avec la famille pour quelque argent, ce qui eut été très facile, que de s'exposer à soixante-dix-huit ans aux discours du tout Paris et de l'Europe, et surtout de plusieurs gens de lettres très accrédités qui se plaignent de lui, et qui ne pardonnent point. Cela me fâche ix. Le marquis de Vence l'appelle dans ses lettres l'antique Alcibiade ; c'est un nom que je lui avais donné dans mes goguettes, quand il n'était point antique x. Le sarcasme retombe un peu sur moi, et cela me fâche encore.

 

Les Enquêtes de Paris sont fâchées aussi, mais la Grand'chambre doit être bien aise. Le Grand conseil me parait demander de petites modifications nécessaires.

 

Je me trouve entre mon neveu Mignot et mon neveu d'Hornoy xi. je les aime tous les deux parce qu'ils ont tous deux l'âme très honnête. J'aime la besogne de M. de Maurepas dans cet arrangement difficile. Il a rempli les vœux du public, et en rétablissant le parlement, il n'a donné aucune atteinte à l'autorité royale xii. Voilà certainement l'aurore d'un beau règne. M. de Maurepas commence mieux que le cardinal de Fleury xiii. C'est qu'il a plus d'esprit , qu'il est plus gai , et qu'il n'est point prêtre.

 

On dit que Henri IV va paraître à la fois à la Comédie italienne et à la Française, comme sur le Pont-Neuf xiv. La nation sera toujours très drôle et il est bon de laisser en cela ses coudées franches.

 

Adieu, mon cher ange, le grand point est que madame d'Argental se porte bien. Je fais mille voeux pour sa santé, mais à quoi bon les vœux d'un blaireau des Alpes peuvent-ils servir ? Ceux de l'univers entier ne servent pas d'un clou à soufflet . »

 

 

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i V* écrit à cette dame le 26 : « J'ai appris par M. d'Argental l'action généreuse que vous daignez faire ... Le jugement atroce qui ne passa que de deux voix est mille fois pire que celui des Calas. Il n'y avait certainement pas de quoi fouetter un page ... Un seul homme détermina les juges à être assassins et cannibales, afin de passer pour chrétiens ... je suis persuadé que vous toucherez M. le comte de Maurepas ... Je me jette à vos pieds au nom de l'humanité ... »

Page 269 : http://books.google.be/books?id=eSAQAAAAYAAJ&pg=PA271...

 

Mme la duchesse d'Anville vue par Boissieu, qui visita Ferney en 1765 : http://www.whitman.edu/VSA/visitors/Boissieu.html

 

ii Ce jour même : « ... le principal sujet de ma lettre est de vous remercier ... de l'humanité ...avec laquelle vous êtes entrée dans l'affaire dont M. d'Argental vous a parlé. Il me mande que vous voulez bien la solliciter auprès de Mme la duchesse d'Anville. Je sais qu'elle n'attend pas qu'on la prie ... Les éloges que vous donnerez à sa belle action seront sa récompense... »

Page 266 : http://books.google.be/books?id=eSAQAAAAYAAJ&pg=PA271...

 

 

iii Envoyé de Prusse ; d'Etallonde étant entré au service du roi de Prusse, celui-ci a promis le 8 octobre d'en faire parler favorablement par son envoyé au nouveau ministre français ; le 18 novembre, il informait V* des bonnes intentions qu'avaient manifesté le vice-chancelier de Vergennes et ajoutait que « cette affaire sera suivie par M. de Goltz ». Le 7 décembre, V* écrit à Goltz : « ... je me flatte que le nom du roi votre maître suffise, avec vos bons offices, pour obtenir la justice qu'on demande. S'il nous est impossible de retirer du greffe (les pièces du procès) nous pourrions alors vous conjurer d'engager M. le comte de Vergennes [ministre des affaires étrangères] à demander la communication de ces pièces à M. le garde des sceaux, et nous saurions enfin précisément ce que nous devons demander. »

Page 271 : http://books.google.be/books?id=eSAQAAAAYAAJ&pg=PA271...

 

iv= risquer gros .

 

v Édition proche de Dom Pèdre dans les premiers jours de 1775 ; le 9 décembre il reparle de cet ouvrage en disant qu'il l'enverra dans six semaines.

Page 105 : « Il est très inutile de savoir quel est le jeune auteur de cette tragédie nouvelle ... » :

http://books.google.be/books?id=yU40AAAAMAAJ&pg=PA105&lpg=PA105&dq=dom+p%C3%A8dre+voltaire&source=bl&ots=50Q-gpJbzc&sig=PlIniSt8L_qe3AgZw_DDPa7CxSk&hl=fr&ei=adjrTLXpPIWk4AbngZmaAQ&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=2&ved=0CBoQ6AEwAQ#v=onepage&q&f=false

 

vi Il y avait neuf édits à mettre au point ; l'ancien parlement avait été rétabli par lit de justice du 12 novembre 1774 et d'Hornoy était entré en fonction ; cf. lettre à d'Hornoy du 20 novembre .

 

vii D'Etallonde, qui avait été brûlé en effigie après avoir réussi à fuir.

 

viii En payant sa dette de 10 000 livres ce dont V* le remerciait le 10 octobre.

Page 803 : http://books.google.be/books?id=sSsTAAAAQAAJ&pg=PA803...

 

ix« Fâcher » = affliger .

Le 28 novembre, V* engage Richelieu à faire paraître un Mémoire .

Cf. lettre du 5 septembre à d'Argental.

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/05/24-jour-de-la-st-barthelemy-je-ne-sais-par-quelle-fatalite-s.html

Le marquis de Vence est le père de Mme de Saint-Vincent.

 

x Dans l'épître à Pallu datée de Plombières en août 1729.

Page 60 : http://books.google.be/books?id=o8o_AAAAcAAJ&pg=PA63&...

 

xi Mignot appartenait au parlement de Maupéou et d'Hornoy à l'ancien parlement. L'ancien parlement vient d'être rétabli le 12 novembre . L'abbé Mignot redevient conseiller clerc au Grand conseil qui vient d'être restauré lui-aussi. Les Enquêtes = la Grande chambre des enquêtes .

Les chambres des requêtes viennent d'être supprimées.

 

xii Le public a applaudi le retour de l'ancien parlement, symbole des libertés. En rétablissant le parlement dissous par Maupéou et supprimant les Conseils supérieurs qui en réduisaient le ressort, le gouvernement a pris certaines précautions. Il donne les offices du Grand conseil rétabli aux titulaires des offices créés en 1771 et supprimés maintenant, et surtout limite les privilèges du Parlement. Si pour forcer la main au roi il suspendait la justice, le Grand conseil se substituerait à lui ; en cas de démissions concertés, les démissionnaires seraient jugés par une cour pleinière. Le parlement rétabli va d'ailleurs faire des représentations au roi dès le 8 janvier 1775 contre l'ordonnance de discipline et contre les pouvoirs accordés à la Grand'chambre qui « se trouverait seule ... être un tribunal supérieur à toute la Pairie. »

 

xiii Ils sont tous deux devenus ou redevenus ministres à 73 ans . Maurepas revint au gouvernement le 11 mai 1774. V* fait sans doute allusion à la lutte d'influence que Fleury dut soutenir contre le duc de Bourbon pour s'imposer. Cf. début du Précis du siècle de Louis XV :chapitre III : http://www.voltaire-integral.com/Html/15/09PREC10.html#i3

 

xiv 14 novembre 1774, au Théâtre Italien, Henri IV ou la bataille d'Ivry de Barnabé Farmian de Rosoy ;

le 16 novembre 1774 à la Comédie Française La partie de chasse de Henri IV de Collé ;

le 10 janvier 1775 sur le Théâtre des Grands Danseurs Le Charbonnier est maître chez lui, ou la partie de chasse de Roger TimothéeRégnard de Pleinchesne ; on joua aaussiLa Partie de chasse ou le charbonnier est maître chez lui de Nicolas Médard Audinot.

 

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