08/05/2011
Donnons la pièce incognito . Jouissons une fois de ce plaisir ; il est très amusant
Commencer par un Te deum :
http://www.youtube.com/watch?v=i23i0IS8m6U&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=3O5ov3ABAAI&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=Z9SrQbNnr9w&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=rUPHqkloOnY&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=qUsPlHNPoYA&feature=related
Tout comme le Tancrède de Volti, j'ai commencé mon errance en ce monde un 22 avril, jour de neige, et vous vous doutez bien que n'étant pas Highlander, ce ne fût pas en 1759 de l'ère chrétienne . Là s'arrête le point commun, mon père ne se nommant pas François-Marie, non plus que ma mère Marie-Louise .
Quoique, quoique !
Tout bien réfléchi, certains jours (rares !) le terme de « vieux fou » peut aussi me convenir ! Et je ne revendique que le "fou", le "vieux" n'étant pas d'actualité, pour autant que je puisse en juger .
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
19 mai 1759
C'est aujourd'hui, mon cher ange, le 19 mai, et c'est le 22 avril qu'un vieux fou commença une tragédie, finie hier i. Vous sentez bien , mon divin ange, qu'elle est finie et qu'elle n'est pas faite, et que mes maçons, mes bœufs, mes moutons et les loups nommés fermiers-généraux contre lesquels je combats, et deux ou trois procès ii qui m'amusent, et des correspondants nécessaires ne me permettront pas de vous envoyer mon griffonnage l'ordinaire prochain iii. Mon cher ange, je vous avais bien dit que la liberté et l'honneur rendus à la scène française iv échauffaient ma vieille cervelle . Ce que vous verrez ne ressemble à rien et peut-être ne vaut rien . Mme Denis et moi-même nous avons pleuré . Mais nous sommes trop proches parents de la pièce, et il ne faut pas croire à nos larmes . Il faut faire pleurer mes anges, et leur faire battre des ailes . Vous aurez sur le théâtre des drapeaux portés en triomphe, des armes suspendues à des colonnes, des processions de guerriers, une pauvre fille excessivement tendre et résolue et encore plus malheureuse, le plus grand des hommes et le plus infortuné, un père au désespoir ; le 5è acte commence par un Te Deum et finit par un De Profundis . Il n'y a eu jamais sur aucun théâtre aucun personnage dans le goût de ceux que j'introduis, et cependant ils existent dans l’histoire, et leurs mœurs sont peintes avec vérité . Voila mon énigme ; n'en devinez pas le mot, et si vous le devinez , gardez moi le secret le plus inviolable . Conspirons, mais ne nous décelons pas . Donnons la pièce incognito . Jouissons une fois de ce plaisir ; il est très amusant, et d'ailleurs je crois le secret nécessaire . La mesure des vers v est aussi neuve au théâtre que le sujet . Mme Denis n'en a point été choquée ; au quatrième vers , elle s'y est accoutumée . Elle a trouvé ce genre plus naturel que l'ancien et quelquefois plus convenable au pathétique . Il met le comédien plus à son aise, j'entends le bon comédien . Avec tout cela nous pouvons être sifflés et il faut tâcher de ne l'être pas sous mon nom.
Gardez-vous bien d'être aussi empressé de faire voir mon monstre que je l'ai été à le former . Silence, anges, ou point de pièce .
Et ce n'est pas assez du silence, il faut jurer comme saint Pierre que vous ne me connaissez pas vi.
N b que dans notre petite drôlerie, nous n'avons ni rois, ni reines , ni princes, ni princesses, ni même gouverneur de toute la province, comme dit P. Corneille vii, et c'est encore un agrément .
Voyez, ô anges, quel pouvoir vous avez sur un Suisse .
V. »
iv Désormais les spectateurs ne sont plus admis sur la scène ; voir lettre du 6 avril : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/04/05/est-ce-l-infame-amour-propre-dont-on-ne-se-defait-jamais-bie.html
v En réalité la disposition des rimes : il y a des rimes croisées . En leur envoyant la pièce V* dit qu'il « a changé la mesure afin que ce maudit public ne me reconnût pas à ce qu'on appelle mon style » . Il propose de « faire donner (la pièce) par Lekain ou par M. de Lauraguais comme l'ouvrage d'un jeune inconnu » ; page 252 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80034x/f257.image.r=.langFR
vi Reniement de Jésus par Pierre , Évangile de Matthieu.http://bible.evangiles.free.fr/bible%20illustrations%20dore/reniement%20de%20saint%20pierre.htm
vii Polyeucte . http://www.dr-belair.com/Languages/French/Corneille/Polyeucte.htm
Dédicace aux tyrans : finir par un De profundis ; oui, mais pas n'importe lequel !
http://www.deezer.com/listen-275793
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07/05/2011
Vous avez gouverné environ vingt mois . Ces vingt mois seront une époque éternelle
Je ne sais à qui je pourrais dédier cette phrase ; pourtant il y a l'embarras du choix si l'on met une connotation négative à "époque éternelle" . C'est vrai que les prises de pouvoir de certains ministres/présidents peuvent sembler n'avoir pas de terme assez rapproché tant elles déçoivent ( et ce n'est ici qu'un euphémisme ! ), et alors 20 mois sont plus longs que 20 siècles .
http://www.deezer.com/listen-315754
« A Anne-Robert-Jacques Turgot
Monseigneur,
Quand vous eûtes la plume de Rosny i, je vous dis que vous seriez toujours Monseigneur ; vous le serez toujours et aujourd'hui plus que jamais ii.
Je ne sais pas ce qui se passe ailleurs, mais M. de Trudaine est témoin qu'à Genève, en Suisse, en Franche-Comté, sur toute la route de Lyon chacun croit avoir perdu son père . On me mande qu'il en est ainsi dans toutes les provinces iii.
Vous avez gouverné environ vingt mois . Ces vingt mois seront une époque éternelle .
C'est tout ce que peut vous dire un vieillard de quatre-vingt-trois ans qui n'a plus qu'à mourir ...
V.
A Ferney 18 juin [1776] »
i C'est-à-dire : quand vous devîntes le successeur et continuateur de Sully, baron de Rosny ; dans le texte imprimé des Œuvres de Turgot on trouve : "la plume du Roi ".
ii Turgot a dû démissionner le 11 mai . V* lui enverra le 17 juin son Épître à un homme : « philosophe indulgent, ministre citoyen ... » ; voir Épîtres : http://www.voltaire-integral.com/Html/10/06EP93FI.htm
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06/05/2011
Madame, si on ne peut être le maître de sa destinée, rendez la vôtre heureuse ...réjouissez vous, et n'en convenez point
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« A Charlotte-Sophie von Altenbourg, comtesse Bentinck
A Gotha 17 mai 1753
Belle âme, j'ai porté à Gotha ma figure de trépassé et mon cadavre ambulant . Si j'avais compté faire un voyage de plaisir j'aurais sans douté été chez Mme la duchesse de Zerbst i où j'aurais parlé de vous . Mme la duchesse de Gotha sachant qu'il y avait dans sa ville un pauvre voyageur malade a fait comme vous , Madame, elle a eu pitié de moi . Elle m'a traité comme vous me traiteriez à Kniphausen ii. Je trouve partout des bontés auxquelles je ne m'attendais pas . Mgr l'électeur palatin m'a fait dire qu’il trouvait bon que je vinsse lui faire ma cour . Mme la margrave de Bareuth veut bien que j'aille à Bareuth . Je ne sais pas encore ce que ma mauvaise santé me permettra de faire . On m'avait prédit que le roi de Prusse me ferait mourir de chagrin comme Louis XIV en fit mourir Racine, mais si cela est je veux qu'on mette dans mon épitaphe que vous y avez contribué, et que le regret de vous avoir quittés m'a achevé .
Vous croyez que Maupertuis va à Lisbonne, plutôt qu'aux terres australes iii. Je voudrais qu'il eût été couronné roi du pôle antarctique le jour qu'il fit faire à La Beaumelle ces beaux commentaires sur Le Siècle de Louis XIV . Il a fait là vraiment une belle affaire, et tout cela a opéré de jolies tracasseries . Vous faisiez jeter au feu l'ouvrage de La Beaumelle par vos remontrances iv. Maupertuis le faisait recommencer par ses cruelles calomnies . Vous étiez le bon ange de ce malheureux, et Maupertuis le mauvais ange . Voila La Beaumelle à la Bastille v, Maupertuis couvert de ridicule et d'opprobre à la face de toute l'Europe littéraire, moi disgracié je ne sais comment auprès d'un monarque dont j'attendais tout le bonheur de ma vie, et à qui j'avais immolé patrie, emplois, famille et tout ce que j'avais de plus cher au monde . Qui croirait qu'un polisson chassé de Dannemark a fait toute cette besogne ? Voilà comme vont les choses de ce monde . Nous sommes des boules qui roulons au hasard selon qu'une autre boule vient nous frapper . C'est la grande chaine des évènements . Un Genevois vi a fait changer la Russie de face . Un Genevois vii me fait changer de face aussi . Le grand et le petit sont soumis à peu de chose. Madame, Madame, si on ne peut être le maître de sa destinée, rendez la vôtre heureuse afin que la mienne soit un peu moins disgraciée . Trottez de reine en reine, réjouissez vous, et n'en convenez point . Arrangez vos affaires, amusez-vous, dormez , digérez, conservez-moi vos bontés . Je suis à vous partout et toujours, sain ou malade, vif ou mort. »
ii En juillet, il écrira à la duchesse de Saxe-Gotha qu'on « trouve autant de distraction que de plaisir » dans sa cour, qu'il a commencé à sa demande dans sa belle bibliothèque les Annales de l'Empire, et il semble que « Jeanne » ait « servi d'intermède aux scènes tragiques des Empereurs et des Électeurs ».
iii Référence aux plaisanteries que fait V* aux dépens des théories de Maupertuis . A Koenig, le 17 novembre 1752 : « C'est un homme qui prétend que pour mieux connaitre la nature de l'âme il faut aller aux terres australes disséquer des cerveaux de géants hauts de douze pieds et des hommes velus portant une queue de singe . » ; voir page 21 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f25.image.r=.langFR
iv Le 30 avril, à Roques : « Je savais que Mme la comtesse de Bentinck avait obligé deux fois La Beaumelle de jeter dans le feu cet indigne ouvrage ... »
Page 60 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f64.image.r=.langFR
15:27 | Lien permanent | Commentaires (0)
05/05/2011
Conservez vos bontés à ce pauvre malade qui ne respire que pour en sentir tout le prix
http://www.youtube.com/watch?v=IEexx5BR5eY
« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu
5è mai 1773, à Ferney
C'est toujours au premier Gentilhomme de la Chambre, au grand maître des Jeux et des Plaisirs que j'ai l'honneur de m'adresser . Je lui ai écrit en faveur de Patrat i que je crois très utile au théâtre que mon héros veut rétablir .
Je lui présente aujourd'hui requête pour La Borde dont on prétend que la Pandore est devenue un ouvrage très agréable . Je crois qu'il mourra de douleur si mon héros ne fait pas exécuter son spectacle aux fêtes de madame la comtesse d’Artois ii, et moi je reprendrais peut-être un peu de vie si cette aventure pouvait me fournir une occasion de vous faire ma cour pendant quelques jours .
Je crois que cette Pandore avec sa boite, a été en effet la source de bien des maux, puisqu'elle fit mourir de chagrin ce pauvre Royer iii, et qu'elle est capable de jouer un pareil tour à La Borde . Les musiciens me paraissent encore plus sensibles que les poètes . Il y a longtemps, Monseigneur, que je cherche le moyen de vous envoyer un recueil qui contient Les Lois de Minos et plusieurs petits ouvrages en prose et en vers assez curieux iv. Je vous demanderais une petite place pour ce livre dans votre bibliothèque ; il est assez rare jusqu'à présent . Ne puis-je pas vous l'envoyer sous l'enveloppe de M. le duc d'Aiguillon ? J'attends sur cela vos ordres .
On va jouer Les Lois de Minos à Lyon, le spectacle sera très beau, mais les acteurs sont bien médiocres . Je compte que la pièce sera mieux jouée dans votre capitale de la Guyenne . Je n'irai point voir le spectacle de Lyon . Les suites de ma maladie ne me le permettent pas . Mais quand il s'agira d'obéir à vos ordres, je trouverai des ailes, et je volerai . Je vois qu'un certain voyage est un peu différé v; tant mieux, car nous n'avons point encore de printemps, mais en récompense nous sommes entourés de neige .
Conservez vos bontés à ce pauvre malade qui ne respire que pour en sentir tout le prix .
V.
N.B.- On me mande que La Borde a beaucoup retravaillé sa Pandore vi, et qu'elle est très digne de votre protection . »
i Le 26 avril, V* a écrit à Richelieu : « Je vous demande en grâce de donner ordre au sieur Patrat de jouer Lusignan, et s'il n'arrache pas des larmes j'ai tort ... ; j'ai été infiniment content lorsqu'il a joué devant un auditoire qui lui était favorable »
ii C'est-à-dire aux fêtes qui devaient être données en l'honneur du mariage du comte d'Artois avec Marie-Thérèse de Savoie, le 16 novembre 1773.
iii Le 4 novembre 1765, V* écrit à La Borde que « Royer avait fait presque toute la musique de cette pièce bizarre lorsqu'il s'avisa de mourir » Voir page 290 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80037z/f295.image.r...
Le 23 janvier 1755 à Cideville : «La seule chose dont je puisse bénir dieu est la mort de Royer », car V* a été très mécontent du remaniement du livret fait par Sireuil à la demande de Royer ; voir page 195 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f199.image.r...
et lettre du 6 octobre 1754 à Mme de Fontaine : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/10/05/o...
et du 23 janvier 1755 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/01/inde...
iv Sur le contenu du recueil, voir la lettre à d'Alembert du 27 mars 1773 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/03/27/m...
01:17 | Lien permanent | Commentaires (0)
04/05/2011
Je n'ai ni meuble ni cuisine , à cela près que je ne suis pas mal quand il fait beau
http://www.youtube.com/watch?v=B_l0X_El1qo
« A Charlotte-Sophie von Altenburg, comtesse Bentinck
Mon héroïne qui va voir des héros trouvera une tasse de mauvais café et si elle veut manger, quelque mauvais plat, chez son admirateur et chez son solitaire . Je n'ai ni meuble ni cuisine , à cela près que je ne suis pas mal quand il fait beau . J'irai à midi attendre au bord de l'eau dans ce Marquisat dégarni celle auprès de qui je voudrais passer ma vie dans quelque bon château bien étoffé, loin des empereurs et des rois de Danemark i. Je ne verrai probablement pas la revue ii, mais je verrai et j'entendrai celle qui mérite d'être vue, revue et entendue, et à qui j'ai voué un zèle, un respect, un attachement infini .
V.
Ce lundi [17 mai 1751] »
15:48 | Lien permanent | Commentaires (0)
avec soixante-dix-sept ans, des fluxions horribles sur les yeux et la goutte, on ne fait pas toujours ce qu’on voudrait
Pas de lettre en date d'un 4 mai, alors j'essaie de rattraper les manques passés, d'où la rédaction d'une lettre du 27 février 1771 à Ruffey .
Ce titre , grâce à Dieu (ou à Jean-Paul II le béat faiseur de miracle!), ne correspond pas à mon état de santé actuel . Je n'ai ni l'âge limite des lecteurs de Tintin, ni autre chose que des bras trop courts pour lire ; quant à la goutte , je la réserve pour me faire un café arrosé , ce qui me dote immédiatement du don de double vue .
77 ans comme :
- John Barry :
Let the rest of the world go by : http://www.deezer.com/listen-4943764
http://www.deezer.com/listen-968611 : Danse avec les loups
Goldfinger : http://www.deezer.com/listen-1037311
- Robert Castel :
http://www.youtube.com/watch?v=isIvC8l20Xo&feature=re...
- Bernadette , la seule , la vraie, à qui le jaune va si bien , des cheveux au costume "trois pièces":
http://www.youtube.com/watch?v=8itRYBZPudo
- Joan Collins , brune , elle !
http://www.youtube.com/watch?v=YjpCU4Zy9Cs&feature=re...
- François de Closets :
http://www.youtube.com/watch?v=wASDzhiJT_k
- Shirley Mac Laines , rousse à volonté :
http://www.oprah.com/oprahshow/Shirley-MacLaines-Beliefs-...
- Manu Dibango , grand-père percutant qui vint donner un concert, qui reste dans les mémoires, devant le château de Voltaire à Ferney :
http://www.youtube.com/watch?v=_xCUPx4JEws &feature=related
Il est de nombreux autres individus qui ont 77 ans à ce jour, mais que je ne cite pas pour cause d'antipathie affirmée ; je vous laisse les chercher .
Pour en revenir au courrier de Volti , voir :
http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/02/27/n...
Pour rester en rythme joyeux : http://www.youtube.com/watch?v=OzJ4e8e_lWk&feature=re...
02:55 | Lien permanent | Commentaires (0)
03/05/2011
Vous savez qu'il faut entrer un peu dans l'opinion des gens qu'on sollicite
Une Pandore rigolote : http://www.youtube.com/watch?v=aTybefyQ6FY
Une Pandora fatale :
http://www.deezer.com/listen-927731
http://www.deezer.com/listen-1435277
http://www.deezer.com/listen-4369732
5 mai 1773
Quoi ! Mon cher Orphée, vous voulez que ce soit moi qui agisse ii, moi si étranger dans votre cour, moi pauvre vieillard dont toute l'ambition est d'être oublié dans ce pays-là ! moi persécuté, moi mourant ! moi qui n'ai jamais eu la moindre correspondance avec la personne iii dont vous parlez !
J'ai grand peur qu'Orphée n'ait joué de sa lyre devant des animaux jaloux de lui . Mais vous approchez des dieux, vous êtes de l'Olympe iv, vous êtes à portée d’obtenir tout des déesses . Ces divinités daigneraient-elles seulement répondre à un mortel confiné dans un désert ? liraient -elles seulement sa lettre ? Le héros qui préside aux fêtes v daigne quelquefois se souvenir de moi, mais bien rarement . Je vais lui écrire et le prier de parler à la belle déesse . Je lui demanderai même si je puis hasarder une lettre, ce qui est extrêmement délicat dans la position où je suis . On m'a dit que beaucoup de choses avaient été applaudies à une répétition que vous fîtes faire , il y a , je crois, trois ans vi, quoique cette répétition fût très mal exécutée, mais que surtout la symphonie et les voix s’acquittèrent très mal de leur devoir au quatrième acte, et la musique ne parut que du bruit .
Cette répétition qui devait faire l'effet le plus favorable, en fit un désavantageux . Cette impression est restée à ce qu'on prétend dans la fête du surintendant des fêtes de cette année . Je lui dirai que ce quatrième acte est tout changé et que vous avez surtout accourci quelques endroits qui parurent trop longs .
Vous savez qu'il faut entrer un peu dans l'opinion des gens qu'on sollicite ; en un mot je vais faire tout ce qui dépendra de moi, mais encore une fois ce n'est pas dans les limbes où je suis que l'on dispose de la cour céleste .
Je vous embrasse bien tendrement ; je baise le manche de votre lyre et je finis ma lettre pour écrire au maître des Jeux.vii »
vii Voir lettre à Richelieu du même jour : page 193 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f198.image.r...
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