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19/03/2014

le centième denier de l'utile, dans une terre délabrée, est justement la racine cubique de rien du tout

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racine cubique de rien.jpg

 

 

« AU CONSEIL ROYAL DES FINANCES
[vers le 15 février 1759]
A nosseigneurs, nosseigneurs du Conseil :
Supplie humblement François Arouet de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre,

Contre le sieur Girard, receveur du domaine 1: disant qu'il a fait un bail à vie avec le sieur de Brosses, président au parlement de Dijon, le 11 décembre 1758, pour la jouissance de la terre de Tournay entre Gex et Genève, terre de l'ancien dénombrement, terre conservée par le roi en son conseil dans tous ses anciens droits et privilèges, par sa déclaration du 12 février 1755 ; que ces privilèges consistent à ne payer aucuns droits ; qu'à ce mépris des déclarations du roi, Girard persiste à exiger le centième denier ; que d'ailleurs jamais bail à vie n'a été sujet à ce droit dans les terres privilégiées; que Girard exige le centième denier d'un bail dont le contractant peut ne jouir qu'une année ou qu'un seul jour; que non-seulement il veut ce centième denier du prix du bail, mais de 12,000 livres de réparations que le contractant ne doit faire que dans trois ans, et que jamais on n'exige aucun droit de réparations faites ou à faire; que ledit Girard persiste, et prétend qu'il lui faut de l'argent sur l'argent que ledit Voltaire n'emploiera peut-être jamais, étant fort âgé, et sa carcasse devant naturellement être enterrée avant de rhabiller la carcasse du château de Tournay; que Girard exige le centième denier de l'agréable, de l'utile et de l'honorable de la seigneurie ( ce sont ses termes); or ledit Voltaire proteste que le centième denier de tout cela est zéro, attendu que le centième denier de l'encens à la messe et des prééminences ne va pas à une obole; le centième denier de l'agréable entre les Alpes et le mont Jura est au-dessous de rien, et le centième denier de l'utile, dans une terre délabrée, est justement la racine cubique de rien du tout ; partant, il espère que nosseigneurs du Conseil daigneront tirer ledit Voltaire des griffes du sieur Girard, etc. »

1Cette lettre est fictive, au moins sous cette forme ; elle a été imprimée à partir d 'un manuscrit envoyé à de Brosses sans doute en même temps que la lettre du 15 février 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/03/19/j-essuie-toutes-les-algarades-d-un-fermier-ivrogne-qui-a-tou-5326142.html

Le conseil royal des finances était une des hautes instances de la nation, et comprenait en effet, outre le roi qui le présidait effectivement, le dauphin, le chancelier (Guillaume de Lamoignon), le chef du conseil (le duc de Béthune), Feydeau de Brou, Trudaine, Boullongne et Berryer . Voir pourtant la lettre à Antoine-Benoit Girard de Propiac du même jour : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/03/20/je-prie-m-girard-de-ne-me-point-faire-de-frais-5327111.html

 

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