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12/08/2010

Je monte à cheval dans mes rêves, et je vais le grand galop à Andrinople.

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Au galop !

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D'un fabuleux guitariste, Manitas de Plata .

reves-cheval-plus-beau-flou-artistique_365166.jpg

 

 Et dédicace, spécialement pour Catherine  : http://www.deezer.com/listen-2639285

 

 

« A Catherine II

A Ferney 12è auguste 1773


 

       Madame,


 

      Que votre Majesté Impériale me laisse d'abord baiser votre lettre de Peterhof du 30 juin de votre chronologie grecque qui n'est pas meilleure que la nôtre. Mais de quelque manière que nous supputions les temps vous comptez vos jours par des victoires. Vous savez combien elles me sont chères. Il me semble que c'est moi qui ai passé le Danube. Je monte à cheval dans mes rêves, et je vais le grand galop à Andrinople. Je ne cesserai de vous dire qu'il me paraît bien étonnant, bien inconséquent, bien triste, bien mal de toute façon, que vos amis l'Impératrice reine et l'Empereur des Romains et le héros de Brandebourg [= Frédéric II], ne fassent pas le voyage de Constantinople avec vous. Ce serait un amusement de trois ou quatre mois tout au plus. Après quoi vous vous arrangeriez ensemble, comme vous vous êtes arrangés en Pologne [par son partage !].


 

Je demande bien pardon à Votre Majesté, mais cette partie de plaisir sur la Propontide me paraît si naturelle, si facile, si agréable, si convenable que je suis toujours stupéfait que les trois puissances aient manqué une si belle fête. Vous me direz, Madame, que je pourrai jouir de cette satisfaction avec le temps, mais permettez-moi de vous représenter que je suis très pressé, que je n'ai que deux jours à vivre, et que je veux absolument voir cette aventure avant de mourir. L'auguste Catherine ne peut-elle pas dire amicalement à l'auguste Marie-Thérèse : « Ma chère Marie, songez donc que les Turcs sont venus deux fois assiéger Vienne [ 1529 et 1683], songez que vous laissez passer la plus belle occasion qui se soit présentée depuis Ortogul ou Ortogrul, et que si on laisse respirer les ennemis du saint nom chrétien et de tous les beaux-arts, ces maudits Turcs deviendront peut-être plus formidables que jamais ? Le chevalier de Tott qui a beaucoup de génie, quoiqu'il ne soit pas ingénieur, fortifiera toutes leurs places sur la mer Égée et sur le Pont-Euxin [i1], quoique Moustapha et son grand vizir ignorent que ces deux petites mers se soient jamais appelées Pont-Euxin et mer Égée. Les janissaires et les Lévanti se disciplineront. Voilà notre ami Alibey mort, Moustapha va être maître absolu de ce beau pays de l'Égypte qui adorait autrefois les chats et qui ne connait point saint Jean Népomucène.


 

Profitons d'un moment favorable qui reste encore, Russes, Autrichiens, Prussiens, fondons sur ces ennemis de l'Église grecque et latine ; nous accorderons au roi de Prusse qui ne se soucie d'aucune Église une ou deux provinces de plus et allons souper à Constantinople. »



 

Certainement l'auguste Catherine fera un discours plus éloquent et plus pathétique, mais y a-t-il rien de plus raisonnable et de plus plausible? Cela ne vaut-il pas mieux que mes chars de Cyrus [proposés à Catherine, sans succès ; cf. lettre du 26 février 1769]? Hélas, l'idée de cette croisade ne réussira pas mieux que celle de mes chars ! vous ferez la paix, Madame, après avoir bien battu les Turcs. Vous aurez quelques avantages de plus, mais les Turcs continueront d'enfermer les femmes et d'être les amis des Welches [encore allusion à l'aide de la France aux Turcs], tout galants que sont ces welches.



 

Je ne suis donc qu'à moitié satisfait.



 

Mais ce n'est pas à moitié que je suis l'adorateur de Votre Majesté Impériale, c'est avec la fureur de l'enthousiasme, qu'elle pardonne ma rage à mon profond respect.



 

Le vieux malade de Ferney »



1iLe gouvernement Choiseul l'a envoyé avec des ingénieurs pour renforcer entre autres les fortifications de Constantinople ; cf. lettre du 20 décembre 1770 à Frédéric.

 

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11/08/2010

Voilà comme sont faits les talents, ma chère enfant, ils violent . Gardons qu'ils ne tuent.

 http://www.youtube.com/watch?v=XgDuH2bA1iw&feature=related

 http://www.youtube.com/watch?v=b8Zjj6mM0LE&feature=related

 http://www.youtube.com/watch?v=NPpgrJWqMvQ&feature=related

And so on !...

Talents ! tels que Volti ne les connaissait pas .

Violent-ils nos esprits ? Tuent-ils ? Non, heureusement ...

 

Mais je veux ce jour râler un peu . Chaque année on en fait un évènement national : revenons à la réalité, ce n'est qu'un rituel, une tradition . Religieuse dites-vous ?  

Le ramdam rituel commence ce jour, l'arbitraire religieux va encore pouvoir se manifester avec éclat et de zélés musulmans opportunistes vont montrer leur dur sacrifice pour acheter le pardon divin, et l'indulgence de leurs patrons .

De plus, et je n'invente rien : si on prolonge le jeûne du ramadan de six jours de plus, non seulment on acquiert le pardon des fautes de l'année écoulée mais on a un bonus de pardon pour l'année à venir ! Bon calcul qui me rappelle furieusement les primes des abonnements téléphoniques .

Il fut un temps où les catholiques achetaient des indulgences ; puis plus démocratiquement celles-ci purent être obtenues par de simples prières assorties de conditions spirituelles (près de chez moi, une vieille croix sur le socle de laquelle on peut lire "40 jours d'indulgence à qui en état de grâce récitera un pater et un ave ", ce qui est d'un rapport qualité/prix imbattable !).

Frères musulmans praticants, cessez de marchander avec Dieu et laissez en paix ceux d'entre vous qui ne pratiquent pas . Ce sont des humains qui ne sont ni meilleurs ni pires que vous.

Je ne connais pas un(e) seul(e) musulman(e) qui finisse le mois de ramadan plus mince qu'il/elle l'a commencé . Meilleur ? Dieu seul le sait !

Pour le dire crûment, cessez de nous les gonfler en vous glorifiant d'un jeûne de quelques heures, encadré de deux périodes où vous vous remplissez la panse comme le chameau avant la traversée du désert . Après tout, vous n'êtes pas plus méritants que les malades hospitalisés qui mangent à 18h et jeûnent jusqu'au lendemain à 7 ou 8h : 13 heures de jeûne et ils n'en font pas tout un plat -sic-, et ils ne considèrent pas qu'ils sont la crême du monde .

Aurez-vous encore le front de vous réclamer de Dieu et du prophète Mohammed lorsque vos coreligionnaires feront exploser leurs bombes par aveuglement sectaire ?

http://fr.wiktionary.org/wiki/ramdam

Ah ! Volti ! accorde-moi encore une bonne dose de tolérance ! Pour la liberté de pensée et d'expression je m'en occupe .

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

A Lunéville ce 12 [août1749]


 


 

Ma chère enfant, j'ai reçu aujourd'hui deux lettres de vous qui m'ont désolé. Je vous croyais à la campagne et vous avez été malade à Paris. Peut-être l'êtes vous encore . Vous travaillez avec un autre feu que Mme du Bocage [i]; et ce feu vous consume. Votre pièce [ii] en vaudra mieux mais il ne faut pas que l'architecte soit accablé par sa maison. Je vous donne des conseils que je n'ai pu prendre pour moi. Il y a longtemps comme vous le savez que je roulais dans ma tête il y a près d'un an [iii] le dessein de venger la France de l'infamie de Catilina. Je voulais rendre à Cicéron la gloire qu'il aimait tant et qu'on avait indignement avilie, jusqu'à le faire maquereau de sa fille ainsi qu'un certain prêtre, imaginé uniquement pour partager ce maquerellage. Je voulais venger le sénat de Rome,[iv] et tout Paris. Je voulais réparer la honte de la nation. Mais ce projet m'avait passé de la tête car comment introduire des femmes dans la conspiration de Catilina ? Enfin le 3 du présent mois un démon ennemi du repos s'empara de moi, me donna l'idée d'une femme qui fait un effet terrible [v], me fit relire Sallustre et Plutarque, me fit travailler malgré moi, et me mena si grand train qu'en huit jours de temps j'ai fait la pièce. Je suis encore épouvanté de ce tour de force. Je lisais tous les deux jours un nouvel acte à Mme du Châtelet, qui est bien difficile ; à M. de Saint-Lambert,[vi] qui a autant de goût que d'esprit ; enfin à notre petite société. La plénitude du sujet, la grandeur romaine, le pathétique affreux de la situation de ma femme, Cicéron, Catilina, César, Caton m'ont élevé au-dessus de moi-même, m'ont donné des forces que je ne connaissais pas. Si on m'avais demandé : Combien de temps vous faut-il pour cet ouvrage ? J'aurais répondu : deux ans . Il a été fait en huit jours, et, il faut tout dire, en huit nuits ; je me meurs, je vais dormir. Voilà comme sont faits les talents, ma chère enfant, ils violent . Gardons qu'ils ne tuent. Songez à votre santé. Mais songez aussi à votre pièce. Je vous enverrai quelques scènes de Catilina, mais en donnant donnant souvenez-vous de M. de La Reynière [vii]. On dit que Mérope est froide, en comparaison de Catilina, et que je n'ai encore fait que cette tragédie. Ce n'est pas tout à fait vrai. Mais entre nous, je crois que Catilina est sans contredit ce que j'ai fait de plus fort à beaucoup d'égards.



 

Il faut être bien sot et bien méchant pour m'imputer ce livre que j'ai à peine lu [viii]. Quelle impertinence ! Laissons dire et faisons ; travaillons, soyons heureux et revoyons-nous, et que je puisse dire

Vivons pour nous ma chère Rosalie [ix]



 

 Quel est donc le fat avec qui vous êtes brouillée ? Comment va la pièce à qui je m'intéresse plus qu'à Catilina [x] ? Les plates lettres que celles de Rousseau [xi]! Bonsoir. »

 



iMme du Bocage vient de faire représenter Les Amazones avec un piètre succès.


 

ii La Femme à la mode, qui deviendra La Coquette punie.


 

iii Le 21 août, à d'Argental, il dira six mois. Le Catilina de Crébillon fut représenté le 21 décembre 1748.


 

iv Il donnera le titre de Rome sauvée à sa pièce.


 

v A d'Argental, le 12 août : le « diable » lui « fit imaginer l'épouse de Catilina ».


 

vi Amant de la marquise et père de l'enfant qu'elle porte.


 

vii Par qui passer pour ne pas payer le port des lettres.


 

viii La Connaissance des beautés et des défauts de la poésie et de l'éloquence dans la langue française, 1749, de D. Durand.


 

ix Le 5 janvier, V* lui envoya le début de La Vie à Paris, Épître à Mme Denis dont il cite ici le premier vers.


 

xLa future Coquette punie.


 

xi Jean-Baptiste Rousseau : Lettres sur différents sujets, dont on attribue l'édition à « Racine le fils ou Racine fi comme disait l'abbé Gedoyn » et comme le dit V* dans ses lettres du 30 juillet à Mme Raynal et du 24 à Mme Denis.

10/08/2010

je sais qu'il a pris pour ses ministres des philosophes, à un seul près qui a le malheur d'être dévot

 Je ne sais si le remaniement ministérie annoncé (changement d'herbage rejouit les veaux !) correspondra à ce diagnostic voltairien . Je crains plutôt qu'il ne soit constitué que de dévots, dévots au Dieu-président bien entendu .

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Ce lien est juste là pour "Devot", ne cherchez pas plus loin , je ne comprends pas assez l'allemand pour être au clair sur le texte, mais un peu de hard rock de temps en temps, ça décolle la pulpe .

Et puis pour une lettre à un teuton, c'est raccord ...

 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse


 

[Vers le 10 août 1775]


 

Lekain dans vos jours de repos

Vous donne une volupté pure [i]

On le prendrait pour un héros,

Vous les aimez, même en peinture.

C'est ainsi qu'Achille enchanta

Les beaux jours de votre jeune âge.

Marc-Aurèle enfin l'emporta.

Chacun se plait dans son image.


 

Le plus beau des spectacles, Sire, est de voir un grand homme, entouré de sa famille [ii], quitter un moment tous les embarras du trône pour entendre des vers, et en faire le moment d'après de meilleurs que les nôtres. C'est ce qui arrive souvent et ce qui n'arrive point à Versailles . Il me paraît que vous jugez très bien l'Allemagne, et cette foule de mots qui entrent dans une phrase, et cette multitude de syllabes qui entrent dans un mot, et ce goût qui n'est pas plus formé que la langue. Les Allemands sont à l'aurore ; ils seraient en plein jour si vous aviez daigné faire des vers tudesques.


 

C'est une chose assez singulière que Lekain et Mlle Clairon [iii] soient tous deux à la fois auprès de la maison de Brandebourg. Mais tandis que le talent de réciter du français vient obtenir votre indulgence à Sans-Souci, Gluck vient nous enseigner la musique à Paris . Nos Orphées viennent d'Allemagne si vos Roscius vous viennent de France . Mais la philosophie d'où vient-elle ? De Potsdam, Sire, où vous l'avez logée et d'où vous l'avez envoyée dans la plus grande partie de l'Europe.


 

 Je ne sais pas encore si notre roi marchera sur vos traces, mais je sais qu'il a pris pour ses ministres des philosophes, à un seul près qui a le malheur d'être dévot.[iv]


 

 Nous perdons le goût, mais nous acquérons la pensée. Il y a surtout un monsieur Turgot qui serait digne de parler avec Votre Majesté . Les prêtres sont au désespoir. Voilà le commencement d'une grande révolution. Cependant on n'ose pas encore se déclarer ouvertement, on mine en secret le vieux palais de l'imposture fondé depuis 1775 années. Si on l'avait assiégé dans les formes, on aurait cassé hardiment l'infâme arrêt qui ordonna l'assassinat du chevalier de La Barre et de Morival. On en rougit, on en est indigné, mais on s'en tient là, on n'a pas eu le courage de condamner ces exécrables juges à la peine du talion. On s'est contenté d'offrir une grâce dont nous n'avons point voulu. Il n'y a que vous de vraiment grand. Je remercie Votre Majesté avec des larmes d'attendrissement et de joie.[v] J'ai demandé à Votre Majesté ses derniers ordres ; et je les attends pour renvoyer à ses pieds ce Morival dont j'espère qu'elle sera très contente.[vi]


 

Daignez conserver vos bontés pour ce vieillard qui ne se porte pas si bien que Lekain le dit. »[vii]

 

 

i Lekain a quitté Paris le 13 mai et va jouer « les rôles d'Oedipe, de Mahomet et d'Orosmane. » écrit Frédéric le 24 juillet, qui ajoute : « L'année passée, j'ai entendu Aufresne ; peut-être lui faudrait-il un peu du feu que l'autre a de trop … cependant je n'ai pu retenir mes larmes ni dans Œdipe, ni dans Zaïre. »

ii Le 24 juillet, Frédéric : « Il y a eu beaucoup de spectateurs à ces représentations : ma sœur Amélie, la princesse Ferdinand, la landgrave de Hesse, et la princesse de Wurtemberg, votre voisine, qui est venue ici de Montbéliard pour entendre Lekain. »


 

iii Qui est alors la maitresse d'Auguste-Christian-Frédéric, margrave d'Anspach, puis de Bayreuth ; cf. lettre du 22 septembre 1773 à Frédéric où V* la dit « la philosophe de monsieur le Margrave »


 

iv Le « dévot » : Louis-Nicolas-Victor de Félix, comte de Muy.


 

v Morival d'Etallonde bénéficiera des bontés de V* et de Frédéric cf. lettres du 7 et 29 juillet à d'Alembert, et celle du 7 juillet à Frédéric.

vi V*, le 29 juillet « suppliait (Sa) Majesté de daigner lui mander » s'il devait « renvoyer Morival à Vesel ou l'adresser à Potsdam ».


 

vii Frédéric, le 24 juillet : « j'ai été bien aise d'apprendre de (Lekain) que vous vous promeniez dans votre jardin, que votre santé est assez bonne, et que vous avez plus de gaieté encore dans votre conversation que dans vos ouvrages ... »

Je passe mon temps à faire des gambades sur le bord de mon tombeau

Jolie fin de vie : 

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 Oui, Volti n'aurait  pas été en désaccord avec Sarcloret (Sarclo pour les amis )lui qui jusqu'au bout a apprécié la joliesse des femmes, tant actrices qu'amies .

 

 

« A Marie Vichy de Chamrond, marquise du Deffand


 

10è auguste 1772


 

J'ai tort, Madame, j'ai très tort [&]; mais je n'ai pas pourtant si grand tort que vous le pensez. Car en premier lieu je croyais que vous n'aviez plus du tout de goût pour les vers, et surtout pour les miens. Et secondement, je n'étais pas content de l'édition dont vous avez la bonté de me parler. Je vous en envoie une meilleure.


 

Pour peu que vous vouliez connaître le système de Spinosa vous le verrez assez proprement exposé dans les notes [&&]. Si vous aimez à vous moquer des systèmes de nos rêveurs, il y aura encore de quoi vous amuser.


 

Vous verrez de plus dans les notes des Cabales, si j'ai eu si grand tort de me réjouir de la chute et de la dispersion de Messieurs [&&&]. La plupart sont comme moi à la campagne ; je leur souhaite d'en tirer le parti que j'en tire .


 

Je me suis mis à établir une colonie ; rien n'est plus amusant . Ma colonie serait bien plus nombreuse et plus brillante si M. M. l'abbé Terray ne m'avait réduit à une extrême modestie.[&&&&]


 

Puisque vous avez vu M. Huber, il fera votre portrait, il vous peindra en pastel, à l'huile, en mezzo tinto, il vous dessinera sur une carte avec des ciseaux, le tout en caricature. C'est ainsi qu'il m'a rendu ridicule d'un bout de l'Europe à l'autre. Mon ami Fréron ne me caractérise pas mieux pour réjouir ceux qui achètent ses feuilles.


 

Nous voici bientôt, Madame, à l'anniversaire centenaire de la Saint-Barthélémy. J'ai envie de faire un bouquet pour le jour de cette belle fête [&&&&&]. En ce cas vous aurez raison de dire que je n'ai point changé depuis cinquante ans que j'ai fait La Henriade [&&&&&&]. Mon corps n'a pas plus changé que mon esprit. Je suis toujours malade comme je l'étais. Je passe mon temps à faire des gambades sur le bord de mon tombeau ; et c'est en vérité ce que font tous les hommes, ils sont tous Jean qui pleure et qui rit ; mais combien y en a-t-il malheureusement qui sont Jean qui mord, Jean qui vole, Jean qui calomnie, Jean qui tue !


 

Eh ! Bien , Madame,n'avouerez-vous pas à la fin que ma Catherine Seconde n'est pas Catherine qui file ? ne conviendrez-vous pas qu'il n'y a rien de plus étonnant ? Au bout de quatre ans de guerre, au lieu de mettre des impôts, elle augmente d'un cinquième la paie de toutes ses troupes . Voilà un bel exemple pour nos Colberts.


 

Adieu, madame, quoi qu'en dise M. Huber, je n'ai pas longtemps à vivre, et quoi que vous en disiez, j'ai la plus grande envie du monde de vous faire ma cour. Comptez que je vous suis attaché avec le plus tendre respect. »

 

&Elle lui reprochait le 1er août de ne pas lui avoir envoyé la dernière édition de ses quatre derniers ouvrages.


 

&& Dans les Systèmes.


 

&&& L'ancien parlement de Paris, dissous et exilé «  à la campagne » par Maupéou, après la disgrâce de Choiseul. Mme du Deffand et ses amis blâmaient V* d'approuver la reforme de Maupéou, et en déduisaient qu'il avait l'ingratitude d'abandonner Choiseul.

Le 23 octobre, à Marmontel, il explique pourquoi il a écrit les Cabales, et ajoute : « Je n'ai prétendu … être d'aucun parti ; et c'est même ce qui m'a déterminé à faire la petite plaisanterie des Cabales … plus je me suis moqué de toutes les cabales, moins on me doit accuser d'en être. »


 


 


 

&&&& Cf. lettre du 31 juillet à Mme de Saint Julien.


 

&&&&& Stances pour le 24 août 1772, qu'il enverra le 15 août à Mme du Deffand avec commentaire : « Ce bouquet n'estpas d'oeillets et de roses, il y rentre un peu d'épines et de chardons … Il est triste qu'il entre nécessairement un peu de fleurs de lys dans ce malheureux bouquet. Mais avouez que j'ai raison quand je dis que la nature a eu beaucoup de bonté en nous rendant frivoles et vains. Si nous étions toujours occupés de l'image de nos malheurs et de nos sottises, la nature huamine serait la nature infernale. »


 

&&&&&& Qui contient une description de la Saint Barthélémy.

qu'il prie Dieu avec elle mardi, qu'il couche avec elle mercredi ; et puis il entrera à l'Académie tant qu'il voudra, et quand il voudra.

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Danser ?

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En tout cas, Volti connaissait bien l'usage de la promotion canapé, sinon pour lui-même, du moins pour ses amis. Ah ! quels conseils réalistes !

 

 

 

« A Louise-Florence Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay

et au

baron Frédéric Melchior von Grimm


 

[vers le 10 août1760]


 

 

Il faut qu'il entre [Diderot, à l'Académie fançaise], mon adorable philosophe, qu'il entre, qu'il entre, vous dis-je. Contrains-les d'entrer [évangile de Luc].


 

Notre cher Habacuc [ = prophête = Grimm qui écrivit le Petit prophête de Boemischbroda], du courage, je vous en prie. La chose vous paraît impossible ? Je vous [ai] déjà dit que c'est une raison pour l'entreprendre. Nous réussirons ; croyez-moi. Ce sera un beau triomphe. Mais que Diderot nous aide et qu'il 'aille pas s'amuser à griffonner du papier dans un temps où il doit agir. Il n'a qu'une chose à faire mais il faut qu'il la fasse. C'est de chercher à séduire quelque illustre sot ou sotte, quelque fanatique sans avoir d'autre but que de lui plaire. Il a trois mois pour adoucir les dévots. C'est plus qu'il ne faut . Qu'on l'introduise chez madame … ou madame … ou madame, lundi, qu'il prie Dieu avec elle mardi, qu'il couche avec elle mercredi ; et puis il entrera à l'Académie tant qu'il voudra, et quand il voudra.


 

Comptez qu'on est très bien disposé à l'Académie. Je recommande surtout le secret . Que Diderot ait seulement une dévote dans sa manche ou ailleurs ; et je réponds du succès. On s'est déjà ameuté sur mes pressantes sollicitations. Travaillez sous terre tous tant que vous êtes. Ne perdez pas un moment, ne négligez rien. Vous porterez à l'Infâme un coup mortel. Et je vous donne ma parole d'honneur de venir à l'Académie le jour de l'élection. Je suis vieux. Je veux mourir au lit d'honneur.


 

Ma belle philosophe sait-elle que je fais bâtir une église ? Oui une église d'ordre dorique à Ferney ? Ô Habacuc, criez sur les toits cette nouvelle consolante. Si Diderot veut y venir dire la messe je la servirai.


 

Ma chère philosophe, voici une autre histoire, une autre négociation. N'est-ce pas M. Faventine qui a le département du domaine [fermier général des droits du domaine]? M. d'Epinay ne peut-il pas quand il rencontrera ce terrible Faventine au conseil des fermes, lui dire : Monsieur, ne savez-vous rien de nouveau sur le pays de Gex ? ne vous a-t-on rien dit touchant certains arrangements avec le Roi [les privilèges seigneuriaux attachés à la terre de Tournay], n'a-t-il rien transpiré ? Alors M. Faventine dira oui ou non ; et ce oui ou ce non, vos belles mains me l'écriront.


 

Mais qu'il entre, qu'il entre, qu'il entre à l'Académie. J'ai cela dans la tête, voyez-vous ! Ma belle philosophe, je vous ai dans mon cœur. Il est vieux mon cœur, mais il rajeunit quand il pense à vous. Tronchin dit que vous avez de gros tétons [&]. Qu'il entre, vous dis-je, et détruisons l'Infâme. Tel est mon avis et qu'on ruine Carthage, disait Caton, qui n'était pas si vieux que moi.


 

Ô belle philosophe ! Ô Habacuc ! je vous salue en Belzébuth.


 

V. »

&Théodore Tronchin par qui elle s'est faite soigner à Genève.

J.-J. Rousseau dit dans les Confessions : « ...elle était fort maigre, fort blanche, de la gorge comme sur ma main. »

Elle aurait été enceinte.

Ce qui vaudrait cette allusion de V* ?

09/08/2010

je me cherche des crimes pour justifier votre indifférence. Je vois bien qu'il n'y a point de passion qui ne finisse

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 Comme toute grande coquette, se faire désirer ...

 

 

« A Catherine II, impératrice de Russie


 

A Ferney, 9 auguste 1774


 

Madame,


 

Je suis positivement en disgrâce à votre cour. Votre Majesté Impériale m'a planté là pour Diderot ou pour Grimm ou pour quelque autre favori. Vous n'avez eu aucun égard pour ma vieillesse. Passe encore si Votre Majesté était une coquette française, mais comment une impératrice victorieuse et législatrice peut-elle être si volage ?


 

Je me suis brouillé pour vous avec tous les Turcs [voir tout ce que V* a écrit depuis 1768 sur eux et le sultan depuis le début de la guerre russo-turque], et même encore avec M. le marquis Pugatshew [$], et votre oubli est la récompense que j'en reçois! Voilà qui est fait, je n'aimerai plus d'impératrice de ma vie.


 

Je songe cependant que j'aurais bien pu mériter ma disgrâce. Je suis un petit vieillard indiscret qui me suis laissé toucher par les prières d'un de vos sujets nommé Rose, Livonien de nation, marchand de profession, déiste de religion, qui est venu apprendre la langue française à Ferney. Peut-être n'a-t-il pas mérité vos bontés que j'osais réclamer pour lui.


 

Je m'accuse encore de vous avoir ennuyée par le moyen d'un Français dont j'ai oublié le nom [« L'avocat Dumesnil qui voulait aider (l'impératrice) à faire des lois » et dont V* reparlera le 19 octobre], qui se vantait de courir à Pétersbourg pour être utile à Votre Majesté et qui sans doute a été fort inutile.


 

Enfin je me cherche des crimes pour justifier votre indifférence. Je vois bien qu'il n'y a point de passion qui ne finisse.[$$] Cette idée me ferait mourir de dépit si je n'étais pas tout près de mourir de vieillesse.


 

Que Votre Majesté, Madame, daigne donc recevoir cette lettre comme ma dernière volonté, comme mon testament. Signé votre admirateur, votre délaissé, votre vieux Russe de Ferney.


 

V. »

$ Insurrection menée par le pseudo-tsar Pougatchev ; en janvier Catherine écrivait : «  Je m'attendais à y voir [à Silistrie] les oisifs fort occupés d'un voleur de grand chemin qui pille le gouvernement d'Orembourg, et qui tantôt pour effrayer les paysans prend le nom de Pierre III et tantôt celui de son employé ».



 

$$ Le 4 septembre Catherine répond : « … quoique très plaisamment vous prétendiez être en disgrâce à ma cour, je vous déclare que vous ne l'êtes point … Je vous révêre tout comme par le passé … Mais en vérité … j'aurais envie de me plaindre à mon tour des déclarations d'extinction de passion que vous me faites... »

 

 

Dernière coquetterie : http://www.deezer.com/listen-1370548