03/06/2023
Je vois que l'industrie se perfectionne tous les jours, et qu'au fond la France est un corps robuste qui se rétablit aisément en peu d'années par du régime, après ses maladies et ses saignées
... AA ou AA-, peut importe la note donnée par des bureaucrates , suivons l'exemple voltairien : travaillons pour nous et nos contemporains et nos descendants , ayons "le ridicule de planter à mon âge" ; et tout ira mieux .
Stop !
« A François-Thomas Moreau , seigneur de La Rochette
3 novembre 1767 à Ferney 1
Les arbres dont vous me gratifiez, monsieur, sont heureusement arrivés à Lyon. Je vais les envoyer chercher. La saison est encore favorable. Je sens également l'excès de vos bontés, et le ridicule de planter à mon âge mais ce ridicule est bien compensé compensé par l'utilité dont il sera à mes successeurs, et au petit pays inconnu que j'ai tâché de tirer de la barbarie et de la misère.
J'ai eu dans mes terres, en dernier lieu, moitié du régiment de Conti et de la légion de Flandre; ils auraient été obligés de coucher à la belle étoile il y a dix ans. Les officiers et les soldats ont été fort à leur aise. Je suis toujours très convaincu que la France en vaudrait mieux d'un tiers si les possesseurs des terres voulaient bien en prendre soin eux-mêmes ; mais je gémis toujours sur les déprédations des forêts.
Je ne pense pas du tout que la France soit aussi dépeuplée qu'on le dit. Je vois, par le dénombrement exact des feux, fait en 1753, qu'il y a environ vingt millions de personnes dans le royaume, en comptant les soldats, les moines et les vagabonds. Je vois que l'industrie se perfectionne tous les jours, et qu'au fond la France est un corps robuste qui se rétablit aisément en peu d'années par du régime, après ses maladies et ses saignées. Je ne suis point du nombre des gens de lettres qui gouvernent l'État du fond de leurs greniers, et qui prouvent que la France n'a jamais été si malheureuse mais je suis du petit nombre de ceux qui défrichent en silence des terres abandonnées, et qui améliorent leur terrain et celui de leurs vassaux.
Je vous dois bien des remerciements, monsieur, de m'avoir aidé dans mon petit travail. Je dois payer au moins la peine de vos enfants trouvés qui ont arraché les arbres, et qui les ont fait voiturer à Chailly. Je vous supplie de vouloir bien me dire à qui et comment je puis faire tenir une petite lettre de change.
Continuez, monsieur, à être utile à l'État, par le bel établissement à la tête duquel vous êtes ; jouissez de vos heureux succès ; comptez-moi parmi ceux qui en sentent tout le prix, et qui sont véritablement sensibles au bien public.
J'ai l'honneur d'être avec autant de respect que d'estime, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire. »
1 Copie du XIXè siècle faite d'après l'édition « Correspondance de Voltaire avec feu M. Moreau de La Rochette, inspecteur général des pépinières de France », Mémoires d'agriculture […] publiés par la Société d’agriculture du département de la Seine (Paris , An X [1801-1802] par François de Neufchâteau . C'est le texte qui a été suivi .
Voir impérativement à l'heure où l'on met enfin l'écologie en avant : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5533755b/texteBrut
et pages 264 et suiv. : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5848750t/f269.image.r=voltaire
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je me flatte que vous aurez la bonté de m'envoyer un petit mémoire des frais que toute la procédure aura coûté, ils seront payés exactement
... C'est avec politesse que le président Macron rassure la présidente de Moldavie Maia Sandu qui aurait pu se faire du souci en suivant la dégradation de la note financière de la France de AA à AA- par Fitch et peut-être aussi Standard and Poor's . La France a encore de quoi payer les voyages de son principal représentant de commerce .
https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/communaute-polit...
« a Sébastien Dupont, Avocat
au Conseil souverain d'Alsace etc.
à Colmar
A Ferney 3è novembre 1767
Mon cher ami, j'ai reçu les contrats ; je me flatte que vous aurez la bonté de m'envoyer un petit mémoire des frais que toute la procédure aura coûté, ils seront payés exactement .
Il me paraît toujours d'une nécessité absolue que M. Simon forme sans aucun délai une opposition à la saisie des marchands de Lyon . Il est très essentiel pour moi que M. le duc de Virtemberg voie que mes démarches sont contre ses créanciers plutôt que contre lui-même ; il faut que je joigne les procédés aux procédures , et que je me fasse payer avec toute la bienséance et toute la sûreté possibles .
Adieu , mon cher ami , je vous embrasse de tout mon cœur .
V. »
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02/06/2023
Ces bagatelles amusent un moment deux ou trois cents oisifs de la ville et sont ensuite oubliées pour jamais
... Comme le dernier match du multimillionnaire Messi avec le PSG ( Perdant Sans Gloire ) : https://www.huffingtonpost.fr/sport/video/christophe-galt...
Heureusement !
« A Etienne-Noël Damilaville
2 novembre 1767 1
J'ai reçu, mon cher ami, les deux actes de Colmar que vous avez eu la bonté de m'adresser . Ils me seront très utiles dans le délabrement des affaires de M. le duc de Wurtemberg . Personne ne me paye et j'ai depuis six semaines les régiments de Conti auquel il faut faire les honneurs du pays . Je suis plus embarrassé que la Sorbonne ne l'est avec M. de Marmontel .
J'ai fait des petites notes sur Charlot, mais je doute que ces notes passent à la douane des pensées . Je doute aussi beaucoup que Merlin ne fasse une seconde édition . Ces bagatelles amusent un moment deux ou trois cents oisifs de la ville et sont ensuite oubliées pour jamais .
Je viens d'apprendre qu'il y a des Mémoires imprimés du maréchal de Luxembourg 2, et je suis honteux de l'avoir ignoré ; ils me seront très utiles pour la nouvelle édition que l'on fait du Siècle de Louis XIV; et je vous prie instamment, mon cher ami, de me les faire venir par Briasson, ou de quelque autre manière.
Connaîtriez-vous un petit écrit sur la population d'une partie de la Normandie et de deux ou trois autres provinces de France ? On dit que l'intendant, M. de La Michodière, a part à cet ouvrage, qui est, dit-on, très exact et très bien fait 3.
Mandez-moi surtout des nouvelles de votre cou, je m'y intéresse plus qu'à tous les dénombrements de la France. »
1 Copies contemporaines : Darmstadt B. ; B. H. ;édition de Kehl . Voir lettre du 31 octobre 1767 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/05/31/il-faut-bien-quelque-philosophe-que-l-on-soit-ne-pas-neglige-6445602.html
2 François-Henri de Montmorency, duc de Luxembourg : Mémoire pour servir à l'histoire du maréchal duc de Luxembourg, depuis sa naissance, en 1628, jusqu'à sa mort, en 1695, contenant des anecdotes très-curieuses, et sa détention à la Bastille, écrite par lui-même; La Haye (Paris), 1758, in-4° : https://books.google.fr/books?id=PB59pmY7Gg0C&pg=PP1&lpg=PP1&dq=Fran%C3%A7ois-Henri+de+Montmorency,+duc+de+Luxembourg+:+M%C3%A9moire+pour+servir+%C3%A0+l%27histoire+du+mar%C3%A9chal+duc+de+Luxembourg,+depuis+sa+naissance,+en+1628,+jusqu%27%C3%A0+sa+mort,+en+1695,+contenant+des+anecdotes+tr%C3%A8s-curieuses,+et+sa+d%C3%A9tention+%C3%A0+la+Bastille,+%C3%A9crite+par+lui-m%C3%AAme;+La+Haye+(Paris),+1758,+in-4%C2%B0.&source=bl&ots=K6uPtoqRA1&sig=ACfU3U3j5kFAaWWrUPcsXEVj8V-7W-h2ig&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjo94W_96P_AhVvTKQEHSneBSMQ6AF6BAgDEAM
3 Messance : Recherches sur la population des généralités d'Auvergne, de Lyon, de Rouen, et de quelques provinces et villes du royaume, 1766, in-4" : https://books.google.bj/books?id=AyhGpkZI2AgC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
On a dit à l'époque que La Michodière et Audra avaient collaboré à cet ouvrage ; voir notamment la Correspondance littéraire, VII, 130 . Du reste V* connaissait La Michodière à qui il a écrit : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1757/Lettre_3422
C'est l'ouvrage dont Voltaire parle dans une note de L'Homme aux quarante écus; voir https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome21.djvu/338
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pour le fortifier dans sa sainte religion
... Kitchissime régal de nos anciennes grenouilles de bénitier et punaises de sacristie !
Vraiment cucul !
« A Gabriel Cramer
[octobre-novembre 1767]
Monsieur Cramer nous abandonne ; il nous avait promis un exemplaire des Nouveaux Mélanges, et il ne les a point envoyés .
On ne lui avait point promis les Lettres sur Rabelais 1, et on les lui envoie pour le fortifier dans sa sainte religion . »
1 Sur cet ouvrage, voir lettre du 4 octobre 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/05/12/ces-marauds-la-ne-valent-pas-la-plaisanterie-il-ne-faut-poin-6442855.html
Voir : https://www.musee-rabelais.fr/2021/07/08/voltaire-critique-rabelais/
et : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6305006z.texteImage
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01/06/2023
P*** n'a point voulu recevoir de mon argent, mais je l'ai forcé d'en prendre
... Ah ! que ne suis-je à la place de P*** !
N. B. : https://apprendreaeduquer.fr/probleme-relation-argent/
« A Henri Rieu
[vers le 31 octobre 1767]
Mon cher ami, je viens de recevoir les deux premiers tomes de Pellet 1 . Je suis un peu étonné de voir Guillaume Tell immédiatement après Le Cid, sans que l’éditeur donne aucune raison de cette étrange accolade .
Je vous suis bien obligé de toutes vos bontés ; on aura bien de la peine à empêcher Marc-Michel Rey d'être un fripon et un insolent . Pourriez-vous cependant me faire avoir les Doutes sur la religion suivi de l'Analyse de Spinoza par Boulainvilliers 2.
L'Esprit du clergé ou le Christianisme primitif vengé 3, traduit de l'anglais ;
La Théologie portative 4 de l'abbé Bernier ;
Le Recueil de Passeran 5.
Vous pourriez aisément me faire avoir ces livres par votre ami M. Cramer .
Je vous embrasse bien tendrement . Pellet n'a point voulu recevoir de mon argent, mais je l'ai forcé d'en prendre . »
1 Du Théâtre français ; voir lettre du 18 avril 1767 à Rieu : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/10/18/vous-me-ferez-un-plaisir-extreme-de-faire-depecher-les-feuil-6407183.html
2 Doutes sur la religion, suivis de l'analyse du Traité théologico-politique de Spinoza . L'attribution à Boulainvilliers est douteuse ; voir Norman L. Terray : « Boulainvilliers, The man and the mask », Studies on Voltaire … 1955.
Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k845270.texteImage
3 John Trenchard and Thomas Gordon : L'Esprit du clergé ou le Christianisme primitif vengé des entreprises et des excès de nos prêtres modernes [traduit par d'Holbach et Naigeon], 1767 .
Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84524z
et : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k845259.image
Le titre original est The Independant Whig, ouvrage que V* possède aussi : https://oll.libertyfund.org/title/trenchard-the-independent-whig-4-vols-1720-1743
4 Paul-Henri Dietrich, baron d'Holbach : Théologie portative ou Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne, par M. l'abbé Bernier, 1768 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3045227k.texteImage
et voir lettre du 22 août 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/04/18/je-sais-monsieur-que-vous-vous-amusez-quelquefois-de-littera-6438954.html
5 Albert Radicati, comte de Passeran : Recueil de pièces curieuses sur les matières les plus intéressantes, 1736 : https://books.google.fr/books?id=ZWuyZLkcT-sC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
Plus tard dans l'année V* publiera son Épître aux Romains , 1768, sous le nom de Passeran : https://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99%C3%89p%C3%AEtre_aux_Romains/%C3%89dition_Garnier
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