22/02/2013
On parle de je ne sais quelles croquignoles
... Qui chez moi ne sont pas féminines et bonnes à croquer !
Instinctivement, au masculin singulier, Croquignol me ramène aux jours d'été, jours de vacances pluvieux où je me jetais sur Les Pieds Nickelés chez mon grand-père et apprenais presque par coeur les aventures de Croquignol (au long nez, avec un petit côté Charles Trenet-Fou chantant), Filochard (borgne) et Ribouldingue (barbe en bataille). Leur ingéniosité dans la filouterie n'avait d'égal que leur invincible propension à perdre le bien mal acquis . Le système D dans toute sa beauté m'égayait, la morale triomphante (la police) me laissait avec un goût d'inachevé et quasi d'injustice . Aujourd'hui, le système D m'enchante toujours, et la police m'agace toujours , essentiellement quand je suis garé en zone bleue ou devant un parcmètre un jour sans monnaie .
« A Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg
Aux Délices 17 décembre [1757]
Et monsieur votre fils, madame, ? que devient-il ? J'ai toujours peur ; je vous prie de m’en dire des nouvelles . On parle de je ne sais quelles croquignoles que MM. de Hanovre nous ont données près de Harbourg 1. Monsieur votre fils est tout propre à s'être présenté là des premiers, et avoir fourré son nez plus avant que d'autres . Je vous supplie madame de dissiper mes inquiétudes . Je vais à Lausanne dans le moment . Je voudrais bien que l'île Jar 2 fut dans mon lac . C'est avec une douleur extrême que j'envisage cette éternelle séparation . Avez-vous toujours la consolation de Mme de Brumath 3? Je vous présente à toutes deux mes respects et mes regrets .
V. »
1 Voir : http://books.google.fr/books?id=RZBDAAAAcAAJ&pg=PA20&lpg=PA20&dq=guerre+de+sept+ans+%22harbourg%22&source=bl&ots=cxbTNQLGdB&sig=0cuCmGN6lqkEQeo0ecz5J4NjprI&hl=fr&sa=X&ei=bDInUcjYHvOp0AWV_4HoBg&ved=0CEcQ6AEwBA#v=onepage&q=guerre%20de%20sept%20ans%20%22harbourg%22&f=false
3 Mme Zuckmantel de Brumath, sœur de l’envoyé de Prusse à Mannheim, que V* appelle « sœur Broumath » , amie et dame de compagnie de la comtesse ..
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21/02/2013
Si j'étais plus jeune , si j'avais de la santé les choses ne se passeraient pas ainsi
... Oh ! là là !! vous verriez ce que vous verriez !
« A Charlotte-Sophie von Altenburg, comtesse Bentinck
Aux Délices 17 décembre [1757]
Puisque vous voulez madame mettre le portrait de votre saint 1 dans votre oratoire, voici l'antienne qui peut convenir à vos sentiments pour lui .
De l'auguste Thérèse il mérita le choix,
Il fait le bonheur de l'empire,
Le voir , l'entendre quelquefois
Est le bonheur que je désire .2
J'exprime mes idées avec les vôtres madame, mais je suis un vieux Suisse qui n'est pas fait pour prétendre à la jouissance comme vous . Si j'étais plus jeune , si j'avais de la santé les choses ne se passeraient pas ainsi . J'aurais fait mon pèlerinage à Vienne, j'aurais tâché d'entrevoir de loin l’immortelle Thérèse, de pouvoir m'approcher un peu du grand homme qui vous enchante, de remercier le très aimable M. de Durazzo 3, de faire quelques coquetteries à la belle Idamé 4 dont vous êtes si contente . Au lieu de me donner toutes ces belles fêtes, je vais quitter les neiges du voisinage de Genève pour les glaçons de Lausanne, je vais madame, au lieu de vers doux et galants en faire de tristes sur vos perfidies 5, sur vos inconstances, sur les promesses trompeuses que vous m'aviez faites de venir philosopher avec moi sur le beau billet que vous avez donné à Panchaud ; tantôt vous poursuivez votre procès, tantôt vous partez pour Venise, puis vous vous engagez pour le pays de Vaud, de là vous faites votre paquet pour Rome, et somme totale, vous restez à Vienne . Je le crois bien vraiment . La gloire de votre auguste Thérèse et les succès de votre grand homme, de belles victoires, de belles fêtes, tout cela vaut bien la Suisse . Souvenez-vous au moins de moi madame quand vous aurez gagné quelque nouvelle bataille et pris quelque capitale .
Mille respects,
V. »
1 Kaunitz ; voir lettre du 5 décembre 1757 à la comtesse : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/11/on-pouvait-avoir-au-printemps-une-paix-glorieuse-voila-ce-qu.html
3 Giacomo Durazzo qui fut ambassadeur de Gênes à Vienne : http://fr.wikipedia.org/wiki/Giacomo_Durazzo
4 Personnage de L'Orphelin de la Chine : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-l-orphelin-de-la-chine-avertissement-114073427.html
5 Voir les mêmes reproches dans sa lettre du 5 décembre 1757 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/11/on-pouvait-avoir-au-printemps-une-paix-glorieuse-voila-ce-qu.html
20:00 | Lien permanent | Commentaires (0)
En fait d'amour, il faut parler et faire
... En de justes proportions, ne pas faire sans parler, ni parler sans rien faire .
Ce que ne semble pas avoir compris Dirty Silly Keutard, d'après le dernier livre paru, écrit par une femme sans foi ni lois, avide de publicité et fric .
Je leur dédie ceci :
« A François de Chennevières
[vers décembre 1757]
Grand merci mon cher confrère de votre petite pastorale .
Vous possédez la langue de Cythère,
Si vos beaux faits égalent votre voix,
Vous êtes maître en l'art divin de plaire ;
En fait d'amour, il faut parler et faire ,
Ce dieu fripon ressemble assez aux rois :
Les bien servir n'est pas une petite affaire .
Hélas ! il est plus aisé mille fois
De les chanter que de les satisfaire .
Il se peut pourtant que vous ayez autant de talents pour le service de Misis que vous en avez pour faire de jolis vers 1. En ce cas je vous fait réparation d'honneur . Si vous avez quelque nouvelle intéressante, je vous prie de m'en faire part quoique en prose . Je vais faire lire Misis à Mme Denis la paresseuse qui n'écrit point mais qui vous aime véritablement . »
1 Voir : http://books.google.fr/books?id=J85sqGU0otIC&pg=PA376&lpg=PA376&dq=Fran%C3%A7ois+de+Chennevi%C3%A8res+misis&source=bl&ots=ZRj1aQS10g&sig=PLmdGmrK34zI2z0X11Asac5WNwE&hl=fr&sa=X&ei=CTUmUamVELO10QW0iIDoAg&ved=0CFoQ6AEwCA#v=onepage&q=Fran%C3%A7ois%20de%20Chennevi%C3%A8res%20misis&f=false
Pour Misis et Glaucé voir page 367 , lien précédent .
16:26 | Lien permanent | Commentaires (0)
Je demande aujourd'hui la permission de la robe de chambre
... Puis on terminera la journée par une soirée pyjama , natürlich !
« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay
[décembre 1757]
Je demande aujourd'hui la permission de la robe de chambre à Mme d'Epinay . Chacun doit être vêtu selon son état ; madame d'Epinay doit être coiffée par les Grâces et il me faut un bonnet de nuit . »
15:23 | Lien permanent | Commentaires (0)
Il arrive souvent que ceux à qui on montre une inscription qu'ils ont demandée la veulent changer
... Et c'est ainsi qu'on se retrouve avec des affiches électorales avec des niaiseries toutes plus affligeantes les unes que les autres .
Enfin, passons !
Aumônier du roi de Pologne
Lorraine, Lunéville
Aux Délices 12 décembre [1757]
Monsieur, je suis toujours prêt à exécuter vos ordres et dès que tout est prêt j'aurai l'honneur de vous envoyer l'épitaphe 2, soit en vers soit en prose , soit latine soit française, à laquelle je me serai déterminé . Je compte que le marbre pourra contenir au moins cinq ou six lignes . Il arrive souvent que ceux à qui on montre une inscription qu'ils ont demandée la veulent changer et qu'un autre se présente pour donner la sienne . Je compte être à l'abri de ce désagrément puisque c'est vous qui me chargez de cet emploi .
A l'égard des ornements, je crois qu'il est convenable d'y placer quelque génie avec les attributs des mathématiques . Si je savais quels ornements on a employés je serais plus à portée d'y conformer l'inscription 3. Je vous réponds tard parce que j'ai été moi-même tout prêt d'avoir besoin d'épitaphe . J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments que je vous dois monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur,
Voltaire. »
1 Voir : note 31 : http://www.blamont.info/textes727.html
2 Marie-Josèphe d'Autriche, femme de Frédéric Auguste II de Saxe (Auguste III de Pologne) fille de l'empereur Joseph, est morte à Dresde le 17 novembre 1757. (Beuchot.) . Voir lettre du 2 décembre 1757 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/09/vous-pourriez-bien-entendre-parler-encore-d-une-bataille-ne.html
3 Rappel au sujet de la tombe de Mme du Châtelet ; voir : http://www.ot-lunevillois.com/UserFiles/File/emilie-du-chatelet.pdf
10:06 | Lien permanent | Commentaires (0)
20/02/2013
j'avais fait ce qui était en moi pour sauver la vie de cet infortuné
... Et vous tous qui me lisez et lisez Voltaire, vous pouvez aussi sauver des vies en étant donneur de sang, donneur de moelle, donneur d'organes .
De tous ces dons, le plus facile [sic] étant le don d'organes puisqu'il arrive après notre mort .
N'oublions pas de faire ces gestes pour les infortunés malades et blessés .
http://www.dondusang.net/rewrite/site/37/etablissement-francais-du-sang.htm?idRubrique=756
http://www.france-adot.org/don-organe.html
« A Adrien-Michel-Hyacinthe BLIN de SAINMORE 1
Aux Délices 12 décembre 1757
Ma mauvaise santé monsieur m'a empêché de vous remercier plus tôt de votre poème sur l'amiral Bing 2; je suis d'autant plus sensible à votre ouvrage que j'avais fait ce qui était en moi pour sauver la vie de cet infortuné ; je lui avais envoyé les témoignages de M. le maréchal de Richelieu 3 et de nos marins qui tous le justifiaient . Mes soins, dont il m'a témoigné sa reconnaissance en mourant n'ont servi qu'à rendre sa condamnation plus injuste . J'ai l'honneur d'être, monsieur, avec l'estime que je vous dois, votre très humble et très obéissant serviteur.
Voltaire
gentilhomme ordinaire du roi . »
2Voir : La mort de l'amiral Bing : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54640760/f2.image
3 Voir lettre du 20 décembre 1756 à Richelieu : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/07/26/si-je-voulais-transcrire-les-paroles-favorables-que-vous-m-a.html
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19/02/2013
l'emporter sur un receveur quand ils ont la justice pour eux
... Est le rêve de tous les contribuables taxés d'office, mais c'est un rêve vain et ruineux, je peux vous l'affirmer . Justice ou pas, le percepteur perçoit ce qui est réclamé, dû ou indû, ensuite on voit si, éventuellement, il y aurait possibilité d'envisager, sans trop se presser, de restituer le trop perçu après vous avoir mis sur la paille .
Où est le contribuable ?
Voltaire est bien inspiré de faire jouer le piston .
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
conseiller d'honneur du Parlement
rue de la Sourdière
à Paris
Aux Délices 12 [décembre 1757]
Mon cher ange voici le plus grand service que vous puissiez jamais me rendre . Je ne peux vous dire à quel point je m'intéresse à cette affaire . Il s'agit de gagner au conseil un procès qui paraît bien juste et dont le succès dépend de M. de Courteille 1. C'est contre un receveur du domaine qu'on plaide et les descendants du grand Budé 2 doivent l'emporter sur un receveur quand ils ont la justice pour eux . Je vous demande avec la plus tendre instance de parler à M. de Courteille avec la plus grande force . Je vous aurai une éternelle obligation .
V.
MM. de Duglas 3 qui sont joints à MM. Budé de Boissy vous rendront ce billet . »
1 Intendant des Finances, responsable entre autres des ligues suisses . Voir : http://books.google.fr/books?id=R6b3UNFg_UMC&pg=PA306&lpg=PA306&dq=courteilles+Intendant+des+Finances&source=bl&ots=B7lnQmXoJT&sig=afnLeX3wvH4QNrDh8HvY98e_5-A&hl=fr&sa=X&ei=I7gjUYepNe6a1AWewoAQ&ved=0CEkQ6AEwBQ#v=onepage&q=courteilles&f=false
2 Guillaume de Budé ; voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume_Bud%C3%A9
3 Le manoir de Montréal avait été légué par Bernard de Budé à Jacob et Anne-Elisabeth Budé, celle-ci étant veuve de Marc Pictet . Le manoir avait été acquis le 13 avril 1757 par Charles Joseph Douglas qui l'occupera le 12 juin 1761 .Voir pages 60-61 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5533048s/f82.image
19:12 | Lien permanent | Commentaires (0)