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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

VRP de luxe = Voltaire

« A Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental

 

J’ai commandé sur le champ, Madame, à mes Vulcains quelque chose de plus galant que la ceinture de Vénus pour madame la marquise de Chalvet, la Toulousaine. Elle aura cercle de diamants, boutons, repoussoir, aiguilles de diamants, crochet d’or, chaîne d’or colorié. Vous aurez du très beau et du très bon. J’ai un des meilleurs ouvriers de l’Europe. C’était lui qui faisait à Genève les montres à répétition, où les horlogers de Paris mettaient leur nom impudemment. Je ne saurais vous dire le prix actuellement, cela dépendra de la beauté des diamants.

 

Vous voulez, peut-être, Madame, des chaines de marcassites séparément ; c’est sur quoi je vous demande vos ordres. Les chaînes ordinaires sont d’argent doré, dont chaque chaton porte une pierre. Ces chaînes valent six louis d’or.

Celles dont les chatons portent des pierres appelées jargon, qui imitent parfaitement le diamant, valent onze louis.

Voilà tout ce que je sais de mes fabricants, car je ne les vois guère : ils travaillent sans relâche. Vous prétendez que j’en fais autant de mon côté ; vous me faites bien de l’honneur. Je n’ai guère de moments à moi ; il m’a fallu bâtir plus de maisons que le président Hénault n’en avait dans le quartier Saint Honoré ; et il me faut à présent combattre la famine. Le pain blanc vaut chez nous huit sols la livre. J’ai envie d’en porter mes plaintes aux Ephémérides du citoyen. [édité par le physiocrate Dupont de Nemours]

Vous me dites que du temps des sorciers j’aurais été brûlé. Vraiment, Madame, je le serais bien à présent si on en croyait l’honnête gazetier ecclésiastique. Mais n’appelez point l’Epitre au roi de la Chine un ouvrage. Ce sont les vers de Sa Majesté chinoise qui sont un ouvrage considérable. On y trouve sa généalogie : il descend en droite ligne d’une vierge. Cela n’est point du tout extraordinaire en Asie.

Je ne sais pas encore ce qui s’est passé au parlement. Il a du trouver fort mauvais qu’on veuille le policer, lui qui prétend avoir la grande et la petite police. Il ferait bien mieux, peut-être de ne point ordonner des autodafés pour des chansons.

La Sophonisbe de Lantin deviendra ce qu’elle pourra. On tâchera de trouver un quart d’heure pour envoyer quelques pompons à cette Africaine ; mais la journée n’a que vingt-quatre heures, et on n’est pas sorcier comme vous le prétendez.

On dit que Lekain est plus gras que jamais et se porte à merveille ; cela doit réjouir infiniment M. d’Argental, il aura enfin des tragédies bien jouées.

Je me mets à l’ombre des ailes de mes anges. Mme Denis leur est attachée autant que moi : c’est beaucoup dire.

Mille respects.

 

V.

7 décembre 1770 »

 

La vente est une chose pour laquelle le Patriarche semble avoir des dispositions, grand connaisseur en bijoux (il était généreux envers les dames qu'il aimait ), placier en montres et bas de soie . Le luxe, il connait bien. Et la mise en boîte aussi : "Sa Majesté chinoise" et le monde asiatique ont droit à un revers lifté imparable qui me réjouit .

Faute d'autodafés pour des chansons, contentons nous des attaques en justice pour des poupées ou des photos de people.

Le Vieux ferneysien montre encore qu'il a du coeur en lançant un combat contre la famine...

 

ps: je fais un petit saut ailleurs et je reviens ...

Coucou, me revoilou. Parler de famine m'a donné un petit creux et il me restait une demi-pomme avec un quignon de pain ! Il neige, il pleut, hiver rude, homme blanc planqué devant télé voir Inspecteur Harry (quand même moins sopo que les Experts à la mie de pain de tous les pays : aujourd'hui,  qui n'a pas sa bande d'experts n'est pas digne d'émettre pour nos chères têtes blondes !). "Grande ou petite police", Clint Eastwood ne connait que la loi de l'efficacité du bien contre le mal, ou plutot du moins mauvais contre le pire.Il ne sera pas dit que seul le comte d'Argental aura des tragédies bien jouées...

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09/12/2008 | Lien permanent

Votre banquier de Bordeaux peut aisément vous avancer, pour six mois, deux cents louis d’or

... Petit conseil amical (sic) à Valérie Pécresse , moderne Perrette au pot au lait, qui a eu le grand tort de s'offrir le frisson de la conquête du pouvoir présidentiel . Résultat : nada . Elle va se renflouer, c'est sûr, Sarko l'a bien fait , ces animaux politiques ont des facilités qui échappent à grande masse des contribuables . On ne prête toujours qu'aux riches .

 

 

« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu

À Ferney, 9 janvier 1767

Le favori de Vénus, de Minerve, et de Mars, s’est donc ressenti des infirmités attachées à la faiblesse humaine. Il a succombé sous la fatigue des plaisirs ; mais je me flatte qu’il est bien rétabli, puisqu’il m’a écrit de sa main . Il est d’ailleurs grand médecin, et c’est lui qui guérit les autres. Je n’ai pas l’honneur d’être de l’espèce de mon héros : dès que les neiges couvrent la terre dans mon climat barbare, les taies blanches s’emparent de mes yeux . Je perds presque entièrement la vue. Mon héros griffonne de sa main des lettres qu’à peine on peut lire, et moi, je ne peux écrire de ma belle écriture ; j’entrerai d’ailleurs incessamment dans ma soixante et quatorzième année, ce qui exige l’indulgence de mon héros.

Nous faisons à présent la guerre très paisiblement aux citoyens têtus de Genève. J’ai trente dragons autour d’un poulailler qu’on nomme le château de Tournay, que j’avais prêté à M. le duc de Villars, sur le chemin des Délices. Je n’ai point de corps d’armée à Ferney ; mais j’imagine que, dans cette guerre, on boira plus de vin qu’on ne répandra de sang.

Si vous avez, monseigneur, une bonne actrice à Bordeaux, je vous enverrai une tragédie nouvelle pour votre carnaval ou pour votre carême. Maman Denis, et tous ceux à qui je l’ai lue, disent qu’elle est très neuve et très intéressante. La grâce que je vous demanderai, ce sera de mettre tout votre pouvoir de gouverneur à empêcher qu’elle ne soit copiée par le directeur de la comédie, et qu’elle ne soit imprimée à Bordeaux. J’oserais même vous supplier d’ordonner que le directeur fît copier les rôles dans votre hôtel, et qu’on vous rendît l’exemplaire à la fin de chaque répétition et de chaque représentation . En ce cas, je suis à vos ordres.

Voici le mémoire concernant votre protégé 1, et l’emploi de la lettre de change que vous avez eu la bonté d’envoyer pour lui. Quand même je ne serais pas à Ferney, il restera toujours dans la maison ; maman Denis aura soin de lui, et je le laisserai le maître de ma bibliothèque. Il passe sa vie à travailler dans sa chambre, et j’espère qu’il sera un jour très savant dans l’histoire de France. Je lui ai fait étudier l’histoire des pairs et des parlements, ce qui peut lui être fort utile. Il se pourra faire que bientôt je sois absent pour longtemps de Ferney . Je serais même aujourd’hui chez M. le chevalier de Beauteville, à Soleure, et de là j’irais chez le duc de Virtemberg et chez l’Électeur palatin, si ma santé me le permettait.

Dans cette incertitude, je vous demande en grâce d’avoir pour moi la même bonté que vous avez eue pour Gallien. Ni vos affaires, ni celles de la succession de M. le prince de Guise, ne seront arrangées de plus de six mois. Je me trouve, à l’âge de soixante et quatorze ans, dans un état très désagréable et très violent. Votre banquier de Bordeaux peut aisément vous avancer, pour six mois, deux cents louis d’or, en m’envoyant une lettre de change de cette somme sur Genève. Il le fera d’autant plus volontiers que le change est aujourd’hui très avantageux pour les Français ; et il y gagnera, en vous faisant un plaisir qui ne vous coûtera rien. J’aurai l’honneur d’envoyer alors mon reçu à compte, de deux cents louis d’or, à M. l’abbé de Blet, sur ce qui m’est dû de votre part. Il joindra ce reçu à ceux que mon notaire a précédemment fournis à vos intendants ; ou, si vous l’ordonnez, j’adresserai ce reçu à vous-même, et vous l’enverrez à M. l’abbé de Blet. Je ne vous propose de le lui adresser en droiture que pour éviter le circuit.

Si je suis à Soleure, le trésorier des Suisses me comptera cet argent, et se fera payer à Genève. Je vous aurai une extrême obligation, car, quoique j’aie essuyé bien des revers en ma vie, je n’en ai point eu de plus imprévu et de plus désagréable que celui que j’éprouve aujourd’hui.

Ayez la bonté de me donner vos ordres sur tous ces points, et de les adresser à Genève sous l’enveloppe de M. Hennin, résident de France. La lettre me sera rendue exactement, quoiqu’il n’y ait plus de communication entre le territoire de France et celui de Genève ; et si je suis à Soleure, Mme Denis m’enverra votre lettre. Vous pouvez prescrire aussi ce que vous voulez qu’elle dépense par an pour les menues nécessités de Gallien ; elle vous enverra le compte au bout de l’année.

Je n’ai d’autres nouvelles à vous mander des pays étrangers, sinon que le corps des négociants français, qui est à Vienne, m’a écrit que vous partiez incessamment pour aller chercher une archiduchesse 2, et qu’il me demandait des harangues pour toute la famille impériale et pour Votre Excellence. J’ai répondu lanternes 3 à ce corps, qui me paraît mal informé.

À l’égard du petit corps de troupes qui est dans mes terres, j’ai bien peur d’être obligé, si je reste dans le pays, de faire plus d’une harangue inutile pour l’empêcher de couper mes bois.

On dit que M. de La Borde ne sera plus banquier du roi. C’est pour moi un nouveau coup, car c’est lui qui me faisait vivre.

Je me recommande à vos bontés, et je vous supplie d’agréer mon très tendre respect.

V. »

2   Ce sera finalement Marie-Antoinette, qui épousera, en 1770, le dauphin, depuis Louis XVI.

3 Lanternes s'emploie comme bagatelles, pour opposer à quelqu'un une fin de non-recevoir ou une incrédulité ironique .

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20/04/2022 | Lien permanent

J'ai toujours été persuadé qu'il faut mépriser les critiques, mais que c'est un devoir de réfuter la calomnie

 Y-a-t'il "critique" dans ce monde politique français (qui fait bien rire mes voisins Suisses ! ) ?

Y-a-t'il "calomnie" de la part d'un monde journalistique "pourri" ?

Relais par un monde politique dit d'opposition, critique et calomnieux , des chacals, qui hurlent pour détourner l'attention de leurs propres (ou plutot malpropres ) manoeuvres.

De pourri, pour l'instant je ne vois pas de trace dans le travail des journalistes . Ce sont eux qui ont le plus à perdre dans cette détestable affaire Woerth-Bettencourt-Sarkozy- ...etc.

Un journaliste convaincu de calomnie risque sa place, donc son gagne- pain .

L'homme politique ne risque que sa rétrogradation, mise sur la touche, puis grâce au copinage retrouve un travail tranquille, bien payé, avec une retraite imméritée et conséquente . Mais il est vrai que c'est dur de tomber du cocotier quand on oublie que c'est de là haut qu'on montre le mieux son cul !... Mais il est vrai que c'est dur de se faire attrapper la main dans le pot de confiture et d'assurer que c'est la main d'un autre .

J'ai bien noté : "je vous mets au défit de trouver une quelconque preuve matérielle ..." .

Moi, je vous mets au défit de prouver votre innocence avec des preuves matérielles .

 

 

 

«  A Etienne-Noël Damilaville



 

11 juillet 1767



 

Il est très certain, mon cher ami, que les protestants de Guyenne sont accusés d'avoir voulu assassiner plusieurs curés, et qu'il y a près de deux cents personnes en prison à Bordeaux pour cette fatale aventure[*] qui a retardé l'arrivée de M. le maréchal de Richelieu à Paris. C'est dans ces circonstances odieuses que l'infâme La Beaumelle m'a fait écrire des lettres anonymes [**]. J'ai été forcé d'envoyer aux ministres le mémoire ci-joint [intitulé Mémoire présenté au ministère ou Mémoire pour être mis à la tête d'une nouvelle édition qu'on prépare du Siècle de Louis XIV (1767)]. C'est du moins une consolation pour moi d'avoir à défendre la mémoire de Louis XIV et l'honneur de la famille royale en prenant la juste défense de moi-même contre un scélérat audacieux, aussi ignorant qu'insensé [***]. J'ai toujours été persuadé qu'il faut mépriser les critiques, mais que c'est un devoir de réfuter la calomnie. Au reste j'ai mauvaise opinion de l'affaire des Sirven. Je doute toujours qu'on fasse un passe-droit au parlement de Toulouse [= qu'ôte l'affaire Sirven au parlement de Toulouse] en faveur des protestants, tandis qu'ils se rendent si coupables, ou du moins si suspects. Tout cela est fort triste ; les philosophes ont besoin de constance.



 

On dit qu'il n'y a point de M. Mercier, que c'est un nom supposé [il s'agit de L'Homme sauvage, de J.-G.-B. Pfeil, « histoire traduite par M.(Louis-Sébastien) Mercier » , 1767; cf. lettre du 19 juin à d'Alembert]. Cela est-il vrai ? »

 

 

*V* écrit à Richelieu, qui est gouverneur de Guyenne, et celui-ci répond le 1er août : « Comme vous dites que tout est bien, vous ne pouvez vous dispenser de dire la même chose dans (l') occasion … des protestants de St Foy accusés d'avoir composé une troupe de cent personnes pour aller causer avec le curé qui n'aimant pas la conversation sauta par la fenêtre et se sauva, le parlement informé, et je puis assurer … que ce parlement ne pense point du tout comme celui de Toulouse pour las protestants, mais s'il voyait quelque chose qui ne fût pas si bien … il pourrait être fort brutal. »


 


 


 

**A Damilaville le 4 juillet : « J'ai reçu quatre-vingt-quatorze (lettres anonymes) de la même écriture, et je les ai toutes brûlées . Enfin j'en ai reçu une quatre-vingt-quinzième qui ne peut être écrite que par La Beaumelle … ou par quelqu'un à qui il l'aura dictée puisque dans cette lettre il n'est question que de La Beaumelle même. »

Ce dernier écrira au marquis de Gudanes, commandant du pays de Foix, qu'il n'a «  pas plus de part à ces lettres que le Grand Turc », qu' « il y a longtemps que la guerre est ouverte entre Voltaire et (lui) et (que) si (il) étai(t) d'humeur à l'attaquer, (il) n'aurait que faire de prendre le masque de l'anonyme », il soupçonne même V* d'avoir « fabriqué lui-même celle qu'il a envoyée à M. le comte de Saint-Florentin ».


 


 

***Vraisemblablement à Saint Florentin, dans le billet d'accompagnement du 8 juillet, V* « implore protection » du ministre « contre la calomnie et contre les lettres anonymes », présente sa « requête en forme de mémoire » , car « il s'agit des plus horribles noirceurs imputées à la famille royale » (notamment dans une réédition qu'il évoque de son Siècle de Louis XIV annoté par La Beaumelle) et il « supplie d'imposer silence à La Beaumelle » dont il donne l'adresse.

Il énumère quelques unes de ces « noirceurs » à son éditeur Lacombe, le 7 août : « On sait bien à Paris que Louis XIV n'a point empoisonné le marquis de Louvois ; que le dauphin, père du roi, ne s'est point entendu avec les ennemis pour faire prendre Lille ; que monsieur le duc, père de M. le prince de Condé d'aujourd'hui, n'a point fait assassiner M. Vergier ... »

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10/07/2010 | Lien permanent

Je n'ai point peuplé, et j'en demande pardon à Dieu . Mais aussi la vie est-elle toujours quelque chose de si plaisant q

...Un petit accent amer avec une pointe d'humour, tel est l'esprit de ce grand homme .

NB.-- Vient de paraitre :

https://www.franceinter.fr/culture/voltaire-amoureux-le-p...

On peut être amoureux, et stérile physiquement parlant, et prolixte et génial intellectuellement, Voltaire nous le prouve .

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A suivre ...

Je le lirai dès la semaine prochaine .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

A Ferney, 2 janvier 1763 1

J'ai reçu, mon très cher frère, le petit chapitre concernant l'Encyclopédie 2, et j'ai retranché sur-le-champ le petit article où je combattais les droits du parlement 3, quoique je sois bien persuadé que le parlement n'a aucun droit sur les privilèges du sceau ; mais je ne veux point compromettre mes frères . Je sais fort bien que quand on s'avise de prendre le parti de l'autorité royale contre messieurs, messieurs vous brûlent ; et le roi en rit . D'ailleurs dans le petit chapitre des billets de confession et des querelles parlementaires et épiscopales 4, j'ai dit assez rondement la vérité . J'ai peint les uns et les autres tout aussi ridicules qu'ils étaient, sans pourtant y mettre de caricature .

J'ai lu l’analyse d'Eponine avec plus de plaisir que je n'aurais lu la pièce . Je plains le tripot français qu’on appelle théâtre . Je comptais que la divine Clairon viendrait dans le tripot de Ferney, mais je vois bien qu'elle restera dans celui de Paris .

J'ai une envie extrême de lire un mémoire que M. Loyseau fit , il y a quelques années, pour Mlle Alliot de Lorraine 5. J'ai connu cette demoiselle à Lunéville et le style de M. Loyseau augmente ma curiosité . Je demande en grâce à mon frère de m'obtenir cette grâce de M. Loyseau .

J'attends la population de M. de Beaumont . Ce livre sera sans doute ma condamnation 6. Je n'ai point peuplé, et j'en demande pardon à Dieu . Mais aussi la vie est-elle toujours quelque chose de si plaisant qu'il faille se repentir de le l'avoir pas donnée à d'autres ?

Nous touchons, je crois, à la décision du Conseil sur l'affaire des Calas . Est-il vrai qu'il faudra préalablement faire venir les pièces de Toulouse ? Ne sera-ce pas plutôt après la révision ordonnée que le parlement de Toulouse sera obligé d'envoyer la procédure ?

Au reste, mes frères, gardez-vous bien de m'imputer le petit livre sur la tolérance 7, quand il paraîtra . Il ne sera point de moi, et ne doit point en être . Il est de quelque bonne âme qui aime la persécution comme la colique .

Frère Thieriot se tue à écrire ; dites-lui qu'il se ménage . Cependant, raillerie à part, je lui pardonne s'il mange bien, s'il dort bien, et surtout si son frère m’écrit .

J'embrasse tous mes frères . Ma santé est pitoyable . Écrasez l’infâme .

P.S. – Il y a un petit mémoire incendié d'un président au mortier ou à la mortier 8, frère peu sensé de l’insensé d'Argens . Je ne hais pas à voir les classes du parlement se brûler les unes les autres en cérémonie . Cela me paraît fort plaisant, et digne de notre profonde nation . Mais vous me feriez surtout un plaisir extrême de m'envoyer par la première poste, le mémoire du président au mortier . »

1 Dans l'édition de Kehl manque le second paragraphe omis dans la copie Beaumarchais, qui ajoute plus loin la lettre du 10 janvier 1763 à Damilaville, suivie par les autres éditions . Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/05/correspondance-annee-1763-partie-1.html

3 Effectivement ce chapitre ne contient rien sur ces matières .

4 Ce chapitre constitue le chapitre XXXVI du Précis du siècle de Louis XV : voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Pr%C3%A9cis_du_si%C3%A8cle_de_Louis_XV/Chapitre_36

5 Mémoire pour la demoiselle Alliot contre le nommé La Ralde soi-disant tuteur de Basile -Amable de Beauvau. , 1761 , d'Alexandre-Jérôme Loyseau de Mauléon .Voir : https://archive.org/stream/barreaufranaisc04clai/barreaufranaisc04clai_djvu.txt

6 Ce livre n'est pas identifié ; tout ce qu'on en sait se réduit à ce qu'on lit dans la lettre du 21 janvier 1763 à Damilaville ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/06/correspondance-annee-1763-partie-2.html

7 Évidemment Le Traité sur la tolérance .

8 Alexandre-Jean-Baptiste de Boyer, chevalier d'Éguilles, a publié des mémoires contre ses collègues au parlement d'Aix, en faveur des jésuites . Ils ont été édités par Auguste Carayon sous le titre Mémoires du président d'Eguilles sur le parlement d'Aix et les jasuites, adressé à Sa Majesté Louis XV, 1867 . On disait effectivement président au mortier ou à mortier (dictionnaire de Richelet ) .Voir : https://sites.google.com/a/orecer.space/gorgishripat/memoires-du-president-d-eguilles-sur-le-parlement-d-aix-et-les-jesuites-adresses-a-sa-majeste-louis--B002K2R9VE

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10/11/2017 | Lien permanent

Il est certain que si les animaux raisonnaient avec les hommes, ils auraient toujours raison, car ils suivent la nature,

... Qu'en dit le béluga égaré en Seine et qu'il aurait fréquentée sans trop de gène si celle-ci n'était pas aussi polluée ? Il ne mange pas, et cela inquiète, il vaudrait mieux se demander quelles saletés il a déjà avalées et dont il ne veut plus . https://www.francetvinfo.fr/animaux/bien-etre-animal/belu...

Le béluga égaré dans la Seine, dans l'écluse de Notre-Dame-de-la-Garenne (Eure), le 6 août 2022. (JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)

 

 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse

Du 3è mars 1767

Sire,

J’entends très bien l’aventure des deux chiens 1, et je l’entends d’autant mieux que je suis un peu mordu. Mes petites possessions touchent aux portes de Genève. Tout commerce est interrompu par cette ridicule guerre ; elle n’ensanglante pas encore la terre, mais elle la ruine. Vos chiens répondent très pertinemment à nos héros français et bernois. Il est certain que si les animaux raisonnaient avec les hommes, ils auraient toujours raison, car ils suivent la nature, et nous l’avons corrompue.

À l’égard du violon 2, je crains de n’entendre pas le mot de l’énigme 3. Est-ce le roi de Pologne, qui, ne pouvant pas lui-même venir à bout de ses évêques, s’est voulu secrètement appuyer de Votre Majesté, de la Russie, de l’Angleterre, et du Dannemark, et qui n’est actuellement appuyé que de la Russie ? Est-ce l’impératrice de Russie, qui soutient seule à présent le fardeau qu’elle avait voulu partager avec trois puissances ?

Il me paraît que je tourne autour du mot de l’énigme ; mais je peux me tromper ; vous savez que je ne suis pas grand politique.

Votre alliée l’impératrice a eu la bonté de m’envoyer son mémoire justificatif 4, qui m’a semblé bien fait. C’est une chose assez plaisante, et qui a l’air de la contradiction, de soutenir l’indulgence et la tolérance les armes à la main ; mais aussi l’intolérance est si odieuse qu’elle mérite qu’on lui donne sur les oreilles. Si la superstition a fait si longtemps la guerre, pourquoi ne la ferait-on pas à la superstition ? Hercule allait combattre les brigands, et Bellérophon les Chimères ; je ne serais pas fâché de voir des Hercules et des Bellérophons délivrer la terre des brigands et des Chimères catholiques.

Quoi qu’il en soit, vos deux contes sont bien plaisants ; votre génie est toujours le même, votre raison supérieure est toujours ingénieuse et gaie. J’espère que Votre Majesté daignera m’envoyer quelque nouveau conte sur la folie de ne vouloir pas qu’un prince afferme son bien 5, lorsqu’il est permis au dernier paysan d’affermer le sien . Cela ne me paraît pas juste, et mérite assurément un troisième conte.

J’ai eu l’honneur de vous parler, dans ma dernière lettre 6, du nommé Morival, cadet dans un de vos régiments à Vesel ; c’est un jeune homme très bien né, et dont on rend de fort bons témoignages. Est-il convenable qu’il ait été condamné à être brûlé vif chez des Picards, pour n’avoir pas salué une procession de capucins, et pour avoir chanté deux chansons ? L’Inquisition elle-même ne commettrait pas de pareilles horreurs. Pour peu qu’on jette les yeux sur la scène de ce monde, on passe la moitié de sa vie à rire, et l’autre moitié à frémir.

Conservez-moi sire, vos bontés, pour le peu de temps que j’ai encore a végéter et à ramper sur ce malheureux et ridicule tas de boue. »

1 Pour comprendre la lettre de V*, voir la lettre de Frédéric II du 10 février 1767 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1767/Lettre_6736

Voir, dans les Œuvres posthumes de Frédéric, la fable intitulée Les Deux Chiens et l’Homme : http://friedrich.uni-trier.de/fr/oeuvres/12/235/text/?h=les|deux|chiens|et|l%27homme

Voir aussi : https://lepetitjournal.com/berlin/correspondance-chien-frederic-ii-prusse-331278

2 Voir dans les Œuvres posthumes de Frédéric, le Conte du Violon : http://friedrich.uni-trier.de/fr/oeuvres/12/233/text/?h=le|conte|du|violon

3 Frédéric donnera lui-même à V* le mot de l'énigme dans une lettre du 24 mars 1767 : http://friedrich.uni-trier.de/fr/oeuvres/23/145-o2/text/?...|mars|1767

4 Manifeste sur les dissensions de Pologne intitulé Exposition des droits des dissidents joints à ceux des puissances intéressées de les maintenir, que Frédéric II a reçu le 11 février 1767 ; voir Politische Correspondenz, XXVI, 51 , et : https://books.google.fr/books?id=gZ1dAAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

et page 19 et suiv . : http://friedrich.uni-trier.de/fr/oeuvres/6/19/text/

5 Allusion à un passage de la lettre du 24 octobre 1766 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6544

dans laquelle , en réponse à des demandes concernant l'établissement de la « colonie philosophique » à Clèves, Frédéric a écrit : « Les fermes que j'ai en ce pays-là s’amodient, et je ne saurais passer un contrat avec un autre fermier qu'après [que] l’échéance du bail est terminée . »

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10/08/2022 | Lien permanent

N'importe il faut aller en avant ...Je n’ai d’autre ressource que dans la vérité ; il faut qu’elle paraisse du moins aux

... Mister président dixit (ou presque) . Maître Castex semble bien l'avoir compris et ses coups de gueule valent bien ceux de l'opposition, nous sommes en régime coups pour coups .

Près de 14 000 nouveaux infectés par heure, plus de 230 chaque minute, soit au moins 34 600 pendant la rédaction et mise en ligne de cette note ! Et il en est encore qui pleurnichent parce qu'on les empêche de nuire . Ces hors-la-loi vont sentir le vent du boulet , et puisqu'il le faudra, les coups de pied au cul .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

1er octobre 1766 1

Je vous envoie, mon cher ami, cette lettre ouverte pour M. de Beaumont 2, que je vous supplie de lire. Il s’est chargé de trois affaires fort équivoques, qui feront grand tort à la cause des Sirven. Il y a un parti violent contre lui . On a surtout prévenu les deux Tronchin. On s’irrite de le voir invoquer une loi cruelle 3 contre les protestants mêmes qu’il a défendus . On dit que sa femme, étant née protestante, devait réclamer cette loi moins qu’une autre. On prétend que l’acquéreur de la terre de Canon 4 est de bonne foi, et que les terres en Normandie ne se vendent jamais plus que le denier vingt. On assure que le brevet obtenu par l’acquéreur le met à l’abri de toutes recherches, et que la même faveur qui lui a fait obtenir son brevet lui fera gagner sa cause.

Je vous confie mes alarmes. L’odieux qu’on jette sur cette affaire nuira beaucoup à celle des Sirven, je le vois évidemment , mais plus nous attendrons, plus nous trouverons le public refroidi ; et d’ailleurs les démarches que j’ai faites exigent absolument que le mémoire soit imprimé sans délai ; si M. de Beaumont est à la campagne, il n’a d’autre parti à prendre que de vous confier le mémoire, que vous ferez imprimer par Merlin. Il se serait bien mieux vendu s'il avait paru avant l'affaire de M. de La Luzerne . C'est un malheur attaché au mérite ; mais les Sirven en souffriront . N'importe il faut aller en avant . La protection de MM. les ducs de Choiseul et de Praslin nous soutiendra . Nous aurons la protection de M. le comte de Saint Florentin . Enfin nous sommes engagés et nous n'avons pas un moment à perdre .

J’ai enfin reçu le certificat 5 de M. Deodati . J’aurai celui 6 de Lacombe par le premier ordinaire. Il est essentiel de confondre la calomnie , car en brisant une de ses flèches, on brise toutes les autres. Il paraît tous les jours des livres qu’on ne manque pas de m’imputer. Il faudrait que je ressemblasse à Esdras 7, et que je dictasse jour et nuit, pour faire la dixième partie des écrits dont l’imposture me charge. On poursuit avec acharnement ma vieillesse ; on empoisonne mes derniers jours. Je n’ai d’autre ressource que dans la vérité ; il faut qu’elle paraisse du moins aux yeux des ministres ; ils jugeront de toutes ces calomnies par celles de l’éditeur de mes prétendues lettres. C’est un service qu’il m’aura rendu, et qui pourra servir de bouclier contre les traits dont on accable les pauvres philosophes. Est-il bien vrai qu'on a mené à la Bastille deux hommes pris à Nancy qu'on dit s'être défendus longtemps contre les preneurs ?

On a annoncé le livre de Fréret 8 dans la Gazette d’Avignon ; on y dit, à la vérité, que le livre est dangereux, mais qu’il y a beaucoup de modération et de profondeur.

Adieu, mon cher ami ; je vous embrasse aussi tendrement que je vous regrette.

Je vous demande en grâce de m’envoyer, par la première poste, le factum de M. de La Roque contre M. de Beaumont 9, car je veux absolument juger ce procès au tribunal de ma conscience. »

1 L'édition de Kehl suivant la copie Beaumarchais omet deux passages : Il se serait mieux vendu […] à perdre , et Est-il bien vrai [,,,] preneurs ? Le cinquième paragraphe omis sur la copie est cependant bien imprimé .

2 Lettre manquante .

4 Département du Calvados. Élie de Beaumont y fonda un prix pour une rosière. L’abbé Le Monnier a publié un opuscule intitulé Fêtes des bonnes gens de Canon, et des Rosières de Briquebec et de Saint-Sauveur-le-Vicomte ; 1778, in-8° : https://books.google.bj/books?id=VKIvyr2S_ioC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

5 Il fait partie de l’Appel au public, page 579 : https://fr.wikisource.org/wiki/Appel_au_public/%C3%89dition_Garnier

6 Il n’est pas dans l’Appel au public.

8 L’Examen critique des Apologistes de la religion chrétienne ; voyez lettre du 1er avril 1766 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/07/06/m-6325583.html

9 Dans le procès dont il est parlé au commencement de cette lettre, voir : https://archives.calvados.fr/ark:/52329/sr8wcdt0n4pb/f0383e89-0710-4e81-a8c6-69d5c16ead83

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06/01/2022 | Lien permanent

la rage de ceux qui gagnent leur pain à écrire

... peut être pardonnée, parfois .

Mais il en est d'autres, comme cet ahuri de BHL qui du haut de ses millions (d'euros, pas d'admirateurs, vous m'avez compris ) n'a pas même l'excuse de la nécessité d'assurer sa pitance quotidienne pour vitupérer contre tout être qui ose dire et mettre en relief les folies israeliennes .

"La première mort de Günter Grass", "ce gros poisson des lettres,[NDLR : prix Nobel de littérature, excusez du peu !], ce turbot congelé par soixante ans de pose et de mensonge, achève de se décomposer ..." , voilà ce qu'on trouve dans le Bloc Notes de BHL du Point du 12 avril, car Günter Grass s'est permis le crime de lèse-majesté de dire qu'Israël est une menace sérieuse pour la paix dans le monde ; ce en quoi , je trouve que M. Grass ne fait que redécouvrir l'eau chaude , écrire une évidence .

BHL se garde bien de jouer les entremetteur et médiateur dans le conflit israelo-palestinien, sa pantalonnade de salonnard en Lybie serait mal reçue par "une démocratie : l'Etat d'Israël" .

Monsieur le donneur de leçons, le verbeux soi-disant philosophe, vous voulez la paix partout, (sauf en Palestine-Israël) , mais  combien d'années de guerre vous satisferont-elles avant de reconnaître la pure soif de pouvoir du gouvernement israëlien ? Vous êtes tellement borné et de mauvaise foi ( y compris votre foi religieuse ) que vous crèverez aussi bête qu'à votre première ligne .

Que n'allez-vous vivre dans ce "tout petit pays, l'un des plus petits du monde, l'un des plus vulnérables aussi" ?

Tellement vulnérable !

Va donc , eh! Calimero !!

BHL sans chemise4421.JPG

Paroles de Corneille !!



 

 

 

« A M. le marquis de THIBOUVILLE.

1er novembre [1755]. 1

Mme Denis vient de me communiquer votre lettre, mon cher marquis je suis plus affligé et plus indigné que vous. Je n'ignore pas absolument qui sont les misérables dont la fureur a mêlé le nom de mes amis et des hommes les plus respectables dans je ne sais quelle plaisanterie qu'on a fait revivre si cruellement depuis quelques années. On m'en a envoyé des fragments où j'ai trouvé M. le maréchal de Richelieu traité de maquereau; M. d'Argental, de protecteur des mauvais poètes. Le succès de l'Orphelin de la Chine a ranimé la rage de ceux qui gagnent leur pain à écrire. Ils ont été fourrer Calvin dans cet ancien ouvrage dont il est question, parce que je suis dans un pays calviniste 2. Enfin ils ont poussé leur imbécile insolence jusqu'à oser profaner le nom du roi 3. Voyez, s'il vous plaît, les beaux vers dans lesquels ils ont exprimé ce panégyrique

Lui, des Bourbons trompant la destinée,
A la gard' Dieu laisse aller son armée, etc.


Je n'ose poursuivre, tant le reste est exécrable. J'ai vu, dans un de ces malheureux exemplaires, saint Louis en enfer 4. Il y a sept ou huit petits grimauds qui brochent continuellement des chants de ce prétendu poème. Ils les vendent six francs le chant, c'est un prix fait, il y en a déjà vingt-deux, et ils mettent mon nom hardiment à la tête de l'ouvrage. Je n'ai pas manqué d'avertir M. le maréchal de Richelieu. On m'avait écrit que vous étiez fourré dans cette rapsodie 5, avec M. d'Argental mais je n'avais point vu ce qui pouvait vous regarder, c'est une abomination qu'il faut oublier, elle me ferait mourir de douleur. Adieu, Mme Denis est aussi affligée que moi. Oublions les horreurs de la société humaine. Amusez-vous dans de jolis ouvrages conformes à la douceur de vos mœurs et aux grâces de votre esprit. Nous attendons votre roman avec impatience cela sera plus agréable que l'histoire de tout ce qui se fait aujourd'hui. Vous devriez venir prendre du lait ici, pour punir les scélérats qui abusent de votre nom et du mien d'une manière si misérable.

Pardonnez à un pauvre malade obligé de dicter, et qui a dicté cette lettre très-douloureusement. »

 

 

 



 

 

 

 

 

 

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14/04/2012 | Lien permanent

Je quitterai mes épinards et mon persil pour vos trois mille plantes de l'Asie et de l'Afrique

... S'écria Popeye dans un dernier éclair de lucidité, ou de folie devant une boutique d'herboriste chinois .

 

popeye.jpg

 

 http://www.viesaineetzen.com/recette/le-popeye-c%C3%A9leri-rave-%C3%A9pinard-persil-orange

 

 

« A Caroline-Louise de Hesse-Darmstadt, margravine de BADEN-DOURLACH.
Aux Délices, 2è février 1759.
Madame, la lettre 1 dont Votre Altesse sérénissime m'honore est un bienfait nouveau qui me remplit de reconnaissance, et un nouveau charme qui m'attache à elle. Vos pastels 2, madame, votre plume, vos bontés, vous font des sujets ou plutôt des esclaves dans un pays libre.

 


Tout me plaît en vous, tout me touche;
Parlez, belle princesse, écrivez ou peignez;
Les Grâces, par qui vous régnez,
Ou conduisent vos mains, ou sont sur votre bouche.


 


J'ai une bien forte tentation, madame, de quitter dans les beaux jours de l'été mes petits ermitages, mes petits châteaux ou chaumières, pour venir me mettre aux pieds de Vos Altesses sérénissimes, dans le palais du meilleur goût que j'aie jamais vu. Je quitterai mes épinards et mon persil pour vos trois mille plantes de l'Asie et de l'Afrique; mes petits bois pour votre immense forêt 3 de Dodone ; mes lièvres pour vos chevreuils ; enfin ma liberté pour les belles chaînes dont vous enchaînez tous ceux qui ont l'honneur de vous approcher.
J'ai perdu dans Mme la margrave de Baireuth une princesse qui m'honora toujours d'une bonté inaltérable ; je retrouve en vous, madame, son esprit, ses talents, et ses grâces, et tout cela très-embelli ; je voudrais mériter d'y retrouver la même bienveillance.
Fasse le ciel que le Saint-Empire romain, qui est sens dessus dessous depuis trois ans, puisse être aussi tranquille, l'été prochain, qu'on l'est dans le beau séjour du Repos de Charles 4 ! Le midi de l'Allemagne est bien heureux : il ne se ressent point des horreurs de la guerre, et il vous possède. On attend la mort du roi d'Espagne pour troubler le reste de l'Europe. Milord Maréchal, ou M. Keith, gouverneur de Neufchâtel, vient de passer par nos Alpes pour aller négocier en Italie; on dit que ce n'est pas pour la pacification générale. Mais, madame, pourquoi vous parler de nouvelles ? Il est plus doux de s'entretenir de monseigneur le margrave 5 et de vous.

Je suis avec le plus profond respect,

madame,

de Votre Altesse sérénissime,

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire.
Elle pardonnera à un pauvre malade qui ne saurait écrire de sa main. »

1 « De madame la margrave de Baden-Dourlach.
A Carlsruhe, le 17 janvier [1759].
Monsieur, je commets peut-être une indiscrétion de vous dérober des moments dont vous savez faire un meilleur usage ; mais pouvez-vous penser que je puisse recevoir vos vers * charmants, que j'admire en rougissant, et en étouffer ma reconnaissance? Non, en vérité, je ne le puis. Je ne suis pas digne de votre lyre, monsieur, je le sais, mais réellement de votre amitié.
Ne la refusez donc point à l'estime la plus pure et la plus vraie. Je fais de bien sincères vœux pour votre santé. Tout m'y intéresse ; et la promesse que vous me donnez, monsieur, de vous revoir ** chez nous me les fait redoubler d'ardeur. J'y mets même une telle confiance que je sens déjà toute la joie de pouvoir vous assurer de vive voix de cette considération et de cette estime distinguée que l'on vous doit, et avec lesquelles j'ai l'honneur d'être plus que personne au monde, monsieur, votre, etc.
Caroline, margrave de Bade-Dourlach.
P. S. Lé margrave, transporté de joie d'oser espérer de vous revoir cet été, monsieur, et pénétré de vos mérites, m'ordonne de vous tenir compte de ses sentiments, et de vous dire combien il est sensible à ceux que vous voulez bien témoigner pour lui. »

*. Ces vers, et la lettre qui les accompagnait sans doute, nous sont inconnus. (Clogenson.)
**. Voltaire, lors de son voyage à Schwetzingen (juillet et août 1758), avait passé par Carlsruhe. (Clogenson.)

3 Celle de Hardtwald.

4 Ce qui est la traduction de Karls ruhe , ville fondée en 1715 par le margrave Charles-Guillaume.

5 Charles-Frédéric, né en 1728, fils et successeur de Charles-Guillaume.

 

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18/02/2014 | Lien permanent

Le roi de Prusse vient de m'écrire une lettre tendre; il faut que ses affaires aillent mal

... Bien vu , Voltaire !

Un roi aussi ça trompe

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Quant à moi, le ciel me préserve de ne recevoir de tendres lettres que quand les choses vont mal, et d'en écrire seulement quand j'ai le blues .

 

 

 

« A M. le maréchal duc de RICHELIEU

A Monrion, près de Lausanne, 4 février [1757].

Je ne sais si mon héros aura déjà reçu un fatras d'histoire qui commence à Charlemagne, et même plus haut, et qui finit par le vainqueur de Mahon 1. Vous n'aurez guère, monseigneur, le temps de lire dans votre année d'exercice 2; cet exercice a été violent dans ces dernières horreurs. Vous voyez des choses bien extraordinaires, mais vous en verrez des exemples dans le fatras que j'ai l'honneur de vous envoyer. Il est en feuilles. Je n'ai point de relieur à Monrion, et je crois que vos livres ont une reliure particulière.
Le roi de Prusse vient de m'écrire une lettre 3 tendre; il faut que ses affaires aillent mal. L'autocratrice 4 de toutes les Russies veut que j'aille à Pétersbourg. Si j'avais vingt-cinq ans, je ferais le voyage. Lekain veut en faire un; et il se flatte que vous lui donnerez permission d'aller prêcher à Marseille à Pâques 5. Je n'ose vous en supplier. Il n'appartient point à un Suisse de parler des acteurs de Paris. Ce n'est pas assurément le temps de parler de comédie il y a des tragédies bien abominables en France, qui prennent toute l'attention. Ce pauvre marquis d'Argenson, que vous appeliez le secrétaire d’État de la république de Platon, est donc mort 6? Il était mon contemporain: il faut que je fasse mon paquet. Jouissez, mon héros, de votre gloire et d'une vie heureuse et longue. Les héros vivent plus longtemps que les philosophes j'en excepte Fontenelle 7, dont je vous souhaite l'estomac et les cent années. Vous voilà doyen de l'Académie: c'est une bien belle place, mais il la faut conserver. Conservez-moi aussi vos bontés. Les deux Suisses vous adorent. »

1 Les éditions de 1756 et 1757 de l'Essai sur l'Histoire générale (ou Essai sur les Mœurs) comprenaient, comme Beuchot l'a dit dans son Avertissement en tête de l'Essai sur les Mœurs (tome XI), le Siècle de Louis XIV; les événements y étaient conduits jusqu'en juin 1756. C'était au chapitre cxcvi que se trouvait le passage dont Voltaire parle ici, et qu'il a replacé, sauf quelques mots, dans le chapitre xxxi du Précis du Siècle de Louis XV; voyez tome XV, pages 338-340.

2 Comme premier gentilhomme de la chambre, il est chargé de la direction des spectacles et de la Comédie Française .

3 Datée du 19 janvier, à Dresde. Elle nous est inconnue. Frédéric II écrivait le 20 janvier à sa soeur Wilhelmine : « J'ai été très surpris de recevor une lettre de Voltaire que l'on m'avait dit mort ; je lui ai fait répondre par l'abbé [de Prades] tout plein de belles choses . »

7 Mort le 9 janvier 1757 à presque 100 ans .

 

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27/09/2012 | Lien permanent

Des armes contre les sots...

Point de messe pour moi ni de culte autre que celui que je rends au chocolat du matin. La grand'messe a été dîte, ou plutôt la messe basse tant elle m'a semblée baclée, vendredi 6 février. Point d'ite missa est, point de bénédiction. Bon thé, excellent gateau, café bienvenu, tout cela sur une langue de bois!Satisfaction du devoir accompli mais pour quel avenir ?

"Je suis bien fâché qu’on soit si bête en France" : cette réflexion est toujours d'actualité car j'ai eu la frustration de voir des projets de qualité ramenés à leur ombre et des buts commerciaux irréalistes mis en avant . Quelle inculture ! Je ne peux citer de nom maintenant, mais nom d'une pipe ( ne rêvez pas !! sots que vous êtes !!) en bois, le courriel a du mal trop souvent à transmettre des idées claires , quand ce n'est pas absence de réseau (quelques élus comprendront les lignes précédentes, mes plates excuses pour les non initiés que j'éclairerai un jour ).

Volti* est de bon conseil ce jour (encore).

 

 

 

 

 

 

 

« A François de Chennevières

 

                Vous me demandez, mon ami, des armes contre les sots. Votre sens commun doit vous suffire. Les petits vers que vous m’avez envoyés sur Lisbonne [« Vers sur les ruines de Lisbonne attribués à M. de Voltaire » signalés par Thiriot dès le 19 janvier] sont de quelque bel esprit de café ou d’antichambre. Permettez-moi de vous dire que les laquais des gens d’esprit ne m’attribueraient pas ces pauvretés. Ma nièce est très sensible à votre souvenir, je vous embrasse de tout mon cœur et vous remercie de votre attention. Je suis bien fâché qu’on soit si bête en France, mais du temps de Boileau, on lui attribuait des vers de Cotin.

 

                Je vous dirai pour nouvelle que le roi de Prusse vient de m’envoyer ma tragédie de Mérope mise par lui en opéra en vers français ; il travaillait à la fois cet ouvrage et à son traité.

 

                P.S.- J’apprends dans le moment que vos petits vers sont d’un jeune homme de condition [= noble] [le marquis de Ximenes, signalé par Grimm seulement le 1er février], je les croyais d’un jeune homme en condition [= domestique]. Vale [= portez-vous bien ].

 

                        Voltaire

                        De Montriond, 8 février 1756. »

 

 

Et demain 9 février1759  , roulez carrosse, direction Gex avec Mme Denis pour parapher les actes d'achat de la seigneurie de Ferney pour la coquette somme de 49000 livres pour la seigneurie et 40000 pour les fonds et biens ruraux [multiplier à peu près par 8 en euros pour avoir le prix actuel !].

 

 

 

 

 

 

 

Pour François de Chennevières :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_de_Chennevi%C3%A8res

Pour le marquis Augustin-Louis de Ximenes :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Augustin_Louis_de_Xim%C3%A9n%C3%A8s

Pour Cotin :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Cotin

 

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08/02/2009 | Lien permanent

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