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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Marchez toujours en ricanant, mes frères

« A Jean Le Rond D’Alembert

 

         Mon cher et aimable philosophe, je vous salue, vous et les frères . La patience soit avec vous . Marchez toujours en ricanant, mes frères,  dans le chemin de la vérité . Frère Thimothée Thiriot saura que la Capilotade est achevée , et qu’elle forme un chant de Jeanne [ chant XVIII ] par voie de prophétie, ou à peu près . Dieu m’a fait la grâce de comprendre que, quand on veut rendre les gens ridicules et méprisables à la postérité, il faut les nicher dans quelque ouvrage qui aille à la postérité . Or le sujet de Jeanne étant cher à la nation, et l’auteur inspiré de Dieu ayant retouché et achevé ce saint ouvrage avec un zèle pur, il se flatte que nos derniers neveux siffleront les Fréron , les Hayer , les Caveirac [ l’abbé Novi de Caveirac en 1758 a publié l’Apologie de Louis XIV… sur la révocation de l’Edit de Nantes ], les Chaumé, les Gauchat, et tous les énergumènes et tous les fripons ennemis des frères .

         Vous savez d’ailleurs que je tâche de rendre service au genre humain, non en paroles, mais en œuvres, ayant forcé les frères jésuites mes voisins à rendre à six gebntilshommes, tous frères, tous officiers, tous en guenilles un domaine considérable que st Ignace avait usurpé sur eux .  Sachez encore pour votre édification que je m’occupe à faire aller un prêtre aux galères [ Ancian, curé de Moëns ]. J’espère, Dieu aidant, en venir à bout . Vous verrez paraître incessamment une petite lettre al signor Albergati Capacelli, senatore di Bologna la grassa . Je rends compte dans cette épître de l’état des lettres en France ; et surtout de l’insolence de ceux qui prétendent être meilleurs chrétiens que nous . Je leur prouve que nous sommes incomparables meilleurs chrétiens qu’eux . Je prie M. Albergati Capacelli d’instruire le pape que je ne suis ni janséniste, ni moliniste, ni d’aucune classe du parlement, mais catholique romain, sujet du Roi, attaché au Roi, et détestant tous ceux qui cabalent contre le Roi . Je me fais encenser tous les dimanches à ma paroisse . J’édifie tout le clergé ; et dans peu l’on verra bien autre chose . Levez les mains au ciel, mes frères .

         Voilà pour les faquins de persécuteurs de l’Eglise de Paris . Venons aux faquins de Genève . Les successeurs du Picard qui fit brûler Servet, les prédicants qui sont aujourd’hui servetiens, se sont avisés de faire une cabale très forte dans le couvent de Genève appelé ville, contre leurs concitoyens qui déshonoraient la religion de Calvin et les mœurs des usuriers et des contrebandiers de Genève au point de venir quelquefois jouer Alzire et Mérope dans le château de Tournay en France . Jean-Jacques Rousseau, homme fort sage et fort conséquent, avait écrit plusieurs lettres contre ce scandale à des diacres de l’Eglise de Genève, à mon marchand de clous, à mon cordonnier . Enfin on a fait promettre à quelques acteurs qu’ils renonceraient à Satan et à ses pompes . Je vous propose pour problème, de me dire si on est plus fou et plus sot à Genève qu’à Paris . Je vous ai déjà mandé que votre ami Nekre [ Necker ]a demandé pardon au consistoire, et a été privé de sa professorerie pour avoir couché avec une femme qui a le croupion pourri [Mme Vernes, épouse de marchand, belle-sœur du  prédicant  Jacob Vernes] et que le cocu qui lui a tiré un coup de pistolet a été condamné à garder sa chambre un mois . Nota bene qu’un assassin cocu est impuni, et que Servet a été brûlé à petit feu pour l’hypostase . Nota bene que le curé que je poursuis pour avoir assassiné un de mes amis chez une fille pendant la nuit, dit hardiment la messe ; voyez comme va le monde .

         Je vous prie, mon frère, de m’écrire quelque mot d’édification, de me mander de vos nouvelles et de celles des frères . Je vous embrasse .

         Urbis amatorem Fuscum salvere jubemus ruris amatores . [ à Fuscus amant de la ville nous envoyons notre salut, nous autres amants de la campagne . Horace ]

 

V.

Au chateau de Ferney, pays de Gex

6 janvier 1761"

 

 

Pour l'épiphanie, hier le 6, j'avais trouvé et transcrit cette lettre qui malheureusement n' a pas été enregistrée suite à une coupure avec le serveur de ces sacrés nom d'une pipe de tonnerre de bonsoir de Neuf-SFR . Ce n'est pas la première fois et ils commencent à me courir sur les haricots ; je ne pense pas être le seul dans ce cas , hélas .

Décidément, en ce début 1761 le Patriarche est en forme et tire sur tout ce qui bouge dans le mauvais sens . Savoir si on est plus fou et plus sot à Genève qu'à Paris, en temps que frontalier permanent et parisien occasionnel, je leur accorde un match nul, je les maudits ou les félicite selon les circonstances . Coté sot et fou, je dirais plutot bas de plafond et forts en gueule .

"une femme qui a le croupion pourri " : alors là, mesdames, je vous laisse juges de la force de l'image ; nous venons de passer les fêtes et quelques dindes et autres volailles ont péri sur l'autel de notre gourmandise, aucun croupion pourri, je l'espère, n'a été sous vos yeux et votre fourchette . M. Nekre qu'allâtes-vous faire en cette galère ? Levons les mains au ciel, mes frères bloggers !!

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07/01/2009 | Lien permanent

Je vous avoue que dans ces ornements je demande célérité plutôt que perfection . Je n'ai jamais trop aimé les estampes d

... Pour une fois, je ne suis pas d'accord avec toi mon cher Voltaire, j'aime les illustrations, estampes ou autres dans les livres quels qu'ils soient, biographies, romans, documentaires, philosophie, etc., etc.

Est-ce dû aux premiers livres illustrés de l'école maternelle, aux bandes dessinées de France-Soir 7è édition (Chéri-Bibi, Simplet, Juliette de mon coeur, Arabelle, Max l'explorateur, tous des héros qui ont fait de moi un lecteur boulimique ),  la Bibliothèque Verte, La Bibliothèque Rouge et Or ?

OUI ! persiste et signe .

J'aime voir s'ajouter le talent d'un dessinateur/illustrateur/photographe au talent de l'écrivain, double plaisir .

J'ose penser que Mam'zelle Wagnière partage ce goût, elle qui illustre quotidiennement MonsieurdeVoltaire et donne une couleur particulière à l'oeuvre publiée sans relâche .

The Illustrated Jules Verne (1866-69) Vingt mille lieues sous les mers  illustrations by Alphonse de Neuville and Édouard Riou:

Ce serait dommage de se priver d'une belle gravure ! Bon souvenir de jeunesse ... A chacun son Star Wars .

 

 

« A Claude-Philippe Fyot de La Marche

Ferney 8 octobre [1761] 1

Vous êtes le plus respectable, et le plus aimable des hommes . Qu'il y a loin de votre âme à celle d'un fétiche ! Mon cher oracle de Thémis et des muses votre lettre du 27 septembre m'a fait un plaisir presque aussi vif que votre apparition à Ferney ou à Voltaire 2. Oui sans doute j’irai à La Marche, je verrai votre labyrinthe, et je voudrais ne point trouver de fil pour en sortir . Comptez que c'est un bienfait essentiel de permettre que votre graveur 3 travaille pour notre Corneille . Il n'y a point d’artiste à Genève dans ce genre-là . On est obligé de dépendre des graveurs de Paris qui sont surchargés d'ouvrage . Je mourrais de vieillesse et de dépit avant qu'ils eussent fini .

Permettez donc que votre protégé nous aide de dix estampes, et surtout ne l'empêchez pas de recevoir des Cramer un petit honoraire . C'est une affaire d'environ cinquante louis . Il n'est pas possible d'en user autrement . Je vous conjure de le souffrir .

Je renvoie comme vous l'ordonnez tous ses dessins, dont je suis très content, avec un petit mot de remerciement et d’instruction pour lui .

Je vous avoue que dans ces ornements je demande célérité plutôt que perfection . Je n'ai jamais trop aimé les estampes dans les livres . Que m'importe une taille douce quand je lis le second livre de Virgile ? et quel burin ajoutera quelque chose à la description de la ruine de Troie ? Mais les souscripteurs aiment ces pompons ; et il faut les contenter .

Je plains votre jeune homme s'il est obligé de lire les pièces dont il gravera le sujet . Cinna et les belles scènes du Cid, de Pompée, d’Horace et de Polyeucte sont au-dessus de toute gravure ; et les autres pièces n'en méritent pas . Les premiers sujets sont déjà distribués . Il est triste, j'en conviens , de travailler sur Agésilas et sur Attila . Mais je vous en aurai plus d'obligation, et je regarderai votre condescendance comme une de vos plus grandes bontés .

J'aurais bien voulu vous montrer quelques-uns de mes commentaires . L'entreprise est épineuse . Il faut avoir raison sur trente deux pièces . Je consulte l'Académie, mais cela ne me suffit pas . Je suis le contraire des commentateurs, je me défie toujours de mes jugements . Qu'il serait agréable de relire Corneille dans votre beau château avec vous et quelque adepte ! Le commentaire serait le résultat de nos conférences, je serais votre secrétaire .

Il est triste que le président fétiche me détourne, mais j'ai peur qu'il ne se couvre de ridicule . Cela ne pourrait-il pas même aller jusqu'à le déshonorer ? Car enfin il est clair qu'il m'a trompé, et après m'avoir trompé sur un marché de près de cinquante mille livres, il me fait un procès pour 12 voies de fagots !

Corneille me dit qu'il faut préférer Rodogune aux fétiches . Travaillons vite . Mille tendres respects .

V. »

1 Date complétée sur le manuscrit . Les deux premières phrases de la lettre ainsi que la fin « je serais votre secrétaire […] . Travaillons vite . » manquent dans les éditions .

2 Claude Fyot de La Marche avait écrit à V* le 13 septembre 1761 qu'il avait « trouvé au château de Voltaire (car Ferney n'aura plus, s'il vous plait, d'autre nom) » ce qu'il avait cherché innutilement dans sa patrie .

3 Sur ce graveur, voir lettre du 14 septembre 1761 à CP Fyot de La Marche :  ; le mot de remerciement est la lettre du 8 octobre 1761 à François de Vosges .

 

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27/09/2016 | Lien permanent

la raison est préférable à l'éloquence

... Ne l'oublions pas quand un marchand de soupe nous fait l'article . Beaux parleurs, nous décortiquerons vos paroles, nos impôts sont trop précieux pour être mis en de mauvaises mains ; les exemples ne manquent pas .

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« A Jean Lévesque de Burigny

Au château de Ferney près de Gex 1

par Genève [janvier-février 1761 ?]2

Tout ce que je puis vous dire, monsieur, c'est que feu M. Secousse m'écrivit 3, il y a quelques années, à Berlin, que son oncle avait réglé les droits et les reprises de Mlle des Vieux, fondés sur son contrat avec M. Bossuet . C'est une chose que je vous assure sur mon honneur . Au reste c'est à vous à voir si vous croyez possible 4 qu'un homme aussi éclairé que lui, ait toujours été de bonne foi, surtout en accusant M. de Fénelon d'une hérésie dangereuse, tandis qu'on ne devrait l'accuser que de trop de délicatesse et de beaucoup 5 de galimatias . Je serais très affligé si le panégyriste de Porphyre 6 et de l'ancienne philosophie, donnait la préférence à certaines opinions sur cette philosophie . M. de Meaux était un homme éloquent, mais la raison est préférable à l'éloquence . Vous me ferez beaucoup d'honneur et de plaisir de m'envoyer votre ouvrage . Mais vous me feriez un très grand tort si vous m'accusiez d'avoir dit que l'éloquent Bossuet ne croyait pas ce qu'il disait . J'ai rapporté seulement qu'on prétendait qu'il avait des sentiments différents de la théologie 7, comme un sage magistrat qui s'élèverait quelquefois au-dessus de la lettre de la loi , par la force de son génie . Il me paraît qu’il est de l'intérêt de tous les gens sensés que Bossuet ait été dans le fond plus indulgent qu'il ne le paraissait .

Je me recommande à vous, monsieur, comme à un homme de lettres et un philosophe pour qui j'ai toujours eu autant d'estime que d'attachement pour votre famille . Si vous voulez bien me faire parvenir votre ouvrage 8 par M. Jannel ou M. Bourret, ce sera la voie la plus prompte, et j'aurai plus tôt le plaisir de m’instruire .

Je vous présente mes remerciements et tous les sentiments respectueux avec lesquels je serai toujours, monsieur, votre etc. »

1 Près de Gex, par Genève , seulement dans l'édition de Kehl .

2 Le manuscrit original qui était entre les mains de la famille Noiron, à Reils, a été acheté par Michelmore à la vente Philips le 24 juin 1919 ; l'édition Jean-Vincent Genet est incomplète mais basée sur l'autographe . Pour la date proposée, le 12 septembre, V* dira au même avoir « reçu fort tard » l’ouvrage sur Bossuet qu'il demande ici, voir lettre du 12 septembre 1761 à Burigny : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1761-partie-38-122359402.html

3 Pour la correspondance avec Denis-François Secousse, né en 1691 et mort en 1754 à Paris sa ville natale, voir lettre du 5 août 1752 à d'Argental : page 149 : https://books.google.fr/books?id=wkEaAAAAYAAJ&pg=PA14...

lettre du 1er septembre 1752 à d'Argental : page 162 ; lettre du 3 octobre 1752 : page 193 .

4 Possible seulement dans l'édition de Kehl .

5 De beaucoup n'est pas dans l'édition de Kehl .

6 Porphyre, écrivain grec du IIIè siècle avait écrit quinze livres contre le christianisme . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Porphyre_de_Tyr

7 Dans le « Catalogue[...] des écrivains français » du Siècle de Louis XIV, article Bossuet : « […] on a prétendu que ce grand homme avait des sentiments philosophiques différents de sa théologie, à peu près comme un savant magistrat qui, jugeant selon la lettre de la loi, s'élèverait quelquefois en secret au dessus d'elle par la force de son génie. »

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02/02/2016 | Lien permanent

ils prêchaient un peu trop l'égalité laquelle ne peut ni plaire aux grands ni subsister dans la société.

Liberté !

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Egalité !

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Fraternité !

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Liberté et fraternité : Volti est imbattable sur ces valeurs .

Egalité ?

Volti se montre réaliste, -à rebours de JJ Rousseau le romantique qui prône l'égalité sociale,- l'égalité n'est pas aimée des dits grands, l'égalité ne peut perdurer dans la société . De ces deux hommes, philosophes, lequel a vu le plus juste ? Voltaire sans conteste ; où voyez-vous l'égalité sociale de nos jours ? France d'en bas, comme disait l'autre ...

 Où est l'égalité ?

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egalite_barree.jpg

http://revolution-francaise.net/2009/05/01/319-le-manuscr...

...  Prémonitoire !...

 

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

 

15è juin [1763]

 

Mon cher frère, il est plus que probable que M. Jannel 1, qui m'a écrit, n'a agi que par des ordres supérieurs et très supérieurs . On ne veut pas que certains ouvrages entrent dans Paris , mais j'ose me flatter qu'on les lit, qu'on en fait son profit en secret, et qu'on est beaucoup plus éclairé, et beaucoup plus philosophe que le public ne pense . La preuve en est qu'on est très loin de persécuter ceux qui ont envoyé ces ouvrages dans lesquels les honnêtes gens s'éclairent . Il y a des ministres qui sont aussi de très bons cacouacs 2. Vous me direz : comment se sont-ils déclarés il y a quelques années contre certains sages ? C'est que ces sages avaient un peu trop effarouché l'amour-propre des grands, c'est qu'ils prêchaient un peu trop l'égalité laquelle ne peut ni plaire aux grands ni subsister dans la société.

 

Il y a donc un maître à danser qui répond à Jean-Jacques 3 et les maîtres en Israël ne lui répondent pas .

 

Je vous supplie de m'envoyer le projet de finance 4. Je le trouve ridicule sur l'énoncé, mais j'aime tout ce qui semble tendre à tort ou à travers au bien de l’État .

 

Voici deux Meslier 5 que je hasarde sous l'enveloppe de M. de Courteilles et de M. d'Argental . Envoyez-en donc un à M. le duc de Bruc notre adepte, chez M. le marquis de Rosmadec, rue de Sèvres . Il ne faut pas mettre la chandelle sous le boisseau .

 

L’Essai sur l'Histoire générale est un énorme ouvrage qui ne peut se débiter qu'avec le temps . Une mauvaise farce se vend en deux jours, un bon livre en quatre ans .

 

Où va frère ambulant et frère dormant Thieriot ? Il me semble qu'il devait loger chez vous .

 

Et moi, n'aurai-je jamais la consolation de vous posséder ? Je ne l'espère pas tant que vous serez chargé de vos vingtièmes 6.

Ecr. l'Inf.

 

Pouvez-vous faire parvenir les incluses à frère Helvétius et frère Diderot ? Je suis zélé. »

1 Le 6 juin, V* demandait à Choiseul-Praslin de le recommander à M. Jannel, intendant de la poste, qui pouvait , entre autres faciliter l'envoi des livres étrangers dont il faisait les comptes-rendus dans la Gazette littéraire .

2 V* pense sans doute au duc de Choiseul, qui a pourtant protégé Les Philosophes de Palissot . A propos des « cacouacs » (= philosophes), voir lettre à d'Alembert du 8 janvier 1758 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/01/08/je-vous-conjure-instamment-d-avoir-toujours-du-courage.html#more

3 Lettre à M. Jean-Jacques Rousseau par M.M. ( Marcel ? Marceau?) datée du 14 février 1763 ; voir lettre du 25 avril à d'Argental sur la Lettre de Rousseau .http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/04/26/dans-l-etat-ou-sont-les-choses-j-aime-mieux-les-suffrages-de.html#more

4 Roussel de La Tour publia, sans toutefois les signer, la Richesse de l’État, puis le Développement du plan intitulé Richesse de l’État .

http://www.archive.org/stream/richessesdeletat00rous#page/n1/mode/2up

V* se souviendra de ces ouvrages en écrivant L'Homme aux quarante écus ; voir d'ailleurs la phrase suivante qui annonce chez lui ce genre de préoccupation .

5 C'est l'Extrait des sentiments de Jean Meslier, de V* . http://www.voltaire-integral.com/Html/24/48_Meslier.html

 

6 Damilaville est commis au vingtième .

 

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09/06/2011 | Lien permanent

les tracasseries étrangères peuvent servir de délassement, et amuser un moment

... Biden-Poutine, Poutine-Biden : "t'ar ta gueule à la récré !"

https://www.youtube.com/watch?v=WjkVzYLAhEg

Brutal refroidissement climatique entre Joe Biden et Vladimir Poutine | Le  HuffPost

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

28è [25] novembre 1765 1

Il y a deux choses, mes divins anges, à considérer en ce paquet. La plus importante est celle de deux vers à restituer dans Adélaïde ; et ces deux vers se trouvent dans une lettre ci-jointe à Lekain 2, laquelle je soumets à la protection de mes anges.

La seconde est une billevesée 3 d’une autre espèce qui fera voir à mes anges combien je suis impartial, ami de la paix, exempt de ressentiment, équitable, et peut-être ridicule.

Plusieurs membres du conseil de Genève et plusieurs citoyens sont venus tour à tour chez moi, et m’ont exposé les sujets de leurs divisions. J’ai pris la liberté de leur proposer des accommodements. Il y a quelques articles sur lesquels on transigerait dans un quart d’heure ; il y en a d’autres qui demanderaient du temps, et surtout plus de lumières que je n’en ai. Mon seul mérite, si c’en est un, est de jouer un rôle diamétralement opposé à celui de Jean-Jacques, et de chercher à éteindre le feu qu’il a soufflé de toutes les forces de ses petits poumons. J’ai mis par écrit un petit plan de pacification 4 qui me paraît clair et très aisé à entendre par ceux qui ne sont pas au fait des lois de la parvulissime république de Genève . Donnez-vous, je vous en prie, le plaisir ou l’ennui de lire ma petite chimère ; je ne veux pas la présenter aux intéressés avant que vous m’ayez dit si elle est raisonnable. Je crois qu’il faudrait préalablement la montrer à deux avocats de Paris, afin de savoir si elle ne répugne en rien au droit public et au droit des gens. Ensuite je vous prierai de la faire lire à M. de Sainte-Foix, à M. le marquis de Chauvelin, à M. Hennin, et enfin à M. le duc de Praslin ; mais non pas à M. Crommelin, parce qu’il est partie intéressée, et que, malgré tout son esprit et toute sa raison, il peut être préoccupé.

Si M. le duc de Praslin approuvait ce plan, je le proposerais alors au conseil de Genève, et ce serait un préliminaire de la paix que M. Hennin ferait à son arrivée. Je ne me mêlerai plus de rien, dès que M. Hennin sera ici ; je ne fais que préparer les voies du Seigneur 5.

Je sais bien, mes divins anges, que M. le duc de Praslin a maintenant des affaires plus importantes. Je vois avec douleur que les parlements, à force d’avoir demandé des choses qui ont paru injustes, succomberont peut-être dans une chose juste, et que la France ne sera pas du diocèse de Novogorod-la-Grande .

La maladie de M. le dauphin cause encore de plus grandes inquiétudes, et ce n’est pas trop le temps de parler des tracasseries de Genève ; mais aussi les tracasseries étrangères peuvent servir de délassement, et amuser un moment.

Amusez-vous donc, et donnez-moi vos avis et vos ordres.

Quand vous serez dans un temps plus heureux et plus fait pour les plaisirs, le petit ex-jésuite vous enverra ses Roués. Il a profité, autant qu’il a pu, de vos très bons conseils . Il ne parviendra jamais à faire une pièce attendrissante , ce n’était pas son dessein ; mais elle pourra être vigoureuse et attachante.

Toute ma petite famille baise très humblement le bout de vos ailes.

N.B. – Je ne vous ai point envoyé une partie de rogatons, parce que je vous destine le tout . J'ai envoyé deux ou trois feuilles à M. l'abbé de Chauvelin, et deux ou trois autres à Mme Du Deffand . La somme totale sera de trois volumes, que Cramer avait commencé d'imprimer sans m'en rien dire, et auxquels j'ai été obligé de donner mes soins quand il m'a dit son secret .6 

V.» 

1L'édition de Kehl, suivie des éditions, omet le nota bene biffé sur la copie Beaumarchais . La date a été corrigée, cette lettre étant évidemment antérieure à celle du 27 , datée elle du 28 : voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/10/correspondance-annee-1765-partie-35.html

Du même jour est la réponse de Crommelin à la lettre de Lullin citée : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/03/16/ce-matin-quatre-citoyens-m-ont-fait-dire-qu-ils-voulaient-me-parler-je-leur.html

3 Un mémoire sur les troubles de Genève. (Georges .Avenel.)

6 Ce Nota bene fait évidemment référence aux Mélanges : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71878s.texteImage

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19/03/2021 | Lien permanent

Il n'y a plus de lois, plus d'honneur, plus de reconnaissance

... chez ces émeutiers de France , voyous avérés, à punir sans trainer . Et que ceux qui parleront de justice expéditive se mettent un moment dans la peau des victimes des vandales . Entendez-vous , mélenchonistes qui approuvent les violences des casseurs et vilipendent les forces de l'ordre . Mélenchon, décidément tu es puant .

 

 

« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu

13è décembre 1767 à Ferney

Votre malingre et affligé serviteur ne peut écrire de sa main à son héros. Tout languissant qu'il est, il compte bien donner non-seulement La Fiancée du roi de Garbe 1, quand il aura quatre-vingts ans, mais encore Le Portier des Chartreux 2 pour petite pièce, que monseigneur fera représenter à la cour avec tout l'appareil convenable.

La prison du prince de Condé, la mort de François second, seraient à la vérité un sujet de tragédie; mais je ne réponds pas de l'approbation de la police. La pièce serait très froide si elle n'était pas très insolente; et, si elle était insolente, on ne pourrait la jouer qu'en Angleterre.

En attendant, si j'avais quelque chose à demander au tripot, ce serait qu'on achevât les représentations des Scythes. On ne les a données que quatre fois 3, et elles ont valu six cents francs à Lekain. Il n'y a plus de lois, plus d'honneur, plus de reconnaissance dans le tripot. J'oserais implorer votre protection comme les Génois mais monseigneur vient à Paris passer six semaines, et partager son temps entre les affaires et les plaisirs ; ensuite il court dans le royaume du prince Noir 14 pour le reste de l'année, et je ne puis alors recourir aux lois, du fond de mes déserts des Alpes.

On m'a mandé que vous aviez abandonné tout net le département dudit tripot; alors je me suis adressé à M. le duc de Duras, afin que mes prières ne sortissent point de la famille. On m'a fait un grand crime dans Paris, c'est-à-dire parmi sept ou huit personnes de Paris, d'avoir ôté un rôle à Mlle Durancy, pour le donner à Mlle Dubois. Le fait est que j'ai écrit une lettre de politesse et de plaisanterie à Mlle Dubois, et qu'il m'est très indifférent par qui tous mes pauvres rôles soient joués. Je ne connais aucune actrice. Le bruit public est que le cul de Mlle Durancy n'est ni si blanc ni si ferme que celui de Mlle Dubois, je m'en rapporte aux connaisseurs, et je n'ai acception de personne.

Vous ne connaissez pas d'ailleurs ma déplorable situation. Si j'avais l'honneur de vous entretenir seulement un quart d'heure, mon héros poufferait de rire. Il sait ce que c'est que l'absence, et combien on dépend quand on est à cent lieues de son tripot . Mais il sait aussi que je voudrais ne dépendre que de lui, et que c'est à lui que je suis attaché jusqu'au dernier moment de ma vie.

A l'égard du jeune homme 5 dont vous avez eu la bonté de me renvoyer la lettre , il est vrai que c'est un des seigneurs les mieux mis et les plus brillants. J'ai peur que sa magnificence ne lui coûte de tristes moments. Je ne me mêle plus en aucune manière de ses affaires. J'ai eu pour lui, pendant un an, toutes les attentions que je devais à un homme envoyé par vous; je n'ai rien négligé pour le rendre digne de vos bontés . C'est maintenant à M. Hennin uniquement à se charger de son sort et de sa conduite. Si vous avez quelques ordres à me donner sur son compte, je les exécuterai avec exactitude; mais je ne ferai absolument rien sans vos ordres précis.

Agréez, monseigneur, avec autant de bonté que de plaisanterie, mon très tendre et très profond respect. »

3 Sur la carrière des Scythes, voir la lettre du 1er avril 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/09/16/j-apprends-qu-une-horde-de-barbares-a-fait-beau-bruit-6401521.html

4 La Guyenne dont le duc de Richelieu est toujours gouverneur .

5 Gallien .

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05/07/2023 | Lien permanent

Il est bon de faire une correction fraternelle

... au gouvernement .

A suivre ; ça ne nous rendra pas plus riches, espérons que ça ne nous appauvrira pas . Voyons les nouveaux CDD .

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« A Jean Le Rond d'Alembert

13 mai 1768 1

Mon cher et vrai philosophe, lisez la page 48 de la nouvelle édition du poème de Genève . Il est bon de faire une correction fraternelle à l'apostat La Bletterie . Si vous voulez ajouter quelques notes utiles au texte, ce texte en vaudra mieux . Frère Marin prétend qu'on peut imprimer La Guerre de Genève 2 à Paris . Pourriez-vous lui communiquer cet exemplaire et l'encourager à une si bonne œuvre ?

Il paraît deux éditions de la mort du chevalier de La Barre . Je n'ai encore vu ni l'une ni l'autre ; il faut attendre trois mois pour avoir des livres de Hollande . On dit que l'auteur de cette relation est un avocat au Conseil, et qu'on y trouve un précis de l'interrogatoire .

Si cela est, la pièce est très curieuse .

Vous ne sauriez croire avec quelle amitié je vous embrasse. »

2 Dans La Guerre civile de Genève, IV, 164, V* inclut le Tacite de La Bletterie ( ou La Blétrie) dans le tas pourri de brochures nouvelles : voir page 48 https://books.google.mu/books?id=Gy8HAAAAQAAJ&printsec=frontcover#v=onepage&q=tacite&f=false

Sur cet ouvrage, voir la lettre du 27 avril 1768 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/12/index.html

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09/01/2024 | Lien permanent

il est dangereux. Il détruirait absolument le pouvoir des ecclésiastiques, avec tous les mystères de notre sainte religi

... C'est bien ainsi que pensent et disent les intégristes face à l'Etat laïc qui ne veut que l'ordre et l'honnêteté (si malaisés etc. ) .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

21è mars 1767 1

M. Boursier , mon cher ami, vient d'adresser à M. de Courteilles l'ouvrage de mathématiques pour votre ami . On m'a envoyé de province une espèce de dialogue entre l'auteur de Bélisaire et un moine 2. L'auteur a trouvé. dans saint Paul qu'il ne faut pas damner Marc Aurèle . Il pourrait faire rougir la Sorbonne si les corps rougissaient . Vous aurez bientôt une lettre ostensible sur les Sirven 3 qui peut-être sera imprimable, supposé qu'il soit permis d'imprimer des choses utiles .

Je vous prie de ne point dégoûter les comédiens de donner quelques représentations des Scythes avant Pâques. La pièce est réimprimée, elle court déjà les provinces ; il n'y a pas un moment de temps à perdre.

Je ne sais comment les paquets que vous m’avez adressés me parviendront. Il n’y a plus de voitures de Lyon à Genève, et, malgré toutes les bontés de M. le duc de Choiseul, nous serons dans l’état le plus gênant et le plus désagréable, jusqu’à ce que l’on ait fait un nouveau chemin.

L’aventure de madame Lejeune a du moins produit un grand bien. On lui a saisi deux cents exemplaires du dernier livre 4 de feu M. Boulanger. Je viens de lire ce livre abominable pour la troisième fois . Je sens combien il est dangereux. Il détruirait absolument le pouvoir des ecclésiastiques, avec tous les mystères de notre sainte religion. L’auteur ne veut que de la vertu et de la probité, qui sont si malaisées à rencontrer, et qui ne suffisent pas. Je vous embrasse . E L. »

1 Copie par Wagnière ; l'édition de Kehl amalgame des fragments de cette lettre avec celle du 27 mars pour en faire une « lettre »du 27 mars 1767 ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/05/correspondance-annee-1767-partie-24.html

2 L’Anecdote sur Bélisaire, dans laquelle on trouve bien une référence à saint Paul .

3 La Lettre de M. de Voltaire à M. Élie de Beaumont en 14 pages, du 20 Mars 1767, selon l'édition de 1767. Le passage en italique, ainsi que les variantes signalées en remarques, figurent seulement à partir des éditions en 15 et en 8 pages qui vont suivre de peu la première .

« Du 20 Mars 1767. 

          Votre mémoire, monsieur, en faveur des Sirven a touché et convaincu tous les lecteurs, et fera sans doute le même effet sur les juges. La consultation, signée de dix-neuf célèbres avocats de Paris, a paru aussi décisive en faveur de cette famille innocente, que respectueuse pour le parlement de Toulouse.

Vous m’apprenez qu’aucun des avocats consultés n’a voulu recevoir l’argent qu’on leur offrait pour leur honoraire. Leur désintéressement et le vôtre sont dignes de l’illustre profession dont le ministère est de défendre l’innocence opprimée.

C’est la seconde fois, monsieur, que vous vengez la nature et la nation. Ce serait un opprobre trop affreux pour l’une et pour l’autre, si tant d’accusations de parricides avaient le moindre fondement. Vous avez démontré que le jugement rendu contre les Sirven est encore plus irrégulier que celui qui a fait périr le vertueux Calas sur la roue et dans les flammes.

Je vous enverrai le sieur Sirven et ses filles, quand il en sera temps ; mais je vous avertis que vous ne trouverez peut-être point dans ce malheureux père de famille la même présence d’esprit, la même force, les mêmes ressources qu’on admirait dans madame Calas. Cinq ans de misère et d’opprobre l’ont plongé dans un accablement qui ne lui permettrait pas de s’expliquer devant ses juges : j’ai eu beaucoup de peine à calmer son désespoir dans les longueurs et dans les difficultés que nous avons essuyées pour faire venir du Languedoc le peu de pièces que je vous ai envoyées, lesquelles mettent dans un si grand jour la démence et l’iniquité du juge subalterne qui l’a condamné à mort , et qui lui a ravi toute sa fortune. Aucun de ses parents, encore moins ceux qu’on appelle amis, n’osait lui écrire, tant le fanatisme et l’effroi s’étaient emparés de tous les esprits.

Sa femme, condamnée avec lui, femme respectable, qui est morte de douleur en venant chez moi ; l’une de ses filles, prête de succomber au désespoir pendant cinq ans ; un petit-fils né au milieu des glaces, et infirme depuis sa malheureuse naissance ; tout cela déchire encore le cœur du père, et affaiblit un peu sa tête . Il ne fait que pleurer : mais vos raisons et ses larmes toucheront également ses juges.

Je dois vous avertir de la seule méprise que j’aie trouvée dans votre mémoire. Elle n’altère en rien la bonté de la cause. Vous faites dire au sieur Sirven que le conseil de Berne et le conseil de Genève l’ont pensionné. Berne, il est vrai, a donné au père, à la mère, et aux deux filles, sept livres dix sous par tête chaque mois, et veut bien continuer cette aumône pour le temps de son voyage à Paris ; mais Genève n’a rien donné.

Vous avez cité l’impératrice de Russie, le roi de Pologne, le roi de Prusse, qui ont secouru cette famille si vertueuse et si persécutée. Vous ne pouviez savoir alors que le roi de Danemark, le landgrave de Hesse, madame la duchesse de Saxe-Gotha, madame la princesse de Nassau-Saarbruck, madame la margrave de Baden, madame la princesse de Darmstadt, tous également sensibles à la vertu et à l’oppression des Sirven, s’empressèrent de répandre sur eux leurs bienfaits. Le roi de Prusse, qui fut informé le premier, se hâta de m’envoyer cent écus, avec l’offre de recevoir la famille dans ses États, et d’avoir soin d’elle.

Le roi de Danemark, sans même être sollicité par moi a daigné m’écrire, et a fait un don considérable. L’impératrice de Russie a eu la même bonté et a signalé cette générosité qui étonne, et qui lui est si ordinaire ; elle accompagna son bienfait de ces mots énergétiques, écrits de sa main : Malheur aux persécuteurs !

Le roi de Pologne, sur un mot que lui dit madame de Geoffrin, qui était alors à Varsovie, fit un présent digne de lui ; et madame de Geoffrin a donné l’exemple aux Français, en suivant celui du roi de Pologne. C’est ainsi que madame la duchesse d’Anville, lorsqu’elle était à Genève, fut la première à réparer le malheur des Calas. Née d’un père et d’un aïeul illustres pour avoir fait du bien, la plus belle des illustrations, elle n’a jamais manqué une occasion de protéger et de soulager les infortunés avec autant de grandeur d’âme que de discernement : c’est ce qui a toujours distingué sa maison  et je vous avoue, monsieur, que je voudrais pouvoir faire passer jusqu’à la dernière postérité les hommages dus à cette bienfaisance, qui n’a jamais été l’effet de la faiblesse.

Il est vrai qu’elle fut bien secondée par les premières personnes du royaume, par de généreux citoyens, par un ministre à qui on n’a pu reprocher encore que la prodigalité en bienfaits, enfin par le roi lui-même, qui a mis le comble à la réparation que la nation et le trône devaient au sang innocent.

La justice rendue sous vos auspices à cette famille a fait plus d’honneur à la France que le supplice de Calas ne nous a fait de honte.

Si la destinée m’a placé dans des déserts où la famille des Sirven et les fils de madame Calas cherchèrent un asile, si leurs pleurs et leur innocence si reconnue m’ont imposé le devoir indispensable de leur donner quelques soins, je vous jure, monsieur, que dans la sensibilité que ces deux familles m’ont inspirée, je n’ai jamais manqué de respect au parlement de Toulouse ; je n’ai imputé la mort du vertueux Calas, et la condamnation de la famille entière des Sirven, qu’aux cris d’une populace fanatique, à la rage qu’eut le capitoul David de signaler son faux zèle, à la fatalité des circonstances.

Si j’étais membre du parlement de Toulouse, je conjurerais tous mes confrères de se joindre aux Sirven pour obtenir du roi qu’il leur donne d’autres juges. Je vous déclare, monsieur, que jamais cette famille ne reverra son pays natal qu’après avoir été aussi légalement justifiée qu’elle l’est réellement aux yeux du public. Elle n’aurait jamais la force ou la patience de soutenir la vue du juge de Mazamet, qui est sa patrie, et qui l’a opprimée plutôt que jugée. Elle ne traversera point des villages catholiques, où le peuple croit fermement qu’un des principaux devoirs des pères et des mères, dans la communion protestante, est d’égorger leurs enfants, dès qu’ils les soupçonnent de pencher vers la religion catholique. C’est ce funeste préjugé qui a traîné Jean Calas sur la roue ; il pourrait y traîner les Sirven. Enfin, il m’est aussi impossible d’engager Sirven à retourner dans le pays qui fume encore du sang de Calas, qu’il était impossible à ces deux familles d’égorger leurs enfants pour la religion.

Jugez, monsieur, de la disposition des esprits en Languedoc par la nouvelle calomnie qui vient de se répandre contre la famille Calas, contre M. de Lavaysse, et surtout contre le Conseil qui a rendu une justice si authentique à l'innocence . Il n'y a point de ville dans cette province où l'on ne débite comme une nouvelle très certaine que cette servante si célèbre dans le procès criminel des Calas par sa probité incorruptible, est morte à Paris ( où elle est en pleine santé), qu'avant de mourir elle a déclaré par devant notaire qu'elle avait été une sacrilège toute sa vie, qu'elle avait feint pendant quarante ans d'être catholique pour être l'espionne des Huguenots, qu'elle avait aidé son maître et sa maîtresse à pendre leur fils ainé, que les protestants de ce pays-là avaient en effet un bourreau secret élu à la pluralité des voix, lequel venait aider les pères et les mères à tuer leurs enfants quand ils voulaient aller à la messe, et que cette charge était la première dignité de la communion protestante .c'est au Conseil à voir s'il y aurait de l'humanité à exposer la famille Sirven à un peuple si fanatique .

A Dieu ne plaise que je soupçonne aucun magistrat du Languedoc d'avoir des opinions si extravagantes, mais je dis qu'elles sont dans la tête de la populace, et que ces cris se font écouter quelquefois .

Je sais très bien, monsieur, que l’auteur d’un misérable libelle périodique intitulé, je crois, L’Année littéraire, assura, il y a deux ans, qu’il est faux qu’en Languedoc on ait accusé la religion protestante d’enseigner le parricide . Il prétendit que jamais on n’en a soupçonné les protestants ; il fut même assez lâche pour feindre une lettre qu’il disait avoir reçue de Languedoc ; il imprima cette lettre, dans laquelle on affirmait que cette accusation contre les protestants est imaginaire : il faisait ainsi un crime de faux pour jeter des soupçons sur l’innocence des Calas, et sur l’équité du jugement de MM. les maîtres des requêtes : et on l’a souffert ! et on s’est contenté de l’avoir en exécration !

Ce malheureux compromit les noms de M. le maréchal de Richelieu et de M. le duc de Villars ; il eut la bêtise de dire que je me plaisais à citer de grands noms ; c’est de me connaître bien mal ; on sait assez que la vanité des grands noms ne m’éblouit pas, et que ce sont les grandes actions que je révère. Il ne savait pas que ces deux seigneurs étaient chez moi quand j’eus l’honneur de leur présenter les deux fils de Jean Calas, et que tous deux ne se déterminèrent en faveur des Calas qu’après avoir examiné l’affaire avec la plus grande maturité.

Il devait savoir, et il feignait d’ignorer, que vous-même, monsieur, vous confondîtes, dans votre mémoire pour madame Calas, ce préjugé abominable qui accuse la religion protestante d’ordonner le parricide ; M. de Sudre, fameux avocat de Toulouse, s’était élevé avant vous contre cette opinion horrible, et n’avait pas été écouté. Le parlement de Toulouse fit même brûler, dans un vaste bûcher élevé solennellement, un écrit extra-judiciaire dans lequel on réfutait l’erreur populaire ; les archers firent passer Jean Calas chargé de fers à côté de ce bûcher, pour aller subir son dernier interrogatoire. Ce vieillard crut que cet appareil était celui de son supplice ; il tomba évanoui ; il ne put répondre quand il fut traîné sur la sellette, son trouble servit à sa condamnation.

Enfin, le consistoire et même le conseil de Genève furent obligés de repousser et de détruire, par un certificat authentique, l’imputation atroce intentée contre leur religio

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07/09/2022 | Lien permanent

Il serait délicieux pour moi de rester à Sully s’il m’était permis d’en sortir

 

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Puisqu'il va être question de fêtes, profitez de l'un de mes pianistes préférés qui joue Bach comme je le sens habituellement, à savoir vivant et rythmé :

 http://www.dailymotion.com/video/x19y1b_jacques-loussier-...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« A Charlotte-Madeleine de Carvoisin, marquise de Mimeure

[parente de Fyot de La Marche, ancien condisciple, qui lui présenta F M Arouet l’été 1711]

 

Je vous écris de ces rivages

Qu’habitèrent plus de deux ans

Les plus aimables personnages

Que la France ait vu de longtemps ;

Les Chapelles, les Manicamps [ Manicamp : courtisan de Louis XIV];

Ces voluptueux et ces sages,

Qui, rimants, chassants, disputants

Sur ces bords heureux de la Loire,

Passaient l’automne et le printemps

Moins à philosopher qu’à boire.

 

 

                    Il serait délicieux pour moi de rester à Sully s’il m’était permis d’en sortir [séjour de mai à octobre 1716 ; il avait été condamné à être éxilé à Tulle, son père obtiendra que ce soit à Sully]. M. le duc de Sully est le plus aimable des hommes et celui à qui j’ai le plus d’obligation. Son château est dans la plus belle situation du monde. Il y a un bois magnifique dont tous les arbres sont tout découpés par de polissons ou des amants qui se sont amusés à écrire leurs noms sur l’écorce.

 

 

A voir tant de chiffres tracés

Et tant de noms entrelacés,

Il n’est pas mal aisé de croire

Qu’autrefois le beau céladon

A quitté les bords du Lignon

Pour aller à Sully-sur-Loire.

 

 

                    Il est bien juste qu’on m’ait donné un exil si agréable puisque j’étais absolument innocent des indignes chansons qu’on m’imputait [vers attaquant la duchesse de Berry, fille du Régent,  sur ses mœurs]. Vous seriez peut être bien étonnée si je vous disais que dans ce beau bois dont je viens de vous parler, nous avons des nuits blanches comme à Sceaux [spectacles féériques donnés à Sceaux en 1714-1715 chez la duchesse de Maine ; V* qui participait aux divertissements y composa ses premiers contes en prose : Le Crocheteur borgne,  et Cosi Sancta.]!  Mme de La Vrillière qui vint ici pendant la nuit faire tapage avec Mme de Listenay, [il dédia son triple madrigal intitulé Nuit Blanche de Sully aux deux sœurs, Mme de La Vrillière et Mme de Listenay]  fut bien surprise d’être dans une grande salle d’ormes éclairée d’une infinité de lampions, et d’y voir une magnifique collation servie au son des instruments et suivie d’un bal où parurent plus de cent masques habillés de guenillons superbes. Les deux sœurs trouvèrent des vers, sur leur assiette, qu’on leur assura être de l’abbé C***. [l’abbé Courtin, sans doute, habitué de Sully cet été là]. Je vous les envoie, vous verrez de qui ils sont. Après tous les plaisirs que j’ai à Sully, je n’ai à souhaiter que d’avoir l’honneur de vous voir à Ussé, et de vous donner des nuits blanches comme à Mme de La Vrillière. Je vous demande en grâce, Madame, de me mander si vous n’irez point en Touraine. J’irais vous saluer dans le beau château de M. d’Ussé après avoir passé quelque temps à Preuilly chez le baron de Breteuil,[père d’Emilie du Châtelet] c’est la moitié du chemin. Ne me dédaignez pas, Madame, comme l’an passé. Souvenez-vous que vous écrivîtes à Roy,[Pierre-Charles Roy, poête] et que vous ne m’écrivîtes point. Vous devriez bien réparer vos mépris par une lettre bien longue où vous me manderiez votre départ prochain pour Ussé. Sinon, je crois que malgré les ordres du régent, j’irai vous trouver à Paris, tant je suis avec un véritable dévouement, etc.

 

 

                           François-Marie Arouet

                           Été 1716. »

 

 

 

Au hasard d’un furetage : http://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres...   ,une petite lettre à Pimpette !

 

 

 

 

 

 

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25/07/2009 | Lien permanent

j'ai les doigts enflés, l'esprit aminci, et je ne peux plus écrire

 

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 Cette main est connue des visiteurs attentifs du château de Volti

 

 

«  A M. THIERIOT.

Aux Délices, le 9 mai [1755]

Je maudis bien mes ouvriers, mon cher et ancien ami, puisqu'ils vous empêchent de suivre ce beau projet si consolant que vous aviez de venir recueillir mes derniers ouvrages et mes dernières volontés.
Je plante et je bâtis, sans espérer de voir croître mes arbres, ni de voir ma cabane finie. Je construis à présent un petit appartement pour Mme de Fontaine, qui ne sera prêt que l'année qui vient. C'est une de mes plus grandes peines de ne pouvoir la loger cette année; mais vous, qui pouvez vous passer d'un cabinet de toilette et d'une femme de chambre, vous pourriez encore, si le cœur vous en disait, venir habiter un petit grenier meublé de toile peinte, appartement digne d'un philosophe, et que votre amitié embellirait. Nous ne sommes pas loin de Genève; vous verriez M. de Montpéroux le résident,i que vous connaissez , vous auriez assez de livres pour vous amuser, une très-belle campagne pour vous promener; nous irions ensemble à Monrion, nous nous arrêterions en chemin à Prangins, vous verriez un très beau et très-singulier pays; et, s'il venait faute de votre ancien ami, vous vous chargeriez de son héritage littéraire, et vous lui composeriez une honnête épitaphe, mais je ne compte point sur cette consolation. Paris a bien des charmes, le chemin est bien long, et vous n'êtes pas probablement désœuvré.
Vous m'avez parlé de cet ancien poème, fait il y a vingt-cinq ans ii, dont il court des lambeaux très-informes et très-falsifiés , c'est ma destinée d'être défiguré en vers et en prose, et d'essuyer de cruelles infidélités. J'aurais voulu pouvoir réparer au moins le tort qu'on m'a fait par cette infâme falsification de cette Histoire prétendue universelle; c'était là un beau projet d'ouvrage, et je vous avoue que je serais bien fâché de mourir sans l'avoir achevé, mais encore plus sans vous avoir vu.
Mme la duchesse d'Aiguillon iii m'a commandé quatre vers pour M. de Montesquieu iv, comme on commande des petits pâtés; mais mon four n'est point chaud, et je suis plutôt sujet d'épitaphes que faiseur d'épitaphes. D'ailleurs, notre langue, avec ses maudits verbes auxiliaires, est fort peu propre au style lapidaire.
Enfin l'Esprit des Lois en vaudra-t-il mieux avec quatre mauvais vers à la tête? Il faut que je sois bien baissé, puisque l'envie de plaire à Mme d'Aiguillon n'a pu encore m'inspirer.
Adieu, mon ancien ami. Si Mme la comtesse de Sandwich v daigne se souvenir de moi, I pray you to present her with my most humble respect. Vous voyez que je dicte jusqu'à de l'anglais; j'ai les doigts enflés, l'esprit aminci, et je ne peux plus écrire. »

 

i Le baron de Montpéroux, comme l'appelle l'Almanach royal de 1761 à 1765, fut résident de France de 1750 jusqu'au début de septembre 1765 . http://books.google.fr/books?id=sqUGAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q=r%C3%A9sident&f=false

Voir : http://www.droz.org/en/livre/?GCOI=26001100180080&fa=author&Person_ID=843

Pierre.-Michel Hennin fut son successeur, à Genève. http://books.google.fr/books?id=cy8HAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

Le 21 décembre1765, à l'arrivée de Hennin, V* écrira à d'Argental : « … il soutiendra la dignité de résident de France mieux que ne le faisait ce pauvre petit Montpéroux. »

iii « la sœur du pot des philosophes » comme la surnomme V* dans une lettre du 27 février à Thieriot . Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Anne-Charlotte_de_Crussol_de_Florensac_d%27Aiguillonoirhttp://fr.wikipedia.org/wiki/Anne-Charlotte_de_Crussol_de_Florensac_d%27Aiguillon

v Voir lettre à Thieriot du 23 janvier 1755 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/01/25/u...

 

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16/01/2012 | Lien permanent

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