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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

tant que son amant ne sera qu'un sot elle ne sera pas digne de paraitre .

... Ô combien de femmes resteront inconnues, cloitrées peut-être, et auront le temps d'avoir bien des cheveux blancs, si on s'en tient à cette condition !

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https://www.youtube.com/watch?v=hHfy1K8ClFc

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

Aux Délices 29 mars 1761

Il faut que j'aie commis quelque grande iniquité dont je ne me suis pas accusé en faisant mes pâques, car mes anges ont détourné de moi leur face 1 et leur plume . Je leur dirai comme le prophète je vous ai joué de la flute et vous n'avez point dansé 2; je leur ai envoyé vers et prose ; point de nouvelles ; nul signe de vie . J'essuie d'ailleurs plus d'une tribulation . Prault a imprimé Tancrède . Non seulement il ne l'a 3 point imprimé tel que je l'ai fait, mais ni Prault, ni Lekain , ni Mlle Clairon qui en ont eu le profit , n'ont daigné m'en faire tenir un exemplaire . En récompense on a imprimé Tancrède entièrement altéré et d'une manière qui, dit-on, me couvre de honte . Prault donne au public sous mon nom l'apologie de Corneille et de Racine 4 malgré tout ce que j'ai exigé de lui . Il faut donc m'armer de patience et me résigner . Mes chers anges ne m'abandonnez pas dans mes détresses . J'ai surtout une grâce à vous demander ; c'est de me garder un profond secret sur Le Droit du seigneur et de ne pas empêcher qu'une personne de mérite qui est dans la pauvreté retire quelque émolument de ce petit ouvrage que j'ai retouché avec le plus grand soin . C'est une chose que j'ai infiniment à cœur, et vous êtes trop bons pour ne vous pas prêter à mes faiblesses .

Vous ne m'avez point écrit depuis le roman de Jean-Jacques . Seriez-vous de ceux qui ont pris le parti de ce petit Diogène manqué ? Savez-vous qu'il y a dix-huit mois que ce fou furieux fit une cabale du fond de son village à Genève pour empêcher la comédie, et qu'il m'écrivit à moi vous corrompez ma république pour prix de l'asile qu'elle vous a donné ?5 Ne vous l'ai-je pas mandé et ne trouvez-vous pas qu'il est trop doucement puni ?

Ne soyez point fâché contre Fanime, tant que son amant ne sera qu'un sot elle ne sera pas digne de paraitre .

Dites-moi je vous en conjure si M. le duc de Choiseul a toujours de la bonté pour moi et si par hasard nous pouvons espérer la paix . Mais surtout instruisez-moi comment vont les yeux et la santé de mes anges, et ne mettez pas mon cœur au désespoir .

V. "

2Évangile selon Matthieu, XI, 17 : http://saintebible.com/matthew/11-17.htm

et selon Luc , VII, 32 : http://saintebible.com/luke/7-32.htm

3 V* a d'abord écrit m'a .

4 L'Appel aux nations , « ouvrage sur les théâtreux » annoncé dans la lettre du 16 décembre 1760 aux d'Argental : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1760-partie-49-121110192.html

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15/03/2016 | Lien permanent

Le Dieu d'Israël est irrité contre les enfants de Jacob qui assassinent dans les rues des vieillards de quatre-vingts an

 

 

 

 

« A Etienne-François de Choiseul-Stainville, duc de Choiseul i


18è février 1770, à Ferney

 

A Mécenas Atticus ii duc de Choiseul, etc., etc.

Le voix de Jean criant dans le désert iii vous dit ces choses .

Ce n'est pas assez que vous ayez fait des pactes de famille iv, donné un royaume à l'ainé de la famille v, fait un pape vi madré ou non madré et mis les soldats d'Israël sur un meilleur pied qu'ils n'ont jamais été. Tout cela n'est rien sans la charité vii. Le Dieu d'Israël est irrité contre les enfants de Jacob qui assassinent dans les rues des vieillards de quatre-vingts ans, des innocents destitués d'armes, blessent des femmes grosses, et se préparent à pendre ceux qu'ils n'ont pu assassiner viii.

 

C'est une des suites de l'insolence avec laquelle ils en ont usé envers l'ambassadeur de l'oint du Seigneur ix et envers Messala Atticus, premier ministre de cet oint . Le sanhédrin n'est pas moins coupable d'avoir fomenté, préparé, autorisé les abominations des enfants de Belial x.

 

Voici ce que dit le Seigneur . Si vous aviez seulement fait bâtir à Versoix une cinquantaine de maisons de boue vous auriez actuellement dans Versoix quatre cents habitants qui ne savent où coucher qui vous seraient attachés pour jamais, et qui probablement iront habiter l'Angleterre que mon cœur réprouve, ou la Hollande que je vomis de la bouche parce qu'elle est tiède xi.

 

J'ai ordonné à mon serviteur François V. capucin digne d'avoir soin de ces malheureux en attendant que votre rosée puisse les consoler .

 

Je sais que mon serviteur chargé de la bourse commune loge le diable dans sa bourse, c'est-à-dire rien, et qu'il ne pourra donner cent mille sicles xii pour bâtir des maisons .

 

Mon serviteur François V. est encore plus pauvre pour le moment présent xiii, mais vous pourriez trouver quelque bon ami, non pas de cœur, mais de finance qui prêtât des sicles pour bâtir des maisons . Il n'est pas encore besoin d'édit pour donner à qui voudra de quoi reposer sa tête .

 

Vous avez une galère xiv dans un port qui n'est pas fait, mais des familles ne peuvent coucher dans une galère à moins que ce ne soit la famille de Fréron .

 

L'esprit de charité pourrait vous porter encore à empêcher qu'on ne pende plusieurs de vos serviteurs qui se sont engagés à vous, dont vous avez la signature xv, qui se sont soumis à coucher dans les maisons que vous n'avez pas bâties, qui se sont déclarés Français, et qui pour cette raison sont présumés avoir incessamment la hart au col .

 

Je vous dis donc de la part du Seigneur : faites comme vous voudrez, car vous avez l'œil de l'aigle, et la prudence du serpent xvi.

 

Signé Jean, prédicateur du désert

et plus bas François V. capucin indigne,

admis à la dignité de capucin par frère

Amatus de Lamballa, général des capucins

résident à Rome;et de plus déclaré père

temporel des capucins de Gex .xvii


Lequel François prie Dieu pour vous et pour votre digne épouse . »

 

ii A Hennin, V* désigne cette lettre comme une « élégie en prose » où l'on trouve Atticus et Mécène amis respectifs de Cicéron et Virgile, Horace , ...

 

iii Vox clamens in deserto : évangile de Jean , et Isaïe dans la bible .

 

iv Traité d'alliance en août 1761 notamment, entre les rois de France et d'Espagne,tous deux Bourbons .

 

v La Corse est cédée au roi de France par Gènes en mai 1768 .

 

vi Clément XIV, né Ganganelli ; le cardinal de Bernis participa activement à l'élection .

 

vii Première épitre aux Corinthiens.

 

viii Rappel des violences qui ont eu lieu à Genève les 15-16 janvier . Le 19 janvier, V* décrit à la duchesse de Choiseul les violences contre les « natifs » : « Une femme grosse assassinée et blessée grièvement ; trois hommes tués ; un vieillard de quatre-vingts ans massacré en sortant de chez lui en robe de chambre ; tous ceux qui voulaient se retirer à Versoix menacés de la corde ... » Le 15, les Natifs avaient manifesté en faveur de deux des leurs condamnés . Le 16, à la demande des chefs des Représentants (encore plus acharnés que les patriciens contre les natifs) une prise d'armes fut décrétée ; trois natifs furent tués, des arrestations de masse opérées .

 

ix Beauteville, ambassadeur du roi, désigné comme médiateur au début 1766 pour mettre fin aux dissensions de Genève : voir lettres de 1765-1767 . Les Genevois refusèrent les conclusions des médiateurs en décembre 1766, et Beauteville quitta Genève .

 

x = Satan dans la littérature juive .

 

xi Apocalypse, de Jean .

 

xii Monnaie d'argent émise en Palestine au 1er siècle après J.-C.

 

xiii Allusion à l'argent placé chez La Borde que la politique de l'abbé Terray lui a fait perdre .

 

xiv La France avait fait bâtir un bateau sur le Léman et V* le rachètera pour qu'il ne tombe pas aux mains des Genevois .

 

xv Il s'agit des dix-huit familles dont V* parle au résident Henin le 16 février : « Lorsqu'on parla de bâtir Versoix, dix-huit Natifs vinrent m'apporter leurs signatures, et s'engagèrent à y bâtir des maisons . J'envoyai leurs propositions au duc de Choiseul ... » page 13 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80040v/f18.image.r=...

Parmi eux se trouvait Georges Auzière, un des meneurs, qui fut avec sept autres banni de Genève sans jugement le 22 .

http://www.imprimeriedesarts.ch/spip/spip.php?article20

 

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24/02/2011 | Lien permanent

je n’ai jamais prétendu que vous hasardassiez le bout d'un ongle en écrasant l’infâme

... Ne pas mettre le doigt entre le marteau et l'infâme (clou, caillou, prêtre de tout poil, politicard, fanatique, truand, etc., etc. !

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« A Jean Le Rond d'Alembert

[vers le 31 mai 1761] 1

Non mon cher philosophe je n’ai jamais prétendu que vous hasardassiez le bout d'un ongle en écrasant l’infâme . Ne peut-on pas lancer la foudre et retirer la main ? Qui peut, mieux que vous, écrire avec force et sagesse, et montrer la turpitude de la carogne en feignant de raccommoder sa jarretière ? Le nom d'un homme est-il écrit au bas des pages ? Les honnêtes gens vous entendent et vous soupçonnent . Les sots sont forcés de se taire .

Je connais fort M. Dardelle ; il me semble que vous l'avez vu quelquefois . Vous ne le décèlerez pas . Vous pourrez montrer à quelque ami, à Mme du Deffand sa besogne . Mais sûrement vous ne la ferez pas courir . Je vous jure par la direction d'intention 2, et par tous les casuistes jésuites que je n'ai aucun commerce avec M. Dardelle, que je n'ai pas la plus légère part à la conversation de l'intendant des menus . Je suis en peine de savoir quel est le plus plat de maître Huerne, de maître Le Dains, et de maître Omer .

Je ne voudrais être à Paris que pour vous dire à quel point je vous estime et à quel point je méprise un maître Omer .

Écrasez l’infâme adroitement et vous aurez paradis . »

1 Cette lettre est une réponse à celle de d'Alembert du 19 mai 1761 ; « Écrasez l’infâme ; écrasez l’infâme ! Cela est bientôt dit, quand on est à cent lieues des fripons et des fanatiques, quand on a cent mille livres de rente, quand on a su par sa réputation et par sa fortune se rendre indépendant de tout . Mais un pauvre diable comme moi, n'écrase point les serpents de peur qu'en retournant la tête, les serpents ne le piquent au talon […] la bonne manière de les tuer , c'est de leur donner envie de crier, et que la voix leur manque ; et c'est à quoi on parviendra en ne parlant jamais d'eux, ni en bien ni en mal, en perfectionnant la morale naturelle, en montrant qu'elle est seule raisonnable, seule nécessaire au bonheur des hommes […] Tout le monde applaudit avec justice à votre projet de l'édition des œuvres de Corneille au profit de sa nièce . Je vous conseille de faire comme en Angleterre, de mettre les noms des souscripteurs à la tête du premier volume . Vous intéresserez par là la vanité de bien des gens […] Mme du Deffand me charge de vous dire qu'elle ne se contente pas de vos compliments, qu'elle aimerait bien mieux une de vos lettres, que vous lui avez promis de lui envoyer bien des choses qu'elle n'a pas reçues, que vous avez grand tort de la négliger […] J'oubliais de vous dire que le libraire Duchesne implore votre protection auprès des Cramer, pour qu'ils le chargent de débiter à Paris la nouvelle édition qu'ils préparent de vos ouvrages . On dit que ce Duchesne est un galant homme, et vous ferez bien de le préférer à Lambert, l'ami et le libraire de Fréron, et qui après tout ce que vous avez fait pour lui, imprime toutes les semaines des injures contre vous et vos amis . »

2 L'emploi de ce terme de casuistique signifie que V* fait un faux serment .

 

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27/04/2016 | Lien permanent

j’ai toujours souhaité que vous ne prissiez les armes que contre nos ennemis, je persiste dans ces sentiments

... Messieurs et mesdames les Gilets Jaunes qui persistez dans vos âneries et  gesticulations, stériles pour le moins, destructrices trop souvent .

 

 

«  A Charles Palissot de Montenoy, etc.

à Argenteuil

par Paris

26è juillet 1764 1

Votre lettre, monsieur, est pleine de goût et de raison . Vous connaissez votre siècle, et vous le peignez très bien. Les sentiments que vous voulez bien me témoigner me flattent d’autant plus qu’ils partent d’un esprit très éclairé. Vous méritiez d’être l’ami de tous les philosophes, au lieu d’écrire contre les philosophes. Je vous répète encore que j’aurais voulu surtout que vous eussiez épargné M. Diderot . Il a été persécuté et malheureux. C’est une raison qui devrait le rendre cher à tous les gens de lettres.

M. de Marmontel s’est trouvé dans le même cas. C’est contre les délateurs et les hypocrites qu’il faut s’élever, et non pas contre les opprimés. Je pardonne à Guillaume Vadé et à Jérôme Carré de s’être un peu moqués des ennemis de la raison et des lettres . Je trouve même fort bon que quand un évêque 2 fait un libelle impertinent sous le nom d’Instruction pastorale, on tourne monseigneur en ridicule ; mais nous ne devons pas déchirer nos frères. Il me paraît affreux que des gens de la même communion s’acharnent les uns contre les autres. Le sort des gens de lettres est bien cruel : ils se battent ensemble avec les fers dont ils sont chargés 3, ce sont des damnés qui se donnent des coups de griffes. Maître Aliboron, dit Fréron, a commencé ce beau combat. Je veux bien que tous les oiseaux donnent des coups de bec à ce hibou, mais je ne voudrais pas qu’ils s’arrachassent les plumes en fondant sur la bête.

Le Crevier dont vous avez parlé est un cuistre fanatique, qui a écrit un livre impertinent contre le président de Montesquieu 4. Tous les gens de bien vous auraient embrassé, si vous n’aviez frappé que de telles canailles. Je ne sais pas comment vous vous tirerez de tout cela, car vous voilà brouillé avec les philosophes et les anti-philosophes. J’ai toujours rendu justice à vos talents ; j’ai toujours souhaité que vous ne prissiez les armes que contre nos ennemis, je persiste dans ces sentiments, et je vous prie de me croire très sincèrement, monsieur, votre très humble et obéissant serviteur

V. »

1 L'édition Œuvres de M. Palissot, 1788, supprime la date et ajoute quelques lignes inventées à la fin ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/08/correspondance-annee-1764-partie-26.html

2 Lefranc de Pompignan .

3 Souvenir du Poème sur la Loi naturelle, III, 112-114 :

Je crois voir des forçats dans un cachot funeste,

Se pouvant secourir, l'un sur l'autre acharnés

Combattre avec les fers dont ils sont enchaînés !

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20/09/2019 | Lien permanent

Les hommes et les autres animaux n'ont qu'une vie précaire . Nous ne vivons que de probabilités

... Et ce d'autant plus que l'on se plait à prédire le succès et l'échec d'hommes/femmes et de partis politiques qui n'ont d'utilité que de prouver que nous sommes en démocratie , qui sont fort bien connus de leur mère et de leur concierge, mais dont le monde se passe fort bien . La chasse au quart d'heure de célébrité - délivré par l'ARCOM- vaut son pesant de popcorn : https://www.publicsenat.fr/actualites/politique/interview...

Bardella, coq de très basse cour, pérore en France pour faire oublier qu'il est bien  minoritaire au niveau européen . Remettons les pendules à l'heure : https://www.touteleurope.eu/institutions/les-groupes-du-p...

Une chose reste sûre, l'homme est un animal grégaire, ça bouchonnera sur les routes des départs en vacances comme d'habitude , bien que tout le monde bêle  en se plaignant de la vie chère .

 

 

 

« A Alexandre-Marie-François de Paule de Dompierre d'Hornoy, Conseiller

au Parlement

rue d'Anjou au Marais

à Paris

25è novembre 1768

Mon cher conseiller, je ne vous ai point remercié , je n'ai écrit ni à madame votre mère, ni à M. de Florian, parce que j'ai ouï dire que Mme de Courcelles est une divinité qui aime fort les prémices . Je m'imagine que cette lettre vous trouvera chez vous à Paris .

Si vous avez eu à Hornoy un temps semblable au nôtre, je vous plains beaucoup ; mais si vous avez joué la comédie , je ne vous plains pas . Les Romains ne demandaient que panem et circemces, mais pour panem je n'en suis pas si sûr . Je souhaite que la Picardie soit plus heureuse que mon maudit pays . Presque personne n'a eu le temps de semer dans mon canton . Je me suis raidi contre les éléments ; j'ai perdu mes semences et mes peines . Les pluies ont pourri mon blé, car, quoi qu'en dise saint Matthieu, il ne faut pas qu'il pourrisse pour germer . Le peu qui a levé a été dévoré par les insectes que l'humidité a fait éclore . Les hommes et les autres animaux n'ont qu'une vie précaire . Nous ne vivons que de probabilités ; et après tout il est probable que le genre humain ne périra pas en l’année 1769.

Je vous réitère mes tendres remerciements . Je vous embrasse de toutes les forces qui me restent, aussi bien que M. et Mme de Florian .

J'écris à Mme Denis, et je partage avec elle sa reconnaissance pour tous vos bons offices .

V. »

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07/06/2024 | Lien permanent

Il me sera impossible de refaire la scène d'Ève et du serpent, à moins que le diable lui-même ne vienne m'inspirer

 http://www.deezer.com/listen-7199244

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

 

16è septembre 1769

 

Je réponds, mon cher ange, à vos lettres du 4 et du 9. Vous devez actuellement avoir reçu par M. Marin la tragédie des Guèbres, avec les additions que le jeune auteur [i] à faites.

 

Lekain a joué à Toulouse Tancrède, Zamore [ii], et Hérode [iii] avec le plus grand succès. La salle était remplie à deux heures. On dit la troupe fort bonne ; plusieurs amateurs ont fait une souscription assez considérable pour la composer. Cette troupe a donné Athalie avec la musique des chœurs, et on me demande des chœurs pour toutes mes pièces. Les spectacles adoucissent les mœurs, et quand la philosophie s'y joint la superstition est bientôt écrasée. Il s'est fait depuis dix ans dans toute la jeunesse de Toulouse un changement incroyable. Sirven s'en trouvera bien. Il verra que votre idée de venir se défendre lui-même était la meilleure, mais plus il a tardé plus il trouvera les esprits bien disposés. Vous voyez qu'à la longue les bons livres font quelque effet, et que ceux qui ont contribué à répandre la lumière n'ont pas entièrement perdu leur peine.[iv]

 

On me presse d'aller passer l'hiver à Toulouse [v]. Il est vrai que je ne peux plus supporter les neiges qui m'ensevelissent pendant cinq mois de suite , au moins, mais il se pourra bien faire que Mme Denis vienne affronter auprès de moi les horreurs de nos frimas, et celles de la solitude et de l'ennui avec un pauvre vieillard qu'il est difficile de transplanter.

 

M. de Chimène [vi] m'a mandé que M. le maréchal de Richelieu avait mis Les Guèbres sur le répertoire de Fontainebleau ; je crois qu'il s'est trompé, car M. de Richelieu ne m'en parle pas. Il a assez de hauteur dans l'esprit pour faire cette démarche, et ce serait un grand coup. Les tribuns militaires vont au spectacle, et les prêtres de Pluton n'y vont point ; la raison gagnerait enfin sa cause, ce qui ne lui arrive pas souvent.

 

Je vois bien que je perdrai la mienne auprès de M. le duc d'Aumont [vii]. Il me sera impossible de refaire la scène d'Ève et du serpent, à moins que le diable lui-même ne vienne m'inspirer. Je suis à présent aussi incapable de faire des vers d'opéra que de courir la poste à cheval. Je prends mon parti sur Pandore, ce spectacle aurait pu être une occasion qui m'aurait fait faire un petit voyage que je désire depuis longtemps [viii], et que vous seul, mon cher ange, me faites désirer. Quand je vous dis seul, j'entends Mme d'Argental et vous ; mais encore une fois je ne suis pas heureux.

 

Adieu, mon très cher ange ; pardonnez à un pauvre malade, si je ne vous écris pas plus au long.

 

V. »

 

i V*.

ii Zamore, personnage d'Alzire.

iii Dans Hérode et Mariamne.

iv L'année précédente l'abbé Audra lui a écrit qu'il avait contribué aux progrès de la tolérance à Toulouse, en particulier chez les jeunes.

v Antoine Darquier de Pellepoix, auquel il répondait le 5 août, lui proposait de passer l'hiver à Toulouse pour diriger des représentations théâtrales, et en particulier « essayer quelques chœurs de tragédie ».

vi Le marquis de Ximenes.

vii Le 9 août, au duc d'Aumont, V* a demandé de faire jouer l'opéra de Pandore quand il « donnerait des fêtes » à marie-Antoinette en l'honneur de son mariage avec le dauphin.

viii Évidemment, un voyage à Paris ; il avait écrit au duc d'Aumont en lui demandant de faire jouer Pandore : « L'idée de paraître encore une fois devant vous avant de mourir semble consoler ma vieillesse, et j'aurais cette espérance si vous m'accordiez la grâce que j'ose vous demander » et de plus en terminant : « Et si la chose réussissait, je serais à portée alors d'avoir la consolation et l'honneur de venir vous faire mes remerciements et de revoir quelques amis que vous aimez... »

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16/09/2010 | Lien permanent

ni Moïse ni les prophètes ne connurent jamais rien de l'immortalité de l'âme, ni du paradis, ni de l'enfer

 ... Et ni eux ni moi n'en vécurent pas au moins aussi bien que ceux qui font vivre l'enfer à ceux qui croient  au paradis et à l'immortalité de l'âme .

Quant à l'enfer éternel, éteint comme mon ordi, il n'est que cendres

enfin l enfer s éteint 1295.JPG

 

Question immortalité, je peux affirmer qu'elle n'est pas une qualité intrinsèque du chargeur-alimentation de mon Toshiba (durée de vie : 2 ans, grâce à des soudures réparant des ruptures de fils), mort sans rémission vendredi passé, d'où mon silence sur la toile !

 

 

 

 

« A M. George KEATE

Au Chêne à Lausanne 26 octobre 1757

Ah now t'is right 1. Vous me donnez enfin votre adresse monsieur, et grâce à la notion que j'ai de Nandos coffee house 2 je peux avoir l'honneur de vous écrire . Il y a environ un mois qu'un Anglais ou Écossais dont le nom finit en ie 3 passa ma porte à Lausanne et y laissa le livre où Warburton prouve si bien, pour la plus grande gloire de Dieu et l'édification du prochain, que ni Moïse ni les prophètes ne connurent jamais rien de l'immortalité de l'âme, ni du paradis, ni de l'enfer jusqu'au temps des Macchabées 4.

Je ne pus avoir l'honneur de vois ce voyageur ni milord Hamilton parce que malheureusement pour moi il alla à Genève quand j'étais à Lausanne et que je me trouvai à Lausanne quand il était à Genève .

J'apprends aujourd'hui monsieur que le Warburton avec un autre livre est un présent dont vous m'honorez . Je vous en fais mes très humbles remerciements . Il est bien beau et bien rare de se souvenir dans son île de ceux qu'on a vu dans le continent . Votre souvenir me flatte beaucoup plus que celui d'un autre .

Vous avez pris un temps bien peu favorable pour voir l'Allemagne et peut-être un temps assez triste pour retourner dans votre patrie . Il me semble qu'il y a beaucoup de division et les arts ne s'en trouvent pas mieux . Mais les dissensions publiques n'ont pas troublé votre tranquillité dans votre compagnie . Vous devez voir tous ces orages d'un œil serein .

Illum non populi fasces, non purpura regnum

Flexit aut infidos agitans discordia fratres

Nec conjurato descendens Dacus ab Istro .5

Farewell good sr, live happy and do not forget yr faithfull friend 6,

l'hermite des Délices . »

1 Voilà qui est bien .

2 Le café Nandos se trouvait au coin de Fleet Street et de Inner Temple Lane à Londres . Voir page 105 : http://books.google.fr/books?id=aQApAAAAYAAJ&pg=PA105&dq=caf%C3%A9+nandos+londres&hl=fr&sa=X&ei=gnH1UKKpKYTHtAaM74CwAg&ved=0CEYQ6AEwAw#v=onepage&q=caf%C3%A9%20nandos%20londres&f=false

là où « le punch était excellent et les filles de comptoir fort jolies ».

3 On ne sait qui il est .

4 Voir lettre du 1er septembre à de Brenles : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/12/14/vous-m-avez-debauche-et-vous-me-laissez-la.html

Voir lettre de janvier-février 1756 à Gabriel et Philibert Cramer où V* en fait mention ; c'est The Divine Legation of Moses demonstrated on the principles of a religious deist, 1755,(1738) que V* obtint au bout de deux ans d'un voyageur anglais .Voir : http://openlibrary.org/books/OL17963079M/The_divine_legation_of_Moses_demonstrated_on_the_principles_of_a_religious_Deist

et : http://books.google.fr/books/about/Divine_Legation_of_Moses_Demonstrated_on.html?id=PGiJp-tdo6cC&redir_esc=y

et : http://books.google.fr/books?id=Mf7KjuCFyMYC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

5 Virgile, Georgiques, II, 495-497 ; Celui-là, ni les faisceaux du peuple, ni la pourpre des rois ne l'émeuvent, ni la discorde qui dresse l'un contre l'autre des frères sans foi, ni le Dace descendant du Danube .

6 Adieu mon cher monsieur vivez heureux et n'oubliez pas votre fidèle ami .

 

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15/01/2013 | Lien permanent

ne jugez point de mes sentiments par ma négligence

... Mais si, mais si ! parlons-en de vos sentiments messieurs les présidents qui négligez de condamner les massacres de chrétiens .

Plus précisément, comment ne pas voir en la RATP une entreprise de sodomites de diptères dans son refus de l'affiche des Prêtres en soutien des chrétiens d'Orient malmenés . Ce n'est plus de la négligence, c'est de la lâcheté . Craindraient-ils de perdre des clients , -des partisans de l'Etat Islamique ,- seule explication que je puisse trouver en ce monde conduit par le seul profit ?

Manuel Valls est heureusement plus couillu à ce sujet

 

 

 

« A Joseph-Louis de Ponte, comte d'Albaret

Aux Délices 10 avril [1760]

Vous direz, monsieur, que je suis un paresseux, et vous aurez raison . Mais vous connaissez ma détestable santé : ne jugez point de mes sentiments par ma négligence ; croyez que de tous les paresseux et de tous les malades, je suis celui qui vous est le plus dévoué . Mme Denis va rejouer, mais pour moi je renonce au tripot . Je suis trop vieux, et je m'affaiblis tous les jours . Vraiment je serais charmé de voir la traduction de cette Alzire . Je suis comme les vieilles qui aiment les portraits dans lesquels elles se trouvent embellies .

Tout ce que vous me dites de Mme l'ambassadrice de France 1 se rapporte fort à ce qu'elle nous a laissé entrevoir . Elle paraît pétrie de grâces et de talents . Si j'avais la hardiesse de passer les Alpes, ce serait pour elle, pour M. de Chauvelin, pour vous , monsieur, et non pour entendre des opéras . Mais il faut achever ma carrière dans ma retraite . Je suis assez semblable aux girouettes qui ne se fixent que quand elles sont rouillées . Comptez que malgré mes misères , je sens bien vivement votre mérite et vos bontés ; autant en fait Mme Denis .

Umillimo 2.

Voltaire . »

1 Mme de Chauvelin , épouse du marquis Bernard-Louis de CHAUVELIN, ambassadeur à Turin. .Voir lettre du 11 décembre 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/19/je-pense-que-tout-le-monde-est-devenu-fou-cela-ne-serait-rien-si-l-on-n-eta.html

2 [Votre] très humble [serviteur].

 

 

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06/04/2015 | Lien permanent

je ne blâme que ceux qui m’ennuient

barbier de séville.jpg

 

« A François-Louis-Claude Marin

 

 

                   Vingt personnes m’ont envoyé ce même arrêt [Beaumarchais  « noté d’infamie »]. Je suis bien surpris, mon cher ami, qu’on ne vous ait pas fait une réparation particulière . Je l’aurais condamné à vous demander pardon [Beaumarchais mettait en cause Marin ; V* écrira : « Pour moi, je ne blâme que ceux qui m’ennuient, et en ce sens il est impossible de blâmer Beaumarchais. Il faut qu’il fasse jouer son Barbier de Séville, et qu’il rie en nous faisant rire. »] . Mais enfin la brûlure est quelque chose  [« Mémoires Goësmann »  de Beaumarchais, condamnés à être brûlés par le bourreau, cas exceptionnel pour un ouvrage qui met en cause un particulier ]. Tout est fini . Cela vous a donné bien de la peine, et cela ne la valait pas. Le beau-frère de L’Epine est fou [ Beaumarchais ; L’Epine est horloger et son beau-frère].

 

                   Voudriez-vous avoir la bonté de faire parvenir ce petit paquet à M. d’Alembert ?

 

                   Mille tendres amitiés .

 

 

                   Voltaire

                   7 mars 1774 »

 

 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois-Louis_Claude_Marin

 

 

 

Temps superbe, neige de rêve et de l'optimisme après avoir vu les Enfoirés. Sans nul doute, Beaumarchais aurait écrit pour eux et mis le rire au service des sans-logis, des sans-papiers, des sans-vies-décentes, des sans-ce-qui-est-nécessaire...

 

 

http://www.dailymotion.com/video/76447

 

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07/03/2009 | Lien permanent

nous sommes ensevelis dans les neiges mais aussi nous avons une belle verdure neuf mois de l'année

... Répètent in petto les habitants des 29 départements exceptionnellement ennneigés !

Ce qui me rappelle une affirmation équivalente lors de mon arrivée dans une ville minière :" Vous allez voir comme les alentours sont agréables !"

Oui, voyons le bon côté .

 

DSCF1033 enseveli sous la neige.jpg

 

 

« A Claude-François Passerat de La Chapelle 1

A Lausanne 6 janvier [1758]

Vous jouissez du printemps, monsieur, et nous sommes ensevelis dans les neiges mais aussi nous avons une belle verdure neuf mois de l'année et , tout est compensé . Je ne troquerais pas ma maison de Lausanne contre le château de Minorque ni même mon lac contre votre Méditerranée . Vous faites aussi très bien de ne pas changer votre sort contre celui de M. de La Virotte 2 qui va, je crois, revenir d'Allemagne avec le vainqueur de Mahon . Je serai bien content quand je vous verrai revenir de vos iles Baléares dans nos Alpes et quand je pourrai vous renouveler dans mes petites Délices les sentiments avec lesquels je serai toute ma vie, monsieur, votre etc.

Le Suisse »

 

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14/03/2013 | Lien permanent

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