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01/04/2022

je me contente de me défendre. Il est triste d’avoir à combattre des rats, quand on est près d’être dévoré par des vautours. J’ai besoin de courage, et je crois que j’en ai

... Volodymyr Zelensky dixit ?

Les vautours sont bien évidemment les Russes de Poutinie .

Les rats ? Sans doute les mercenaires de Wagner déployés au  Donbass : https://www.20minutes.fr/monde/3261331-20220329-guerre-uk...

Ira-t-on aussi jusqu'à faire appel aux ghost busters ?

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

29 décembre 1766

Mon cher ami, j’ai reçu le 27 votre lettre du 23. L’abbé Mignot doit vous avoir montré une lettre de sa sœur. Nous vous demandons, elle et moi, le secret le plus profond 1.

Voyez, je vous prie, la lettre que j’écris, aujourd’hui 29, au conseiller du Grand-Conseil, et que ce secret reste entre vous et lui, et M. d’Argental. Nous nous sommes sacrifiés pour lui comme nous le devions, et nous espérons qu’il fera quelque chose pour nous. Vous lui en parlerez, si cela est nécessaire.

Je serais au désespoir, mon cher ami, de vous avoir chagriné en vous demandant un peu d’ordre. Ce n’est pas assurément pour moi, c’est uniquement pour les Sirven . Car il y a grande apparence que je ne pourrai plus me mêler de cette affaire, ni d’aucune. Je ne vous ai demandé que de vous rendre compte à vous-même des dépenses qu’on sera obligé de faire pour la procédure. Il ne s’agit que d’avoir un petit livret de deux sous, dont on fait un journal ; ce n’est pas là assurément une affaire de finance.

Vous n’avez pas apparemment reçu la scène de l’embaucheur 2. Vous ne m’accusez pas non plus la réception de ma lettre à l’impératrice de Russie 3. Nos lettres se seront croisées.

Je suis très malade ; je ne me soutiens que par un peu de philosophie. Je devais partir demain, ma faiblesse et le temps horrible de notre climat m’en empêchent ; mais je suis prêt à partir, s’il est nécessaire. Qu’importe où l’on meurt ? J’éprouve une grande consolation en voyant que mon petit de La Harpe vient de remporter le prix de l’Académie 4. Je mets ma gloire dans celle de mes élèves, et j’attends beaucoup de lui. Il n’y avait que deux hommes qui pussent avoir fait la Lettre à Pansophe, l’abbé Coyer et Bordes, qui étaient tous deux en Angleterre dans ce temps. Coyer nie fortement, et avec l’air de sincérité ; Bordes nie faiblement, et avec un air d’embarras.

Pour celui qui a fait les notes 5, c’est un intime ami du docteur Tronchin, et je ne suis pas assez heureux pour être sa confidence. Je sais certainement que les notes ont été faites à Paris par un homme très au fait, que vous connaissez ; mais je ne veux accuser personne, et je me contente de me défendre. Il est triste d’avoir à combattre des rats, quand on est près d’être dévoré par des vautours. J’ai besoin de courage, et je crois que j’en ai.

Je ne sais ce que c’est que ce livre des plagiats de Rousseau 6, imprimé chez Durand. Si je reste à Ferney, je vous prierai de me l’envoyer. Il est cité, page 12, dans la triste et dure brochure des notes sur ma lettre à M. Hume 7.

A l’égard des Sirven, mon cher ami, continuez, et vous serez béni Le temps n’est pas favorable, je le sais ; mais il faut toujours bien faire, laisser dire, et se résigner. Quel beau rôle auraient joué les philosophes, si Rousseau n’avait pas été un fou et un monstre ! mais ne nous décourageons point.

Vous sentez bien que je ne dois rien dire sur M. de La Chalotais. Je vous suis seulement très obligé de m’avoir fait voir combien le roi est sage et bon. Vous ne m’avez rien appris ; mais j’aime à voir que vous en êtes pénétré comme moi. Je vous prie de faire mettre, si vous pouvez, cette déclaration dans le Mercure 8.

Voudriez-vous avoir la bonté de faire tenir d’abord cette lettre à l’abbé Mignot 9? »

1 Sur l’aventure de madame Lejeune.

5 Voltaire lui-même.

9 Cette lettre n'est pas connue .On peut noter que le 26 décembre 1766, Wagnière a écrit à Damilaville le billet suivant : « Je n'ai pu retrouver, monsieur, dans le désordre où nous sommes, le billet de douze cents livres [voir lettre du 29 octobre 1766 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/01/28/n... ] . Je vous prie de m'adresser toujours vos lettres à Genève. Voici un petit billet par lequel j'annule tous autres billets . Ainsi les choses sont en règle . Vos amis vous font les plus tendres compliments . Ayez la bonté de n’écrire qu'à moi . J'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur. / Wagnière. »

La destitution de cet homme est l’objet le plus important de cette affaire et le seul qui puisse nous délier les mains

... On peut le supposer à propos du czar Poutine, sans oublier qu'il ne règne pas avec une cour de saints, et que son élimination ne garantit pas d'avoir un.e démocrate à sa place . Dur dur de négocier avec l'ours oriental .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

29 Décembre 1766 (1).

Voyez, mon cher ange, si Homère n’avait pas raison de dire que le destin est le maître de tout.

Premièrement, c’est un étrange effet de la destinée que la femme de votre laquais Lejeune soit la sœur d’un homme qui aurait été peut-être maréchal de France, s’il eût vécu, et qui sûrement aurait mérité de l’être.

Secondement, c’est encore une grande fatalité qu’elle soit venue à Ferney. Mais en voici une troisième non moins forte.

Parmi soixante et dix mille scélérats en commission, qui sont employés à tourmenter la nation dans les bureaux des fermes, il y a entre autres un scélérat nommé Jeannin, revêtu de l’emploi de contrôleur du dernier bureau entre la France et Genève, dans un village nommé Saconnex. Cet homme m’a les plus grandes obligations ; j’ai empêché deux fois qu’on ne le chassât de son poste ; je lui ai prêté une maison, je lui ai prêté de l’argent. Lui et sa femme venaient souvent dîner à la table de notre maître d’hôtel. Il vit plusieurs fois cette pauvre Lejeune, qui n’avait point d’autre nom dans la maison ( car elle n’a pris le nom de Doiret qu’au bureau de Collonges, où elle a été arrêtée, à six lieues de Ferney, sur la route de Chalon.)

L’infernal Jeannin a été son confident ; il s’est offert de la servir, il l’a conduite lui-même de Ferney à Collonges dans mon carrosse, moyennant une récompense 1 ; et c’est là qu’il l’a trahie pour avoir, outre sa récompense, le tiers des effets qu’il a fait saisir.

Cet homme, pour être plus sûr de sa proie, et craignant que nous ne réclamassions le carrosse, les chevaux et les habits qui étaient dans les malles mêlés avec les papiers de madame Lejeune déclara que les papiers m'appartenaient, et Mme Lejeune eut la probité ou l’imprudence de dire, dans son trouble, que les papiers étaient à elle.

Nous ne savions point, quand nous avons commencé la procédure contre des quidams, que Jeannin était instruit du nom de Lejeune. Nous ne pouvons plus continuer la procédure contre ce misérable, trop instruit que madame Lejeune est la femme de votre valet de chambre, et qui ne manquerait pas de le déclarer en justice.

Il est d’une nécessité indispensable de commencer par faire révoquer cet homme ; il n’est pas de la province, et il n’y restera certainement pas. Il n’y a qu’à dire un mot à Rougeot, fermier-général, chargé de la ruine du pays de Gex ; il est de Dijon ; c’est un très bon homme. M. de Courteilles ou quelque autre peut prier M. Rougeot de renvoyer Jeannin sans délai. J’agirai de mon côté. Rougeot m’aime, et il est venu coucher souvent à Ferney.

La destitution de cet homme est l’objet le plus important de cette affaire et le seul qui puisse nous délier les mains. Car ce monstre, n’osant avouer son crime, n’a été qu’un dénonciateur secret, et il n’est fait mention de lui dans le procès-verbal de Collonges que sous le nom d’un quidam. Dès qu’il sera écarté, nous serons à notre aise, et nous informerons contre ce quidam sans nommer Jeannin. Ou si on le nomme, il ne sera plus à craindre 2.

Mme Denis persiste toujours dans la juste résolution de redemander ses chevaux et son carrosse ; car si elle consent à la saisie, elle s’avoue coupable, avec moi, d’un délit que nous n’avons commis ni l’un ni l’autre. Pour moi, je fonde mon innocence sur l’impossibilité morale que je fasse commerce de livres, et qu’à l’âge de soixante et treize ans je me sois fait colporteur pour faire fortune.

Tout ceci est horrible, je le sais, mon cher ange ; mais vous avez du courage et de la sagesse, et vous viendrez à bout de tout. Il y a dans la vie de plus grands malheurs ; il n’y a d’autre chose à faire qu’à les réparer ou à les supporter. Mon âme sera aussi à son aise dans un village de Suisse ou de Hollande que dans celui de Ferney, et partout où sera cette âme, elle adorera la vôtre. Je serais déjà parti, tout languissant que je suis, et je serais actuellement enfoncé dans les neiges, si je n’attendais pas de vos nouvelles . Je ne veux ni partir, ni mourir, sans en avertir mon cher ange.

V. »

2 Phrase ajoutée par V* sur le manuscrit .