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25/06/2024

il n’y a plus rien à changer que le titre de la tragédie

... Au lieu de l'appeler "Elections législatives" nommons-la "Triomphe des bonimenteurs" ou "Désastre pour le bon sens" .

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

19 décembre 1768

Mon cher ange, les mânes de La Touche se recommandent à votre bonté habile et courageuse. Je me trompe fort, ou il ne reste plus aucun prétexte a l’allégorie. La fin du IIIè acte pouvait en fournir ; on l’a entièrement retranchée. Ces prêtres mêmes étaient trop odieux, et n’attiraient que de l’indignation lorsqu’il fallait inspirer de l’attendrissement. C’était à la jeune Guèbre à rester sur le théâtre, et non à ces vilains prêtres qu’on déteste. Elle tire des larmes ; elle est orthodoxe dans toutes les religions ; son monologue est un des moins mauvais qu’ait jamais faits La Touche. Les prêtres ne paraissent plus dans les trois derniers actes ; et leur rôle infâme étant fort adouci dans les deux premiers, il me paraît qu’un inquisiteur même ne pourrait s’élever contre la pièce.

Voici donc les trois premiers actes, dans lesquels vous trouverez beaucoup de changements. Les deux derniers étant sans prêtres, il n’y a plus rien à changer que le titre de la tragédie. La Touche l’avait intitulée Les Guèbres ; cela seul pourrait donner des soupçons. Ce titre des Guèbres rappellerait celui des Scythes, et présenterait d’ailleurs une idée de religion qu’il faut absolument écarter. Je l’appelle donc Les Deux Frères. On pourra l’annoncer sous ce nom, après quoi on lui en donnera un plus convenable.

Lekain peut donc la lire hardiment à la Comédie. Il ne s’agit plus que d’anéantir dans la tête de Marin le préjugé qui pourrait encore lui donner de la timidité : c’est un coup de partie, mon cher ange ; il faut ressusciter le théâtre, qui faisait presque seul la gloire des Welches. Je vous avouerai de plus que ce serait une occasion de faire certaines démarches que sans cela je n’aurais jamais faites 1. Je n’ai plus que deux passions, celle de faire jouer Les Deux Frères, et celle de revoir les deux anges.

J’ai encore une demi-passion, c’est que l’opéra 2 de M. de La Borde soit donné pour la fête du mariage du dauphin. La musique est certainement fort agréable. Je doute que M. le duc de Duras puisse trouver rien de mieux. Dites-moi si vous voulez lui en parler, et si vous voulez que je lui en écrive.

Mme la comtesse de B. aime-t-elle la musique 3?

sub umbra alarum tuarum 4. »

1  V* , comme dans la lettre du 17 décembre 1768 à Mme Denis, semble songer à un retour à Paris ; voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/06/22/les-personnages-odieux-sont-toujours-a-la-glace-6504070.html

3 Cette phrase où il est sans doute question de Mme Du Barry est omise dans l'édition de Kehl et toutes éditions postérieures .

4 Psaume xvi, 8. : à l'ombre de tes ailes : https://www.aelf.org/bible/Ps/16#:~:text=08%20Garde-moi%2....

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