27/03/2018
c’est un coup d’aiguillon qui doit forcer à mieux faire encore
... Vous avez diantrement raison Mme Foresti :
http://www.lefigaro.fr/culture/2018/03/27/03004-20180327A...
« A Nicolas-Claude Thieriot
[vers le 30 mars 1763] 1
[…] Mon ancien ami, si M. Simon Lefranc de Pompignan n’eût point épuisé tous les éloges qu’il a fait faire dans la magnifique église de son village, je compilerais, compilerais, compilerais éloges sur éloges pour louer les succès que mademoiselle Dubois a eus dans ma tragédie de Tancrède . Je ne connaissais pas cette aimable actrice ; ce que vous m’en écrivez me charme. Je tremblais pour le Théâtre-Français ; mademoiselle Clairon est prête à lui échapper. Remercions la Providence d’être venue à notre secours.
Si les suffrages d’un vieux philosophe peuvent encourager notre jeune actrice, faites-lui dire, mon ancien ami, tout ce que j’ai dit autrefois à l’immortelle Lecouvreur. Dites-lui qu’elle laisse crier l’envie, que c’est un mal nécessaire ; c’est un coup d’aiguillon qui doit forcer à mieux faire encore 2. Dites-lui surtout d’aimer ; le théâtre appartient à l’amour : ses héros sont enfants de Cythère. Dites-lui de mépriser les éloges de Jean Fréron et des auteurs de cette espèce. Que le public soit son juge, il sera constamment son admirateur [...]. »
1 Ce fragment de lettre, imprimé sous diverses dates, est manifestement une réponse à la lettre du 23 mars 1763 où Thieriot écrit : « Il est bien juste que vous soyez informé de la clôture du Théâtre . On a représenté dans les deux dernières semaines Brutus, L'Orphelin de la Chine et Tancrède . Mlle Dubois qui s'applique et s'exerce beaucoup depuis quelque temps a été encouragée aussi par le public qu'elle a étonné . Mlle Clairon a obtenu un congé pour aller trouver M. Tronchin . Votre entrevue ne peut manquer de vous faire un extrême plaisir à tous deux . »
2 On a ici une citation par V* de sa propre épître à Hénault de 1748 .
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26/03/2018
quand on est content de la conduite des gens, on n’exige point qu’ils disent leurs raisons
... Comme ici , mille fois hélas, et ne manquez pas les commentaires : https://www.lequotidiendumedecin.fr/actualites/article/20...
« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu
Aux Délices 30è mars 1763
J’ai envoyé votre lettre à M. le duc de Villars, à l’instant que je l’ai reçue. Je n’ai pu, monseigneur le duc, la porter moi-même, attendu que les vents et les neiges me poursuivent jusque dans le printemps ; c’est un petit inconvénient attaché à la beauté de notre paysage, bordé par quarante lieues de glace. On dit que c’est ce qui me rend quinze-vingts, et que j’aurai des yeux avec les beaux jours . J’en doute beaucoup, car lorsqu’on est dans la soixante-dixième année, rien ne revient. Je ne parle pas pour les maréchaux de France qui auront leur septante 1 ans comme nous autres chétifs ; nos seigneurs les maréchaux sont d’une meilleure pâte ; et je suis sûr que quand vous serez leur doyen, comme vous l’êtes de l’Académie, vous serez le plus joyeux de la bande. Notre confrère M. de Pompignan n’est pas si gai, quoiqu’il fasse rire tout le monde. Je ne crois pas que son sermon soit parvenu jusqu’à vous ; c’est son panégyrique qu’il a fait prononcer dans l’église de son village de Pompignan, et dont il est l’auteur ; il l’a fait imprimer à Paris, et vous croyez bien qu’il a été affublé de plus de brocards que n’en a jamais essuyé feu M. Chie-en-pot-la-perruque 2.
Un M. de Radonvilliers, ci-devant jésuite, est votre autre frère académicien. Il était, comme vous savez, fort recommandé par la cour, et en conséquence il a obtenu six boules noires. Nos pauvres gens de lettres, tout effrayés, craignant d’être perdus à la cour, ont fouillé vite dans leurs poches, et ont montré, par les boules noires qui leur restaient, qu’ils en avaient donné de blanches . De façon qu’il a été bien avéré que c’étaient messieurs de la cour eux-mêmes qui avaient fait ce petit présent à M. de Radonvilliers ; cela fait voir qu’il y a des malins partout.
Pour M. le duc de Villars, votre confrère en pairie, en Académie, et en gouvernement de province, il est engraissé et embelli depuis environ trois semaines ; ses créanciers ont appris avec une joie incroyable la mort de madame la maréchale sa mère ; mais, pour moi, j’en ai été très affligé. Je crois qu’il restera encore quelque temps à Genève ; ce n’est pas qu’il y soit amoureux ; mais Tronchin, qui est malade, et qui ne sort pas de son lit, lui promet de le guérir radicalement ; il n'a plus d'autre mal que de roter un peu après dîner, comme Pont-de-Veyle, mais il n'a pas les mêmes bonnes fortunes .
Ah ! monseigneur, je n’ai point du tout l’esprit plaisant, et je ne sais plus que faire de ma fiancée. Vous devriez bien, quand vous serez de loisir, faire des mémoires de votre vie ; ils seraient écrits du style de ceux de M. le comte de Gramont, et ils contiendraient des choses plus intéressantes, plus nobles, et plus gaies. Est-ce que vous ne serez jamais assez sage pour passer trois à quatre mois à Richelieu ? Vous repasseriez tout ce que vous avez fait dans votre illustre et singulière vie, et personne ne peindrait mieux que vous les ridicules de votre siècle.
Vraiment notre victoire des Calas est bien plus grande qu’on ne vous l’a dit : non seulement on a ordonné l’apport des pièces, mais on a demandé au parlement compte de ses motifs. Cette demande est déjà une espèce de réprimande ; quand on est content de la conduite des gens, on n’exige point qu’ils disent leurs raisons. Aussi M. Gilbert 3, grand parlementaire, n’était point de cet avis.
Le quinze-vingts V. se met à vos pieds. »
1 Pour septante, voir lettre du 5 janvier 1763 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/11/15/il-faut-qu-il-mette-du-vin-dans-son-eau.html
2 Ce Chiampot la perruque doit être un personnage du théâtre de marionnettes , pseudonyme que prendra à l'occasion V* . Voir aussi lettre à d'Argental du 21 septembre 1750 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/09/21/df40a821fb169cb0faa0ca782bd67517.html
3 Pierre-Paul Gilbert de Voisins, opposé à l'arrêt de révision du procès de Calas, et petit-fils de l'avocat général Pierre Gilbert de Voisins qui avait requis contre les Lettres philosophiques . Voir : http://data.bnf.fr/15559852/pierre_gilbert_de_voisins/
et : http://journals.openedition.org/rives/2?gathStatIcon=true&lang=en
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25/03/2018
Il y a des viandes que l’estomac du peuple ne peut pas digérer, et qu’il ne faut servir qu’aux honnêtes gens : c’est une bonne méthode dont tous nos frères devraient user
... Voilà qui va en faire bondir plus d'un, -tant pis,- mais remettons-nous un moment dans l'époque et usons des mots comme ils étaient compris alors . Alles klar ?
Le peuple français actuel, et plus particulièrement certains professionnels, effectivement sont incapables de digérer des réformes nécessaires et sèment le désordre pour garder des droits ineptes , des "avantages sociaux" qu'ils dénient au reste du prolétariat . Baste !
« A Etienne-Noël Damilaville , Premier commis
des bureaux du vingtième
Quai saint-Bernard
à Paris
28è mars 1763
Mon cher frère, vraiment l’aventure de l’Académie est tout à fait singulière ! Mais comment se peut-il faire qu’il n’y ait eu que quatre boules noires 1 ? Il faut que mes confrères soient de bien bonnes gens.
Mademoiselle Clairon ne vient plus à Ferney 2; mais si mon frère y vient, je ne regretterai personne ; car la philosophie et l’amitié me sont bien plus précieuses que des tragédies. J’ai mandé à mon frère et à l’ange d’Argental que la tragédie d’Olympie, que j’avais donnée à Manheim, était imprimée je ne sais où, et que j’avais été obligé d’en envoyer une copie plus correcte. Mon ange d’Argental veut la faire jouer après Pâques ; il est bien le maître. Il légitimera ce bâtard comme il lui plaira ; mais si on joue la pièce, je crois qu’il serait bon d’en empêcher le débit à Paris, avant qu’elle eût été sifflée ou supportée. Je prie mon frère d’en conférer avec mon ange.
Le livre sur la tolérance, dont il a paru quelques exemplaires en Suisse et à Genève, est intitulé les Lettres toulousaines. Ce livre est d’un bon parpaillot, nommé de Court 3, fils d’un prédicant. Il y a des anecdotes assez curieuses ; mais nous avons craint que ce livre ne fît un peu de tort à la cause des Calas, et l’auteur le supprime de bonne grâce, jusqu’à ce que le parlement toulousain ait envoyé ses procédures et ses motifs.
Quant au traité véritable de la Tolérance, ce sera un secret entre les adeptes. Il y a des viandes que l’estomac du peuple ne peut pas digérer, et qu’il ne faut servir qu’aux honnêtes gens : c’est une bonne méthode dont tous nos frères devraient user.
Je n’ai point encore vu la lettre de Jean-Jacques à Christophe ; j’ai grand’peur qu’elle ne fasse du mal à la philosophie.
Est-il vrai qu’on a envoyé à M. le marquis de Pompignan la relation de son voyage à Fontainebleau 4, et qu’il est résolu d’aller faire rire en personne tout Versailles ? Faites-lui, je vous prie, mes baisemains.
J’embrasse mes frères. Écrasez l'infâme. »
1Lors des élections à l'Académie, une boule noire est un vote contre le candidat,ici lors de l'élection de l'abbé de Radonvilliers . Voir : http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/claude-francois-lysarde-de-radonvilliers
2 Elle a cependant écrit le 23 mars 1763 : « […] vous et Mlle Corneille êtes mes dieux, jugez combien votre offre m'est agréable ; jugez du plaisir que j'éprouverais en allant vous rendre mes hommages . Je vous entendrais tous les jours, je pourrais témoigner ma reconnaissance à M. Tronchin, à qui je suis sûre que je vais devoir la vie ; j’aurais pour compagnes votre nièce et celle de Corneille . Il me paraît impossible que rien m'arrête . »
3 Ou plutôt Court de Gébelin.
4 Voir les Facéties : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-faceties-prefac...
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24/03/2018
vous êtes fort belle ; il est étonnant qu’avec cela vous fassiez des livres, et de bons livres
... Voir à ce sujet : http://www.buzz-litteraire.com/200903061329-le-grand-ecri...
« A Octavie Belot
28è mars 1763 aux Délices
Votre drôle de lettre, madame, m’a fait un plaisir que je ne peux vous exprimer. Vous ne pouvez pas dire que vous n’avez pas de quoi faire chanter un aveugle , car je chante vos louanges, et je chante encore celles du roi, qui a récompensé votre mérite. Il me reste environ un œil, qui lira avec grand plaisir l’Histoire des Tudors 1, quoiqu’il soit en assez mauvais état. Je vous admire de vous appliquer à des ouvrages si solides et si utiles avec un esprit fait pour la gaieté.
Mme Dupuits, ci-devant Mlle Corneille, prétend qu’elle vous a vue, et que vous êtes fort belle ; il est étonnant qu’avec cela vous fassiez des livres, et de bons livres. Il faut qu’il n’y ait pas un moment de perdu dans votre vie ; mais il n’appartient pas à un vieil aveugle de vous dire des galanteries. Je me borne à vous féliciter de faire de si bonnes choses et d’être couchée sur l’état des pensions, ce qui est une des meilleures manières de se coucher. Tous les saints dont vous me parlez sont les miens, et je les invoquerais tous pour obtenir une petite part dans votre bienveillance. Je supplie madame la veuve B. d’agréer la reconnaissance du laboureur V. »
1 David Hume : Histoire de la maison de Tudor sur le trône d'Angleterre, traduite […] par Mme B***, 1763 ; voir par ex . https://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=ucm.5323843616;view=1up;seq=9
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23/03/2018
Il ne tient qu'à vous de m'envoyer un détail exact qui puisse autoriser mon zèle : il est très vif et très sincère, mais il a besoin d'être éclairé
... Serge Tournaire et Aude Buresi, juges, ont pu le dire tour à tour à cette anguille qu'est Nicolas Sarkozy . A mon avis, ils ne sont pas près d'avoir satisfaction, le prévenu est tout, sauf clair .
« A Pierre Rousseau etc. 1
Chez monsieur le Comte de Turpin
rue Garancière
à Paris
26è mars 1763 aux Délices 2
J'ai écrit , monsieur, dès que j'ai reçu votre lettre, mais je n'ai pu écrire qu'en général, et vous jugez bien que la requête d'un solitaire des Alpes a très peu d'effet à Paris et à Versailles, surtout quand elle n'est pas assez motivée . J'aurais désiré que vous m'eussiez instruit des prétextes qu'on a pris pour saisir vos effets . Il faut apparemment qu'on vous suppose quelques dettes, ou que vous ayez eu le malheur de transiger avec des personnes qui abusent de votre facilité . Il n'est que trop ordinaire aux gens de lettres de faire de mauvais marchés . En ce cas, ne pourrait-on pas demander des arbitres , et les faire agréer par M. le duc de Bouillon ? Cette voie me paraît la plus raisonnable, la plus courte et la moins dispendieuse . Je ne vois pas , d'ailleurs, qu'on puisse vous empêcher de faire un journal ; c'est un travail que tout le monde peut entreprendre, et s'il y a quelque avantage, c'est pour celui qui réussit le mieux .
Je conçois encore moins comment on a pu saisir les effets de madame votre femme, sans quelque sentence juridique, obtenue en vertu de quelque dette contractée, ou de quelque acte de société . Vous me laissez dans une ignorance totale de ce qu'il était nécessaire de savoir pour vous rendre service . Il ne tient qu'à vous de m'envoyer un détail exact qui puisse autoriser mon zèle : il est très vif et très sincère, mais il a besoin d'être éclairé .
J'ai l'honneur d'être, monsieur, avec tous les sentiments qui vous sont dus, votre très humble et très obéissant serviteur
V. »
2 Sur l'adresse, une main étrangère a barré les indications et les a remplacées par «à Bouillon »
00:24 | Lien permanent | Commentaires (0)
22/03/2018
Est-il bien vrai que maître Marin a été fourré à la Bastille pour quatre vers d'une tragédie oubliée
... et que maître Sarkozy, mis en examen favorisé, couche encore dans son lit douillet sans coup férir ? Le Code le permet, de façon exceptionnelle, c'est vrai, mais s'il s'agissait de vous ou de moi aurions -nous profité de cet accommodement ? Niet ! Nada ! Nichts ! Que pouic ! Et dire qu'il vit à nos crochets ...
Avoir le beurre, l'argent du beurre, et la main de etc.
« A Etienne-Noël Damilaville
Le 26 mars [1763]
Est-il bien vrai que maître Marin a été fourré à la Bastille pour quatre vers d'une tragédie oubliée, composée par maître Dorat ? On m'a envoyé ces quatre vers 1. Ils peuvent regarder les rois fainéants de la première race ; mais comment peut-on les appliquer à un roi qui a gagné deux batailles en personne ; qui a volé de Flandre en Allemagne ; qui a pris Fribourg en relevant d'une maladie mortelle ; qui tient conseil tous les jours, et qui est lui-même le premier ministre ? Tout cela est exactement vrai . Je ne peux croire qu'on lui ai fait l'outrage de mettre Marin à la Bastille . Je vous prie, mon cher frère, de me dire ce qui en est .
Voulez-vous bien avoir la bonté d'envoyer, par la petite poste, ce chiffon à Mme de Florian ?
Je soupire après les feuilles de l'Encyclopédie, que mon frère m'a promises .
J'embrasse toujours mes frères . »
1 Voir lettre du 25 mars 1763 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2018/03/19/j-aime-encore-mieux-un-sifflet-qu-un-changement-fait-malgre-6035491.html
00:25 | Lien permanent | Commentaires (0)
21/03/2018
Envoyez-moi je vous prie par les messageries les plus promptes, le paquet que je vous ai demandé
... Qui a dit cela :
1° L'acheteur des tableaux de Guéant
2° Le juge d'instruction à Sarkozy
3° Sarkozy à Kadhafi
4° Moi-même à un vendeur du Bon Coin
« A Cosimo Alessandro Collini, Secrétaire intime
et historiographe de Son altesse Électorale
à Manheim
Je vous fais mon compliment de tout mon cœur, mon cher ami, de votre historiographerie 1. Vous voilà en pied 2 de toute façon . Envoyez-moi je vous prie par les messageries les plus promptes, le paquet que je vous ai demandé, et mettez aux pieds de Son Altesse Électorale son vieux serviteur qui est presque aveugle .
Je vous embrasse du meilleur de mon âme .
V.
Aux Délices 26è mars 1763 3. »
1 Néologisme créé et déjà utilisé par V*, voir : https://fr.wiktionary.org/wiki/historiographerie
2 Être en pied signifie la même chose qu'avoir le pied à l'étrier .
3 Sur l'original, mention « f[ran]co Reinhausen [changé en Canstatt] ».
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