25/01/2010
l’intolérance est aussi absurde qu’horrible
Suite à une charmante visite de l'équipe clunysienne ce jour au château de Voltaire , une visite "éclairs" ( au chocolat, et je m'en lèche encore les doigts !! ) , je me permets de leur faire un peu de pub pour le grand évènement qui va bien les occuper cette année : cluny a 1100 ans . Mazette ! Ils ont déjà plus de cent mille visiteurs par an, combien vont-ils en avoir cette fois ?
http://www.dailymotion.com/video/x98l2f_cluny-2010-en-lum...
Vous pouvez constater que l'esprit de tolérance est vif chez les voltairiens !
Et l'esprit de moquerie tout autant, ce qui justifie ce lien : http://www.youtube.com/watch?v=HE1sf-pDoUs
Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais dans le style kitch, il est difficile de faire mieux sur le sujet . Je ne sais si je dois rire ou admirer l'art et la manière de "lire-chanter le Bottin" ou ici, le document de visite .
J'ai peur qu'un jour un trouvère complètement allumé vienne conduire la visite à Ferney ! Je suis certain que ça aurait son charme, mais bon, nous avons assez de jours de pluie ici, n'en rajoutons pas !
Je m'offre le luxe de faire de la pub pour un monument "diablement" fréquenté, cible entre autres de colère voltairiennes qui n'appréciait pas du tout le luxe des abbayes ni les taxes diverses qu'elles récoltaient sur le dos des plus pauvres, ceux-ci étant maintenus dans une crainte supersticieuse déplorable.
Autre temps, autres moeurs! De nos jours l'Etat s'est substitué au clergé : les promesses de paradis laïc valent bien les promesses de paradis clérical ! Non ?
Mieux ou pire ?
Mé pi, pas pi ! comme on dit en Savoie (la "hiaute" ! )
Ici, il est d'actualité d'ouvrir le château dès le 3 avril, ce qui nous ferait gagner plus d'un mois d'ouverture. Je vous prie d'y penser et de profiter de cette saison où il n'y a pas encore trop de monde .
« A Etienne-Noël Damilaville
24 janvier 1763
Mon cher frère, on ne peut empêcher, à la vérité, que Jean Calas ne soit roué, mais on peut rendre ses juges exécrables, et c’est ce que je leur souhaite. Je me suis avisé de mettre par écrit toutes les raisons qui pourraient justifier ces juges, je me suis distillé la tête pour trouver de quoi les excuser, et je n’ai trouvé que de quoi les décimer.
Gardez-vous bien d’imputer aux laïques un petit ouvrage sur la tolérance qui va bientôt paraitre [il l’annonçait déjà le 6 décembre 1762 : « on dit qu’il paraitra quelque chose à l’occasion des Calas et des pénitents blancs », en spécifiant qu'« on attendrait que la révision eût été jugée »]. Il est, dit-on d’un bon prêtre ; il y a des endroits qui font frémir, et d’autres qui font pouffer de rire ; car Dieu merci, l’intolérance est aussi absurde qu’horrible.
Mon cher frère m’enverra donc la petite feuille qu’on attribue à M. Le Brun [La Renommée littéraire ; V* écrira à Le Brun pour lui faire part des fiançailles de Mlle Corneille le 26, et lui propose de signer le contrat (par procuration). Il écrira à Damilaville le 1er février : « C’est une aventure assez comique que j’ai eue avec Pindare-Le Brun en vous envoyant un paquet pour lui dans le temps que vous me dépêchiez ses rabâchages contre moi … Je l’accable de politesses qui doivent lui tenir lieu de châtiment.]. Mais est-il possible que Le Brun qui m’adressait de si belles odes pour m’engager à prendre Mlle Corneille et m’envoie souvent de si jolis vers, ne soit qu’un petit perfide ?
Nous marions Mlle Corneille à un gentilhomme du voisinage, officier de dragons, sage, doux, brave, d’une jolie figure, aimant le service du roi et sa femme, possédant dix mille livres de rente, à peu près, à la porte de Ferney [Claude Dupuits de La Chaux]. Je les loge tous deux. Nous sommes tous heureux. Je finis en patriarche. Je voudrais à présent marier Mlles Calas à deux conseillers au parlement de Toulouse.
On dit la comédie de M. Dupuis [Dupuis et Desronais, comédie de Charles Collé, inspirée d’une nouvelle des Illustres Françaises de Robert Challe] fort jolie : cela est heureux. Le nom de notre futur est Dupuits [à Le Brun , il écrira que cette coïncidence « est d’un bon augure »]. Frère Thiriot doit être fort aise de la fortune de Mlle Corneille. Elle la mérite . Savez-vous que cette enfant a nourri longtemps son père et sa mère du travail de ses petites mains [Jean-François Corneille était « facteur de la petite poste dans les rues de Paris »] ? La voilà récompensée. Sa vie est un roman.
Je vous embrasse tendrement, mon cher frère. Ecrasez l’Infâme.
http://www.dailymotion.com/video/x84nla_generique-les-env...
PS. : Si vous regardez bien le petit doigt de la main droite de Gunzo -moine de gauche- (un moine peut-il être de gauche ? oui, si ça lui permet de se retrouver à la droite de Dieu ! ), pour ceux qui ont suivi la série culte "Les Envahisseurs", vous voyez que David Vincent aurait déjà eu du fil à retordre au Moyen Age . Gunzo, envahisseur déguisé en moine ! Trop fort !!
19:38 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, damilaville, dupuis, dupuits, corneille, le brun, tolérance, calas
13/12/2009
L’opéra-comique soutient–il toujours la gloire de la France ?
http://www.youtube.com/watch?v=1Ti96X2tTnM
Vous pouvez le constater la période des fêtes de Noël a perdu un peu de son mystère pour moi !
http://www.youtube.com/watch?v=OLag3lQ6lFc&feature=re...
Le compte à rebours commercial est enclanché ! Faites chauffer vos cartes bleues silver-gold-platine- (fer blanc , comme la mienne ).
http://www.youtube.com/watch?v=6Guhjf2OCGI&feature=re...
L'Infâme de cette période ...
http://www.youtube.com/watch?v=ZmRwJdFQPJM&feature=re...
Qui peut nous remettre sur pieds ?
Volti, bien sûr !
« A Etienne-Noël Damilaville
13 décembre [1762]
Ô mon cher frère, vous faites une action digne des beaux siècles de la philosophie [Damilaville a écrit une réponse aux Erreurs de M. de Voltaire… de Nonnotte ; V* joindra sous le titre Additions aux susdits éclaircissements , la réponse de Damilaville à la sienne intitulée Eclaircissements historiques à l’occasion d’un libelle calomnieux sur l’Essai de l’histoire générale, en 1763 quand il ajoutera un volume à l’Essai]. Je vous remercie au nom de la vérité et du mien. J’ai fait sur-le-champ transcrire votre écrit qui m’enchante autant qu’il m’honore Je vous renvoie le mien qui sera bien honoré d’être à coté du vôtre. Il est mieux qu’il n’était, parce qu’il est conforme à vos remarques autant que je l’ai pu. On m’assure que l’impertinent ouvrage que vous daignez réfuter et qui peut en imposer aux ignorants, est de la façon de Patouillet et de Caveirac. J’ai cru y reconnaitre le style de l’abominable auteur de l’apologie de la Saint-Barthélemy. Il est juste que de mon côté je serve un peu la philosophie et les frères. Je vais insérer dans l’Histoire générale un chapitre sur les gens de lettres et sur l’Encyclopédie [chapitre LXI : « D’un fait singulier concernant la littérature » du huitième volume ajouté à l’Essai sur l’Histoire en 1763]. Il sera fait de façon qu’Omer Fleury [Omer Joly de Fleury qui fit suspendre l’Encyclopédie par le Parlement en 1759] en rougira, et ne pourra ni se fâcher ni nuire.
Le mémoire de Loyseau vient fort bien après les autres [sur l’affaire Calas, après ceux de Mariette et de Beaumont, qui lui, en prit ombrage]. Ce sont trois batteries de canon qui battent la persécution en brèche. Je crois vous avoir dé jà mandé [dès le 6 décembre, V* annonce à Damilaville son Traité sur la Tolérance, en ajoutant qu’ « on attendra que la révision ait été jugée ». Le Traité paraitra en novembre 1763] qu’il paraîtrait en son temps, à l’occasion des Calas, un écrit sur la tolérance prouvée par les faits [allusion à « l’ouvrage odieux » de l’abbé d’Houtteville La vérité de la religion chrétienne prouvée par les faits (1722) et où la tolérance est appelée « système odieux » dans la préface].. Ô mes frères combattons l’Inf… jusqu’au dernier soupir ! Frère Thiriot est du nombre des tièdes ; il faut secouer son âme. Je n’ai reçu que douze lignes de lui depuis qu’il dort à Paris.
Joue-t-on encore Eponine ? [pièce de Michel-Paul-Guy de Chabanon, jouée le 6 décembre 1762] . L’opéra-comique soutient–il toujours la gloire de la France ?
Voltaire. »
Noël un opéra-comique ? En avez-vous votre dose ?
Allez, encore une goutte : http://www.youtube.com/watch?v=0HWiVI4-OMI&feature=re...
17:53 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, damilaville, caveirac, calas, nonnotte, fleury, patouillet, libelle
09/12/2009
Personne n’est plus indulgent que moi, mais ce n’est pas pour les calomniateurs
http://www.youtube.com/watch?v=sqinwy0RdQs : l' Eternel féminin vu par Juliette .
On peut lui faire confiance pour la réalité des faits , elle est femme , et je me réjouis chaque fois que je l'écoute. Non pour le point final, mais pour ce ton d'humour qu'elle sait manier à la perfection .
Régalez vous et grappillez ses autres titres, vous en redemanderez ...
« A Charles Manoël de Végobre
Je vous confie, mon cher Monsieur, que M. Court est à Paris sous un autre nom [Antoine Court de Gébelin, à Paris pour créer un centre clandestin de renseignement et de propagande pour les protestants. Il a écrit Les Toulousaines ou Lettres historiques et apologétiques en faveur de la religion réformée et de divers protestants condamnés (1763) ]. J’ai peur qu’il ne veuille précipiter le succès de ce que j’ai entrepris en faveur des protestants du royaume ; et que son zèle très louable ne demande trop tôt ce qu’on ne doit attendre que dans quelques années. Il m’a prié de lui faire avoir des audiences de quelques personnes qui peuvent beaucoup ; je l’ai fait. Je peux vous assurer qu’il y a des hommes en place qui sont tout aussi zélés que moi. Mais plus cette affaire est importante, plus elle demande de ménagements extrêmes.
Si quelques jours vous pouviez venir chez moi, je vous montrerais des choses qui vous surprendraient beaucoup .Comptez que personne ne vous a servis plus efficacement que moi depuis plus de soixante ans.
Laissons d’abord juger définitivement l’affaire de Calas, à laquelle mon avocat au Conseil travaille jour et nuit. C’est alors qu’on pourra agir avec plus de sureté.
M. le maréchal de Richelieu me mande qu’il accorde toute sa protection à M. de Carbon, et que si on voulait lui faire la moindre peine, il l’en ferait avertir.
Vous avez dans votre ville de Genève une espèce de quakre, qui mériterait, au moins d’être chassé, s’il était coupable de la calomnie qu’on lui impute [Claude Gray, qui invité à diner chez V* aurait affirmé ensuite « qu’on avait tenu à table de discours impies ». V* écrit à l’avocat Debrus à Genève : « S’il répand en effet ce bruit , nous en demandons justice, ou nous la ferons nous-mêmes. » et signe « Voltaire, Denis »]. Je suis bien aise de vous envoyer la déclaration de Mme Denis et la mienne. Personne n’est plus indulgent que moi, mais ce n’est pas pour les calomniateurs . Je ferai saisir ce misérable par la maréchaussée, s’il reparait sur les terres de France.
Je vous embrasse de tout mon cœur, et sans cérémonie.
V.
9è décembre 1763 à Ferney. »
05:22 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, végobre, court, dray, richelieu, calas, carbon, denis, calomniateur, maréchaussée
04/09/2009
ce sont mes mains qui ont travaillé
Loué soit Dieu, Dieu est Bach, et Glenn Gould est son prophète.
http://www.youtube.com/watch?v=wyOf_L4cNHc&NR=1
Bonheur ! et comment ne pas se réjouir d’avoir deux oreilles et un petit plus entre les deux !
Allez, je ne peux résister , fermez les yeux, battez la mesure (pas votre chat !), dansez tendrement et redemandez-en !
http://www.youtube.com/watch?v=buq-p8vSCLQ&feature=re...
« A Louise-Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul
Madame Gargantua, [le 11 septembre il expliquera à Mme Denis : «… pour qu’elle eût le premier bas de soie qu’on ait fait dans le pays de Gex, et pour que son mari qui fait bientôt bâtir sa ville de Versoix vît qu’on peut établir des manufacturiers dans sa colonie… j’avais demandé à Mme de Choiseul, qu’on dit posséder le plus joli et le plus petit pied du monde, un de ses souliers pour prendre juste ma mesure. Elle m’a envoyé un soulier de treize pieds de long. Je l’ai appelée Mme Gargantua ( et je lui ai envoyé des bas pour les enfants de Mme Gigogne.) »]
Pardon de la liberté grande, mais comme j’ai appris que monseigneur votre époux forme une colonie dans les neiges de mon voisinage [Versoix], j’ai cru devoir vous monter à tous deux ce que notre climat qui passe pour celui de la Sibérie sept mois de l’année peut produire d’utile.
Ce sont mes vers à soie qui m’ont donné de quoi faire ces bas, ce sont mes mains qui ont travaillé à les fabriquer chez moi avec les fils de Calas ; ce sont les premiers bas qu’on ait faits dans le pays.
Daignez les mettre, Madame, une seule fois, montrez ensuite vos jambes à qui vous voudrez, et si on n’avoue pas que ma soie est plus forte et plus belle que celle de Provence et d’Italie, je renonce au métier. Donnez-les ensuite à une de vos femmes, ils lui dureront un an.
Il faut donc que monseigneur votre époux soit bien persuadé qu’il n’y a point de pays si disgracié de la nature qu’on ne puisse en tirer parti.
Je me mets à vos pieds, j’ai sur eux des desseins ;
Je les prie humblement de m’accorder la joie
De les avoir logés dans ces mailles de soie
Qu’au milieu des frimas, je formai de mes mains.
Si La Fontaine a dit : Déchaussons ce que j’aime [dans La Courtisane amoureuse],
J’ose prendre un plus noble soin ;
Mais il vaudrait bien mieux, j’en juge par moi-même,
Vous contempler de près que vous chausser de loin.
Vous verrez, Madame Gargantua, que j’ai pris tout juste la mesure de votre soulier. Je ne suis fait pour contempler ni vos yeux ni vos pieds mais je suis tout fier de vous présenter de la soie de mon cru.
Si jamais il arrive un temps de disette, je vous enverrai dans un cornet de papier du blé que je sème et vous verrez si je ne suis pas un bon agriculteur digne de votre protection.
On dit que vous avez reçu parfaitement un petit médecin de notre colonie [Coste, que V* avait envoyé à Choiseul en avril fut très bien accueilli : on l’invita et on lui fit donner de gros appointements.], mais un laboureur est bien plus utile qu’un médecin. Je ne suis plus typographe [il se disait le typographe Guillemet dans ses lettres antérieures], je me donne entièrement à l’agriculture depuis le poème des Saisons de M. de Saint Lambert. Cependant s’il restait quelque chose de bien philosophique qui puisse vous amuser, je serai toujours à vos ordres.
Agréez, Madame, le profond respect de votre ancien colporteur, laboureur et manufacturier
Guillemet.
Ferney, 4 septembre 1769. »
Gigogne : ref : http://littre.reverso.net/dictionnaire-francais/definitio...
Et comme je viens d'avoir de bonnes nouvelles de Mamzelle Wagnière , j'ai une joie à faire partager : http://www.youtube.com/watch?v=BywaOxQna6E&feature=fvw
21:12 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : voltaire, choiseul, gex, versoix, calas, bas, blé
16/08/2009
lorsqu’il s’agit de faire du bien il est permis d’être imprudent,... mon cœur est fait pour les grandes passions
Un air qui me trotte dans la tête, allez savoir pourquoi, je laisse faire mon subconscient et je vous le transmets : http://www.youtube.com/watch?v=CSzMXRjr-zQ ou http://www.youtube.com/watch?v=0rlB_q6lJ5A&NR=1 ,et je mets le son à fond . Allez-y ! ça fait bouger entre les deux oreilles !!
Volti lui aura de nombreuses "pretty woman" et sera un vrai "tombeur" qui vous le voyez sait se mettre à la hauteur de l'interlocutrice .
Embrassons-nous et jouons !!!
Vont-t-ils finir en se roulant sur un tapis ? Vous le saurez en venant au château de Volti à Ferney ....
N'ayant pu trouver une lettre datée du 15 aout, je vous donne celle-ci .
« Au baron Frédéric Melchior Von Grimm
Je n’avais pas manqué, mon cher prophète, d’écrire à l’impératrice de Russie, car lorsqu’il s’agit de faire du bien il est permis d’être imprudent [elle avait écrit : « …ce livre (La Philosophie de l’histoire) sera infailliblement purifié par le feu à Paris, ce qui lui donnera un lustre de plus. »]. Cette souveraine qui m’a daigné écrire une lettre aussi philosophique que charmante vient de se signaler par deux actions dont aucune de nos dévotes n’est capable [« Elle a fait présent de quinze mille livres à M. Diderot » pour l’achat en viager se sa bibliothèque, et lui accordera « cent pistoles chaque année pour les soins qu’il en prendrait », « et de cinq mille livres à Mme Calas]. Les philosophes français contribuent à sa réputation, et les Welches ne pourront la ternir.
Je suspends ma lettre pour aller entendre Mlle Clairon qui va jouer Électre dans la tragédie d’Oreste.
J’en viens, j’ai été dans le ciel pendant deux heures. Il y a eu bien des talents en France, il n’y en a eu aucun qui en son genre ait été poussé à cette perfection. Je suis hors de moi. Il est convenable, il est juste que Mlle Clairon ait des dégoûts, et que Fréron soit honoré et récompensé.
Ce qui vous étonnera c’est que cette sublime personne n’a été déparée par aucun acteur tant elle les animait tous [Mme Denis et Mme de Florian, ses nièces, ont très bien joué, écrira-t-il à Cideville]. Je suis bien sûr qu’elle n’a jamais fait plus d’impression à Paris que dans ma masure allobroge où j’avais rassemblé environ cent cinquante personnes, la plupart dignes de l’entendre.
Malgré tous mes transports [dans ces « transports » il composera une Épître à Mlle Clairon si élogieuse qu’il reconnaitra qu’il a « été un peu trop loin…, mais (il a) cru qu’il fallait un tel baume sur les blessures qu’elle avait reçues au Fort-L’Evêque », (où elle avait été emprisonnée.], Mlle Clairon ne me fait pas oublier Mme Calas : mon cœur est fait pour les grandes passions. Dans l’instant, je reçois quelques signatures de souscripteurs [comme V* l’écrira à Collini le 4 octobre « … on fait dans Paris une très belle estampe de la famille des Calas. On a fait une espèce de souscription… Elle vaut un écu de six livres », au profit des Calas. Suite à l’opposition du parlement de Toulouse,- M. David et huit conseillers-, V* espèrera « que la démarche inattendue du parlement ne servira qu’à augmenter l’empressement du public. »]. J’espère que cette entreprise ne sera pas infructueuse, et je doute que le nombre d’estampes puisse suffire. Je suis aux pieds de M. de Carmontelle ; il a fait une action digne de ses crayons ; vous en faites une digne de votre cœur. Je présente mon respect à ma charmante philosophe [Mme d’Épinay] que je n’oublierai jamais. Puissent tous les Welches devenir Français ! Je vous embrasse avec la plus vive tendresse.
Voltaire
Ferney vers le 14 août 1765. »
Quelques facettes de ce Melchior Grimm : http://images.google.fr/imgres?imgurl=http://web1.radio-f...
16:40 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : voltaire, clairon, catherine, calas, grimm, collini, cideville
11/06/2009
au nom du genre humain protégez-la !
Tendresse et douceur , magie du désert qui nous tente pour mieux nous perdre , aller plus loin, aller trop loin,…
Comme tous les humains, sur notre pirogue-terre, au milieu du fleuve-voie lactée, perdue dans l’univers sans limite
En souvenir d’un ami malgache, mort trop jeune pour avoir le temps de revoir son pays natal , salut à toi Jean-Noël :
Force tranquille, retour à la maison
Quittons le rêve, attaquons l'infâme, et rêvons encore, à des jours meilleurs...
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental, envoyé de Parme etc., rue de la Sourdière Paris
et à Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental
Mes divins anges, je me jette réellement à vos pieds et à ceux de M. le comte de Choiseul. La veuve Calas est à Paris dans le dessein de demander justice. L’oserait-elle si son mari eût été coupable ? Elle est de l’ancienne maison de Montesquieu par sa mère (ces Montesquieu sont de Languedoc). Elle a des sentiments dignes de sa naissance et au dessus de son horrible malheur. Elle a vu son fils renoncer à la vie et se pendre de désespoir ; son mari accusé d’avoir étranglé son fils, condamné à la roue et attestant Dieu de son innocence en expirant ; un second fils accusé d’être complice d’un parricide, banni, conduit à une porte de la ville et reconduit par une autre porte dans un couvent, ses deux filles enlevées, elle-même enfin interrogée sur la sellette, accusée d’avoir tué son fils, élargie, déclarée innocente, et cependant privée de sa dot. Les gens les plus instruits me jurent que la famille est aussi innocente qu’infortunée. Enfin si malgré toutes les preuves que j’ai, malgré les serments qu’on m’a faits, cette femme avait quelque chose à se reprocher, qu’on la brûle. Mais si c’est, comme je le crois, la plus vertueuse et la plus malheureuse femme du monde, au nom du genre humain protégez-la.[le même jour lettre à Ribote-Charron : « …nos sommes très peu informés du fond de l’affaire. Ceux qui devraient nous donner le plus de lumières gardent un silence bien lâche, et qui même est suspect… On se donnera tous les mouvements possibles pour faire rendre justice à l’innocence ; mais il faut savoir pleinement la vérité. »]. Que M. le comte de Choiseul daigne l’écouter. Je lui fais tenir un petit papier qui sera son passeport pour être admise chez vous. Ce papier contient ces mots : la personne question vient se présenter chez M. d’Argental, conseiller d’honneur du parlement, envoyé de Parme, rue de la Sourdière.
V.
Mes anges, cette bonne œuvre est digne de votre cœur.
V.
11 juin 1762. »
22:21 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : voltaire, calas, argental, choiseul
28/01/2009
S’il y a quelque sottise nouvelle...
« A Frederic II, roi de Prusse
Sire,
Je mets aux pieds de Votre Majesté un ouvrage [ Le Siècle de Louis XIV ] que j’ai composé en partie dans votre maison . Et je lui en présente les prémices longtemps avant qu’il soit publié . Votre Majesté est bien persuadée que dès que ma malheureuse santé pourra me le permettre je viendrai à Potsdam sous son bon plaisir .
Je suis bien loin d’être dans le cas d’un de vos bons mots : qu’on vous demande la permission d’être malade. J’aspire à la seule permission de vous voir et de vous entendre . Vous savez que c’est ma seule consolation et le seul motif qui m’a fait renoncer à ma patrie, à mon roi, à mes charges, à ma famille, à des amis de quarante années ; je ne me suis laissé de ressource que dans vos promesses sacrées qui me soutiennent contre la crainte de vous déplaire.
Comme on a mandé à Paris que j’étais dans votre disgrâce, j’ose vous supplier très instamment de daigner me dire si je vous ai déplu en quelque chose [ V. avait fait des « tracasseries » à propos d’ « éditions subreptices » du Siècle de Louis XIV ce qui fâcha le roi ]. Je peux faire des fautes ou par ignorance ou par trop d’empressement . Mais mon cœur n’en fera jamais . Je vis dans la plus profonde retraite, donnant à l’étude le temps que les maladies cruelles peuvent me laisser . Je n’écris qu’à ma nièce, ma famille, et mes amis ne se rassurant contre les prédictions qu’ils m’ont faites que par les assurances respectables que vous leur avez données [ Mme Denis et les d’Argental entre autres ]. Je ne lui parle que de vos bontés, de mon admiration pour votre génie, du bonheur de vivre auprès de vous [ c’est ce qu’il fait dans les lettres aux correspondants autres que sa nièce ]. Si je lui envoie quelques vers où mes sentiments pour vous sont exprimés, je lui recommande même de n’en jamais tirer de copie et elle est d’une fidélité exacte.
Il est bien cruel que tout ce qu’on m’a mandé à Paris la détourne de venir s’établir ici avec moi et d’y recueillir mes derniers soupirs . Encore une fois, Sire, daignez m’avertir s’il y a quelque chose à reprendre dans ma conduite. Je mettrai cette bonté au rang de vos plus grande faveurs . Je la mérite m’étant donné à vous sans réserve ; le bonheur de me sentir moins indigne de vous me fera soutenir patiemment les maux dont je suis accablé .
V.
27 janvier 1752. »
Un bon résumé de la volonté de Volti* :"...celui qui rit de toutes les sottises qui sont frivoles, et qui tâche de réparer celles qui sont barbares ". Humoristes de tous temps et optimistes de tout poil, Hommes de bonne volonté , je vous le dis, je trouve que c'est une bonne attitude .
« A Jean Ribote-Charron, à Montauban
D’une main on donne le fouet aux parlements, et de l’autre on les caresse ; on déclare que les commandants n’ont fait qu’obéir aux ordres supérieurs, et on les rappelle [ allusion au duc de Fitz-James qui ayant fait arrêter des membres du parlement de Toulouse qui refusaient d’appliquer les édits du roi, fut relevé de ses fonctions par le roi après libération des parlementaires décembre 1763 ]. On chasse les jésuites, et on en garde quatorze à la cour qui confessent, ou font semblant de confesser. On est irrité des remontrances, et on invite à en faire ; ce monde est gouverné par des contradictions . Nous verrons quelle contradiction résultera du procès des Calas qui est actuellement sur le bureau . Est-il vrai que votre parlement s’est avisé de casser l’arrêt de celui de Paris, qui cassait le décret d’appréhension au corps du duc commandant de la province [ duc de Fitz-James ]?
S’il y a quelque sottise nouvelle, Monsieur Ribote est prié d’en faire part à celui qui rit de toutes les sottises qui sont frivoles, et qui tâche de réparer celles qui sont barbares .
Voltaire
Le 27 janvier 1764. »
15:39 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, frederic, santé, ribote-charron, calas, sottise