Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

je ne vois pas comment on pourrait supposer que des Anglais (qui se piquent aujourd’hui d’être une nation généreuse) pus

...http://tempsreel.nouvelobs.com/brexit/20160609.OBS2248/br...

Le doute pouvait subsister au jour de parution de cet article, mais désormais le Brexit prononcé relativise la "générosité" britannique .

 Dans la jungle de Calais, des migrants passent devant une inscription: "Amenez l'amour, arrêtez la guerre, merci. Nous voulons juste aller en Angleterre, s'il vous plaît".

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol , comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

A Ferney 23 décembre 1762

Je ne peux rien ajouter, mes favorables anges, à tout ce que je vous ai dit sur le futur, sinon que je suis content de lui de plus en plus. Les bons caractères sont, dit-on, comme les bons ouvrages , on en est moins frappé d’abord qu’on ne les goûte à la longue ; mais comme il n’a rien, et que de longtemps il n’aura rien, il est difficile de le marier sans la protection de M. le duc de Praslin ; et c’est sur quoi nous attendons vos ordres.

En attendant, il faut que je vous parle de mademoiselle d’Épinay ou de l’Épinay 1 ; ce n’est pas pour la marier. M. le maréchal de Richelieu paraît avoir usé de ses droits de premier gentilhomme de la chambre avec cette infante . Il veut la payer en partie par les rôles qu’avait mademoiselle Gaussin dans les pièces de votre serviteur . Il me demande une déclaration en faveur de la demoiselle, et même au détriment de l’infante Hus. Dites-moi, mes souverains, ce que je dois faire. Jamais je n’ai été moins au fait du tripot, et moins en état d’y travailler. Il faut finir mes tâches prosaïques, et attendre l’inspiration. Je crois que, s’il arrivait malheur aux pièces nouvelles, les comédiens pourraient trouver quelque ressource dans le Droit du Seigneur et dans Mariamne, telle qu’elle est ; car je vous avoue que je trouve très bon que la Salome dise à Mariamne qu’elle ne la regarde plus que comme une rivale 2. C’est précisément cette rivalité dont il s’agit, c’est de quoi Salomé est piquée ; et une femme à qui on joue ce tour dit volontiers à son adverse partie ce qu’elle a sur le cœur.

A l’égard de Zulime, pourquoi l’imprimer, si elle ne peut rester au théâtre ? et il me semble qu’elle ne peut y rester si on ne laisse la fin telle que je l’envoyai, et telle que nous l’avons jouée sur le théâtre de Ferney ? Vous m’avouerez qu’il est dur pour un pauvre auteur qu’on change malgré lui ce qu’il croit avoir bien fait. Il peut se tromper, cela n’arrive que trop souvent ; mais vous savez qu’il n’en est pas moins sensible, et surtout quand il a vu l’effet heureux des choses qu’on veut rayer dans son ouvrage, et qu’on y substitue des corrections dont il est mécontent, il a quelque droit d’être affligé.

Quant au duc de Foix rechangé en un autre personnage 3, n’est-ce pas un peu trop d’inconstance ? Souffrira-t-on plus aujourd’hui une méchante action dans un prince du sang qu’on ne la supporta autrefois ? n’y a-t-il pas des choses qu’il faut placer dans des temps éloignés, et qui révoltent quand elles sont présentées dans des temps éloignés, et qui révoltent quand elles sont présentées dans des temps plus récents ? ne vaut-il pas mieux mettre une proposition sanguinaire et barbare dans la bouche des Maures que dans celle des Anglais ?  Ce sont les Maures qui demandent le sang du héros de la pièce ; ce sont eux qui exigent qu’un prince français leur sacrifie son frère. En vérité, je ne vois pas comment on pourrait supposer que des Anglais (qui se piquent aujourd’hui d’être une nation généreuse) pussent faire une telle proposition à un prince de la race qui est à présent sur le trône. Assurément le moment n’est pas propre ; ce n’est pas le temps d’insulter les Anglais. Je crois que nos princes du sang et le duc de Bethford seraient également indignés, et que le public le serait comme eux.

Si cette idée insoutenable est tombée dans la tête de Lekain, vous lui ferez comprendre sans doute à quel excès il se trompe. Cela lui arrive bien souvent. Je confierai volontiers des rôles aux Lekain et aux Clairon, mais je ne les consulterai jamais.

Croyez-moi, encore une fois, qu’ils jouent le Droit du Seigneur et Mariamne, s’ils n’ont rien de nouveau ce carême. Je tâche d’oublier Olympie, afin d’en mieux juger, et de vous l’envoyer plus digne de vous. J’ai presque achevé l’Histoire générale, que j’ai conduite jusqu’à la paix pour ce qui regarde les événements politiques, et jusqu’à l’arrêt singulier du parlement contre l’Encyclopédie pour ce qui concerne l’histoire de l’esprit humain. On finit d’imprimer Pierre-le-Grand. Je serai bientôt libre, et je me rendrai au tripot ; car, entre nous, je l’aime autant que vous l’aimez.

Puissé-je, en attendant, faire un épithalame ! mais cela dépend de M. le duc de Praslin. Voilà bientôt ce qu’on appelle le jour de l’an . Je souhaite à mes anges toutes les félicités terrestres , car, pour les célestes n’y comptons pas.

V. »

1 Mlle de l'Épinay est plus connue sous le nom de Mme Molé (1740-1782) . Pierrette-Claudine-Hélène Pinet avait fait ses débuts le 21 janvier 1761, et fut reçue le 29 janvier 1763 . elle épousa le 10 janvier 1769 le fameux acteur François-René Molé . Si ce que dit V* est vrai, le véritable père de sa fille Elisabeth-Félicité, née le 23 juillet 1760, peut avoir été Richelieu .Voir Dictionnaire des comédiens, de Lyonnet ; voir : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2137871/f442.image

et voir : https://www.comedie-francaise.fr/fr/artiste/mlle-mole

et : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2137871/f440.image

2 Hérode et Mariamne, II, 2 : « Tremblez imprudente rivale ! » ; http://www.theatre-classique.fr/pages/programmes/edition.php?t=../documents/VOLTAIRE_MARIAMNE.xml#A2

3 Rebaptisé en duc de Vendôme .

Lire la suite

31/10/2017 | Lien permanent

Je suis toujours, mon cher monsieur, dans le même état, à cela près que je vieillis tous les jours

... et je guette les signes de l'attaque du Covid-19 : https://sante.journaldesfemmes.fr/fiches-maladies/2630075...

Belle liste à la Prévert ! Sur ce , je remets mon masque et reste au grand air .

 

 

« Au marquis Francesco Albergati Capacelli

Senatore di Bologna

à Bologna 1

Je suis toujours, mon cher monsieur, dans le même état, à cela près que je vieillis tous les jours . Il faut renoncer à tous les plaisirs, excepté à celui d’être aimé de vous, jouissez de tous ceux que votre bonne santé, et votre esprit encore meilleur peuvent vous procurer. Le goût des lettres et celui d’une véritable philosophie feront vos délices dans un pays où il y a bien peu de philosophes. Faites fleurir votre théâtre, tandis que je détruis le mien. Consolez-moi en exerçant un art auquel je suis forcé de renoncer, et conservez-moi des bontés auxquelles vous savez combien je suis sensible.

V. »

1 D'après l'original portant la mention « f[ran]co Milano ».

Lire la suite

23/08/2020 | Lien permanent

Continuez, sœurs aimables, à me parler de cuisse . Cela console les vieux malheureux

Note rédigée le 27 juillet 2011 pour parution le 20 décembre 2010 .

 

cuisse-de-nymphe-emue.jpg

 Emue, peut-être par la vue d'autres cuisses remarquables (plus que les miennes, c'est sur !) à voir ci-après ...

 

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

et à

Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine

 

Colmar 20 décembre [1753]

 

Mesdames mes deux nièces, je reçois vos consolantes lettres qui m'apprennent que le mal de Mme Denis est sans danger, et qui me font supporter tous les miens . Que Dieu le rende aux deux sœurs de m'avoir écrit en même temps . Mon pied deviendra ce qu'il pourra, mais que la cuisse dont il s'agit se désenfle 1. Continuez, sœurs aimables, à me parler de cuisse . Cela console les vieux malheureux .

 

Cette prétendue Histoire universelle jusqu'à Charles Quint, qui est poussée jusqu'à notre Charles VII, cette sottise si sottement imprimée est un des effets du lutin qui préside à ma destinée . Le roi de Prusse est fait de toute façon pour me persécuter . Ce manuscrit très incorrect qu'il avait à la bataille de Sore tomba avec tous son bagage dans les mains des houzards du prince Charles 2. Un valet de chambre de ce prince l'a vendu à un faquin de libraire de Hollande 3, et je crois que ce sont les houzards qui ont conduit l'impression . Je tremble plus que jamais pour Jeanne 4 et pour sa cuisse et gorge nue .

 

Franchement je ne sais pas comment tout ceci finira, et je crains de finir aussi tristement que j'ai vécu .

 

Je crois être bien instruit que Cernin 5 a écrit à ce pauvre Ericard . Le pauvre homme, le sot qu'Ericard !6 C'est un plat personnage . En avez-vous des nouvelles ? Comment va son tripot ?

 

Je suis actuellement occupé à rédiger , à mettre en ordre des lettres à une certaine Mme Daurade 7. C'est un manuscrit du XVIè siècle qu'un fureteur m'a confié ; on peut faire de ce rogaton un ouvrage dans le goût de Paméla, une espèce d'histoire intéressante et suivie qui sera curieuse pour le XIXè siècle 8.

 

Pour ce siècle où nous vivons, il me paraît un tant soit peu absurde, et méprisable . Je le quitterai bientôt . Les frais en sont faits . Je me regarde comme un homme déjà mort . Je ne m'aperçois que je suis en vie, ma chère enfant, qu'à ma tendresse pour vous .

 

Pied pourri vous embrasse de tout son cœur . Votre frère 9 s'est avisé de m'écrire de Nantes où je cois qu'il court des bénéfices et des filles.

 

Adieu, je ne suis pas en état de courir .

 

V. »

 

1 Celle de Mme Denis .

3 Jean Néaulme . Bien que ce libraire « qui a une boutique à Berlin comme à La Haye jure qu'il a acheté le manuscrit d'un valet du prince Charles », V* soupçonnera Frédéric ; le 25 décembre 1753, V* dit « que le roi de Prusse a donné à ce libraire le second manuscrit que je lui avais confié, et qu'il l'a fait dans le dessein de me perdre en France et de me forcer à recourir à lui ».

Le 30 décembre à Richelieu : « On m'assure que le prince Charles rendit au roi de Prusse … jusqu'à son chien . Il me demanda depuis un nouvel exemplaire . Je lui en donnai un plus correct et plus ample . Il a gardé celui-là . Son libraire Jean Néaulme a imprimé l'autre . »; page 102 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f106.image.r=.langFR

Après avoir lu cet Abrégé de l'histoire universelle … , il écrira le 13 janvier 1754 à Walther : « C'est un … manuscrit … que j'avais pris la liberté de donner au roi de Prusse sur la fin de 1739 » ; page 102 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f106.image.r=.langFR

Le roi lui écrira le 18 mars qu'il se trompe  car il a encore le manuscrit confié par V* et celui-ci doit être tranquille sur tout ce qu'il lui a confié . 

Voir aussi lettre à Néaulme du 28 décembre 1753 : page 100 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f104.image.r=.langFR

4Des fragments de La Pucelle se trouvaient à Sohr avec l'Histoire universelle dans la « cassette grise-rouge de l'avare » écrit V* à d'Argental le 21 ; page 99 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f103.image.r=.langFR

5 Frédéric II.

6 Louis XV.

7 Mme Denis ; voir lettres précédentes .

8 C'est l’œuvre vengeresse, les lettres de Prusse à Mme Denis réécrites, à publier après sa mort, ou alors l'ébauche du conte Les Lettres d'Amabed, où il est question de l'Inquisition , de femme incarcéré et violée, et qui est censé être la transcription d'un manuscrit du XVIè siècle . Le 9 janvier 1754, V* donnera des précisions qui peuvent s'appliquer à l'un ou l'autre hypothèse : «  … de ces occupations la plus agréable et la plus chère a été de mettre en ordre nos lettres, de les ajuster, et d'en faire un recueil qui compose une histoire suivie, assez variée et assez intéressante . Elles sont naïves, c'est comme Paméla une histoire en lettres ; il n'y a point d'humeur, cela fourmille d'anecdotes . Tout est dans la plus exacte vérité . Une cinquantaine de lettre composent le recueil . Cernin n'y gagnera pas, et la postérité jugera . »

9 L'abbé Mignot.

 

tatouage-cuisse-sebastien-chabal1.jpg

 

Lire la suite

20/12/2010 | Lien permanent

Mais si le gouvernement se mêle de cette affaire, il est juste que je me défende sans accuser personne.

http://www.deezer.com/listen-880068

Pour commencer une journée tonique,

Et aller au grand air,

Aux ennuis faire la nique,

Prenez un grand bol de Gotainer .


... Volti m'a contaminé ! je rime !...

Mais je dois l'avouer, je ne résiste pas à ce fou chantant qui nous donne des tranches de vie hilarantes :

http://www.deezer.com/listen-874772


Et pour préparer la rentrée, avec ou sans subvention :

http://www.deezer.com/listen-874773

Herakles_Niobid_krater_Louvre_G341.jpg

Au moins lui, il a déjà toutes ses fournitures !

 

 

 

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental


A Ferney 17è auguste 1774


Ceci devient sérieux, mon cher ange. Vous connaissez sans doute la Lettre d'un théologien à l'auteur du Dictionnaire des trois siècles [i] . C'est Hercule qui assomme à coups de massue un insecte, mais il frappe aussi sur toutes les têtes de l'hydre. On ne peut être ni plus éloquent ni plus maladroit. Cet ouvrage aussi dangereux qu'admirable [ii] armera sans doute tout le clergé. Il parait tout juste dans le temps que j'écris à monsieur le Chancelier pour l'affaire que vous savez [iii]. Pour comble de malheur on m'impute cet écrit funeste [iv] dans lequel il est question de moi presque à chaque page.


L'ouvrage est d'un homme qui a sans doute autant d'esprit que Pascal, et qui est aussi bon géomètre. Il dit que d'Alembert a résolu le premier d'une manière générale et satisfaisante le problème des cordes vibrantes, et qu'il a inventé le calcul des différences partielles.


Je n'ai jamais lu ces cordes vibrantes ni ces différences partielles de M. d'Alembert. Il y a près de quarante ans que vous m'avez fait renoncer à la sécheresse des mathématiques.


Il est donc impossible que je sois l'auteur de cet écrit [v]. J'aime les philosophes, je ne veux donc pas être leur bouc émissaire. Je ne veux ni de la gloire d'avoir fait la Lettre d'un théologien ni du châtiment qui la suivra.


J'admire seulement comme tous les évènements de ce monde s'enchainent, et comment un gueux comme Sabatier [vi], un misérable connu pour avoir volé ses maîtres, un polisson payé par les Pompignan, devient le sujet ou d'une persécution ou d'une révolution.


Je mets peut-être trop d'importance à cette aventure. Je peux me tromper et je le souhaite. Mais si le gouvernement se mêle de cette affaire, il est juste que je me défende sans accuser personne.


Je ne sais actuellement où vous êtes, mon cher ange. Mais si cette affaire fait autant de bruit qu'on le dit, si monsieur le Chancelier en est instruit, s'il vous en parle, songez, je vous en prie , que je n'ai nulle part à la Lettre du Théologien, que je me suis contenté de causer avec Pégase [vii] et qu'il y aurait une injustice affreuse à me rendre responsable des témérités respectables de gens qui valent beaucoup mieux que moi. Je suis affligé qu'on ait gâté une si bonne cause en la défendant avec tant d'esprit. Je vois la guerre déclarée et la philosophie battue. Mon innocence et ma douleur sont telles que je vous écris en droiture. Je vous demande en grâce de me répondre le plus tôt que vous pourrez.


J'attends avec impatience des nouvelles de la santé de madame d'Argental et de monsieur votre frère. »


iDe Condorcet.

ii Le même jour, à d'Alembert : « S'il n'y avait pas dans la Lettre d'un théologien à Sabatier une douzine de traits sanglants et terribles contre des gens puissants qui vont se venger, l'auteur de cette lettre, qui est assurément Pascal second du nom, serait le bienfaiteur de tous les honnêtes gens, mais voila une guerre affreuse déclarée. »

Le 20 août, à Condorcet : « Le minsistère peut se joindre au clergé, et rouver fort mauvais qu'on dise à la page 82 que c'est du peuple que les princes ont reçu leur autorité... »

iii La réhabilitation de d'Etallonde ; cf lettre du 12 août à Condorcet.

iv Le 25 septembre, à d'Argental : « L'abbé de Voisenon me mande que le maréchal de Richelieu s'amuse à lui prouver que je suis l'auteur de la Lettre du théologien. »

En effet on attribuait cette lettre à V*.

vIl l'écrivait la veille à Marin, si bien placé et qu'il a ménagé pour cette raison.

vi A propos de Sabatier, cf. lettres à d'Alembert des 1er janvier et 19 novembre 1773, à d'Argental le 30 avril 1774.

vii C'est à dire écrire le Dialogue de Pégase et du vieillard pour « démasquer dans les notes ... ce scélérat d'abbé Sabatier » ; cf. lettre du 30 avril 1774 à d'Argental.

 

 

Condorcet :

http://www.efm.bris.ac.uk/het/condorcet/new/Condorcet01.h...
Condorcet-NB.jpg

Lire la suite

18/08/2010 | Lien permanent

sa pétulance augmente avec l'âge . Il n'a rien gagné sur ses défauts et rien perdu de ses talents

... A combien d'hommes peut-on dire ceci ?

A part Voltaire, je pense à Jean d'Ormesson . Je suis sans doute mal renseigné pour donner une presque-liste aussi courte, mais des hommes dont la pétulance augmente (à part la mienne, bien sûr ;-) ) , cela ne court pas les rues chez les gens de lettres . Je suis prêt à citer tous ceux que vous pouvez suggérer .

 DSCF6489 pétulance.jpg

 Pétulance ? Appétence ?

 

« A Germain-Gilles-Richard de Ruffey

Aux Délices 27 mars 1759

Nous sommes Mme Denis et moi, monsieur, les deux plus envieuses créatures de ce monde et Mme de Fontaine 1 est l'objet de notre rage . Elle va vous voir et nous restons entre nos Alpes et le mont Jura . Je présente mes regrets et mes respects à Mme de Ruffey . Vous m'avez permis de m'adresser à vous, monsieur, pour l'aveu et le dénombrement du fief de Ferney . Je vous envoie ce que j'ai . S'il faut ma minute du contrat, j'aurai l'honneur de vous la faire tenir . Je n'ai point encore fini avec Mgr le comte de La Marche . On ne peut être plus sensible que je le suis à vos bontés . Regardez-moi comme un homme qui vous sera attaché toute sa vie .

V. »

1 Mme de Fontaine écrivait des Délices à Ruffey le 21 mars : « Je pars dans six jours . Je ferai un petit séjour à Dole et j'arriverai à Dijon le mardi 3 avril . J'irai descendre chez vous puisque vous l'ordonnez [...] » Elle retournait à Paris après un séjour à Ferney où ses relations avec Mme Denis n'avaient pas été excellentes .

Voir la lettre de Mme Denis à Cideville du 8 juin 1759 : « J'ai été assez malade , mon cher ami ; c'est ce qui m'a empêchée de vous écrire . J'ai eu depuis le départ de ma sœur une inflammation d'entrailles qui m'a mise en danger, mais Tronchin n'a pas voulu me laisser mourir et m'a tirée d'affaire à merveille . J'ai eu depuis un an des moments de chagrin qui peuvent bien avoir occasionné cet accident . Je vous en ai dit une partie . Le voyage des ma sœur avait entièrement changé l'humeur, et j'ose dire le caractère de mon oncle ; mais , mon cher ami, quelque chose qui arrive, croyez qu'il m'était impossible de ne pas me soumettre au parti que j'ai pris . J'en ai connu tous les dangers avant de m'y engager, mais l'honneur et même le devoir me forçaient de m'y rendre . Depuis le départ de ma sœur, je suis beaucoup plus heureuse . Le Florian et la sécheresse de caractère de la dame aigrissaient le sien . Tout va mieux présentement . Cependant sa pétulance augmente avec l'âge . Il n'a rien gagné sur ses défauts et rien perdu de ses talents .

Je ne vous envoie pas l'ode, parce que je sais qu'elle est publique à Paris . Dites-moi l'effet de la lettre en prose qui suit cette ode . Elle est un peu salée, et frère Berthier y est vivement houspillé . L'auteur prétend qu'il a actuellement son franc-parler, et il en use le mieux du monde . Sa prudence n'est pas encore consommée, mais ses talents sont plus brillants et plus abondants que jamais . Il vient de faire une tragédie sous mes yeux qui me confond d'admiration. Il n'a été qu'un mois à la faire . C'est ce que j'ai vu de plus touchant, sans en excepter aucune de ses autres pièces . Elle n'est sa plus fortement écrite . Il a voulu faire du nouveau et mêler les rimes; je ne déciderai pas s'il a bien fait . Mais malgré cela je suis sure que la pièce fera un effet prodigieux . Il y a bien encore deux ou trois petits défauts que l'on pourrait corriger en une demi-heure si l'on osait lui faire la plus petite objection, mais cela devient impraticable . C'est une qualité qu’il a acquise depuis eux ans, bien fâcheuse pour lui et pour les personnes qui s'y intéressent, parce qu'il est impossible de l'empêcher de suivre son premier mouvement et de lui faire la moindre réflexion . Voilà ce qui tourmente ma vie et ce qui me cause le plus d'inquiétude par l'extrême amitié et le vif intérêt que je prends à lui . Vous croyez qu'après avoir fait une tragédie il se reposera du moins quelques jours . Point du tout . Le jour qu'il a fini les derniers vers du cinquième acte, l'impératrice de toutes les Russies lui a envoyé une grande compilation de mémoires pour l'histoire de son père, et il y travaille douze heures par jour . Elle a accompagné cela de martre zibeline et des plus belles hermines avec une prodigieuse quantité de thé du roi de la Chine, qui est excellemment bon . Je voudrais bien que vous puissiez en venir prendre .

Nous sommes à merveille avec M . le duc de Choiseul, il vient de nous accorder une grâce bien flatteuse et qui, par la suite, peut me devenir bien avantageuse . La terre de Ferney que mon oncle a achetée sous mon nom est franche et quitte de tous droits en plus grande partie, lorsqu'elle est possédée par un Genevois . Cet accord a été fait par traité entre la France et Genève ; mais si elle passe en d'autres mains, elle perd son droit à jamais, et quand un Genevois la rachèterait, il ne pourrait plus la recouvrer . Le roi par un brevet signé de sa main nous a conservé ce droit ce qui rend cette terre bien plus facile à vendre si jamais je voulais m'en défaire . Cette grâce était difficile à obtenir . Mme la marquise et M. le duc de Choiseul nous ont donné dans cette occasion toute sorte de marques de bonté .

J'ai actuellement un grand plaisir, Mlle Fel est aux Délices avec tous ses jolis rossignols et passera quinze jours avec nous . C'est une fille aimable , indépendamment de son talent, et sa voix m'enchante . Le concert de Lyon l'avait fait venir, ce qui lui a valu plus de deux cents louis . Je l'ai engagée de venir nous voir ; elle donne trois concerts à Genève et nous lui ferons une souscription de cinquante louis . Je n'avait point entendu de bonne musique française depuis mon départ de Paris et j'en avais besoin .

Adieu, mon cher ami, ne vendez point votre jolie terre . Si jamais je revois ma patrie, il serait bien plus doux de passer les étés à trente lieues de Paris qu'à cent vingt . Pour lors je vendrais la mienne . Qui sait s'il ne prendra pas fantaisie à mon oncle dans sa vieillesse de retourner à Paris, et si nous ne l’engagerons pas à vous y aller voir . Si cependant vous aviez envie de vous en défaire, je garderais la mienne, et il faudrait bien que vous vinssiez nous y tenir compagnie, mais tout bien pesé, croyez que Paris vaut mieux que Genève . Écrivez-moi des lettres que je puisse montrer . Écrivez quelquefois aussi à mon oncle, je voudrais réchauffer en lui l'ancienne amitié qu’il a eue pour vous, sans paraître y prendre trop d'intérêt, et je voudrais l'engager à vous prier de lui-même de nous venir voir . Écrivez-lui, écrivez-moi, mais surtout conservez-moi votre amitié . Songez que la mienne vous est acquise pour jamais . Adieu, vous me faites regretter mon pays ; je me souviens toujours des moments où nous causions avec le grand abbé si librement et avec cette liberté et cette confiance qu'on ne retrouve qu'avec ses vrais amis. »

Les rapports de Mme Denis avec de Ruffey peuvent laisser penser qu'ils ont dépassé ceux de la simple amitié .

 

Lire la suite

14/05/2014 | Lien permanent

vieux comme un chemin

 vieux chemin.jpg

"Vieux comme un chemin", cette formule que je lis pour la première fois , a tout de suite évoqué pour moi un chemin de montagne, caillouteux, malaisé ("et de tous côtés au soleil exposé" aurait ajouté la mouche du coche de La Fontaine !), bien loin du "petit chemin qui sent la violette" , quelque chose d'assez éreintant .

Une fois de plus Volti a un langage imagé, parlant . Il aurait été un remarquable publicitaire (ou publiciste ?) .

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

 

26è septembre 1773

 

Et moi, mon cher ange, je me hâte de me justifier de l'obscurité que vous me reprochez par votre lettre du 20 . L’obscurité est assurément dans la conduite du maître des Jeux 1. Je lui ai toujours présenté mes humbles requêtes très nettement et très constamment . Je ne lui ai pas écrit une seule lettre où je ne l'aie fait souvenir de la parole d'honneur qu’il avait donnée au bon roi Teucer, au petit sauvage et à son amoureuse 2. Je me suis même plaint douloureusement de la préférence qu’il donnait à la partie carrée d'Iphianasse avec Oreste et d'Electre avec le petit Ithis 3.

 

J'ai toujours insisté sur la nécessité absolue de faire un peu valoir un ancien serviteur . Je lui ai représenté que c'était peut-être la seule manière de venir à bout d'une chose dont il m'avait flatté 4. Il m’a toujours répondu des choses vagues et ambigües . Il y a deux affaires que je n'ai jamais comprises, c'est cette conduite du maître des Jeux et l'édition de Valade 5.

 

Il y en a une troisième que je comprends fort bien, c'est le changement d'avis du maître des choses 6. Je conçois que les hypocrites ont parlé à ce maître des choses, et qu’ils ont altéré ses bonnes dispositions . Les Tartuffes sont toujours très dangereux 7. A l'égard de Sophonisbe, comment puis-je distribuer les rôles moi qui, depuis trente ans , ne connais d'autre acteur que Lekain ? C'est au maître des Jeux à en décider .

 

J’écris ces jours-ci à Mme de Saint-Julien, et je l'ai remerciée de toutes ses bontés 8, en comptant même qu'elle en aurait encore de nouvelles, mais voici le voyage de Fontainebleau,9 et je n'ai plus le temps de rien espérer . Celle qui a lu si bien ma petite lettre 10 à mon successeur l'historiographe, aurait pu se mêler un peu des affaires de la Crête et de l'Afrique 11; mais je n'ai pas osé seulement lui faire parvenir cette proposition ; j'ai craint de faire une fausse démarche . On voit rarement les choses telles qu'elles sont avec des lunettes de cent trente lieues .

 

J'ai donc tout remis en dernier lieu entre les mains de la Providence .

 

Vous daignez entrer, mon cher ange, dans toutes mes tribulations . Vous me parlez de ma malheureuse affaire des rescriptions 12. Elle est très désagréable, et elle a beaucoup nui à ma colonie . C'est encore une affaire de la Providence qui demande une grande résignation .

 

Quant à M. de Garville 13, qui est si lent dans ses voyages, je crois qu'il s'était chargé de deux Minos, l'un pour vous, l'autre pour M. de Thibouville .

 

Il ne me reste plus qu'à répondre à vos semonces d'écrire à M. le duc d'Albe 14. Il me semble qu'il y a trop longtemps que j'ai laissé passer l'occasion de lui écrire 15. Je dois d'ailleurs ignorer la chose 16, et ne me point mêler de ce que les gens de lettres ont bien voulu faire pour moi tandis que les gens d’Église me persécutent un peu . Et puis, il faut vous dire que je suis découragé, affligé, malade, vieux comme un chemin, que je crains les nouvelles connaissances, les nouveaux engagements et les nouveaux fardeaux .

 

Pardonnez-moi ; il y a des temps dans la vie où l'on ne peut rien faire, des temps morts, et je me trouve dans cette situation . Vous me demanderez pourquoi j'écris des fariboles à mon successeur l'historiographe 17, et que je ne puis écrire des choses raisonnables à M. le duc d'Albe . C'est précisément parce que ce sont des fariboles ; on retombe si aisément dans son caractère ! Mais je me sens bien plus à mon aise quand je vous écris, parce que c'est mon cœur qui vous parle . Je suis bien consolé par ce que vous me dites de Mme d'Argental . Si elle se porte bien elle est heureuse, il ne lui manquait que cela .

 

Mme Denis et moi, nous lui en marquons toute notre joie . Vous savez à quel point nous vous sommes attachés .

 

Adieu, mon cher ange, je vous aimerai jusqu'à ce que mon corps soit rendu aux quatre éléments, et l'âme à rien du tout, ou peu de chose .

 

Pour répondre à tout, je vous dirai que le Taureau blanc est entre les mains de M. de Lisle 18, et qu'il faut le faire transcrire . »

1   Le duc de Richelieu, premier gentilhomme de la chambre chargé des spectacles en 1773 .

2   A savoir, les Lois de Minos ;

voir lettre du 7 août : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/08/07/j...

3 Dans une lettre du 26 août, V* se plaint de la préférence accordée à l'Electre de Crébillon sur son Oreste .Voir page 236 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f241.image.r=.langFR

4   Le voyage de V* à Paris ; il écrivait par exemple le 26 juillet à Richelieu : « J'ai imaginé que si les Lois de Minos et la Sophonisbe réussissaient, ce succès pourrait être un prétexte pour faire adoucir certaines mois dont vous savez que je ne parle jamais . » ;

voir pages 222-224 , lettre datée du 19 juillet : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f227.image.r=.langFR

5 L'édition pirate faite à paris des Lois de Minos ;

voir lettre à d'Argental du 30 janvier : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/01/30/je-n-ai-jamais-jusqu-a-present-fait-errer-ainsi-des-femmes-e.html

et à Richelieu du 1er février : page 147 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f152.image.r=.langFR

6   Le roi .

7   D’Alembert lui en avait cité .

Voir lettre du 1er janvier 1773 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/01/02/j-ai-resolu-de-me-moquer-des-gens.html

8   Il lui a écrit la veille : «Vous avez fait rentrer en lui-même M. le maréchal de Richelieu au sujet de l'Afrique et de la Crète . Du moins vous l'avez convaincu , ... » ;

voir page 248 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f253.image.r=.langFR

9 Déplacement de la cour à Fontainebleau agrémenté de spectacles.

10 Mme du Barry . S'agit-il de la lettre du 20 septembre où il présente à la comtesse une montre de ses manufactures, et dont il parle à Richelieu le même jour ? 

voir page 247 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f252.image.r=.langFR

Ou s'agit-il de la petite galanterie mi vers-mi prose du début de juillet où il rend « deux baisers » envoyés « par la poste »?

L'historiographe est Marmontel .

11 Faire représenter Sophonisbe et Les Lois de Minos .

12 Le 14 septembre , V* lui a rappelé à propos de la banqueroute d'un créancier génois que « … J'aurais pu réussir si M. l'abbé Terray m'avait pas pris mes rescriptions entre les mains de M. Magon ».

Voir page 245 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f250.image.r=.langFR

13   Ami du duc d'Aiguillon qui en quittant V* à Ferney dit partir pour Paris et ne fit qu'aller « se réjouir dans une maison de campagne » avec les paquets de V* ; voir lettre du 14 septembre à d'Argental .

14 C'est bien du duc d'Albe dont il s'agit, celui-ci ayant souscrit (20 louis) pour la statue réalisée par Pigalle ; voir lettre du 19 mai à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/05/11/mon-degout-pour-tout-ce-qui-n-est-que-vanite-faux-air-affect.html

Lire la suite

26/09/2011 | Lien permanent

A l'égard des adoucissements sur la prêtraille, c'est là véritablement la chose impossible qui est au- dessus des talent

 

Note rédigée le 2 août 2011 pour parution le 18 novembre 2010 .

http://www.deezer.com/listen-10239903

diable-rd-01.jpg

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

 

18 novembre 1768

 

Mes anges avaient très grande raison de s'endormir comme au sermon aux deux premières scènes du Vè acte des Guèbres ; le diable qui affligeait alors le petit possédé 1 était un diable très soporatif, un diable froid, un diable à la mode . Ces scènes n'étaient que des jérémiades où l'on ne faisait que répéter ce qui s'était passé et ce que le spectateur savait déjà . Il faut toujours dans une tragédie que l'on craigne, qu'on espère à chaque scène ; il faut quelque petit incident nouveau qui augmente ce trouble ; on doit faire naitre à chaque moment dans l'âme du lecteur une curiosité inquiète . Le possédé était si rempli de l’idée de la dernière scène, quand il brocha cette besogne, qu'il allait à bride abattue dans le commencement de l'acte, pour arriver à ce dénouement qui était son unique objet .

 

A peine eut-il lu la lettre céleste des anges qu'il refit sur-le-champ les trois premières scènes qu’il vous envoie . Il ne s'en est pas tenu là, il a fait au IVè acte des changements pareils ; il polit tout l'ouvrage . Ce n'est plus le seul Arzemon qui tue le prêtre, c'est toute la troupe honnête qui le perce de coups . Il n'y a pas une seule de vos critiques à laquelle votre exorcisé ne se soit rendu avec autant d'empressement que de reconnaissance . Le diable de La chose impossible 2 n'était pas plus docile .

 

A l'égard des adoucissements sur la prêtraille, c'est là véritablement la chose impossible qui est au- dessus des talents du diable . La pièce n’est fondée que sur l'horreur que la prêtraille inspire, mais c'est une prêtraille païenne . Mahomet a bien passé, pourquoi Les Guèbres ne passeraient-ils pas? si on craint les allusions, il y en avait cent fois plus dans le Tartuffe .

 

Trouveriez-vous à propos que Marin montrât la pièce au chancelier 3, ou plutôt que quelqu'un de ses amis la lui confiât comme un ouvrage posthume de feu La Touche, auteur de l'Iphigénie en Tauride ? Un homme fraichement sorti du Parlement ne s’effrayera pas de l'humiliation des prêtres . Il m' a écrit une lettre charmante sur Le Siècle de Louis XIV .

 

A l'égard des acteurs, j'oserais presque dire que la pièce n'en a pas besoin . C'est une tragédie qu'il faut plutôt parler que déclamer . Les situations y feraient tout, les comédiens peu de chose ; et le sujet est si piquant , si intéressant, si neuf, si conforme à l'esprit philosophique du temps, que la pièce aurait peut-être le succès du Siège de Calais 4, et du Catilina de Crébillon 5, quoique ces deux pièces soient inimitables .

 

Il y a plus encore, c'est que cette tragédie pourrait faire du bien à la nation . Elle contribuerait peut-être à éteindre les flammes où le chevalier de La Barre a péri, à la honte éternelle de ce siècle infâme .

 

Si on ne peut jouer Les Guèbres, il se trouvera un éditeur qui la fera imprimer avec une préface sage dans laquelle on ira au-devant de toutes les allusions malignes . Un jour viendra que les Welches seront assez sages pour jouer Les Guèbres . C'est dans cette douce espérance que je me mets à l'ombre de vos ailes avec toute la tendresse imaginable .

 

Est-ce Villars qu'on appelle aujourd'hui Praslin ? ou est-ce Praslin auprès de Chalons ?

 

Croyez-vous que Moustapha l'imbécile déclare la guerre à ma Catau Sémiramis ?6 Ne pensez-vous pas que le pape aide sous main les Corses ?7 Si vous ne faites pas rentrer l'infant dans Castro 8, je vous coupe une aile .

 

Et du blé, en aurez-vous ? Je vous avertis que j'ai été obligé de semer trois fois le même champ . L’Évangile ne sait ce qu'il dit quand il prétend que le blé doit pourrir pour germer 9; les pluies avaient pourri mes semences, et malgré l’Évangile, je n'aurais pas eu un épi . Je suis un rude laboureur .

 

V. »


4 Tragédie de du Belloy, créée le 13 février 1765, réimprimée en 1769  : http://books.google.com/books?id=rJdDAAAAcAAJ&printse...

Voir aussi la critique : http://www.jstor.org/pss/40519848

5 V* en a voulu à Mme de Pompadour d'avoir soutenu cette pièce .

6 A savoir le sultan de Turquie et Catherine II de Russie .

7 Les Corses en révolte, guidés par Paoli ; voir lettre du 26 octobre à Mme Denis : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/10/26/ma-bonne-sante-et-ma-mort-sont-egalement-fausses.html#more

8 L'infant de Parme, dont d'Argental est l'envoyé à Paris, est en conflit avec le pape ; voir lettre à Richelieu du 13 juin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/06/05/il-ne-reste-dans-la-memoire-des-hommes-que-les-evenements-qu.html

En représailles de l'excommunication prononcée par le pape contre le duc et ses conseillers en janvier , on avait aussi menacé de reprendre Castro et Ronciglione (Précis du Siècle de Louis XV)

9 Évangile de Jean .

 

 

Lire la suite

18/11/2010 | Lien permanent

ce sont les termes et non les choses qui révoltent l'esprit humain

http://www.youtube.com/watch?v=eUKz2fvb6jY&feature=related

 

 

 

« A Charles-Marie de La Condamine

 

22 juin 1734

 

Si la grand-chambre était composée, monsieur, d'excellents philosophes, je serais très fâché d'y avoir été condamné [le 10 juin les Lettres philosophiques condamnées sont brûlées au pied du grand escalier du Palais], mais je crois que ces vénérables magistrats n'entendent que médiocrement Neuton et Locke .Ils n'en sont pas moins respectables pour moi quoiqu'ils aient donné autrefois un arrêt en faveur de la physique d'Aristote, qu'ils aient défendu de donner de l'émétique [la Sorbonne lance un arrêt contre l'antimoine en 1566. Le parlement fit un arrêt en faveur de la doctrine d'Aristote sous Louis XIII en 1624, puis un arrêt contre l'émétique] etc., leur intention est toujours très bonne. Ils croyaient que l'émétique était un poison, mais depuis que plusieurs conseillers de grand-chambre furent guéris par l'émétique, ils changèrent d'avis sans pour autant réformer leur jugement, de sorte qu'encore aujourd'hui l'émétique demeure proscrit par un arrêt, et que M. Silva ne laisse point d'en ordonner à messieurs, quand messieurs sont tombés en apoplexie. Il pourrait peut-être arriver à peu près la même chose à mon livre. Peut-être quelque conseiller pensant lira les Lettres philosophiques avec plaisir quoiqu'elles soient proscrites par arrêt. Je les ai relues hier avec attention pour voir ce qui a pu choquer si vivement les idées reçues. Je crois que la manière plaisante dont certaines choses y sont tournées aura fait généralement penser qu'un homme qui traite si gaiement les quakers et les anglicans, ne peut faire son salut cum timore et tremore [= avec crainte et tremblement], et est un très mauvais chrétien ; ce sont les termes et non les choses qui révoltent l'esprit humain. Si M. Neuton ne s'était pas servi du mot d'attraction dans son admirable philosophie, toute notre Académie aurait ouvert les yeux à la lumière, mais il a eu le malheur de se servir à Londres d'un mot auquel on aurait attaché une idée ridicule à Paris, et sur cela seul on lui a fait ici son procès avec une témérité qui fera un jour peu d'honneur à ses ennemis.

 

S'il est permis de comparer les petites choses aux grandes, j'ose dire qu'on a jugé mes idées sur des mots. Si je n'avais pas égayé la matière, personne n'eût été scandalisé, mais aussi personne ne l'aurait lu.

 

On a cru qu'un Français qui plaisantait les quakers, qui prenait le parti de Locke et qui trouvait de mauvais raisonnements dans Pascal était un athée. Remarquez, je vous prie, si l'existence d'un Dieu dont je suis réellement très convaincu n'est pas clairement admise dans tout mon livre ? Cependant les hommes qui abusent toujours des mots appelleront également athée celui qui niera un Dieu et celui qui disputera sur la nécessité du péché originel. Les esprits ainsi prévenus ont crié contre les Lettres sur Locke et sur Pascal.

 

Ma lettre sur Locke se réduit uniquement à ceci :

la raison humaine ne saurai démontrer qu'il soit impossible à Dieu d'ajouter la pensée à la matière.

 

Cette proposition est, je crois, aussi vraie que celle-ci : deux triangles qui ont la même base et la même hauteur sont égaux.

 

A l'égard de M. Pascal le grand point de la question roule visiblement sur ceci,savoir si la raison humaine suffit pour prouver deux natures dans l'homme. Je sais que Platon a eu cette idée et qu'elle est très ingénieuse, mais il s'en faut bien qu'elle soit philosophique. Je crois le péché originel quand la religion me l'a révélé, mais je ne crois pas les androgynes quand Platon a parlé ; les misères de la vie, philosophiquement parlant, ne prouvent pas plus la chute de l'homme que les misères d'un cheval de fiacre ne prouvent que les chevaux étaient tous autrefois gros et gras et ne recevaient jamais de coups de fouet, et que , depuis qu'un d'eux s'avisa de manger trop d'avoine, tous ses descendants furent condamnés à trainer des fiacres. Si la sainte Écriture me disait ce dernier fait, je le croirais, mais il faudrait du moins m'avouer que j'aurais eu besoin de la sainte Écriture pour le croire et que ma raison ne suffisait pas.

 

Qu'ai-je donc fait autre chose que de mettre la sainte Écriture au dessus de la raison ? Je défie encore une fois qu'on me montre une proposition répréhensible dans mes réponses à Pascal .Je vous prie de conférer sur cela avec vos amis et de vouloir bien me mander si je m'aveugle.

 

Vous verrez bientôt Mme du Châtelet. L'amitié dont elle m'honore ne s'est point démentie dans cette occasion [elle est sa maitresse depuis le printemps 1733, et lui a offert refuge dans son château de Cirey suite à la lettre de cachet de mai lancée contre lui]. Son esprit est digne de vous et de M. de Maupertuis [Maupertuis a initié la marquise aux hautes mathématiques, devenu son amant, il fera tout pour se dérober à l passion exigeante de Mme du Châtelet], et son cœur est digne de son esprit. Elle rend de bons offices à ses amis, avec la même vivacité qu'elle a appris les langues et la géométrie ; et quand elle a rendu tous les services imaginables, elle croit n'avoir rien fait ; comme, avec son esprit et ses lumières, elle croit ne savoir rien, et ignore si elle a de l'esprit. Soyez-lui bien attachés, vous et M. de Maupertuis, et soyons toute notre vie ses admirateurs et ses amis. La cour n'est pas trop digne d'elle ; il lui faut des courtisans qui pensent comme vous. Je vous prie de lui dire à quel point je suis touché de ses bontés. Il y a quelque temps que je ne lui ai écrit et que je n'ai reçu de se nouvelles, mais je n'en suis pas moins pénétré d'attachement et de reconnaissance.

 

Embrassez pour moi, je vous prie, l'électrique M. du Fay [Charles-François Cisternay du Fay, directeur du jardin et du cabinet d'histoire naturelle du roi, ayant découvert en 1733 l'existence de deux types d'électricité], et si vous embrassiez ma petite sœur, feriez-vous si mal ? Mandez-moi, je vous prie, comment elle se porte. Mille respects à Mme du Fay et à ses dames. Vous m'aviez parlé d'une lettre de Stamboul,[allusion au fait que V* n'avait pas reconnu La Condamine déguisé en turc lors d'un diner chez du Fay en décembre 1732 , ou à une lettre du comte de Bonneval envoyée de Turquie fin 1726] etc. »

 

 

 

Emétique ? 

Hey ! Meetic ?

Et mes tics ?

Aye ! mes tiques ?

Russula_emetica2.jpg

http://www.cnrtl.fr/lexicographie/%C3%A9m%C3%A9tique

 

Lire la suite

22/06/2010 | Lien permanent

Sa petite âme ne voulait qu’une réputation viagère

Petite occasion de sourire avant ou après avoir lu son horoscope !

http://www.youtube.com/watch?v=saclo51anNY

 

 

Yawhé, Allah, Jéhovah,
Vichnou (la paix, comme disaient si bien Francis Blanche et Pierre Dac )
Pachacamac, Têtedanlsac, Sorduhamac, comme qu'on vous nomme :
Vous êtes sourds !
tintin pachacamac.jpg

 

« A Marie de Vichy de Chambond, marquise du Deffand

 

16è décembre 1770

 

                            Je m’en étais douté, il y a trente ans que son âme n’étais que molle, et point du tout sensible [le président Hénault mort le 24 novembre ; le 5 décembre V* écrit à Mme du Deffand : « Je regrette jusqu’au fond de mon cœur le président Hénault », mais le 9 décembre elle lui écrivit que , dans son testament, le président « de ses amis n’en parle point » ]; qu’il concentrait tout dans sa petite vanité, qu’il avait l’esprit faible et le cœur dur ; qu’il était content pourvu que la reine trouvât son style meilleur que celui de Montcrif, et que deux femmes se le disputassent. Mais je ne le disais à personne, je ne disais pas même que ses Etrennes mignonnes [=Abrégé chronologique de l’histoire de France] ont été commencées par Du Molard et faites par l’abbé Boudot.

 

                            Je reprends toutes les louanges que je lui ai données.

 

Je chante la palinodie,

Sage du Deffand je renie

Votre président et le mien.

A tout le monde il voulut plaire

Mais ce charlatan n’aima rien,

De plus il disait son bréviaire !

 

                            Je voudrais, Madame, que vous sussiez ce que  c’est que ce bréviaire, ce ramas d’antiennes et de réponses en latin de cuisine ! Apparemment que ce pauvre homme voulait faire sa cour à Dieu comme à la reine par de mauvais vers.

 

                            Je suis dans la plus grande colère, je suis si indigné que je pardonne presque au misérable La Beaumelle d’avoir si mal traité les Etrennes mignonnes du président [polémique à propos de l’Examen de la nouvelle histoire de Henri IV, dans laquelle V* voulait entrainer Hénault ; voir lettres de septembre 1768 à février 1769 ]. Quoi ! ne vous pas laisser la moindre marque d’amitié dans son testament, après vous avoir dit pendant quarante ans qu’il vous aimait ! Sa petite âme ne voulait qu’une réputation viagère. Je suis très persuadé que l’âme noble de votre grand-maman [la duchesse de Choiseul  ] trouvera cela bien infâme.

 

                            Vous voulez des vers pour la Bibliothèque bleue [ensemble de romans parus sous couverture bleue en brochures : Histoire de Pierre de Provence et de la belle Maguelonne ; Histoire de Robert le Diable ; Histoire des quatre fils Aymon, etc]; vous vous adressez très bien ; en voici qui sont dignes d’elle.

 

La belle Maguelone avec Robert le Diable

Valaient peut-être au moins les romans de nos jours ;

Ils parlaient de combats, de plaisirs et d’amours.

Mais tout ce papier bleu quoique très estimable

                   N’est plus regardé qu’en pitié.

Mon cœur en a senti la cause véritable,

                   On n’y parle point d’amitié.

 

N’est-il pas vrai, Madame, que nous n’aurons point la guerre ? C’est une obligation que la France aura encore au mari de votre grand-maman.

 

                            Je veux que vous m’écriviez dorénavant à cœur ouvert, nous n’avons rien à dissimuler ensemble. [d’après Atys, opéra de Quinault] .Mais quelque chose que vous ayez la bonté de m’écrire, faites contresigner par votre grand-maman, ou envoyez votre lettre chez M. Marin, secrétaire général de le Librairie, rue des Filles-Saint-Thomas, qui me la fera tenir très sûrement, le tout pour cause.

 

                            Voltaire. »

APPEL au PEUPLE !!

"Je veux que vous m’écriviez dorénavant à cœur ouvert, nous n’avons rien à dissimuler ensemble.": cette phrase est dédiée à tous ceux qui n'osent pas ou ne prennent pas le temps de laisser de commentaire !!

 

 Allez, on arrose ça !!

marmotte-avec champagne.jpg

 

Lire la suite

16/12/2009 | Lien permanent

Antecedentem scaelestum Persequitur pede pœna claudo / le crime a beau prendre de l'avance, le châtiment au pied boite

...

justice_poursuivant_crime.jpg

 

« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'ÉPINAY
Aux Délices, par Genève, 7 janvier [1760].
Que faites-vous, madame ? où êtes-vous? que dites-vous ? comment vous réjouissez-vous? Est-il vrai que le baron d'Holbach est en Italie, et qu'il reviendra par les Délices ?1 Ce sera une grande consolation pour moi de trouver un homme à qui je ne pourrai parler que de vous. Vous êtes à mes yeux la femme qui a raison; mais le faquin de libraire qui l'a imprimée, et indignement défigurée, en a fait la femme qui a tort. Quoique je fasse peu d'attention à ces petites tribulations, elles ne laissent pas cependant de prendre du temps ; on n'aime pas à voir ses enfants courir les rues mal vêtus et mal élevés. Il n'est pas bien sûr que notre docteur aille auprès du roi de Prusse 2; s'il avait cette faiblesse, vous pourriez lui appliquer ces vers de Corneille :
D'un Romain lâche assez pour servir sous un roi
Après avoir servi sous Pompée et sous moi.3

On dit, madame, qu'il y a une brochure dédiée au Cheval de bronze , qui est assez plaisante 4. Si je pouvais l'avoir par votre protection, je vous serais bien obligé. Monsieur l'envoyé 5 de Francfort, la guerre me paraît traîner furieusement en longueur; ayez la bonté de faire finir ces pauvretés-là le plus tôt que vous pourrez. Si Luc est écrasé ou enchaîné, je ferai danser ce faquin de Schmitt, qui est, je crois, au nombre de vos seigneurs commettanst 6: Antecedentem scaelestum Persequitur pede Pœna claudo. 7
Je suis accablé de bagatelles ; j'en ai cent pieds par-dessus la tête ; bagatelles touchant Pierre le Grand, bagatelles de théâtre, bagatelles d'histoire du siècle, bagatelles de mes masures et du gouvernement de mes hameaux. Je ne peux songer de longtemps à l'Encyclopédie; d'ailleurs, comment traiter Idée et les autres articles? Ma levrette accoucha ces jours passés, et je vis clairement qu'elle avait des idées. Quand j'ai mal dormi ou mal digéré, je n'ai point d'idées; et, pardieu, les idées sont une modification de la matière, et nous ne savons point ce que c'est que cette matière, et nous n'en connaissons que quelques propriétés, et nous ne sommes que de très-plats raisonneurs ; et maître Joly de Fleury n'en sait pas plus que moi sur tout cela. Ce n'est pas la peine d'écrire pour ne point dire la vérité. Il n'y a déjà dans l'Encyclopédie que trop d'articles de métaphysique pitoyables ; si l'on est obligé de leur ressembler, il faut se taire. On m'assure que Diderot est devenu riche ; si cela est, qu'il envoie promener les libraires, les persécuteurs et les sots, et qu'il vienne vivre en homme libre entre Gex et Genève.
Ma philosophe 8, on a grande envie de rendre ce pays de Gex libre et indépendant . Ce serait une bonne affaire pour la philosophie. On trouve une compagnie qui offre de l'argent comptant aux fermiers généraux, et même au roi 9. Pour peu que le plan soit plausible, je vous l'enverrai ; je veux que vous fassiez réussir cette affaire, et que vous en ayez la gloire; vous ameuterez trois ou quatre des Soixante 10, et je vous dresserai une statue à Ferney.
Vous êtes à jamais dans ma tête et dans mon cœur.

V. »

1 On ne connait pas de visite d'Holbach à Voltaire .

3 Corneille ,La mort de Pompée, acte III, scène 4

4 Allusion obscure ; il pourrait s'agir d'une brochure ou chanson telle qu'on en débitait à Paris sur le Pont-Neuf, près du Cheval de bronze ; mais il pourrait aussi s'agir d'une œuvre de V* .

5 Grimm ; il venait d'être chargé des intérêts de la ville de Francfort-sur-le-Main auprès de la cour de France, avec un traitement de 24 000 livres. Les employés du bureau secret de la poste ayant décacheté, en 1761, une lettre dans laquelle monsieur l'envoyé faisait une plaisanterie sur un des ministres de Louis XV, on obligea aussitôt la ville impériale à choisir un autre chargé d'affaires. (Clogenson.)

La phrase qui suit est extrêmement révélatrice des mobiles profonds de V* . s'il ne se soucie aucunement du Canada, ni de l'équilibre européen (pour lequel la France s'est alliée à l'Autriche), il souhaite tout simplement que Frédéric soit battu pour deux raisons : d'une part il aura le plaisir de philosopher avec lui et de lui prouver que le sage est plus heureux que le roi, d'autre part il se vengera de ses ennemis de Francfort .

7Horace : Odes III, ode II, v. 31-32  un peu modifiés : le crime a beau prendre de l'avance, le châtiment au pied boiteux le poursuit . (Mais rarement le Châtiment Quoique en boitant, a manqué le coupable. ).

8 Et non philosophie comme écrit dans l'édition Besterman .

 

Lire la suite

16/01/2015 | Lien permanent

Page : 220 221 222 223 224 225 226 227 228 229 230