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03/01/2024

Je n'ai reçu, monsieur, votre lettre du 29 avril que ce matin en m'éveillant

... Jusque là rien d'étonnant, le facteur est pressé de finir sa tournée au plus tôt . Mais , chose tout à fait invraisemblable pour nos P et T, leurs syndicats et préposés, c'est un dimanche, et pire encore un 1er mai . Qui dit mieux ? On est loin de la semaine de trente-cinq heures et des RTT .

Allons, bonne année : travail- santé- fortune- congés- JO !

 

 

« A Etienne-Salomon Reybaz, 1 Gouverneur

de monsieur le comte de Lewenhaupt 2

à Genève

Je n'ai reçu, monsieur, votre lettre du 29 avril que ce matin en m'éveillant . Je suis très malade dans mon lit . Je n'en recevrai pas moins la visite de M. Campbel 3 avec une sensible reconnaissance . Je vous prie de présenter mes compliments à votre élève .

J'ai l'honneur d'être avec tous les compliments que je vous dois, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

gentilhomme ordinaire

de la chambre du roi, etc.

Dimanche au matin 1er mai 1768 à Ferney. »

.

2 Fils du comte Adam Lewenhaupt . Voir page 10 de https://journals.openedition.org/alsace/2541

3 Personnage non identifié .

02/01/2024

Si jamais vous vous trouvez dans une compagnie où tout le monde montre son cul, je vous conseille de mettre chausses bas en entrant, au lieu de faire la révérence

... Ce n'est pas dans le code de bonne conduite de Nadine de Rotschild, mais ça pourrait être du Stéphane Bern épris du respect de l'étiquette coûte que coûte. Bien des caciques du RN et de la NUPES tiennent à ce que leurs proches sympatisants dévoilent leurs arrières et gardent tête basse  .

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Plus chastes : Les 4-sans cul, de Chambéry

 

 

 

« A Philippe-Charles-François-Joseph de Pavée, marquis de Villevielle

1er Mai 1768

Mon cher marquis, le sieur Gillet ou Gilles n’est pas trop bien informé des affaires de ce monde. Il ne sait pas que quand on est enfermé entre des renards et des loups, il faut quelquefois enfumer les uns et hurler avec les autres. Il ne sait pas qu’il y a des choses si méprisables qu’on peut quelquefois s’abaisser jusqu’à elles sans se compromettre . Si jamais vous vous trouvez dans une compagnie où tout le monde montre son cul, je vous conseille de mettre chausses bas en entrant, au lieu de faire la révérence.

Faites, je vous en prie, mes sincères compliments à MM. Duché et Venel 1; les compagnons francs-maçons doivent se reconnaître au moindre mot 2.

On demande si on peut vous adresser de petits paquets sous l’enveloppe de M. l’intendant.

Mais surtout, si vous allez à votre régiment, passez par chez nous, n’y manquez pas, je vous en prie : ce pèlerinage est nécessaire, j’ai beaucoup de choses à vous dire pour votre édification.

Le marquis de Mora, fils du comte de Fuentès, ambassadeur d’Espagne à Paris, gendre de ce célèbre M. le comte d’Aranda qui a chassé les jésuites d’Espagne, et qui chassera bien d’autres vermines, est venu passer trois jours avec moi ; il s’en retourne en Espagne, et ira peut-être auparavant à Montpellier : c’est un jeune homme d’un mérite bien rare. Vous le verrez probablement à son passage, et vous serez étonné. L’inquisition d’Espagne n’est pas abolie ; mais on a arraché les dents à ce monstre, et on lui a coupé les griffes jusque dans la racine. Tous les livres si sévèrement défendus à Paris entrent librement en Espagne. Les Espagnols, en moins de deux ans, ont réparé cinq siècles de la plus infâme bigoterie.

Rendez grâces à Dieu, vous et vos amis, et aimez-moi. »

1 Ces personnages ont déjà été rencontrés dans la lettre du 23 mars 1767 à Villevielle : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/09/09/il-est-vrai-que-le-diable-est-dechaine-6400196.html

2 Première allusion à la franc-maçonnerie dans la correspondance de V*.

A votre avis, que doivent faire les sages, quand ils sont environnés d’insensés barbares ? Il y a des temps où il faut imiter leurs contorsions, et parler leur langage

... Le fera-t-on pour s'adresser à Israël, ou plus exactement à Netanyahou ? à Kim Jung un ? à Poutine ? à Xi Jinping et toute la foule de sanguinaires de tous continents  ? Face à des tordus soyons encore plus retors qu'eux !

Et pour l'usage national, hardi Machiavel !

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

1 de mai [1768]

 Mon cher ami, mon cher philosophe, que l’être des êtres répande ses éternelles bénédictions sur son favori d’Aranda, sur son très cher Mora, et sur son bien-aimé Villa-Hermosa !

Un nouveau siècle se forme chez les Ibériens. La douane des pensées n’y ferme plus l’allée à la vérité, ainsi que chez les Velches. On a coupé les griffes au monstre de l’inquisition, tandis que chez vous le bœuf tigre frappe de ses cornes et dévore de ses dents 1.

L’abominable jansénisme triomphe dans notre ridicule nation, et on ne détruit des rats que pour nourrir des crocodiles. A votre avis, que doivent faire les sages, quand ils sont environnés d’insensés barbares ? Il y a des temps où il faut imiter leurs contorsions, et parler leur langage. Mutemus clypeos 2. Au reste, ce que j’ai fait cette année, je l’ai déjà fait plusieurs fois ; et, s’il plaît à Dieu, je le ferai encore Il y a des gens qui craignent de manier des araignées, il y en a d’autres qui les avalent.

Je me recommande à votre amitié et à celle des frères. Puissent-ils être tous assez sages pour ne jamais imputer à leurs frères ce qu’ils n’ont dit ni écrit . Les mystères de Mitra ne doivent point être divulgués, quoique ce soient ceux de la lumière ; il n’importe de quelle main la vérité vienne, pourvu qu’elle vienne. C’est lui , dit-on, c’est son style, c’est sa manière ; ne le reconnaissez-vous pas ? Ah ! mes frères, quels discours funestes ! Vous devriez au contraire crier dans les carrefours :  «  Ce n’est pas lui. » Il faut qu’il y ait cent mains invisibles qui percent le monstre, et qu’il tombe enfin sous mille coups redoublés. Amen.

Je vous embrasse avec toute la tendresse de l’amitié et toute l’horreur du fanatisme. »

1  V* songe à Etienne Pasquier qui joua un rôle dans les affaires La Barre, Lally et autres ; voir lettre du 7 novembre 1754 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/10/11/si-vous-me-conservez-une-amitie-a-laquelle-je-suis-mille-foi.html

je serais au désespoir que des mesures mal prises nuisissent à vos intérêts

...

 

« A Gabriel Cramer

[avril-mai 1768]

Mon cher Caro, j'ai reçu les estampes . Ce sont assurément de très belles enseignes à bière . Je vous plains bien d'avoir fait cette malheureuse dépense, et je me flatte que Le Siècle de Louis XIV et de Louis XV vous dédommagera . J'ai mandé à l’ami Panckoucke , qu'il pourrait inviter dans les journaux à fournir des mémoires sur tous ceux qui se sont distingués dans le siècle présent ; mais j'ai oublié de lui dire qu'il ne faudra faire cette invitation que quand le livre aura pris un peu faveur . La précipitation gâterait tout . L'empressement d'offrir l'in-quarto et d'envoyer partout des billets n'a déjà été que trop préjudiciable . Je vous aime, Caro, et je serais au désespoir que des mesures mal prises nuisissent à vos intérêts .

Au reste, il est essentiel pour moi que Le Siècle de Louis XV soit achevé incessamment , la négligence de vos ouvriers me retient en prison chez moi, et m'empêche de faire un voyage dont je ne puis me dispenser tout malade que je suis .

Je vous embrasse de tout mon cœur . »

01/01/2024

Je ne publie pas cette déclaration dans l’espérance de désarmer l’envie et l’imposture ; mais je la dois à la vérité, à mes amis, à ma famille

... Telle est ( ou aurait dû être selon le président auteur ) la conclusion sous-titrée de la "cérémonie" [sic] des voeux qui comme toutes celles qui ont précédé ne restera pas dans l'histoire .

En musique de fond, pour résumer l'esprit du discours, j'aurais bien mis les Stones avec "Angry" : https://www.youtube.com/watch?v=_mEC54eTuGw&ab_channe...

 

 

« A François Morénas

[vers le 30 avril 1768] 2

J’ai lu, monsieur, dans votre gazette, l’histoire de ma conversion, opérée par la grâce et par un ex-jésuite, qui m’a, dit-on, confessé et traîné au pied des autels. Plusieurs autres papiers publics y ont ajouté que j’avais une lettre de cachet pour pénitence ; d’autres sont entrés dans des détails de ma famille ; d’autres ont parlé d’un beau sermon que j’ai fait dans l’église. Tout cela pourrait servir à établir le pyrrhonisme de l’histoire. Ceux qui écrivent de Paris ces nouvelles, très ignorées dans mon pays, ne sont pas apparemment mes amis, et vous savez que des succès vains et passagers dans les belles-lettres attirent toujours beaucoup d’ennemis très implacables.

Je puis assurer que l’ex-jésuite retiré chez moi n’a jamais été mon confesseur, que je n’ai jamais eu la moindre part à la foule d’écrits qu’on se plaît à m’attribuer ; que je n’ai parlé dans ma paroisse, en rendant le pain bénit, que pour avertir d’un vol qu’on faisait dans ce temps-là même à mes paroissiens, et surtout pour avertir qu’il fallait prier tous les dimanches pour la santé de la reine, dont on ignorait la maladie dans mes déserts.

Enfin, monsieur, pour vous prouver la fausseté de tout ce qu’on a imprimé dans vingt gazettes, d’après les bulletins de Paris, je me vois forcé de publier l’attestation ci-jointe 3, que j’ai eu la précaution d’accepter depuis trois ans, pour confondre les calomniateurs qui me persécutent depuis plus de trente.

 

À Ferney le 5 avril 1765.

« Nous soussignés certifions que M de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, seigneur de Ferney et Tournay, au pays de Gex, près de Genève, a non seulement rempli les devoirs de la religion catholique dans la paroisse de Ferney, où il réside, mais qu’il a fait bâtir et orner l’église à ses dépens ; qu’il a entretenu un maître d’école ; qu’il a défriché à ses frais les terres incultes de plusieurs habitants ; a mis ceux qui n’avaient point de charrue en état d’en avoir, leur a bâti des maisons, leur a concédé des terrains, et que Ferney est aujourd’hui plus peuplé du double qu’il ne l’était avant qu’il en prît possession ; qu’il n’a refusé ses secours à aucun des habitants du voisinage. Requis de rendre de témoignage, nous le donnons comme la plus exacte vérité. »



Le tout signé par deux curés, par les syndics de la noblesse et de la province, par des prêtres, des gradués, par les habitants ; collationné par un notaire royal, et déposé au contrôle de Gex.

Je ne publie pas cette déclaration dans l’espérance de désarmer l’envie et l’imposture ; mais je la dois à la vérité, à mes amis, à ma famille qui sert le roi dans ses armées et dans les premiers tribunaux du royaume, et à la charge que Sa Majesté a bien voulu me conserver auprès de sa personne.

J’ai l’honneur d’être,

monsieur

votre . »

2 Le corps de la lettre est de la main de Bigex, l'en-tête « à un gazetier d'Avignon » de celle de Wagnière, d'abord daté de 1765 puis de 1768 et finalement « avril 1768' . comme l'attestation est datée du 28 avril et qu’elle fut envoyée à l'archevêque de Genève le 29, la date du 30 avril pour la présente lettre est probablement correcte .

3 Une copie contemporaine endossée par V* collationné par devant notaire et contrôle au bailliage, signé de divers noms de familiers de V* (Gros, Sauvage de Verny, Fabry, David (prieur des Cames) , Adam, Fournier, Christin) porte ici « double » au lieu de « triple » . D'autres attestations plus complètes et plus détaillées furent aussi élaborées par les soins de V*.

Voir lettre du 29 avril 1768 à Biord : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/12/30/m-6477853je-ne-sais-quels-faux-rapports-ont-pu-m-attirer-tant-d-aigreur-de.html

31/12/2023

Je ne sais quels faux rapports ont pu m’attirer tant d’aigreur de votre part

... Tel peut être le bilan de la popularité du président lors de son discours de voeux ce soir . Qu'il se rassure, il y a autant, ou peut-être plus de vérités que de fausses nouvelles pour étayer l'impopularité liée à sa fonction et sa manière d'agir . Même De Gaulle le héros s'est fait jeter, les Gaulois sont comme ça, illogiques et râleurs, trop cons pour être des gens : https://www.fluideglacial.com/bd/reuze/faut_pas_prendre_l...

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« A Jean-Pierre Biord

A Ferney 29è avril 1768

Monseigneur,

Votre seconde lettre 1 m’étonne encore plus que la première. Je ne sais quels faux rapports ont pu m’attirer tant d’aigreur de votre part. On soupçonne beaucoup un nommé Ancian, curé du village de Moëns qui eut un procès criminel au parlement de Dijon en 1761, procès dans lequel je lui rendis service, en portant les parties qui le poursuivaient à se contenter d’un dédommagement de quinze cents livres, et du paiement des frais 2.

On prétend que l’official de Gex se plaint de ce que les citoyens contre lesquels il plaide pour les dîmes se sont adressés à moi. Il est vrai qu’ils m’ont demandé mes bons offices ; mais je ne me suis point mêlé de cette affaire, attendu que l’Église étant mineure, il est malheureusement difficile d’accommoder un tel procès à l’amiable. J’ai transigé avec mon curé dans un cas à peu près semblable ; mais c’est en lui donnant beaucoup plus qu’il ne demandait : ainsi je ne puis le soupçonner de m’avoir calomnié auprès de vous.

Pour les autres procès entre mes voisins, je les ai tous assoupis : je ne vois donc pas que j’aie donné lieu à personne, dans le pays de Gex, de vous écrire contre moi . Je sais que tout Genève accuse l’aumônier du Résident 3, dont j’ignore le nom, d’écrire de tous côtés, de semer partout la calomnie ; mais à Dieu ne plaise que je lui impute de faire un métier si infâme, sans avoir les preuves les plus convaincantes ! Il vaut mieux mille fois se taire et souffrir, que de troubler la paix par des plaintes hasardées.

Mais en établissant cette paix précieuse dans mon voisinage, j’ai cru, depuis longtemps, devoir me la procurer à moi-même. Messieurs les syndics des États du pays, les curés de mes terres, un juge civil, un supérieur de maison religieuse, étant un jour chez moi, et étant indignés des calomnies qu’on croyait alors répandues par le curé Ancian, pour prix de l’avoir tiré des mains de la justice, me signèrent un certificat qui détruisait ces impostures 4. J’ai l’honneur , Monseigneur, de vous envoyer cette pièce authentique, conforme à l’original. J’en envoie une autre copie à M. le premier président du parlement de Bourgogne, et à monsieur le procureur général, afin de prévenir l’effet des manœuvres qui auraient pu surprendre votre candeur et votre équité. Vous verrez combien il est faux que les devoirs dont il est question n’aient été remplis que cette année. Vous serez indigné, sans doute, qu’on ait osé vous en imposer si grossièrement.

Je pardonne de tout mon cœur à ceux qui ont osé ourdir cette trame odieuse. Je me borne à les empêcher de nuire, sans vouloir leur nuire jamais, et je vous réponds bien que la paix, qui est mon perpétuel objet, n’en sera point altérée dans mes terres.

Les bagatelles littéraires n’ont aucun rapport avec les devoirs du citoyen et du chrétien . Les belles-lettres ne sont qu’un amusement. La bienfaisance, la piété solide et non superstitieuse, l’amour du prochain, la résignation à Dieu, doivent être les principales occupations de tout homme qui pense sérieusement. Je tâche, autant que je puis, de remplir toutes ces obligations dans ma retraite, que je rends tous les jours plus profonde. Mais ma faiblesse répondant mal à mes efforts, je m’anéantis encore une fois, avec vous, devant la providence divine, sachant qu’on n’apporte devant Dieu que trois choses qui ne peuvent entrer dans son immensité, notre néant, nos fautes, et notre repentir.

Je me recommande à vos prières autant qu’à votre équité.

J’ai l’honneur d’être avec respect,

monseigneur

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

gentilhomme ordinaire

de la chambre du roi très chrétien. ».

1 L'évêque avait répliqué le 26 Avril. (Georges .Avenel.)

Voir : https://voltairefoundation.wordpress.com/tag/jean-pierre-biord/

4 Certificat qu'on retrouve dans la lettre du 30 avril 1768 à Morénas .

« Copie authentique de l’attestation des états du pays de Gex, signée par le notaire Raffoz, le 28 avril 1765, contrôlée à Gex le même jour, signée LACHAUX.

 « Nous soussignés certifions que M de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, seigneur de Ferney et Tournay, au pays de Gex, près de Genève, a non seulement rempli les devoirs de la religion catholique dans la paroisse de Ferney, où il réside, mais qu’il a fait bâtir et orner l’église à ses dépens ; qu’il a entretenu un maître d’école ; qu’il a défriché à ses frais les terres incultes de plusieurs habitants ; a mis ceux qui n’avaient point de charrue en état d’en avoir, leur a bâti des maisons, leur a concédé des terrains, et que Ferney est aujourd’hui plus peuplé du double qu’il ne l’était avant qu’il en prît possession ; qu’il n’a refusé ses secours à aucun des habitants du voisinage. Requis de rendre de témoignage, nous le donnons comme la plus exacte vérité. Signé : GROS, curé ; SAUVAGE DE VERNY, syndic de la noblesse ; FABRY, premier syndic général et subdélégué de l’intendance ; CHRISTIN, avocat ; DAVID, prieur des carmes ; ADAM, prêtre, et FOURNIER, curé. »

30/12/2023

nous mettrons tout cela au net dans un mois

... Soutenir ou non Gégé Depardieu, that's the question . Son comité de soutien me semble être du même tonneau que celui qui est capable de voter pour Trump . Ecoutons ceux et celles qui lui répondent : https://www.bfmtv.com/people/cinema/affaire-depardieu-ang...

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

27 avril 1768

Ma chère nièce, nous ne parlerons point aujourd'hui de M. de Laleu, je vois que tout s'arrangera dans un mois à votre satisfaction et à celle de toute ma famille à qui je fais les plus tendres compliments . Je remercie les deux conseillers des lettres qu'ils m'ont écrites . Il y avait en effet une petite erreur dans le premier mémoire pour M. de Laleu ; je m'en aperçus, et je la corrigeai dans le second mémoire plus détaillé que je vous envoyai ; nous mettrons tout cela au net dans un mois .

Il faut en attendant, que je vous parle du devoir que j'ai rempli à Ferney . Vous savez que je m'en étais déjà acquitté avec vous, et je ne pouvais m'en dispenser lorsque je suis seul à Ferney chargé de la manutention de la terre et de l'édification publique . Je ne sais pas pourquoi l'action du monde la plus simple, et la plus convenable à mon âge a pu paraître singulière . Vous voyez que la calomnie s'attache à tout . Je ne dois sans doute compte à personne de mes sentiments ni des fonctions nécessaires que j'ai remplies ; mais comme vous avez déjà rempli avec moi ces mêmes fonctions, je suis sûr que vous parlerez de cette affaire d'une manière convenable . Ceux qui veulent envenimer les motifs de ma conduite, ceux qui me calomnient, ceux qui m'imputent des ouvrages dont la religion peut s'alarmer, doivent être confondus . Je n'ai, Dieu merci, aucun ouvrage dans ce goût à me reprocher . Je ne m'appelle ni Bolingbroke, ni Fréret, ni Du Marsais, ni Saint-Hyacinthe, ni La Mettrie . Je ne suis ni l'ex-capucin Maubert, ni l'ex-mathurin Laurent, et vous savez, de plus, que nous n'avons jamais lu aucun de ces livres .

L'abbé Adam qui a été quatre ans notre aumônier 1 et qui est encore au château peut rendre un témoignage authentique de ma conduite . Je me trompe beaucoup ou les derniers jours de ma vie ne seront point troublés par les impostures des Frérons et des gens de cette espèce .

Je vous ai mandé sur la terre de Ferney, tout ce que je pouvais vous en dire, elle rapporte certainement fort peu, mais elle peut devenir pour vous une retraite fort agréable lorsque vous serez lasse de Paris . Vous aurez d'ailleurs quelque bien dans ce pays-là, comme la rente de la tontine sur M. de Beaumont, et quelques autres petites rentes .

Le parti que vous prenez de vous loger agréablement près du rempart 2 avec Mme Dupuits vous fera mener une vie fort douce ; vos amis viendront vous voir quand ils sauront qu'on vous trouve chez vous, et en vérité, cette compagnie-là vaut mieux que celle de Gex . Pour moi qui suis entièrement voué à la solitude, et qui passe mes journées entières ou a souffrir ou à travailler, comment pourrais-je contribuer aux agréments de votre vie ? Les jours de tumulte et de fêtes sont passés, et ne reviendront plus . Je me couche à l'heure où vous soupiez ; je me lève à l’heure où vous vous endormiez, enfin je touche à ma soixante-quinzième année avec une santé languissante qui demande le régime et la retraite . Soyez à Paris ma consolation, écrivez-moi quand vous n'aurez rien à faire ; vos lettres me soulagent du fardeau de mes inutiles correspondances .

M. Dupuits est à Châlons avec son régiment . Quand il viendra il trouvera M. Christin qui gouvernera ses affaires . Daumart est toujours dans le même état 3. La Fanchon 4 qui était auprès d'Adélaïde a toujours la fièvre . Le chirurgien la traite et consulte M. Joly 5, nous espérons qu'on la sauvera .

M. Bourcet va donner ses ordres à Versoix 6 . Les coches et les rouliers y arrivent régulièrement . Si on bâtit une ville comme je l'espère, ce sera une raison de plus pour ne point vendre Ferney, ou pour mieux vendre cette terre un jour . J'y achèverai ma vie en vous aimant, et en vous donnant toutes les preuves d'amitié qui seront en mon pouvoir .

N. B. – On n'a fait que rire de La Guerre de Genève ; et en effet, ce n'est qu'une pure plaisanterie qui ne peut déplaire qu'à Vernet et à Jean-Jacques .
Dîtes-moi, je vous en prie, ce que vous pensez de la musique de M. de La Borde, et assurez-le bien de l'intérêt que je prends à sa personne et à son procès 7.

V. »

1 Plus de quatre ans même ; en janvier 1763, le père Adam disait déjà la messe à Ferney ; voir lettre du 18 janvier 1763 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/01/16/jean-jacques-fait-des-lacets-dans-son-village-avec-les-monta.html

2 Rue Bergère, près de l'ancien rempart .

3 Petit neveu infirme après accident dont V* s'occupe depuis 1757 . Voir lettre du 7 septembre 1760 à Th. Tronchin : et du 9 mai 1764 à Mme Du Deffand :http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/06/12/je-crois-qu-il-est-impossible-d-aimer-veritablement-le-neant.html

4 Fanchon était une des servantes de Mme Denis, restée avec V*.

5 Gaspard Joly, auteur , en collaboration avec Jean-Antoine Cramer, d'une « Lettre […] sur l'inoculation de la petite vérole », Le Nouvelliste suisse , août 1751.Voir : https://www.academia.edu/36328437/_La_bataille_du_si%C3%A..._

6  Le 16 avril, Dupan écrit : « Il est arrivé depuis plusieurs jours un nouvel ingénieur à Versoix, on attend à Gex le 1er mai le bataillon de Cambrésis, et M. Bourcet viendra ensuite donner les derniers ordres pour le port », (Genève , Suppl. 1544 )