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24/10/2024

Il observera que j’emprunte à 6 et que je prête à 4.

... M. le président , est-ce bien ainsi que M. Antoine Armand, ministre des Finances, doit opérer pour réduire la dette de la France ?

 

 

« A François-Louis Jeanmaire

A Ferney 22è avril 1769 1

Monseigneur le duc de Virtemberg me doit par billet à ordre au mois de mars passé trente-cinq mille livres, et autant l'année prochaine . Son Altesse Sérénissime propose de me subroger à la créance du sieur Dietrich de Strasbourg, auquelle elle doit 96000£ moyennant que je lui prête ces 96000 £ remboursables en quatre ans, à 24000 £ par an avec les intérêts légitimes . Pour cet effet on veut que je rétrocède les deux billets de 70000 £ et que je fournisse le reste argent comptant .

Quoique à mon âge de soixante et quinze ans ce marché soit peu avantageux, je l'accepte ; et même pour marquer à Son Altesse Sérénissime mon attachement respectueux, je me relâche des cinq pour cent d'intérêts que j'aurais, si cet acte était passé à Genève ou à Montbéliard.

Je me réduis à quatre pour cent, et j'espère que Mgr le duc de Virtemberg sera content de mon procédé .

Voici un compte net du paiement à faire de ces 96000 £ avec l'intérêt au quatre pour cent en quatre années.

Chaque année on paiera vingt-quatre mille livres, et au bout de l’année l’intérêt échu.

La première . Le capital est de                              96000 £

A 4 pour cent la 1ère année                3840 £

La seconde année                                 2880

La troisième                                         1920

La quatrième                                          960

Somme totale des intérêts

pendant 4 ans                                9600 £     9600

En ajoutant le capital à ces intérêts légitimes

on forme une somme                                           105600 £

 

Je demande que Son Altesse Sérénissime s'engage à me payer ces 105600 £ en quatre ans comme argent prêté, le tout payable en quatre ans par quartiers, en délégations acceptées par ses fermiers régisseurs, sans préjudice de ce qu'il me doit d'ailleurs, et ratifiant ses premiers engagements .

On stipulera qu'on me paiera de cette somme prêtée de 105600 £

La première année                            28000 £

La seconde                                       28000

La troisième                                      24800

La quatrième                                     24800

                                                      105600 £

 

Cet arrangement est précis et équitable ; il prévient toute difficulté, il n'est plus besoin de compte à échelle, de stipulation d'intérêt ; tout est plus net et plus noble .

M. Jeanmaire promettra au nom du prince, de me remettre le contrat fait avec le sieur Dietrich, et de me subroger en sa place .

Il m'enverra tous les papiers sans frais .

Pour lui fournir les 96000 £ demandées,

je donne

deux billets du prince                       70000 £

Sur Riquewihr, le quartier échu à

la fin de mars                                      700

Argent prêt à Genève et

emprunté à 6%                                96000£

 

Il observera que j’emprunte à 6 et que je prête à 4 .

Je me flatte que M. Dupont rédigera le tout dans la meilleure forme ; que je serai payé de tout ce qu'on me doit, exactement par quartiers, n'ayant plus que ces effets pour subsister, moi et ma famille, et que Son Altesse Sérénissime me continuera l’honneur de se bontés .

N. B. que les paiements par quartiers des 105600 £ doivent commencer à courir depuis le 1er avril de cette année, et que le premier quartier sera échu le dernier juin prochain .

Je prie M. Jeanmaire de communiquer cet écrit à M. l’avocat Dupont.

Son très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

 

1 Original signé, le dernier alinéa et la formule autographes . Edition Lettres inédites, 1821, n'en donne qu'une version très abrégée datée du « 23 août 1769 ».

23/10/2024

voir les ouvrages où il préside

... Pierre-Marie Abadie , que va-t-il décider, que va-t-on lui laisser faire :

https://www.latribune.fr/climat/energie-environnement/autorite-de-surete-nucleaire-pierre-marie-abadie-confirme-1009639.html

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Il en connait un rayon

 

 

« A François de Caire, Chevalier

de Saint-Louis, ingénieur en chef

à Versoix

Le malade de Ferney fait les plus tendres remerciements à monsieur de Caire . Il voudrait bien venir l'embrasser au premier beau jour, voir les ouvrages où il préside, et se mettre aux pieds de Mme de Caire .

22è avril 1769. »

Un enthousiasme fanatique et fripon fait seul plus de mal que tous les sages ne peuvent faire du bien : voila le grand malheur . Les fous courent les rues et crient, les sages ferment leurs portes,...et laissent crier les fous

...

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 Deux Têtes de mule

https://www.librairies-nouvelleaquitaine.com/livre/978207...

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

20avril 1769 1

J'ai reçu enfin, mon cher ange, votre lettre du 14 mars par Perrachon . Je voudrais vous écrire un volume, mais je suis toujours assez malade, et ce qui vous surprendra, c'est qu'à peine j'ai un moment de libre dans ma solitude. Vous trouverez dans ce paquet le Cucufin de M. Aveline, L'A.B.C. de M. Huet, et Les Singularités de la nature, d'un académicien de l’institut de Bologne .

Sirven, à qui vous daignez vous intéresser, est à Toulouse, dirigé par un conseiller du parlement et par un docteur de Sorbonne, qui embrassent tous deux sa clause et celle de la philosophie avec autant de chaleur que de prudence . Il faut enfin que l'esprit de tolérance s'établisse. J'aurai du moins contribué à cette bonne œuvre, et c’était l'objet de mon ambition .

Les Guèbres n'ont été faits que dans ce dessein . Je regarde la publicité de cet ouvrage comme la chose la plus importante . Il comporte une préface dans laquelle on déploiera des sentiments honnêtes et des vérités qu'aucun des barbares qui existent encore ne pourra combattre .

Je vous prie instamment de me renvoyer le manuscrit par Marin ou par telle autre voie sûre que vous pourrez aisément trouver .

Je n'ai point reçu les réflexions que vous m'aviez promises , mais j'en ai fait . Je ferai porter sur le manuscrit les additions et les changements qui m'ont paru nécessaires . Il y avait trois mois que je n'avais relu cet ouvrage ; mes autres occupations me l'avaient entièrement fait perdre de vue . Il m'a intéressé ; je ne puis m'imaginer qu'il soit mal reçu . Le temps le plus favorable pour les spectacles est précisément celui qu'il faut prendre pour le faire représenter . Les acteurs sont mauvais, d'accord ; mais pourvu qu'il soit joué seulement cinq ou six fois, et que les gens pensants, qui gouvernent à la longue les autres, en soient contents, cela suffit . Il ne s'agit que d'avoir un droit acquis de faire subsister cette pièce au théâtre pour l'édification du genre humain. Elle est assurément moins hardie que Le Tartuffe, et elle embrasse des objets plus essentiels .

S'il y avait de la difficulté, pourrait-on trouver quelqu'un qui s'adressât à Mme d'Egmont, qui l'intéressât en faveur du jeune homme auteur de cette pièce, qui l'engageât à la faire jouer d'autorité par un ordre exprès de M. de Richelieu ? Ce pas est délicat et dangereux ; aussi je ne vous le propose que comme une idée dont je me défie beaucoup, et que je soumets entièrement à votre prudence .

J'avoue que j'ai une violente passion de faire jouer cette pièce cette année, parce que toutes les apparences sont que je ne verrai pas l'année 1770 . Je m'affaiblis tous les jours ; j'ai eu douze accès de fièvre assez violents : j'en ai encore des ressentiments toutes les nuits ; plus d'appétit, plus de force : mon petit rôlet va finir .

C'est une belle chose que l'immortalité de l'âme . J'aime assez le capitaine suisse qui, avant une bataille, faisait ses prières derrière un buisson, et qui disait : « Mon Dieu, s'il y en a un, ayez pitié de mon âme si j'en ai une. »

Les hommes prononcent toujours des mots sans les entendre . Tout ce que nous savons, c'est que nous voyons avec nos yeux, que nous digérons avec notre estomac, que nous pensons par notre tête, et que nous sentons par tout notre corps . Mais il n'y a point d'être particulier qui s'appelle la vue, point d'être qui s'appelle la digestion, point d'être qui s'appelle la sensation, point d'être qui s'appelle âme . Daignez relire le chapitre sur l'âme dans L'A.B.C.

Toutefois il est fort bon de faire accroire aux hommes qu'ils ont une âme immortelle, et qu’il y a un Dieu vengeur qui punira mes paysans s'ils me volent mon blé et mon vin 2, qui fera rouer là-bas ou là-haut les juges des Calas, et brûler ceux d'Abbeville . Le grand point est d’empêcher les prêtres d'abuser de cette doctrine pour nous tyranniser en s’engraissant de notre substance . Tous les honnêtes gens doivent s'entendre et se liguer ensemble pour que la religion fasse le moins de mal qu'il est possible . Il est bien honteux pour un état policé qu'on ait contenu les officiers sans pouvoir jamais contenir le prêtres . Le temps approche où on les mettra dans l'impossibilité de nuire ; alors la vie sera un peu tolérable .

L’Imposture sacerdotale 3 est un recueil de quelques pensées anglaises et un tableau de quelques abominations des papes . Michel Rey a imprimé à Amsterdam trente volumes beaucoup plus philosophiques . L'Examen de Milord Bolingbroke 4 est beaucoup plus profond, plus méthodique et plus fort . C'est l'histoire suivie et démontrée des dix-sept cents ans d'impostures . Le Militaire philosophe 5 , adressé au père Malebranche, est plus abstrait ; mais c'est une logique à laquelle il n'y a rien à répliquer . Les livres philosophiques sont actuellement sans nombre ; tout cela fait du bien sans doute ; mais un cordelier véhément qui prêche, qui confesse, et qui fait des enfants à ses dévotes, a plus de crédit sur le peuple que cent mille volumes bien écrits n'en ont sur les sots qui osent croire n'être pas peuple .

Un enthousiasme fanatique et fripon fait seul plus de mal que tous les sages ne peuvent faire du bien : voila le grand malheur . Les fous courent les rues et crient, les sages ferment leurs portes, soupent tranquillement avec leurs amis, et laissent crier les fous . Je souhaiterais aux sages un peu plus de chaleur .

Au reste vous voyez bien, mon cher ange, par la quantité prodigieuse de livres contre la prêtraille dont l'Europe est inondée, combien il est injuste de m'attribuer des ouvrages dont plus de la moitié est traduite de l'anglais .

L'indiscrétion de plusieurs gens de lettres de Paris, qui, sans croire me nuire, m'ont attribué des ouvrages qui me nuisent, ont eu l'imprudence la plus fatale . Ce sont de très mauvais conspirateurs : non seulement ils découvrent leur complices, mais ils en supposent d'imaginaires . Ils fournissent à leurs ennemis des armes contre leurs amis . L'auteur du Catéchumène 6 , par exemple, auteur que je connais très bien, a fait courir son ouvrage sous mon nom . Je vous avoue franchement que je ne veux être le martyr de personne . J'ai toujours respecté la religion de mon pays dans tous mes écrits . Je désavoue hautement tous ceux qu'on m'attribue, et j'aimerais mieux communier tous les huit jours dans ma paroisse que de ne pas mourir en paix .

Dites bien à Mme d'Argental, mon cher ange, combien je suis affligé que vous ne me parliez point d'elle dans vos lettres . Mais si sa santé est bonne, je vous pardonne .

Vous savez que je n'ai point vu Molé ; il serait venu inutilement, j’étais alors à la mort .

Adieu,mon très cher ange, portez-vous bien . Faites prospérer la tragédie de La Tolérance 7 , et tolérez le plus vieux de vos amis, qui vous chérira jusqu'à son dernier moment .

Vous pouvez m'écrire par Marin . Les lettres contresignées Chancelier ne sont jamais ouvertes .

Permettez que je vous parle un petit moment d'affaires temporelles . Croyez-vous qu'on rembourse les actions des particuliers sur la caisse d'escompte ? J'y ai mis la plus grande partie du bien libre qui me restait . J'ai donné tout le reste . Je serais très embarrassé . La finance serait-elle aussi dangereuse que la prêtraille ? 

V.»

1 Édition Moland d'après un texte « communiqué par M. Stapfer. »

2 On ne peut donner formule plus concrète de la pensée religieuse de V* à cette époque .

4 Sur L 'Examen de milord Bolingbroke, voir lettre du 30 septembre 1767 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/05/07/m-6441944.html

7 Les Guèbres .

22/10/2024

Il a fallu passer par les cérémonies ordinaires. Vous savez que je ne les crains pas, quoique je ne les aime point du tout ; mais il faut remplir ses devoirs de citoyen

... C'est ce qui mène nos ministres et sénateurs et députés, en gros tous les élus, à se montrer partout où il se passe quelque chose et aussi où il ne se passe rien d'autre que le dérangement apporté par leur présence, donner l'impression d'être utile à quelque chose, à l'écoute de quelqu'un, même à contrecoeur, puis rentrer chez eux satisfaits de leur activité .

 

 

« A Jean-François de La Harpe

Nostræ spes altéra scenæ 1,

Je suis très fâché que vous enterriez votre génie dans une traduction de Suétone 2, auteur, à mon gré, assez aride, et anecdotier très suspect. J’espère que vous ne direz pas dans vos remarques que vous renoncez à faire des vers, ainsi que l’a dit notre ami La Bletterie. Il est plaisant que La Bletterie s’imagine avoir fait des vers.

Voici un petit paquet pour votre Mercure 3. S’il me tombe quelque rogaton sous la main, je vous en ferai part, mais j’aimerais bien mieux que le Mercure eût à parler d’une nouvelle tragédie de votre façon : nous avons besoin de beaux vers beaucoup plus que de Suétone.

J’ai eu douze accès de fièvre. J’ai été sur le point de mourir, et je disais : « Le théâtre français est mort de son côté, si M. de La Harpe n’y met la main. » Il a fallu passer par les cérémonies ordinaires. Vous savez que je ne les crains pas, quoique je ne les aime point du tout ; mais il faut remplir ses devoirs de citoyen . Ceux de l’amitié me sont bien plus chers.

17è avril 1769. »

1 Nouvel espoir de notre scène. Virgile a dit, Ænéide XII, 168 : Spes altéra Romæ = un autre espoir de Rome .

2 Il s'agit de l'ouvrage intitulé Les douze Césars. Traduit du latin de Suétone, avec des notes et des réflexions, par M. de La Harpe, 1770

21/10/2024

Les charlatans de toute espèce me sont également odieux

... Des truands aux politiques, tous ont le verbe haut, leur but commun est de s'enrichir à nos dépens, et ça marche . De ces sales individus, les politiques sont les plus impardonnables .  Benêts que nous sommes, croyant à la petite souris et au père Noël . Est-ce si difficile de les éliminer ?

 

 

« A Jacques Lacombe

Votre Mercure, monsieur, doit avoir un grand débit, ou les Welches sont bien dégoûtés. Je ne sais comment vous faites, M. de La Harpe et vous, pour donner tous les mois des choses instructives et amusantes . Je viens de retrouver la copie d'une lettre que j'écrivis il y a près d'un an à M. Walpol 1. J'imagine qu'elle pourra trouver place dans votre journal .

Je ne conçois pas comment vous n'avez point reçu le Siècle de Louis XIV qui était dans le même paquet que celui de M. de La Harpe . On en fait actuellement des éditions plus correctes . Celle de Genève fourmillait de fautes absurdes .

On m'attribue toujours dans le catalogue de vos livres je ne sais quelle Lettre au docteur Pansophe 2 . Je vous prie instamment de faire rayer cette annonce . Je serais très fâché d'être l'auteur de cette plaisanterie quatre fois trop longue ; et si je l'avais faite je ne la désavouerais pas . On sait assez quel est mon mépris pour Jean-Jacques. Les charlatans de toute espèce me sont également odieux . Comptez, je vous prie, par une raison contraire, sur l'estime et l'amitié de votre très humble et très obéissant serviteur

V.

17è avril 1769 à Ferney. »

2 A Letter to Mr. Jean-Jacques Rousseau, 1766 , plus connue sous le titre Lettre au docteur J.-J. Pansophe, publiée en avril 1766 ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Lettre_de_Voltaire_%C3%A0_Jean-Jacques_Pansophe

20/10/2024

votre manière est de ne pas répondre aux choses dont vous ne voulez pas qu'on vous parle

... Ça me rappelle quelqu'un : E* M*** ?

-- Elon Musk ?

-- Non.

-- Un président ?

-- Juste !

 

 

« A Marie-Louise Denis

17è avril 1769

Je reçois, ma chère nièce, votre lettre du 17 avril . Je suis bien aise que M. de Lézeau vous ait tenu parole pour le passé . Mais il vous doit je crois actuellement deux années ou une au moins, en son propre et privé nom ; c'est ce que vous pourrez aisément vérifier . J'espère que vous ne serez pas moins contente de M. de Richelieu . Je veux que vous soyez heureuse quand j'ai renoncé à l'être . J'ai encore une petite fièvre toutes les nuits , qui est peut-être plus dangereuse que les onze ou douze accès violents que j'ai essuyés . Je n'ai fait aucune difficulté de communier dans mon lit lorsque j'étais en danger . Il y a une très grande différence entre nos philosophes se portant bien qui dédaignent dans Paris une cérémonie inutile et un vieillard malade qui est malheureusement célèbre, qui doit ne pas révolter les barbares dont il est environné, qui est forcé d'imposer silence à un évêque ultramontain, fanatique et persécuteur, qui doit surtout éviter un scandale désagréable pour sa famille et pour l’Académie française dont il est membre . J'ai donné même un exemple que tout bon citoyen suivra peut-être . J'ai déclaré que je voulais mourir et que j'avais toujours vécu dans la religion de mon roi et de ma patrie laquelle fait partie des lois de l’État . C'est la déclaration d'un honnête homme ; elle fait taire le fanatisme, et ne peut irriter le philosophe . Je trouve Boindin très ridicule de n’avoir point voulu se soumettre aux lois de son pays. Qu'a-t-il gagné par cette opiniâtreté ? Il a fait de la peine à sa famille et il a été jeté à la voirie 1.

Je présume que je pourrai vivre encore jusqu'à l'hiver prochain . Vous trouverez alors le Châtelard bien bâti et la terre dans le meilleur état possible .

Ma maladie m'a mis absolument hors d'état de travailler . Je me fais lire ; je vois mes ouvriers quand le temps le permet ; je me couche à dix heures précises, je ménage ainsi le peu de forces qui me restent .

On ne sait ce qu'est devenu Perrachon . Votre lettre est probablement perdue 2 . Vous pourriez aisément me mander ce qu'elle contenait, et me l’envoyer par M. Lefèvre .

J'avoue que ç'aurait été une consolation pour moi, et en même temps un grand amusement, si vous aviez pu faire réussir l'affaire de La Touche cette année . Peut-être en viendrez-vous à bout, personne n'en est plus capable que vous .

J'ignore le projet dont vous me parliez dans votre dernière lettre . Je suis tout dérouté quand vous me dites que vous n'aimez pas Paris 3. Vous avançâtes votre voyage de trois jours pour revoir vos parents, vos amis, les spectacles , et pour jouir de tout ce que la capitale peut avoir d'agréments, tandis que j'ai vécu dans une espèce de prison pendant une année entière . La solitude de la campagne est faite pour moi, pour ma situation, et pour ma mauvaise santé qui exige la retraite . Mais vous êtes encore d'un âge à goûter tous les plaisirs de la société . La vie que je mène serait un supplice pour vous . Enfin je ne puis concevoir le dégoût que Paris semble vous inspirer . Je ne puis le regarder que comme un dégoût passager qui s 'évanouira bientôt . Ouvrez-moi votre cœur, parlez-moi avec confiance ; soyez très sûre que je partage vos plaisirs et vos peines . J'imagine que vous pourriez louer l'appartement qu'occupait chez vous Mme Dupuits à quelque homme de lettres, dont la société serait pour vous un agrément de plus . C’est peut-être ce que vous auriez de mieux à faire .

J'ignore toutes les nouvelles . La gazette de Berne prétend que M. de Laborde est exilé 4, et je n'en crois rien . C'est un homme trop sage pour s'être attiré cette disgrâce . Mais je crains beaucoup pour ses actions de la caisse d'escompte . Je crois vous avoir dit que j'ai entre les mains presque le seul bien libre qui me restait . S'il lui arrivait un malheur j'en serais la première victime, et je serais bien embarrassé pour assurer quelque chose à votre neveu d'Hornoy par son contrat de mariage . Nos affaires avec le duc de Virtemberg sont dans la plus grande sécurité; mais tout ne sera arrangé que dans trois mois . Il me semble que je vous en ai aussi informée .

L'autre La Borde, premier valet de chambre du du roi, m'inquiète un peu . Vous ne m'accusez point la réception d'un paquet que je lui ai envoyé pour vous il y a trois semaines . Je ne reçois de lui aucune nouvelle . Il paraît ne plus songer à Pandore, c'était pourtant une belle fête à donner à la Dauphine 5.

On fait trois nouvelles éditions du Siècle de Louis XIV , à Leipsick, à Lausanne, et dans la ville d'Avignon. Celui qui a frappé ma médaille 6 s'appelle Wachter, il est sujet de l'électeur palatin .

J'ai répondu à tous les articles de votre [lettre ] . Il est inutile à présent que M. d'Hornoy passe chez la veuve Duchesne, elle a entièrement réparé sa faute . Renvoyez-moi, je vous prie, le petit billet pour Laleu afin que tout soit en règle . Je mets un ordre très exact dans toutes mes affaires . Mon âge et ma mauvaise santé l'exigent . Je vous embrasse avec la plus tendre amitié.

V. »

1 Nicolas Boindin, procureur et auteur dramatique, né en 1676, mort à Paris le 30 novembre 1751 . Voir lettre du 9 avril 1769 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/10/11/il-faut-etre-poli-et-ne-point-refuser-un-diner-ou-l-on-est-p-6518425.html

2 Dans la lettre du 26[30] mars à laquelle répond V*, Mme Denis demandait : « […] avez-vous reçu mon cher ami une grand lettre que je vous ai envoyée par Perrachon ? Il me semble que je vous dis bien des choses dans cette lettre . J'espère que vous m'y répondrez ( car votre manière est de ne pas répondre aux choses dont vous ne voulez pas qu'on vous parle ), mais je vous déclare que je ne resterai pas à Paris.[...] Quand vous voudrez savoir mon projet je vous le dirai .»

3 Voir note précédente, où Mme Denis fait une comparaison entre l'hiver à Paris et en Jura s'achevant ainsi : « Mon corps est ici, mais mon cœur et ma tête sont toujours à Ferney. »

4 Les Nouvelles de divers endroits du 12 avril 1769 rapportent en effet, dans une dépêche datée du 3 avril :'Le bruit a court depuis deux jours que M. de Laborde est exilé à sa terre de La Ferté dans le Perche. On n'en donne pas la raison . »

19/10/2024

aucune satire, aucun conte ordurier, rien par conséquent qui réveille l'attention des hommes

... Il n'est qu'à voir la fréquentation et le suivi d'influenceurs.euses pour voir que ce ne sont pas les plus instructifs et ceux de bonne volonté qui sont les plus suivi.es . Messieurs, l'actualité donne raison au Patriarche Voltaire, viol et violence , voila bien de quoi avoir honte , jusqu'à quand serons-nous si terriblement menés par de bas instincts ?

Pour info sur le "regard masculin" : https://www.youtube.com/watch?v=0oMsFlQk_m4&ab_channel=Lescouillessurlatable

 

 

« A Gabriel Cramer

[avril 1769]

Cette petite édition 1 est charmante ; continuez mon cher Caro . Voici deux petites additions pour la fin des nombres 14 et 30 . Vous concevez aisément qu'il ne faut pas tirer un nombre prodigieux d'exemplaires de cette bagatelle . Il n'y a que très peu de plaisanterie, aucune satire, aucun conte ordurier, rien par conséquent qui réveille l'attention des hommes . Toutes les fois qu’il ne s'agira que de raison, tirez peu d'exemplaires . Je vous embrasse du meilleur de mon cœur, et j'ai grande impatience de vous voir .

Ce n'est point Panckoucke c'est Merlin qui n'a pas fourni les six exemplaires en question . On va le presser . »

1 D'après les détails donnés plus loin il ne peut s'agir que de la Collection d'anciens évangiles qui parut au début mai 1769 .

Voir : https://books.google.nl/books?id=ihA3AAAAMAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

et : https://www.persee.fr/doc/dhs_0070-6760_1996_num_28_1_2139_t1_0572_0000_3