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12/05/2021

« La tolérance est établie chez nous ; elle fait loi de l’État, et il est défendu de persécuter. »

... Devinez où , et quand, et quel chef d'Etat dit cela ?

-- Russie .

-- 1765

-- Catherine II .

Qu'en pense le dictateur Poutine ( exhibitionniste ridicule, qui en cela arrive à battre le Donald Trump de triste mémoire ) "le plus orgueilleux" et "le plus malhonnête homme" qui soit ? J'ajouterai : le plus dangereux .

Poutine super tsar: 60 dessins de presse: Amazon.fr: Collectifs, Chol,Éric:  Livres

Pitoyable !

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

24è janvier 1766 1

Je vous avoue, mon divin ange, et à vous aussi, ma divine ange, que je trouve vos raisons pour ne pas venir à Genève extrêmement mauvaises. Je penserai toujours qu’un conseiller d’honneur du parlement de Paris peut très bien figurer avec un grand trésorier du pays de Vaud ; je penserai qu’un ministre plénipotentiaire d’un petit-fils du roi de France est fort au-dessus de tous les plénipotentiaires de Zurich et de Berne ; je penserai que l’incompatibilité du ministère de Parme avec celui de France est nulle, et qu’on a donné des lettres de compatibilité 2 en mille occasions moins importantes. Enfin, je croirai toujours que ce voyage ne serait pas inutile auprès de Mme de Grosley ; mais vous ne voulez point venir, il ne me reste que de vous aimer en gémissant.

On me mande de Paris que, le jour de Sainte-Geneviève 3, jour auquel sa chapelle autrefois ne désemplissait pas, il ne se trouva personne qui daignât lui rendre visite, et que celle qui donne la pluie et le beau temps gela de froid le jour de sa fête. Je ne me souviens plus si je vous ai mandé que M. Dupuits, et mon jésuite, qui nous dit la messe, s’en allèrent malheureusement à Genève donner des copies de cette guenille : on l’imprima sur-le-champ, le tout sans que j’en susse rien. On l’a imprimée à Paris. Fréron dira que je suis un impie et un mauvais poète . Les honnêtes gens diront que je suis un bon citoyen.

Vous souvenez-vous d’un certain mandement d’un archevêque de Novogorod contre la chimère aussi dangereuse qu’absurde des deux puissances ? L’auteur ne croyait pas si bien dire. Il se trouve en effet que non-seulement cet archevêque, à la tête du synode grec, a réprouvé ce système des deux puissances, mais encore qu’il a destitué l’évêque de Rostou, qui osait le soutenir. L’impératrice de Russie m’a écrit huit grandes pages de sa main, pour me détailler toute cette aventure. J’ai été prophète sans le savoir, comme l’étaient tous les anciens prophètes. Voici d’ailleurs deux lignes bien remarquables de sa lettre 4 : « La tolérance est établie chez nous ; elle fait loi de l’État, et il est défendu de persécuter. »

Pourquoi faut-il que ma Catherine ne règne pas dans des climats plus doux, et que la vérité et la raison nous viennent de la mer glaciale ! Il me semble que, dans mon dépit de ne vous point voir arriver à Genève, je m’en irais à Kiovie finir mes jours, si Catherine y était ; mais malheureusement je ne peux sortir de chez moi ; il y a deux ans que je n’ai fait le voyage de Genève.

Vous me demandez qui sera mon médecin quand je n’aurai plus le grand Tronchin ; je vous répondrai : personne, ou le premier venu ; cela est absolument égal à mon âge ; mon mal n’est que la faiblesse avec laquelle je suis né, et que les ans ont augmentée ; Esculape ne guérirait pas ce mal-là . Il faut savoir se résigner aux ordres de la nature.

Rousseau est un grand fou, et un bien méchant fou, d’avoir voulu faire accroire que j’avais assez de crédit pour le persécuter, et que j’avais abusé de ce prétendu crédit. Il s’est imaginé que je devais lui faire du mal, parce qu’il avait voulu m’en faire, et peut-être parce qu’il lui était revenu que je trouvais son Héloïse pitoyable, son Contrat social très insocial, et que je n’estimais que son Vicaire savoyard dans son Émile ; il n’en faut pas d’avantage dans un auteur pour être attaqué d’un violent accès de rage. Le singulier de toute cette affaire-ci, c’est que les petits troubles de Genève n’ont commencé que par l’opinion inspirée par Jean-Jacques au peuple de Genève que j’avais engagé le conseil de Genève à donner un décret de prise de corps contre Jean-Jacques, et que la résolution en avait été prise chez moi, aux Délices. Parlez, je vous prie, de cette extravagance à Tronchin, il vous mettra au fait ; il vous fera voir que Rousseau est non-seulement le plus orgueilleux de tous les écrivains médiocres, mais qu’il est le plus malhonnête homme.

J’ai été tenté quelquefois d’écrire au conseil de Genève pour démentir solennellement toutes ces horreurs, et peut-être je succomberai à cette tentation 5; mais j’aime bien mieux la déclaration que me donnèrent, il y a quelque temps, les syndics de la noblesse et du tiers état de notre province, les curés et les prêtres de mes terres, lorsqu’ils surent qu’il y avait, je ne sais où, des gens assez malins pour m’accuser de n’être pas bon chrétien. Je conserve précieusement cette pièce authentique, et je m’en servirai, si jamais la tolérance n’est pas établie en France comme en Russie.

J'espère que ma petite famille verra M. de Chabanon avec plus de plaisir que Virginie . On a dit qu'il a beaucoup de talents agréables et des mœurs charmantes ; il a une sœur fort aimable, qui voulait acheter une terre dans mon voisinage.

Adieu, anges cruels, qui ne voulez voir ni les Alpes ni le mont Jura ; je ne m’en mets pas moins à l’ombre de vos ailes. 

Je vous supplie d’avoir la bonté de me mander si cette dame Belot que M. de Meynières vient d’épouser, est la dame Belot traductrice de Hume, et qui voulait venir à Ferney .

V.»

1 L'édition de Kehl, suivant la copie Beaumarchais et suivie des éditions omet le dernier paragraphe ainsi que celui qui commence par « J'espère … voisinage. »

2 Littré ne donne pas d'exemple de ce mot, qui existe pourtant dans le langage juridique dès le XVIIè siècle .

3 Le 3 janvier .

4 V* se montre un peu trop optimiste . Voir la lettre , qui occupe deux folios, donc quatre pages dans l'original conservé à Moscou : «De Catherine II, impératrice de Russie II,

« À Pétersbourg, ce 28 novembre 1765 [9 décembre nouveau style].

« Monsieur, ma tête est aussi dure que mon nom est peu harmonieux ; je répondrai par de la mauvaise prose à vos jolis vers . Je n’en ai jamais fait, mais je n’en admire pas moins pour cela les vôtres. Ils m’ont si bien gâtée, que je ne puis presque plus en souffrir d’autres. Je me renferme dans ma grande ruche ; on ne saurait faire différents métiers à la fois. Le mien prend beaucoup de temps , et je trouve ma tête, malgré ce que vous me dîtes de mon bau nom , si peu docile, si peu flexible, que le nom de Catherine m'est très justement donné . Il harmonie avec l'harmonie de mon génie . C'est feu l'impératrice Élisabeth à laquelle je dois beaucoup qui m'appela ainsi par tendresse et par respect pour sa mère .

Jamais je n’aurais cru que l’achat d’une bibliothèque m’attirerait tant de compliments : tout le monde m’en fait sur celle de M. Diderot. Mais avouez, vous à qui l’humanité en doit pour le soutien que vous avez donné à l’innocence et à la vertu dans la personne des Calas, qu’il aurait été cruel et injuste de séparer un savant d’avec ses livres, et empêchez je vous prie M. d'Alembert d'être aussi sensible au refus de la pension qui lui est due . C'est une inconséquence qu'il doit mépriser, il a fait des sacrifices bien au-delà de cette très modique pension . L'effet de ce refus retombe sur ceux qui le persécutent, ils en souffrent plus que lui ..

Dmitri, métropolite de Novogorod, n’est ni persécuteur, ni fanatique. Il n’y a pas un principe dans le Mandement d’Alexis qu’il n’avouerait, ne prêcherait, ne publierait, dès que cela était utile ou nécessaire . Il abhorre la proposition des deux puissances, plus d’une fois il en a donné des exemples que je pourrais vous citer si je ne craignais de vous ennuyer . Je les mettrai sur une feuille séparée, afin de la brûler si vous ne voulez pas la lire.

La tolérance est établie chez nous : elle fait loi de l’État, et il est défendu de persécuter. Nous avons, il est vrai, des fanatiques qui, faute de persécution, se brûlent eux-mêmes ; mais si ceux des autres pays en faisaient autant, il n’y aurait pas grand mal ; le monde n’en serait que plus tranquille, et Calas n’aurait pas été roué. Voilà, monsieur, les sentiments que nous devons au fondateur de cette ville, que nous admirons tous deux.

Je suis bien fâchée que votre santé ne soit pas aussi brillante que votre esprit : celui-ci en donne aux autres. Ne vous plaignez point de votre âge, et vivez les années de Metusalem, dussiez-vous tenir dans le calendrier la place que vous trouvez à propos de me refuser. Comme je ne me crois point en droit d’être chantée, je ne changerai point mon nom contre celui de l’envieuse et jalouse Junon . Je n’ai pas assez de présomption pour prendre celui de Minerve ; je ne veux point du nom de Vénus, il y en a trop sur le compte de cette belle dame. Je ne suis pas Cérès non plus ; la récolte a été très-mauvaise en Russie cette année . Le mien au moins me fait espérer l’intercession de ma patronne là où elle est  et à tout prendre, je le crois le meilleur pour moi ; mais en vous assurant de la part que je prends à ce qui vous regarde, je vous en éviterai l’inutile répétition.

Le mandement m'a fait ressouvenir de l'honnête Antoine Vadé et de son discours. » ***

*** En rouge les sections manquantes dans l'édition selon Beuchot . Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire...

5 Ce qu'il fait le jour suivant, voir lettre du 25 janvier 1766 à Pierre Lullin .

11/05/2021

Je ne crois pas qu’à eux deux ils viennent à bout de faire une tragédie 

... Détrompe toi ami Voltaire, Israeliens et Palestiniens sont tout à fait capables de faire couler le sang, les pessimistes disent "comme d'habitude", les optimistes disent "à nouveau", ou vice-versa . Il est vraiment lamentable que ce pays qui vient de se vanter d'avoir sauvé du Covid par une vaccination massive la quasi totalité de son peuple, trouve le moyen de faire remonter les statistiques des décès par la folie d'intégristes bornés (pléonasme), plus cinglés et meurtriers que nos adeptes de rave parties  , puis comme la religion ne suffit pas comme motif de s'étriper, le vrai motif fondamental, l'intérêt, le dieu dollar/shekel reçoit son tribut de morts . A tous ceux qui reprochent à la France un passé colonialiste, je demande qu'ils voient, et dénoncent s'ils l'osent, un peu ce qui se passe au présent dans ce petit pays au soleil ( pour faire sécher le sang ? ).

https://www.lefigaro.fr/international/pelerinage-en-israe...

https://www.lefigaro.fr/international/a-jerusalem-le-chaos-et-la-rage-sur-l-esplanade-des-mosquees-20210510

Il y a trois ans

https://www.planetebd.com/bd/le-lombard/la-petite-bedethe...

 

 

 

« A Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine, marquise de Florian

22 janvier 1766

J’ai fini avec regret l’Histoire de Ferdinand et d’Isabelle 1. Elle m’a fait un très grand plaisir, et je ne doute pas qu’elle n’ait beaucoup de succès auprès de tous ceux qui préfèrent les choses utiles et vraies aux romanesques. Je fais mon compliment à l’auteur, et je m’enorgueillis de lui appartenir de si près. Si Isabelle revenait au monde, elle lui donnerait au moins un canonicat de Tolède ; mais si la petite Geneviève de Nanterre revenait, elle me traiterait fort mal. Dès que j’eus fait ces maudits vers 2, M. Dupuits et père Adam les portèrent à Genève sans m’en rien dire ; ils furent imprimés sur-le-champ dans la ville de Calvin ; ils l’ont été dans le quartier de Geneviève à Paris, et me voilà brouillé avec la sainte, avec tous les génovéfins, avec M. Soufflot, et peut-être avec les dévots de la cour ; mais c’est ma destinée. J’avais pourtant bonne intention. Je me suis laissé trop entraîner à mon zèle pour Henri IV. Il n’y a d’autre remède à cela que de faire pénitence, et de réciter l’oraison de sainte Geneviève pendant neuf jours.

Je ne me mêle en aucune façon du recueil qu’on fait à Lausanne des pièces concernant les Calas 3. Je n’aime point le titre d’assassinat juridique, parce qu’un titre doit être simple, et non pas un bon mot. Il est très vrai que la mort de Calas est un assassinat affreux, commis en cérémonie4; mais il faut se contenter de le faire sentir sans le dire.

Le père Corneille est venu voir sa fille. Je ne crois pas qu’à eux deux ils viennent à bout de faire une tragédie : mais le père est un bon homme, et la fille une bonne enfant.

Il n’y a point de trouble à Genève, comme on se tue de le dire : il n’y a que des tracasseries, des misères, des pauvretés auxquelles les médiateurs mettront ordre dans quatre jours.

Le docteur Tronchin doit être parti aujourd’hui, suivi de quelques-uns de ses malades, qui le mènent en triomphe. J’espère que M. et Mme de Florian le verront dans sa gloire, et qu’ils me maintiendront dans mon amitié 5.

J’embrasse tendrement nièce, neveu et petits-neveux. »

1 Histoire des rois catholiques Ferdinand et Isabelle, 1766, deux volumes in-12. L’auteur est l’abbé Mignot, frère de Mme de Florian et neveu de Voltaire. Voir lettre du 29 décembre 1762 à Mme de Fontaine : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/11/04/il-est-honteux-que-cette-affaire-traine-au-conseil-si-longte-5995797.html

2 Épître à Henri IV.

3 Il s'agit peut-être de ce qui deviendra l'Histoire des malheurs de la famille Calas [...], d’Édouard Thomas Simon, 1766 : voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89douard-Thomas_Simon

et https://openlibrary.org/works/OL7567338W/Histoire_des_malheurs_de_la_famille_des_Calas

4 Rappel des Satires, VIII, 296, de Boileau;page 84 : «  Mener tuer un homme avec cérémonie »  https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5469682b/f105.item.texteImage

5 On sait que Tronchin a pris ses distances avec V* . On est tenté de lire dans son amitié .

10/05/2021

à la honte de la France, il y a cent personnes qui lisent les males semaines de Fréron, contre une qui s'instruit dans les ouvrages de Clairault

... Changeons "Fréron"  par n'importe quel tabloïd, et "Clairault" par "Voltaire" et tout autre auteur de la liste suivante https://www.senscritique.com/liste/Lectures_recommandees/91989 , et nous aurons actualisé le constat voltairien .

Lire plus de 280 signes, est-ce donc si difficile ? Et les écrire correctement ?

 

 

« A Philibert-Charles-Marie Varenne de Fénille

La lettre que vous me citez, Monsieur, est précisément celle dont je vous parlais 1; ce sera du moins un témoignage de l'amitié qui me liait à l'illustre M. Clairault. Je ne croyais pas lui survivre 2. Nous avons fait une grande perte, mais le public ne la sent pas assez, il ne sait pas combien les mérites de ce genre sont en petit nombre ; nous avons tout au plus trois ou quatre géomètres astronomes ; s'ils manquaient on serait tout étonné de n'avoir pas un seul homme qui sut faire une observation. Et à la honte de la France, il y a cent personnes qui lisent les males semaines de Fréron, contre une qui s'instruit dans les ouvrages de Clairault .

Votre très humble et très obéissant serviteur

V.

20è janvier 1766 à Ferney.3 »

3 L'édition « Copie d'une lettre de M. de Voltaire , à M. de Varenne, receveur des tailles de Montargis », Journal encyclopédique du 1er janvier 1770, amalgame la lettre du 1er janvier 1766 à la présente ; voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/04/21/je-m-interesse-au-monument-que-vous-elevez-a-sa-gloire-il-me-6311176.html

Allez jouir de tous vos succès, ils ne seront pas plus grands que les regrets que vous nous laissez

... Diable ! à qui pourrais-je bien dire cela ?

En attendant, je me dis ...

300 Citations sur la vie qui te changeront (à tout jamais)

 

 

« A Théodore Tronchin

A Ferney 20è janvier 1766 1

Mon cher Esculape, vos malades vous accompagnent à Paris, et mon cœur vous y suivra . Si Mlle Ferboz a l'honneur d'écrire à sa chère amie Mlle Levasseur, je vous enverrai sa lettre 2. Je n'ai plus qu'un désir, c'est celui de souper un jour entre vous et Mme d'Epinay, mais comme je n'ai pas la force de me transporter à Genève, il n'y a pas d'apparence que je puisse faire le voyage de Paris . Allez jouir de tous vos succès, ils ne seront pas plus grands que les regrets que vous nous laissez . »

1 L'édition Tronchin B. est incomplète et mal datée .

2 Ce qu'on sait de cette affaire ressort du début d'une lettre de Du Pan à Freudenreich du 18 janvier 1766 : « Nous attendons sa vingt-et-unième lettre , qui sera de Mlle Levasseur servante maîtresse de Jean-Jacques à Mlle Catherine Ferboz, ci-devant maîtresse de Covelle et à présent femme d'un quidam . Rousseau va être la bête à qui Voltaire adressera ses coups et si Rousseau répond, Volt garde pour la réplique les propres lettres dudit Jean-Jacques écrites de Venise et qu'il a en original, pour prouver que Rousseau n’était rien moins que premier secrétaire d'ambassade […] . C'est Rousseau qui a conseillé à nos souverains de se lier avec Voltaire, ces messieurs voulaient faire frapper une médaille à l'honneur de Rousseau, qui écrivit à l'un d'eux qu'ils feraient bien de s'attacher à Voltaire, et de lui décerner la médaille avec cette légende Phoebo pacificatori, à Apollon pacificateur . Ils ont fait leur cour à Voltaire qui les a bien reçus, mais comme ils sont faits pour l'ennuyer, il est vraisemblable que leur liaison avec lui ne sera pas de longue durée. »

La vingt-et-unième lettre ne parut pas .

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Marie-Th%C3%A9r%C3%A8se_Le_Vasseur

et : https://gw.geneanet.org/rossellat?lang=fr&p=catherine&n=ferboz

et :: https://gw.geneanet.org/rossellat?lang=fr&p=robert&n=covelle

09/05/2021

Je n'ai [... ]que cette horreur pour le fanatisme intolérant ; horreur bien raisonnable, et qu’il est utile d’inspirer au genre humain pour la sûreté des princes, pour la tranquillité des États, et pour le bonheur des particuliers

... S'il est une des meilleures choses à laquelle il faut se tenir, c'est bien celle-là .

 

 

http://123parlefrancais.blogspot.com/2020/10/le-vaccin-pa...

 

 

« A Marie de Vichy de Chamrond

marquise Du Deffand

20è janvier 1766 1

Je me jette à vos genoux, madame ; je vois par votre lettre du 6è janvier 2, qui ne m’est parvenue pourtant que le 18, que je vous avais alarmée. Comptez que je serais désespéré de vous causer la plus légère affliction. Vous sentez bien que, dans la situation où je suis, je ne dois donner aucune prise à la calomnie : vous savez qu’elle saisit les choses les plus innocentes pour les empoisonner. Il y a des gens qui m’envient une retraite au milieu des rochers, qui n’auraient pitié ni de ma vieillesse, ni des maux qui l’accablent, et qui me persécuteraient au delà du tombeau ; mais je suis pleinement rassuré par votre lettre, et vous avez dû voir par ma dernière 3 avec quelle confiance je vous ouvre mon cœur ; ce cœur est plein de vous, il est continuellement sensible à votre état comme à votre mérite, il aime votre imagination et votre candeur, il vous sera attaché tant qu’il battra dans mon faible corps.

Vous et votre ami, vous pouvez avoir été convaincus par ma dernière lettre combien je suis éloigné de quelques philosophes modernes qui osent nier une intelligence suprême, productrice de tous les mondes. Je ne puis concevoir comment de si habiles mathématiciens nient un mathématicien éternel. Ce n’était pas ainsi que pensaient Newton et Platon. Je me suis toujours rangé du parti de ces grands hommes. Ils adoraient un Dieu, et ils détestaient la superstition ; je n’ai rien de commun avec les philosophes modernes que cette horreur pour le fanatisme intolérant ; horreur bien raisonnable, et qu’il est utile d’inspirer au genre humain pour la sûreté des princes, pour la tranquillité des États, et pour le bonheur des particuliers.

Voilà ce qui m’a lié avec des personnes de mérite qui peut-être ont trop d’inflexibilité 4 dans l’esprit, qui se plient peu aux usages du monde, qui aiment mieux instruire que plaire, qui veulent se faire écouter, et qui dédaignent d’écouter ; mais ils rachètent ces défauts par de grandes connaissances et par de grandes vertus. J’ai d’ailleurs des raisons particulières d’être attaché à quelques-uns d’entre eux, et une ancienne amitié est toujours respectable. Mais soyez bien persuadée, madame, que de toutes les amitiés la vôtre m’est la plus chère. Je n’envisage point sans une extrême amertume la nécessité de mourir sans m’être entretenu quelques jours avec vous ; c’eût été ma plus chère consolation. Vos lettres y suppléent : je crois vous entendre quand je vous lis. Jamais personne n’a eu l’esprit plus vrai que vous ; votre âme se peint tout entière dans tout ce qui vous passe par la tête ; c’est la nature elle-même avec un esprit supérieur ; point d’art, point d’envie de se faire valoir, nul artifice, nul déguisement, nulle contrainte. Tout ce qui n’est pas dans ce caractère me glace et me révolte. Je vous aime, madame, parce que j’aime le vrai : en [un] mot, je suis au désespoir de ne point passer quelques jours avec vous, avant de rendre ma chétive machine aux quatre éléments.

Vous ne m’avez point mandé si vous digérez ; tout le reste, en vérité, est bien peu de chose.

Faites-vous lire, madame, le rogaton 5 que je vous envoie, et ne le donnez à personne, car, quelque bon serviteur que je sois de Henri IV, je ne veux pas me brouiller avec sainte Geneviève. »

1 L'édition de Kehl la date du 27, ;suivant la copie de Beaumarchais V* semble répondre à une lettre du 6 janvier 1766 connue par une copie de Wyart (voir note suivante), mais on possède une autre lettre de Mme du Deffand du 14 janvier 1766 qui contient les mêmes thèmes, plus une allusion à « l'abbé Bazin » et des nouvelles du président Hénault .

2 Elle commence ainsi : « Jamais je n'ai rêvé d’oiseaux qu'il ne me soit arrivé quelque tracasserie . J'ai rêvé cette nuit de perroquet et à mon réveil j'ai reçu votre lettre du 1er janvier, elle a troublé ma pauvre tête . Je vous proteste que je ne 'ai donné de copie de vos lettres à personne , et que depuis celle qui vous a fait une tracasserie avec Montcrif je n'en ai lu aucune qu'à quatre ou cinq personnes, le président, Pont-de-Veyle, et mes Anglais . »

4 D'Alembert, qui n'est pas aimé de Mme Du Deffand, et qui le lui rend bien . (Beuchot.)

Les médiateurs seront bien étonnés quand ils verront qu’on les fait venir pour une querelle de ménage dont il est difficile de trouver le fondement : c’est faire descendre Jupiter du ciel pour arranger une fourmilière

... Ainsi en va-t-il de la vie politique française, de l'extrême droite à l'extrême gauche, où tout se joue à tire-poils *. Notre Jupiter est appelé par les fourmis, règlera-t-il le problème en les boulottant toutes ?

* Tira pelle : https://www.persee.fr/doc/mar_0758-4431_1985_num_13_2_1266

Revue verdons n°54 à quoi on joue ? - Autour du livre, des écrivains...  dans les Alpes de Haute-Provence

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

20 janvier 1766 1

Mon cher frère, je vous prie d'envoyer l'incluse à frère Protagoras 2 .

J'ai encore une grâce à vous demander . C'est d'avoir la bonté de faire prendre chez l’enchanteur Merlin et chez l'original Panckoucke les livres dont voici la note signée Cramer . Je vous demande bien pardon de cette corvée, mais je sais que les pauvres diables de philosophes aiment à s'aider les uns les autres .

Les tracasseries de Genève continuent, mais elles sont à pouffer de rire. Les deux partis se jouent tous les tours imaginables, avec toute la discrétion possible. Les médiateurs seront bien étonnés quand ils verront qu’on les fait venir pour une querelle de ménage dont il est difficile de trouver le fondement : c’est faire descendre Jupiter du ciel pour arranger une fourmilière. Le plaisant de l’affaire, c’est que l’origine de toute cette belle querelle est que la ville de Calvin, où l’on brûla autrefois Servet, a trouvé mauvais qu’on ait brûlé le Vicaire savoyard. Il me semble que les Parisiens n’ont rien dit quand on a brûlé le poème de La Religion naturelle.

Les comédiens ont-ils donné quelque chose de nouveau à la rentrée ? Comment vous portez-vous ? Je n’en peux plus ; je me résigne, et je vous aime.

Quand m'enverrez-vous donc du Fréret 3? Est-ce Mme Belot , traductrice de Hume, que M. de Meynières a épousée 4? »

Vous savez qu’il m’importe bien peu que les vers du pays de Gex ou d’un autre fassent de mauvais repas de ma maigre figure

... Lu et approuvé .

210 idées de Confinement, com finement, con finement en 2021 | humour,  blague, drôle

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

20è janvier 1766

Voilà donc qui est fait ; j’aurai la douleur de mourir sans vous avoir vus ; vous me privez, mes cruels anges, de la plus grande consolation que j’aurais pu recevoir. Je ne vous alléguerai plus de raisons, vous n’entendrez de moi que des regrets et des gémissements. Quel que soit le ministre médiateur que M. le duc de Praslin nous envoie, il sera reçu avec respect, et il dictera des lois. Si je pouvais espérer quelques années de vie, je m’intéresserais beaucoup au sort de Genève. Une partie de mon bien est dans cette ville, les terres que je possède touchent son territoire, et j’ai des vassaux sur son territoire même.

Il est d’ailleurs bien à désirer qu’un arrangement projeté avec les fermes générales réussisse ; qu’on transporte ailleurs les barrières et les commis qui rendent ce petit pays de Genève ennemi du nôtre ; qu’on favorise les Genevois dans notre province, autant que le roi de Sardaigne les a vexés en Savoie ; qu’ils puissent acquérir chez nous des domaines, en payant un droit annuel équivalent à la taille, ou même plus fort, sans avoir le nom humiliant de la taille. Le roi y gagnerait des sujets ; le prodigieux argent que les Genevois ont gagné sur nous refluerait en France en partie ; nos terres vaudraient le double de ce qu’elles valent. Je me flatte que M. le duc de Praslin voudra bien concourir à un dessein si avantageux. Je ne me repentirais pas alors de m’être presque ruiné à bâtir un château dans ces déserts.

Je ne saurais finir sans vous dire encore que je n’ai aucune part aux plaisanteries de M. Baudinet et de M. Montmolin. Soyez sûr d’ailleurs que, s’il y a encore des cuistres du seizième siècle dans ce pays-ci, il y a beaucoup de gens du siècle présent ; ils ont l’esprit juste, profond, et quelquefois très délicat.

Il n’y a point à présent de pays où l’on se moque plus ouvertement de Calvin que chez les calvinistes, et où l’esprit philosophique ait fait des progrès plus prompts : jugez-en par ce qui vient de se passer à Genève : un peuple tout entier s’est élevé contre ses magistrats, parce qu’ils avaient condamné le Vicaire savoyard . Il n’y a point de pareil exemple dans l’histoire depuis 1766 ans.

Ceux qui ont eu part au Dictionnaire philosophique sont publiquement connus. Je sais bien qu’on a inséré dans ce livre plusieurs passages qu’on a pris dans mes Œuvres : mais je ne dois pas être plus responsable de cette compilation, dont on a fait cinq éditions, que de tout autre livre où je serais cité quelquefois. Si on avait l’injustice barbare de me persécuter pour des livres que je n’ai point faits, et que je désavoue hautement, vous savez que je partirais demain, et que j’abandonnerais une terre dont j’ai banni la pauvreté, et une famille qui ne subsiste que par moi seul. Vous savez qu’il m’importe bien peu que les vers du pays de Gex ou d’un autre fassent de mauvais repas de ma maigre figure. Les dévots sont bien méchants : mais j’espère qu’ils ne seront pas assez heureux pour m’arracher à la protection de M. le duc de Praslin, et pour insulter à ma vieillesse.

Les tracasseries de Genève sont devenues extrêmement plaisantes. M. Hennin, qui en rit comme un homme de bonne compagnie qu’il est, en aura fait rire sans doute M. le duc de Praslin . On se fait des niches de part et d’autre avec toute la circonspection et toute la politesse possible. Ce n’est pas comme en Pologne, où l’on tire un sabre rouillé à chaque argument de l’adverse partie . Ce n’est pas comme dans le canton de Switz, où l’on se donne cent coups de bâton pour donner plus de poids à son avis. On commence à plaisanter à Genève ; on dit que les syndics usent du droit négatif avec leurs femmes, attendu qu’ils n’en ont point d’autre. Le monde se déniaise furieusement, et les cuistres du XVIè siècle n’ont pas beau jeu.

L’ex-jésuite vous enverra ses guenillons à Pâques ; il est malade par le froid horrible qu’il fait en Sibérie. Nous nous mettons, lui et moi, sous les ailes de nos anges.