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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Il faut de l'enfer à la canaille

... Sur terre, sur mer , dans les airs et au delà .

 

 

« A David-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches

Ma[jor des g]ardes de Son Altesse Sérénissime le prince

d'[Orange]1 etc.

à Lausanne

A Ferney 26 décembre 1760 2

Mon Dieu que j'aime votre bon lieutenant-colonel ! Il me semble, monsieur le major des gardes, que vous en auriez fait tout autant . Il n'y a que les braves gens qui soient humains, et il n'y a que des prêtres capables de voir avec plaisir Dieu occupé pendant l'éternité à faire cuire son monde . Cependant je pense qu'il eût été tout aussi bon de laisser les choses comme elles étaient . Les peines qui ne sont que comminatoires, ne sauraient être trop fortes . Il faut de l'enfer à la canaille . L'enfer était éternel chez les anciens chez qui nous avons tout pillé . J'ai une petite affaire avec d'autres prêtres, mais elle est toute temporelle . C'est avec les frères jésuites qui se sont emparés je ne sais comment il y a un siècle d'un assez gros domaine à la porte de Ferney . Ils ne s'en sont pas contentés, ils ont envahi en dernier lieu une terre appartenante à six frères, bons gentilshommes, tous au service du roi, et tous pauvres : pour vous intéresser davantage à la chose vous saurez qu'ils sont Suisses et du canton de Berne . Les bons jésuites ont surpris une permission du roi d'acheter la terre de ces six officiers à vil prix, et j'ai en main un écrit de leur commissionnaire dans lequel ils avouent qu’ils ne se sont emparés de ce bien que dans l'opinion probable où ils étaient que les héritiers légitimes étaient trop pauvres pour rentrer dans leur héritage . Leur doctrine de l'opinion probable m'a piqué . J'ai renversé leur système en prêtant aux six officiers la somme nécessaire pour reprendre leur patrimoine ; et j'espère qu'ils en seront en possession l'année prochaine . Saint Ignace pourra me damner éternellement mais j'obtiendrai grâce auprès de vous .

Le consistoire genevois crie un peu contre la comédie 3. Il y a m[oins] de tapage qu'à Neuchâtel 4, mais il y a du bruit . Apparemment que les disciples de Jean Chauvin s'étant mis à nier la divinité de Jésus , veulent affecter du rigorisme afin qu'on ne les accuse pas à la fois d'une morale et d'une doctrine relâchée . Il leur sera, je crois, plus difficile de renverser mon théâtre que leurs autels . Je ne leur conseille pas d'être à la fois les ennemis de Jésus-Christ et les miens . Adieu, monsieur, je vous souhaite la bonne année et à toute votre famille, à qui je présente mes respects .

V. »

1 Les trois passages restitués dans le dernier paragraphe et l'adresse correspondent à des trous dans la manuscrit .

2 Wagnière a porté sur l'original : « Cette lettre ayant été oubliée à Ferney, n'est partie que ce jourd'hui 30è. »

3Les pièces par lesquelles le Conseil de Genève interdit à V* de donner des représentations théâtrales aux Délices (octobre 1760-janvier 1761 ) sont reproduites par Bestermann . Voir aussi dans la même sens la lettre de Jacob Vernet à Jean-Jacques Rousseau du 24 décembre 1760 .

4 In pasteur, Ferdinand-Olivier Petitpierre, venait d'être renvoyé pour avoir défendu, en chaire et par imprimé, la thèse de non éternité des peines de l'enfer ; vois son Apologie […] sur son système de la non -éternité de l'enfer , 1760 . c'est le calviniste mentionné dans l'article « enfer » du Dictionnaire philosophique .

 

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26/12/2015 | Lien permanent

toujours fâché de voir des singes devenus tigres

...  Une belle ménagerie  , à poils, à plumes, à écailles : Gauche extrême ou radicale : 6 --  Gauche : 6  -- Ecologie : 3  --  Droite : 8  -- Droite extrême ou radicale : 5 -- Divers : 12  : https://www.francetvinfo.fr/elections/presidentielle/cand...

Manque dans cette liste le plus lâche et le plus simiesque : Eric Zemmour, saltimbanque  sans avenir, qui tord l'histoire sans vergogne .

le vrai 4è singe ! | Proverbes drôles, Humour, Drôle

... il râle à tout propos .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

Au eaux de Rolle en Suisse par Genève, 6è auguste 1766

Le petit prêtre a reçu les Roués 1; le petit prêtre doit être plus tragique que jamais, car il joint aux roués, dans son imagination, les décollés, les bâillonnés, les brûlés, les incarcérés qui écrivent des mémoires avec des cure-dents 2; et il ne s’accoutume point à ces passages rapides de l’opéra-comique à la grève. Il est toujours fâché de voir des singes devenus tigres ; mais il gourmande son imagination, il ne s’occupe que des atrocités de l’Antiquité. Il est très touché des choses raisonnables que ses anges lui disent. Il sait très bien qu’il n’est pas membre du parlement d’Angleterre. Il dévore en secret ses sentiments d’humanité ; il gémit obscurément sur la nature humaine.

Osera-t-il prier l’une des deux anges d’expliquer une critique qu’elle a faite de la tragédie d’Octave et le jeune Pompée, dans sa lettre du 22è juillet, dont elle a daigné accompagner l’envoi de la pièce ? Voici la critique :

Pompée doit songer à qui ce serait directement s’attaquer ; rien ne pourrait mettre Pompée à couvert de son ressentiment. Est-ce du ressentiment d’Octave dont vous voulez parler, madame, ou du ressentiment du sénat de Rome ? C’est peut-être de l’un et de l’autre. Je crois la critique très juste, et je vous réponds que le jeune auteur y aura la plus grande attention. Vous savez combien il est docile à vos critiques, quelle déférence il a toujours eue pour vos jugements.

Quoiqu’il soit plongé dans l’Antiquité, il ne laisse pas de s’intéresser quelquefois aux modernes. Le. mémoire écrit avec un cure-dent lui a paru devoir faire un effet prodigieux. S’est-il trompé, et se trompe-t-il quand il pense que ce mémoire irritera des hommes considérables ? Ô Velches ! sans tous ces orages, votre pays serait un joli pays !

Respect et tendresse.

V. »

2 Ceux de La Chalotais : Mémoires de M. de La Chalolais, procureur général au parlement de Bretagne, in-12 de 80 pages, contenant deux mémoires , voir : https://www.edition-originale.com/fr/livres-anciens-1455-... . Voir aussi lettre du 7 [10 ?] août 1766 à d'Alembert : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/02/correspondance-avec-d-alembert-partie-42.html

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01/11/2021 | Lien permanent

Qui jamais approuvera un ouvrage dont on fait des applications qui condamnent notre conduite ?

 

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

 

Colmar, le 21 septembre [1754]

 

Je vous obéis avec douleur, mon cher ange ; l'état de ma santé me rend bien indifférent sur une pièce de théâtre, et ne me laisse sensible qu'au chagrin d'envisager que peut-être je ne vous reverrai plus . Mais je vous avoue que je serai infiniment affligé si j'étais exposé à la fois à des dégoûts à l'Opéra et à la Comédie , immédiatement après l'affliction que cette Histoire prétendue universelle m'a causée . Amusez-vous, mon cher ange, avec vos amis, de mes Tartares et de mes Chinois, qui ont au moins le mérite d'avoir l'air étranger . Ils n'ont que ce mérite là ; ils ne sont point faits pour le théâtre ; ils ne causent pas assez d'émotion . Il y a de l'amour, et cet amour, ne déchirant pas le cœur, le laisse languir . Une action vertueuse peut être approuvée, sans faire grand effet . Enfin je suis sûr que cela ne réussirait pas , que les circonstances seraient très peu favorables , et que les allusions de la malignité humaine seraient très dangereuses . Les personnes sur lesquelles on ferait ces applications injustes se garderaient bien, je l'avoue, de les prendre pour elles, de s'en fâcher, d'en parler même ; mais , dans le fond du cœur, elles seraient très piquées, et contre moi, et contre ceux qui auraient donné la pièce . Elles la feraient tomber à la cour ; c'est bien le moins qu'elles pussent faire . Qui jamais approuvera un ouvrage dont on fait des applications qui condamnent notre conduite ? Je vous demande donc en grâce que cet avorton ne soit vu que de vous et de vos amis . J'ai donné mon consentement à la représentation de ce malheureux opéra de Prométhée, comme je donne mon consentement à mon absence, qui me tient éloigné de vous . Je souffre avec douleur ce que je ne peux empêcher . On m'a fait assez sentir que je n'ai aucun droit de m'opposer aux représentations d'un ouvrage imprimé depuis longtemps, dont la musique est approuvée des connaisseurs de l'Hôtel de Ville, et pour lequel on a déjà fait de la dépense . Je sais assez qu'il faudrait une dépense royale et une musique divine pour faire réussir cet ouvrage ; il n'est pas plus propre pour le théâtre lyrique que les Chinois pour le théâtre de la Comédie . Tout ce que je peux faire, c'est d’exiger qu'on ne mette pas au moins sous mon nom les embellissements dont M. de Sireuil a honoré cette bagatelle . Je vois qu'on est toujours puni de ses anciens péchés . On me défigure une vieille Histoire générale ; on me défigure un vieil opéra . Tout ce que je peux faire à présent, c'est de tâcher de n'être pas sifflé sur tous les théâtres à la fois . Vous jugerez, mon cher ange, de la nature du consentement donné à Royer par la lettre ci-jointe . Je vous supplie de la faire passez dans les mains de Moncrif, si cela se peut sans vous gêner .

 

J'ai encore pris la précaution d'exiger de Lambert qu'il fasse une petite édition de cette Pandore avant qu'on ait le malheur de la jouer, car la Pandore de Royer est toute différente de la mienne, et je veux du moins que ces deux turpitudes soient bien distinctes . Je vous supplie d'encourager Lambert à cette bonne action, quand vous irez à la Comédie . Je vous remercie tendrement de Mahomet et de Rome . Vous consolez mon agonie . Mme Denis et moi, nous nous inclinons devant les anges . Adieu, mon cher et respectable ami . »

 

 

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21/09/2011 | Lien permanent

je suis indigné contre ceux qui m’attribuent tant de belles choses

http://www.youtube.com/watch?v=FZIoarxXqmA

 

 http://images.google.fr/imgres?imgurl=http://farm4.static...

 

 

 http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Juste_de_Beauvau-Craon

 

Beauvau Craon_Charles_Juste.jpg

 

 

« A Charles-Just de Beauvau, prince de Beauvau-Craon

 

A Ferney 5è avril 1771

 

             Je me jette aux pieds de mon très respectable confrère [qui vient d’être élu à l’Académie]  qui veut bien m’appeler de ce nom, comme un chêne est le confrère d’un roseau. Le roseau en levant sa petite tête dit très humblement au chêne : « Ceux de Dodone n’ont jamais mieux parlé. » Il est vrai, illustre chêne, que vous n’avez point prédit l’avenir, mais vous avez raconté le passé avec une noblesse, une décence, une finesse, un art admirable [dans le discours de réception à l’Académie].

 

             En parlant de ce que le roi a fait de grand et d’utile, vous avez trouvé le secret de faire l’éloge d’un ministre votre ami [Choiseul, qui vient de tomber en disgrâce], dont les soins ont rendu le Comtat d’Avignon à la couronne, subjugué et policé la Corse, rétabli la discipline militaire,  et assuré la paix à la France. Vous avez sacrifié à l’amitié et à la vérité. Je n’ai que deux jours à vivre, mais j’emploierai ces deux jours à aimer et à révérer un grand ministre qui m’a comblé de bontés, et le roi approuvera ma reconnaissance.

 

             Je ne me mêle pas assurément des affaires d’Etat ; ce n’est pas le partage des roseaux ; j’applaudis comme vous l’érection des six conseils, à la justice rendue gratuitement, aux frais de justice dont les seigneurs des terres sont délivrés [réforme de Maupéou]; mais je n’écris point sur ces objets ; j’en suis bien loin ; et je suis indigné contre ceux qui m’attribuent tant de belles choses [en 1771, il a pourtant écrit l’Avis important d’un gentilhomme à toute la noblesse du royaume (en janvier), le Fragment d’une lettre écrite de Genève le 19 mars 1771 par un bourgeois de cette ville, à un bourgeois de L***, la Lettre d’un jeune abbé, la Réponse aux remontrances de la cour des Aides, les Sentiments des six conseils établis par le roi et de tous les bons citoyens, les Très humbles et très respectueuses remontrances du grenier à sel].

 

             Il y a, entre autres écrits, un Avis important à la noblesse de France [dont il est bien l’auteur], dont la moitié est prise mot pour mot d’un petit livre d’un jésuite, intitulé Tout se dira [Tout se dira, ou l’esprit des magistrats destructeurs (1763) de André Christophe Balbany]; et on a l’injustice et l’ignorance de m’imputer cette feuille qui n’est qu’un réchauffé. Qu’on m’impute Barmécide [Epître à la duchesse de Choiseul, après la disgrâce de son mari : Benaldaki à Caramoufle, femme de Giafar le Barmécide], voilà mon ouvrage ; je le réciterai au roi.

 

             Mais dans ma vieillesse et dans ma retraite, je ne peux que rendre justice obscurément et sans bruit au mérite. C’est ainsi que ce pauvre roseau cassé en use avec le beau chêne verdoyant ; auquel il présente son profond respect.

 

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05/04/2010 | Lien permanent

Allongez les trop courts, et rognez les trop longs, vous les trouverez tous fort bons

... A quoi pensez-vous , là, tout de suite ? Comme la dame s'adressant au régent ? Vous avez sans doute raison !

Peut-on en dire autant des discours télévisés de nos ministres ? J'en doute, mais compte tenu de l'esprit de contradiction français, c'est possible . Non ?

Citation 20 Ans Anniversaire Humour

 

 

 

« A Jean-Benjamin de Laborde

4è novembre 1765 à Ferney 1

Savez-vous, monsieur, combien votre lettre me fait d’honneur et de plaisir ? Voici donc le temps où les morts ressuscitent. On vient de rendre la vie à je ne sais quelle Adélaïde, enterrée depuis plus de trente ans ; vous voulez en faire autant à Pandore ; il ne me manque plus que de me rajeunir : mais M. Tronchin ne fera pas ce miracle, et vous viendrez à bout du vôtre. Pandore n’est pas un bon ouvrage, mais il peut produire un beau spectacle, et une musique variée : il est plein de duos, de trios, et de chœurs . C’est d’ailleurs un opéra philosophique qui devrait être joué devant Bayle et Diderot ; il s’agit de l’origine du mal moral et du mal physique. Jupiter y joue d’ailleurs un assez indigne rôle ; il ne lui manque que deux tonneaux. Un assez médiocre musicien, nommé Royer, avait fait presque toute la musique de cette pièce bizarre 2, lorsqu’il s’avisa de mourir. Vous ne ressusciterez pas ce Royer, vous êtes plutôt homme à l’enterrer.

J’avoue, monsieur, qu’on commence à se lasser du récitatif de Lully, parce qu’on se lasse de tout, parce qu’on sait par cœur cette belle déclamation notée, parce qu’il y a peu d’acteurs qui sachent y mettre de l’âme ; mais cela n’empêche pas que cette déclamation ne soit le ton de la nature et la plus belle expression de notre langue. Ces récits m’ont toujours paru fort supérieurs à la psalmodie italienne ; et je suis comme le sénateur Pococurante 3, qui ne pouvait souffrir un châtré faisant, d’un air gauche, le rôle de César ou de Caton. L’opéra italien ne vit que d’ariettes et de fredons ; c’est le mérite des Romains d’aujourd’hui , la grand-messe et les opéras font leur gloire. Ils ont des faiseurs de doubles croches, au lieu de Cicérons et de Virgiles , leurs voix charmantes ravissent tout un auditoire en a, en e, en i, et en o.

Je suis persuadé, monsieur, qu’en unissant ensemble le mérite français et le mérite italien, autant que le génie de la langue le comporte, et en ne vous bornant pas au vain plaisir de la difficulté surmontée, vous pourrez faire un excellent ouvrage sur un très médiocre canevas. Il y a heureusement peu de récitatif dans les quatre premiers actes ; il paraît même se prêter aisément à être mesuré et coupé par des ariettes.

Au reste, si vous voulez vous amuser à mettre le péché originel en musique 4, vous sentez bien, monsieur, que vous serez le maître d’arranger le jardin d’Éden tout comme il vous plaira ; coupez, taillez mes bosquets à votre fantaisie, ne vous gênez sur rien. Je ne sais plus quelle dame de la cour, en écrivant en vers au duc d’Orléans régent, mit à la fin de sa lettre : « Allongez les trop courts, et rognez les trop longs, vous les trouverez tous fort bons. »

Vous écourterez donc, monsieur, tout ce qui vous plaira ; vous disposerez de tout. Le poète d’opéra doit être très humblement soumis au musicien ; vous n’aurez qu’à me donner vos ordres, et je les exécuterai comme je pourrai. Il est vrai que je suis vieux et malade, mais je ferai des efforts pour vous plaire, et pour vous mettre bien à votre aise.

Vous me faites un grand plaisir de me dire que vous aimez M. Thomas ; un homme de votre mérite doit sentir le sien. Il a une bien belle imagination guidée par la philosophie ; il pense fortement, il écrit de même. S’il ne voyageait pas actuellement avec Pierre-le-Grand 5, je le prierais d’animer Pandore de ce feu de Prométhée dont il a une si bonne provision ; mais la vôtre vous suffira . Le peu que j’en avais n’est plus que cendres -- soufflez dessus, et vous en ferez peut-être sortir encore quelques étincelles. Si j’avais autant de génie que j’ai de reconnaissance de vos bontés, je ressemblerais à l’auteur d’Armide 6 ou à celui de Castor et Pollux 7.

J’ai l’honneur d’être avec les sentiments les plus respectueux, monsieur, [...] »

 

1 Minute corrigée par V* . Dans la marge du haut de la quatrième page, V* a noté , sans doute en vue d'un remaniement ces indications, qui n'apparaissent que dans cette minute : « Question sur le récitatif de Pandore / 1er couplet / Peut-on répéter deux fois je vous appelle en vain ? On ne s'est pas encore avisé de ces répétitions . Il me semble qu'elles feraient un bon effet ./ Avant ce vers Oiseaux, tendres oiseaux, etc., ne peut-on pas faire entendre une symphonie imitative ? / Ne faut-il pas un grand temps entre les deux derniers vers ? / Ces répétitions, ces symphonies, ces repos ne rompent-ils pas heureusement l'uniformité du récitatif ? »

Laborde, premier valet de chambre du roi, a écrit à V* le 26 octobre 1765 pour lui demander la permission de mettre Pandore en musique .

Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Benjamin_de_La_Borde

et https://journals.openedition.org/anabases/4706#ftn4

et page 15 https://sup.sorbonne-universite.fr/sites/default/files/public/files/product-preview/revue_voltaire_14-extrait.pdf

4 Avec Pandore .

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26/02/2021 | Lien permanent

J'ai l'Histoire universelle et une demi lieue de pays à défricher, et des marais à dessécher, et un curé à mettre aux ga

... On n'est riche que de ses amis : https://www.youtube.com/watch?v=jLg6uTT5izo&ebc=ANyPx...

C'est dit !

 

DSCF8462 riche de ses amis.JPG

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

19 mars [1761] à Ferney 1

C'est pourtant aujourd'hui le jeudi de l'absoute mes chers anges, et Lekain n'est point arrivé . J'ai ouï dire des choses qui percent le cœur . Est-il donc bien vrai que Lekain ait été en prison 2 pour n'avoir eu un congé que de M. le duc d'Aumont et pour n'en avoir pris deux ? Mlle Corneille avait appris trois rôles, notre théâtre était tout arrangé, et surtout nous nous attendions à voir Lekain muni de vos lettres et de vos ordres . Toutes ces belles espérances ont été détruites par la noble sévérité du premier gentilhomme de la chambre .

J’espérais encore que Lekain m'apporterait une édition de ce Tancrède qui doit tant à vos bontés, et de cette petite vengeance que j'ai tirée de l'outrecuidance anglaise . Le Prault petit-fils est un petit drôle, il va criant que cette justification de Corneille, que ce plaidoyer contre Shakespeare, que cette préférence donnée à la politesse française sur la barbarie anglaise 3 est un ouvrage de votre créature des Alpes . Ce Prault est peu discret d'avoir dit mon secret 4 . Ce Prault a joué d'un tour à Cramer . Il y a un nouveau tome tout garni de facéties, c'est Candide, Socrate , L’Écossaise, et choses hardies 5. Envoyez-moi ce tome par la poste, écrit Prault à Cramer, afin que je juge de son mérite, et que je voie si je peux me charge[r] de 1500 de vos exemplaires . Cramer envoie son tome comme un sot . Prault l'imprime en deux jours 6, et probablement y met mon nom pour me faire brûler par Omer . Ah mes chers anges que ce coquin ôte mon nom ! Il ne faut pas être brûlé tous les six mois .

Mes chers anges il est vrai que j'ai un beau sujet 7, que je pense pouvoir donner un peu de force à la tragédie française, que j'imagine qu'il y a encore une route, que je ressemble à l'ingénieur du roi de Parsingue 8 qui s'avisait de toutes sortes de sottises . Mais attendons le moment de l'inspiration pour travailler . Je suis à présent dans les horreurs de L'Histoire générale qu'on réimprime . Mais que de changements! le tableau n’était qu'en miniature ; il est en grand . Mes anges verront le genre humain dans toute sa turpitude, dans toute sa démence . Omer frémira . Je m'en moque . Omer n'aura jamais un aussi joli château que moi, ni de si agréables jardins . Des vignes en festons à perte de vue : quatre jardins champêtres aux quatre points cardinaux, la maison au milieu presque rien de régulier Dieu merci . Ma tragédie sera plus régulière, mais aussi neuve .

Laissez-moi faire . Plus je vieillis plus je suis hardi . Mes chers anges soyez aussi hardis, faites jouer Oreste ; faites une brigue je vous en prie, qu'on entende les cris de Clytemnestre, que Clairon et Mesnil joutent, que Lekain fasse frissonner . Les comédiens me doivent cette complaisance ; vous m'allez dire Fanime, Fanime . Eh bien il est vrai que Fanime, Énide, et le père, sont d'assez beaux rôles ; mais l'amant est un benêt, soyez-en sûrs . Il faut que je donne une meilleure éducation à ce fat . Il faut du temps . J'ai l'Histoire universelle et une demi lieue de pays à défricher, et des marais à dessécher, et un curé à mettre aux galères . Tout cela prend quelques heures d'un pauvre malade .

Voici une Épître sur l’agriculture dont vous ne vous soucierez point . Vous n'aimez pas la chose rustique, et j'en suis fou . J'aime mes bœufs, je les caresse, ils me font des mines . Je me suis fait faire une paire de sabots, mais si vous faites jouer Oreste, je les troquerai contre deux cothurnes sous l'ombrage de vos ailes .

V.

Et vos yeux ? Parlez-moi de vos yeux .9

 

J'ajoute vraiment une requête bien importante à ma très longue lettre ; même deux requêtes, la première, comment puis-je obtenir quelque recommandation auprès de mon nouvel intendant M. de Villeneuve, et qui est ce M. de Villeneuve ? Je suis bien auprès de mon curé, de mon évêque, de mon gouverneur . Il me manque l'intendance . La seconde requête est que Prault petit-fils ne s'avise pas de mettre mon nom ni même un fatal V à un volume que les Cramer lui envoient . Ces Cramer mettent des V très hardiment, ils sont genevois, ils ne craignent rien . Prault petit-fils n'est que français ; il doit être humble, et surtout adroit . Il ne doit point demander de permission, il ne doit point paraître .

Ce volume contient L’Écossaise, Socrate, mais Socrate hardi ; Candide, mais Candide renforcé 10, un chapitre sur la tolérance, un sur les bacheliers et sur les sauvages, un sur les allégories, un sur la pluralité des dieux ; et l'Ecclésiaste, et le Cantique des cantiques avec une préface foudroyante . Je veux bien qu'Omer fasse brûler tout cela, mais je ne veux pas qu'on brûle V . On encagerait le petit-fils Prault, pauvre enfant de Paris qui ne doute de rien et on fermerait sa boutique .

Je supplie instamment mes divins anges d'envoyer chercher le petit-fils et de vouloir bien lui recommander sur les yeux de sa tête de ne point mettre le dangereux V en évidence .

Le titre doit être Nouveau volume pour être joint aux autres . Ce titre est plus piquant, et personne n'est compromis, on ne voit point de V dans les arrêts de parlement . Tout cela est misérable .

Précis de mes humbles requêtes .

À quand Tancrède ?

Protection de M. le duc de Choiseul auprès de M. de Villeneuve .

Remontrances à Prault petit-fils .

Lettre à Pierre Corneille .

Assurance à M. l'abbé de La Tour du Pin 11 que sa nièce ou cousine 12 entend la messe régulièrement comme dans son couvent . »

 

1 Pour le quantième, V* avait d'abord écrit 18 .

2 Fausse nouvelle .

3 V* a d'abord écrit française rayé .

4 Vers de Quinault dans Alceste , I, 4 : voir page 13 : Céphise : « Lychas est peu discret ... » : https://books.google.fr/books?id=ejxuGzV5Fa4C&pg=PA51...

6 V* devait avoir reçu des nouvelles inexactes de la Troisième Suite ; voir lettre du 15 mars 1761 à Prault : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/03/02/je-n-avoue-aucune-des-pieces-que-ce-livre-contient-et-que-je-5768313.html

8 Du roi de Prusse ; on retrouve la même dénomination (imprimée Narsingue) dans le Rescrit de l'empereur de Chine à l'occasion de la paix perpétuelle, que V* écrivait alors à la suite de la publication de l'Extrait du projet de paix perpétuelle de M. l'abbé de Saint-Pierre par P. Rousseau . La référence du Rescrit …. montre que V* désigne Maupertuis « ingénieur » du roi de Prusse .

9 Ici s'arrête la quatrième page, et, conséquemment le texte des éditions antérieures .

10 Précision importante pour l'histoire de Candide .

12 Ou cousine est ajouté au-dessus de la ligne .

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05/03/2016 | Lien permanent

le commerce de l'esprit ira toujours en décadence quand les commis à la phrase retourneront vos poches à la douane des p

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

 

Ferney ce 15 janvier 1773

 

Raton convient que Bertrand i a raison par sa lettre du 9 janvier ii. Bertrand a mis le doigt sur la plaie ; mais il faut qu'il sache qu'on a retranché à Raton deux scènes assez intéressantes auxquelles il a été obligé de substituer des longueurs . On ne fera jamais rien de passable, et le commerce de l'esprit ira toujours en décadence quand les commis à la phrase retourneront vos poches à la douane des pensées. C'est dommage, car le sujet est heureux, et il a donné lieu à des notes qui feront dresser les cheveux à la tête des honnêtes gens, à moins qu'ils ne soient chauves iii.

On reconnaissait les boeufs-tigres iv dans une des scènes supprimées. C'est une plaisante contradiction d'avoir chassé ces bœufs, et de ne vouloir pas que l'on parle de leurs cornes.

M.Belleguier v m'a écrit que vous auriez reçu son discours pour les prix de l'université, il y a plus de huit jours, si les typographes n'avaient pas été fort inquiétés à Montpellier, où sa drôlerie s'imprime. Ce M. Belleguier n'est point plaisant ; ou du moins il n'a pas cru que l'on dût plaisanter dans cette affaire. Il est quelquefois un peu ironique, mais il prouve tout ce qu'il dit par des faits authentiques, auxquels il n'y a pas le petit mot à répondre . Je ne crois pas qu 'il ait le prix, car ce n'est pas la vérité qui le donne. La pauvre diablesse est toujours au fond de son puits, où elle crie : croyez cela et buvez de l'eau.

Je vous embrasse bien tendrement.

Raton. »


i Raton = Voltaire ; Bertrand = d'Alembert.

ii Page 214-217 lettre du 9 janvier 1773 de d'Alembert : « J'ai lu les Lois de Minos ; le sujet est beau, mais je crains pour le cinquième acte ... » http://books.google.fr/books?id=7j8HAAAAQAAJ&pg=PA214&lpg=PA214&dq=alembe...

iii Cf. lettre du 3 février à l'abbé Voisenon, du 8 et 22 février à Thibouville :  la pièce « était faite pour fournir des notes sur les sacrifices de sang humain, et sur toutes les horreurs religieuses » , à La Harpe le 29 mars : ce sont « des sacrifices du temps passé et du temps présent »

Lettres pages 684, 687, 690 : http://books.google.fr/books?id=sSsTAAAAQAAJ&pg=PA687...

iv Le « boeuf-tigre » Pasquier responsable de condamnations, prononcées par l'ancien parlement, suite à ses réquisitoires ; cf. lettre à d'Alembert du 16 septembre 1766 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/16/c...

v Prétendu auteur dont il est question dans les lettres du 1er et 4 janvier . http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/01/02/j...

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/01/04/c...

 

 

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15/01/2011 | Lien permanent

Je ne suis point rétif, point opiniâtre, point amoureux de ma statue. Quand je ne corrige pas, c’est que je ne trouve pa

... Ainsi aimerais-je faire aussi !

 

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Brain storming ?

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

27è juillet [1763] 1

Mes divins anges, Dieu soit loué, et Lekain .2 Je suis fort aise que votre nation soit assez ferme pour soutenir une tragédie sans femme  . Cette aventure est fort à l’honneur des acteurs. Lekain m’a écrit une jolie lettre sur cette affaire . S’il se met à avoir de l’esprit, il ne lui manquera rien.

Vraiment je serai fort aise que M. de Praslin s’amuse de mes coupe-jarrets . Mais il y a un rôle de Fulvie dont je ne suis pas content aux premiers actes . La vérité historique m’avait induit en erreur. Il est vrai que la femme d’Antoine avait eu une passade avec Octave ; mais ce trait historique n’est point du tout tragique. Je ne crois pas qu’une femme répudiée par son mari, et abandonnée par son amant, puisse jamais jouer un beau rôle. Je me complaisais à peindre toute la licence de ces temps de cruauté et de débauche. J’ai été trop loin, et j’ai avili Fulvie en peignant les triumvirs tels qu’ils étaient. En un mot, il faut retoucher le rôle de Fulvie. La pièce, à cela près, vous paraît-elle aller un peu ? S’il y a quelque chose de mauvais, dites-le-moi ; s’il y a du bon, dites-le moi aussi. Je ne suis point rétif, point opiniâtre, point amoureux de ma statue. Quand je ne corrige pas, c’est que je ne trouve pas . La bonne volonté ne me manque point, mais bien l’imagination . On n’a pas toujours des idées à commandement . C’est un coup de la grâce ; elle vient quand il lui plaît ; elle est, comme l’amour, très volontaire.

J'écrirai à M. de Chauvelin ; mais je vous ai déjà dit que j'ai peu de temps et puis quand on n'a rien de nouveau à dire à quoi sert d'importuner les gens ? Il faut que les lettres aient un objet .

Je vous promets le secret . Il n’y aura point de Thieriot dans cette affaire. La nymphe Clairon n’aura pas, je crois, de rôle dans mes coupe-jarrets . Julie est trop jeune, Fulvie trop peu de chose. Ce ne sera jamais qu’une femme qui veut se venger, et ce n’est pas assez pour un premier rôle . Il faudrait des passions plus tragiques. Fulvie réussirait à Londres . On y aime les caractères de toute espèce dès qu’ils sont dans la nature . Nous sommes plus délicats et plus dégoûtés.

Mes anges, dès que vous aurez passé légèrement sur le rôle de Fulvie avec M. le duc de Praslin, et que vous aurez daigné examiner le reste, renvoyez-moi ma drogue.

Mais est-il vrai que le feu couve sous la cendre en Russie ? qu’il y a un grand parti en faveur de l’empereur Ivan 3 , que ma chère impératrice sera détrônée, et que nous aurons un nouveau sujet de tragédie ?

Respect et tendresse .»

1 L'édition de Kehl donne une lettre sans le 3è paragraphe rayé sur la copie Beaumarchais, mais grossie d'extraits de la lettre du 26 juillet 1763 ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/06/correspondance-annee-1763-partie-24.html

2 La Mort de César, reprise le 18 juillet 1763 avec Lekain dans le rôle de Brutus aura cinq représentations .

3 Ivan fut assassiné l’année suivante.

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12/07/2018 | Lien permanent

il dit peu de chose, il ne m’apprend rien, et me laisse dans ma rage

... ... Qui donc ? le gouvernement .

A qui ? à la Fondation Abbé Pierre qui ne peut que sonner l'alarme encore et toujours face à la recrudescence des expulsions locatives, véritable plaie sociale pour laquelle nulle solution valable n'est donnée : https://www.20minutes.fr/societe/3157119-20211025-logemen...

Que disent les candidats à la présidentielle ? Rien .

Qui serait/sera capable de sacrifier une part de son budget de campagne pour donner quelque secours aux nécessiteux ? Les millions jetés larga manu et inutilement aux sociétés de sondages pourraient , je crois, être plus justement employés ; trop beau pour être vrai .

Nos outils de prévention d'expulsion locative | Fondation Abbé Pierre

https://www.fondation-abbe-pierre.fr/outils-et-informations/procedure-expulsion-pour-impaye

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

30 de juillet [1766]

Ma rage vous embrasse toujours tendrement, mon cher et aimable philosophe. Il m’a tant passé d’horreurs par les mains depuis quelques jours que je ne sais plus ce que je vous ai écrit. Vous ai-je mandé que j’avais obtenu de frère Frédéric une gratification pour les Sirven ? Cette goutte de baume sur tant de blessures faites à la raison et à l’innocence, m’a un peu soulagé, mais ne m’a pas guéri. Je suis honteux d’être si sensible et si vif à mon âge. Je m’afflige du tremblement de terre à Constantinople 1, tandis que vous examinez gaiement combien il faut de parties sulfureuses pour renverser une ville dont les dimensions sont données. Je pleure les gens dont on arrache la langue, tandis que vous vous servez de la vôtre pour dire des choses très agréables et très plaisantes. Vous digérez donc bien, mon cher philosophe ; et moi je ne digère pas. Vous êtes encore jeune, et moi je suis un vieux malade ; pardonnez à ma tristesse. Je viens de voir dans la Gazette de France un article du tonnerre qui a pulvérisé une vieille femme ; et le tonnerre n’est point tombé sur les juges d’Abbeville ! Comment cela peut-il se souffrir ?

Si vous savez quelque chose sur Polyeucte et Néarque 2 daignez m’en écrire un petit mot aux eaux de Rolle.

J’ai vu le mémoire des huit avocats 3; il dit peu de chose, il ne m’apprend rien, et me laisse dans ma rage.

Les plénipotentiaires viennent de commencer leurs opérations à Genève, en déclarant Jean-Jacques Rousseau un calomniateur infâme 4. Un parti vient de faire un libelle abominable contre tous les particuliers de l’autre parti. On cherche à pendre l’auteur du libelle. Vernet a fait un nouveau mémoire, mais il ne trouve personne qui veuille l’imprimer ; les libraires y ont été déjà attrapés.

Vivez gaiement, mon grand philosophe ; mais pourquoi les gens qui pensent ne vivent-ils pas ensemble ? »

1 Ressenti à plusieurs reprises du 22 mai au 16 juin 1766, puis le 1er et enfin le 5 juillet ; voir Robert Mallet « Third report on the Facts of Earthquake Phenomena », 1853, British Association for the Advancement of Science : Report […] 1853. Voir : https://www.researchgate.net/publication/274244963_Prevalence_of_Earthquake_Lights_Associated_with_Rift_Environments

2 La Barre et d’Étallonde.

4 A la page 3 de la déclaration des médiateurs du 25 juillet 1766 .

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26/10/2021 | Lien permanent

Je n'ai jamais vu d'ailleurs d'ouvrage plus digne à la fois de mépris et de châtiment; mais je crois à présent le parlem

 ... Comme celui de Richard Millet (chez Gallimard), intitulé "Eloge littéraire d'Anders Breivik" .

Voir : http://www.lemonde.fr/livres/article/2012/08/27/l-apologie-de-breivik-par-richard-millet-cree-la-polemique-chez-gallimard_1751851_3260.html

et bien sûr ne pas manquer Patrick Besson : http://www.lepoint.fr/editos-du-point/patrick-besson/saint-germain-des-pres-zone-urbaine-sensible-06-09-2012-1503310_71.php

 Ci-dessous mon "Eloge de l'oeuvre de Richard Millet"

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 Sous titre : "Vision du futur de la dite oeuvre : Garbage !"

 

 

 

« A M. le comte d'ARGENTAL.

Aux Délices, 20 décembre [1756].

Mon cher ange, j'ai vu cette infamie que l'on impute à La Beaumelle, et que je n'impute qu'à un diable, et à un sot diable. Il y a deux endroits assez piquants contre moi dans cette rapsodie digne des halles 1, qu'on a osé imprimer sous mon nom. Je n'ai jamais vu d'ailleurs d'ouvrage plus digne à la fois de mépris et de châtiment; mais je crois à présent le parlement et le public occupés de soins plus pressants que celui de juger un petit libelle 2. Je me console par la juste espérance que les honnêtes gens et les gens de goût me rendront justice. Vous y contribuez plus que personne, vos amis vous secondent il serait bien étrange que la vérité ne triomphât pas, quand c'est vous qui l'annoncez.
Si cette affreuse calomnie a des suites, je suis très-sûr que vous serez le premier à m'en instruire. Je crois qu'à présent je n'ai rien à faire qu'à déplorer tranquillement la méchanceté des hommes. M. le duc de La Vallière m'a mandé les mêmes choses que vous il veut bien se charger d'assurer Mme de Pompadour de mon attachement et de ma reconnaissance pour ses bontés, et il répond qu'elle ne prêtera point l'oreille à la calomnie 3.
Ce n'est pas assurément le temps que M. le maréchal de Richelieu entame ce que votre amitié généreuse lui a suggéré, et je suis bien loin de lui laisser seulement envisager que je veuille mettre ses bontés à l'épreuve 4. Pour Rome sauvée et les autres pièces, ce sont là des choses qu'on peut demander hardiment. Je n'y ai pas manqué, et j'espère que vous vous joindrez à moi.
Zulime ne sera plus Zulime, elle changera de nom sans changer de caractère 5. Le lieu de la scène ne sera plus le même. Il y aura quelques scènes nouvelles; et, comme les deux derniers actes sont absolument différents de ceux qui furent joués, la pièce sera en effet toute neuve. Le reste viendra quand il pourra, quand j'aurai de la santé, de la force, de la tranquillité; quand la calomnie ne viendra plus assiéger mon ermitage, désoler mon coeur, et éteindre mon pauvre génie. Je vous embrasse avec larmes, mon respectable ami.
Il n'est pas douteux que La Beaumelle n'ait été l'auteur et l'éditeur, avec ses associés, de cet abominable ouvrage; je le reconnais à cent traits. Voilà pour la seconde fois qu'il fait imprimer mes propres ouvrages 6 farcis de tout ce que sa rage pouvait lui dicter. Il y a des horreurs contre le roi même. Leur platitude ne les rend pas moins criminelles. Ce libelle est un crime de lèse-majesté, et il se vend impunément dans Paris. »

 1 Une version de La Pucelle .

3 Allusion aux vers qui commencent ainsi, dans les variantes du chant II de la Pucelle:
Telle plutôt cette heureuse grisette

Que la nature ainsi que l’art forma

Pour le b….. ou bien pour l’Opéra,

Qu’une maman avisée et discrète

Au noble lit d’un fermier éleva,

Et que l’amour, d’une main plus adrète,

Sous un monarque entre deux draps plaça.

6 Le Siècle de Louis XIV et, plus récemment, La Pucelle.

 

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