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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

On parle d'arrangements de finances qui dérangeront furieusement les particuliers

... Ah ! ce cher Voltaire ! mais comment fait-il pour nous décrire avec 350 ans d'avance ce qui attend la Grèce et ses fils d'evzones ?

http://www.capital.fr/a-la-une/politique-economique/les-concessions-de-la-grece-pour-obtenir-l-aide-des-europeens-1015357

"Lutter contre la fraude, l'évasion fiscale, la contrebande" ! mais de quoi vont-ils vivre désormais ; quels autres métiers connaissent-ils ? comment rééduquer un peuple pour qui la fraude est estimable ? un sevrage avec huile et pain sec ?

Le régime crétois ayant fait fondre la graisse des gros touristes , ne saurait-il pas engraisser les maigres grecs aux maigres revenus, victimes des potentats de la triche ?  

Zorba and C° , vous chantiez (et Mélanchon riait de se voir si beau en votre miroir), j'en suis fort aise , eh  bien ,  dansez maintenant , et sans faux pas s'il vous plait .

 JAMAIS LE DIMANCHE - French Poster.jpeg

 

 

« A Nicolas-Claude THIERIOT.
Aux Délices, 22 février [1760].
On reconnaît ses amis au besoin : il faut que vous me disiez absolument ce que c'était que cette lettre de change du révérend père de Sacy 1, de la compagnie de Jésus et de Judas. Il faut aussi
que vous ayez la bonté de me faire avoir, par le moyen de M. Bouret, les Œuvres du poëte-roi. Je n'entends pas par là les Psaumes de David, mais bien la prose et les vers de Sa Majesté prussienne.
Il n'est plus guère Majesté prussienne, attendu que les Russes lui ont raflé la Prusse ; il est encore électeur de Brandebourg, mais peut-être ne le sera-t-il pas longtemps. Je serai fort flatté d'avoir
mis la main à ses ouvrages, s'ils durent un peu plus que son royaume.
A-t-on joué Spartacus 2, et M. Lefranc de Pompignan a-t-il fait un bel éloge de Maupertuis ?3 A-t-il bien prôné la religion de cet athée? A-t-il fait de belles invectives contre les déistes de nos jours ?
Je vous prie, mon cher ami, de me mettre un peu au fait.
J'ai beau exalter mon âme pour lire dans l'avenir, comme feu Moreau-Maupertuis, je ne peux deviner ce que deviendront nos fortunes. On parle d'arrangements de finances qui dérangeront furieusement les particuliers. Si, avec cela, on peut avoir des flottes contre les Anglais, et des grenadiers contre le prince Ferdinand, il ne faudra pas regretter son argent.
Je n'ai point été surpris de voir qu'il n'y ait que quinze conseillers au parlement qui aient porté leur vaisselle; mais je suis fâché que sur plus de vingt mille hommes qui en ont à Paris, il ne se soit trouvé que quinze cents citoyens qui aient imité Mlle Hus et le roi 4.
On dit que le parlement fera brûler les Œuvres du roi de Prusse : c'est une plaisanterie digne de notre siècle; il vaudrait mieux brûler Magdebourg; mais malheureusement on y rôtirait l'abbé de Prades, qui est dans un cachot de la citadelle, et je n'aime point qu'on brûle les bons chrétiens.
Je vous embrasse de tout mon cœur. »

2 Le Spartacus de Saurin a été joué le 20 février avec succès ; voir aussi lettre du 24 octobre 1759 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/10/24/on-paye-cher-les-malheurs-de-nos-generaux.html

3 Jean-Jacques Lefranc de Pompignan , premier président de la cour des aides à Montauban avait été élu au fauteuil de Maupertuis à l'Académie française . Il prononça l'éloge de ce dernier le 10 mars 1760 ; son discours constituait une attaque courageuse contre les philosophes, qui devait déclencher la longue « campagne des monosyllabes »de V* contre lui . Voir lettre du 25 mars 1760 à Gabriel Cramer : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/03/27/la-lettre-a-laquelle-je-reponds-est-d-un-cuistre-de-ministre.html

 

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25/02/2015 | Lien permanent

assurer l'honneur de rendre notre langue, la langue des étrangers, et puisque c'est la seule gloire qui nous reste, il n

... Parler français, j'espère qu'on l'entendra depuis Rio, et pas seulement dans les sports où c'est officiel .

http://franceolympique.com/art/831-le_francais,_langue_ol...

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Tchin tchin !

 

 

 

« A Jean Pâris de Montmartel

Au château de Ferney, par Genève

27è august 1761

Monsieur, deux jours avant que je reçusse l'honneur de votre lettre du 20è auguste 1, j'en reçus une de monsieur le contrôleur général, dans laquelle il me disait que vu les difficulté des temps, il ne pouvait me donner que des billets royaux . Je n'ai que trop de ces effets, ayant mis malheureusement en billets de loterie, en annuités, etc., la plus grande partie du bien dont je pouvais disposer . On ne s’attendait pas alors aux revers funestes qui nous ont accablés . Je conçois quel est le fardeau de monsieur le contrôleur général, surtout quel est le vôtre . Je sens bien que mon entreprise serait plus convenable en temps de paix, quelque médiocre qu’elle soit, et s'il ne s'agissait que d'attendre quelques mois cette paix si nécessaire, je différerais l'exécution de mes engagements . Mais ma proposition a été reçue avec tant d'empressement dans toute l'Europe, que je ne peux différer longtemps .

L'entreprise est assez honorable pour la nation . Elle contribue à nous assurer l'honneur de rendre notre langue, la langue des étrangers, et puisque c'est la seule gloire qui nous reste, il ne faut pas la négliger .

Permettez-moi donc de vous importuner encore, pour savoir quels effets je pourrais prendre . Je supporterais volontiers la perte qu'on pourrait y faire ; et vous pourriez aisément avoir la bonté de faire cet arrangement . Ne pourrait-on pas, par exemple, me donner pour quatre cents louis d'effets, pour m'être délivrés dans six mois ? Ces effets demeureraient entre vos mains .

En ce cas, ne pourriez-vous pas avoir la bonté de fournir pour trois cents louis de billets, payables dans trois termes, cent louis dans trois mois, cent dans six mois, et cent dans neuf ? Je me rendrais même responsable de ces trois cents louis, et l'on tirerait des cent autres ce qu'on pourrait . C'est un objet bien médiocre .

Mais l'entreprise qu'on se propose, étant d'environ cinquante mille francs , et ayant résolu de ne pas recevoir un sou du public avant l'exécution, nous sommes obligés de nous assurer quelques secours . Je vous demande en grâce que la modicité de l'objet ne vous rebute pas, vous ferez une très belle action dont le public vous saura gré ; c'est une chose à laquelle vous êtes accoutumé .

Je suis bien aise de vous dire une petite anecdote ; c'est que le plus grand et le plus solide protecteur qu'ait eu Corneille de son vivant, était comme vous garde du trésor royal ; il s'appelait M. de Montauron 2. Je suis persuadé que vous pensez comme lui, et vous en avez donné des preuves . Vous me ferez un plaisir extrême de prendre cette bagatelle à cœur ; vous en aurez de la gloire, et il en coûtera peu d'argent , c'est faire un bon marché . Rien de vous est plus aisé que de voir quels effets royaux je peux prendre, et de vous arranger en conséquence .

Pardonnez-moi mon importunité, et la longueur de ma lettre, et comptez que je serai toute ma vie, avec la plus tendre reconnaissance, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur .

Voltaire . »

1 Cette lettre n'est pas connue .

2 C'est à Pierre-Puget de Montauron, trésorier de l'épargne, qui «  par une libéralité inouïe en ce siècle s'est rendu toutes le smuses redevables », que Corneille dédia Cinna .Voir page 123 : https://books.google.fr/books?id=KoMOAAAAQAAJ&pg=RA1-PA123&lpg=RA1-PA123&dq=montauron&source=bl&ots=AIwJhPIMtN&sig=LftFbV0zs8tw5XQ8AMZ2MPmiEqU&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiame6MpabOAhXE0RoKHeDyARsQ6AEIKzAB#v=onepage&q=montauron&f=false

et : http://www.valmorency.fr/72.html

 

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04/08/2016 | Lien permanent

Je suis aussi lévrier qu'autrefois, toujours impatient, obstiné, ayant autant de défauts que vous avez de vertus, mais a

... Beau constat

 

 

« A Claude-Philippe Fyot de La Marche

Au château de Ferney pays de Gex

18 janvier 1761 1

M. de Ruffey, monsieur, m'a fait verser des larmes de joie en m'apprenant que vous vouliez bien vous ressouvenir de moi, et que vous vous rendiez à la société dont vous avez toujours fait le charme . Mon cœur est encore tout ému en vous écrivant . Songez-vous bien qu'il y a près de soixante ans que je vous suis attaché ? Mes cheveux ont blanchi, mes dents sont tombées, mais mon cœur est jeune . Je suis tenté de franchir les monts et les neiges qui nous séparent, et de venir vous embrasser . J'ai honte de vous avouer que je me regarde dans mes retraites comme un des plus heureux hommes du monde . Mais vous méritez de l'être plus que moi, et je vous avertis que je cesse de l'être, si vous ne l'êtes pas . Vous êtes honoré, aimé, je vous connais une très belle âme, un âme charmante, juste , éclairée, sensible . Je peux dire de vous

gratia fama valetudo contongit abunde

quid voveat majus nutricula dulci alumno ?2

mais je ne vous dirai pas

me pinguem ac nitidum bene curata cute vises 3.

Je suis aussi lévrier qu'autrefois, toujours impatient, obstiné, ayant autant de défauts que vous avez de vertus, mais aimant toujours les lettres à la folie, ayant associé aux muses Cérès et Pomone et Bacchus même, car il y a aussi du vin dans mon petit territoire . Joignant à tout cela un peu de Vitruve, j'ai bâti, j'ai planté tard, mais je jouis . Le roi m'a daigné combler de bienfaits . Il m'a conservé la place de son gentilhomme ordinaire . Il a accordé à mes terres des privilèges que je n'osais demander . Je ne prends la liberté de vous rendre compte de ma situation que parce que vous avez daigné toujours vous intéresser un peu à moi . Je suis si plein de vous que j'imagine que vous me pardonnerez de vous parler un peu de moi-même .

Monsieur le procureur général 4, monsieur, me mande que vous lui avez donné Tancrède 5 à lire . Il est donc aussi musarum cultor 6; mais quels Tancrède, s'il-vous-plait ? Si ce n'est pas Mme de Courteilles 7 ou M. d'Argental qui vous a envoyé cette rapsodie, vous ne tenez rien . Il y a une copie absurde qui court le monde . Si c'est cet enfant supposé qu'on vous a donné, je vous demande en grâce de le renier auprès de monsieur le procureur général , car je ne veux pas qu'il ait mauvaise opinion de moi . J'ai envie de lui plaire .

L'affaire du curé de Moens, pays de Gex, est bien étrange . Quoi, les complices décrétés de prise de corps, et le chef ajourné ! Tantum relligio potuit suadere 8!

Agréez le très tendre respect et l'attachement jusqu'à la mort de votre vieux camarade .

Volt. »

 

1L’édition Lettres inédites, très inexacte la date de juillet, ce qui sera corrigé par Clogenson .

2 La faveur, la renommée, la santé lui échoient en abondance ; que demanderait le mieux la nourrice pour son tendre nourrisson ? ; d'après Horace, Épîtres , I, 4, 10, 8 .

3 Tu me verras gras, brillant, la peau bien soignée . Ibd. , I, 4, 15 .

4 Carré de Quintin, procureur général de Bourgogne .

5 En manuscrit , comme le montre la suite ici .

6 Adepte des muses .

7 Madeleine de Courteilles, fille de la correspondante de V* .

8 Tant la religion a pu inspirer [de maux] ; d'après Lucrèce, De la nature, I, 101 .

 

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18/01/2016 | Lien permanent

Puissent les frères être toujours unis contre les méchants ! Qu’ils fassent seulement pour l’intérêt de la raison la dix

... La charge de travail est immense et je suis encore abasourdi par les déclarations du pape François qui sont un sommet de débilité infantile ; soit il est de bonne foi et digne des petites- maisons, soit il veut nous tromper et il est digne de la prison . C'est du grand Guignol, Jésus-Christ crie et Satan tente , le père Noël grimace et le Père Fouettard jubile, paroles d'experts inexcusables ; décidément toutes les religions nous prennent pour des abrutis , c'est le gagne-pain de ces sectes .

Dédicace à tous ceux qui croient à la poupée qui tousse et aux croquemitaines : https://www.youtube.com/watch?v=TasfaJRD4c8

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Le diable est franchement [bi]sexué, mais  que cherchent ces mains en dessous de la ceinture du pape ?

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

15 février 1764

Ah, mons Crevier 1! ah, pédant ! ah, cuistre ! vous aurez sur les oreilles ; vous l’avez bien mérité, et nous travaillons actuellement à votre procès. Vous entendrez parler de nous avant qu’il soit peu, mons Crevier.

Mes chers frères auront des contes de toutes les façons . Un peu de patience, et tout viendra à la fois. J’ai reçu la première partie des Lettres historiques sur les fonctions du parlement. Il est plaisant que cela paraisse imprimé à Amsterdam . Il faut que l’auteur croie avoir dit partout la vérité, puisqu’il a fait imprimer son livre hors de France. Je remercie bien mon cher frère, et j’espère qu’il aura la bonté de me faire tenir la seconde partie. Je fais venir souvent des livres sur leurs titres, et je suis bien trompé. Ils ressemblent presque tous aux remèdes des charlatans : on les prend sur l’étiquette, et on ne s’en porte pas mieux. Mais au moins il y a quelque chose de consolant dans les mauvais livres ; quelque mauvais qu’ils soient, on y peut trouver à profiter, et même dans celui du lourd Crevier contre le sautillant Montesquieu.

Tout ce que j’apprends des dispositions présentes conduit à croire qu’on ne fera pas mal de répandre quelques exemplaires de la Tolérance. Tout dépend de l’opinion que les premiers lecteurs en donneront. Il s’agit ici de servir la bonne cause, et je crois que mon cher frère ne s’y épargnera pas.

Je ne sais si je lui ai mandé que cet ouvrage avait déjà opéré la délivrance de quelques galériens condamnés pour avoir entendu, en plein champ, de mauvais sermons de sots prêtres calvinistes. Il est évident que nos frères ont fait du bien aux hommes. On brûle leurs ouvrages ; mais il faudra bientôt dire : adora quod incendîsti, incende quod adorasti 2. Puissent les frères être toujours unis contre les méchants ! Qu’ils fassent seulement pour l’intérêt de la raison la dixième partie de ce que les autres font pour l’intérêt de l’erreur, et ils triompheront.

On dit que le contrôleur-général a fait retrancher les pensions sur la cassette, supprimer les tables officiers de la maison, et diminuer les revenant-bons des financiers. Ces ménages de bouts de chandelles ne sont peut-être pas ce qui fait fleurir un État ; mais, si on encourage le commerce et l’agriculture, on pourra faire quelque chose de nous.

J’embrasse tendrement mon cher frère et les frères.

Ecr. l’inf. »

1 Mons n'est pas une abréviation de monsieur mais un terme de mépris pour un inférieur .

2 Paroles adressées à Clovis par Remigius lors de son baptême : adore ce que tu as brûlé ; brûle ce que tu as adoré .

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25/02/2019 | Lien permanent

pour saisir ce projet, il faut des hommes actifs, ingénieux, qui n'aient pas le préjugé grossier et dangereux du train o

... Actif, ingénieux, sans préjugé grossier :  je le suis  . Aussi vous parlerai-je du bidet ! Tout autant que Voltaire qui en était un partisan , et qui souligne dans sa lettre l'arrivée de son cousin , son petit cousin et leurs deux bidets .

Il est de coutume de dire qu'on ne prête ni sa femme ni son couteau (ni sa voiture ) , et au XVIIIè à chacun son bidet et les fesses seront bien (sauve)gardées .

http://fr.wikipedia.org/wiki/Bidet

http://www.liberation.fr/vous/0101150618-god-save-le-bidet-la-france-le-boude-il-est-du-dernier-cri-outre-manche

 http://clio-cr.clionautes.org/spip.php?article2517

Bidet_1_pompadour.jpg

 Bidet de la Pompadour avec qui il était à cul et à toi !

Je ne me résigne pas à vous faire écouter "sur mon bidet", mais pourtant je ne vous épargne pas "adada" , Bourvil étant un homme et un artiste que j'aime : http://www.deezer.com/track/8010795

Et une de mes favorites : http://www.deezer.com/track/3132356


PS- Certains esprits chagrins me diront que Voltaire a plutôt pensé à deux haridelles sur lesquelles ont chevauché ses cousins, et non pas qu'ils faisaient suivre dans leurs bagages des meubles de grande nécessité ; eh ! bien qu'ils me le prouvent !

 

 

« A Marie-Elisabeth de DOMPIERRE de FONTAINE. et Philippe-Antoine CLARIS, marquis de FLORIAN

Aux Délices, 31 mai [1757] 1.

Je vous dirai d'abord, ma chère nièce, que vous avez une santé d'athlète, dont je vous fais de très-sincères compliments; et que si jamais votre vieux malingre d'oncle se porte aussi bien que vous, il viendra vous trouver à Hornoy, ensuite vous saurez que Mme Denis était chargée d'envoyer trois cents livres à Daumart 2, dans sa province du Maine, quand il a débarqué chez vous, lui, son fils, et deux bidets. Je vous prie de lui dire que je lui donnerai trois cents livres tous les ans, à commencer à la Saint-Jean prochaine. Je vous enverrai un mandat à cet effet sur M. Delaleu 3, ou vous pourrez avancer cet argent sur les revenus du pupille, et sur la rente qu'il me fait cela est à votre choix, j'ignore ce qui convient au jeune Daumart; je sais seulement que cent écus lui conviendront. Trouvez bon que je m'en tienne à cette disposition, que j'avais déjà faite.
Mme Denis embellit tellement le lac de Genève qu'il reste peu de chose pour les arrière-cousins. Quant à ma bâtarde de Fanime, son protecteur, M. d'ArgentaI, vous dira que je ne prétends pas que cette amoureuse créature se produise sitôt dans le monde. Mlle de Ponthieu 4 y fait un si grand rôle, et ses compagnes se présentent avec tant d'empressement, qu'il faut ne se pas prodiguer. Quand même la pièce vaudrait quelque chose, ce ne serait pas assez de donner du bon, il faut le donner dans le bon temps.
A vous maintenant, monsieur le capitaine des chariots de guerre de Cyrus 5. Vous pouvez être sûr que je n'ai jamais écrit de ma vie à M. le maréchal d'Estrées, et que, s'il a été instruit de notre invention guerrière, ce ne peut être que par le ministère. J'aurais souhaité, pour vous et pour la France, que mon petit char eût été employé, cela ne coûte presque point de frais; il faut peu d'hommes, peu de chevaux, le mauvais succès ne peut mettre le désordre dans une ligne; quand le canon ennemi fracasserait tous vos chariots, ce qui est bien difficile, qu'arriverait- il ? ils vous serviraient de rempart, ils embarrasseraient la marche de l'ennemi qui viendrait à vous. En un mot, cette machine peut faire beaucoup de bien, et ne peut faire aucun mal : je la regarde, après l'invention de la poudre, comme l'instrument le plus sûr de la victoire 6.
Mais, pour saisir ce projet, il faut des hommes actifs, ingénieux, qui n'aient pas le préjugé grossier et dangereux du train ordinaire. C'est en s'éloignant de la route commune, c'est en faisant porter le dîner et le souper de la cavalerie sur des chariots, avant qu'il y eût de l'herbe sur la terre, que le roi de Prusse a pénétré en Bohême par quatre endroits, et qu'il inspire la terreur. Soyez sûr que le maréchal de Saxe se serait servi de nos chars de guerre. Mais c'est trop parler d'engins destructeurs, pour un pédant tel que j'ai l'honneur de l'être.
On a imprimé dans Paris une thèse de médecine 7 où l'on traite notre Esculape-Tronchin de charlatan et de coupeur de bourse. Il y a répondu par une lettre au doyen de la faculté 8, digne d'un grand homme comme lui. Il y répond encore mieux par les cures surprenantes qu'il fait tous les jours.
Une jeune fille fort riche a été inoculée ici par des ignorants, et est morte. Le lendemain vingt femmes se sont fait inoculer sous la direction de Tronchin, et se portent bien.
Je vous embrasse tous du meilleur de mon cœur. »


1 En fait V* ne rentra aux Délices que le 3 juin ; a-t-il antidaté sa lettre pour que sa nièce lui réponde à cette adresse  ? .

2 Arrière-cousin maternel de Voltaire.

3 Notaire de V* à Paris .

4 Adèle, comtesse de Ponthieu, pièce de Pierre-Antoine de La Place, jouée le 28 avril 1757 ; voir lettre du 18 mai à Cideville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/10/30/titre-de-la-note.html

5 Le marquis de Florian .

6 On verra l'importance des chars (blindés) dans les guerres du XXè siècle .

7 Maximilien-Joseph Leys , de Saint-Omer, rue Poupée, au coin de la rue Hautefeuille : Utrum ab hygieine sola repetenda sit morborum prophylaxis ? Paris 14 avril 1757 .Voir, auf Deutsch, : http://digisrv-1.biblio.etc.tu-bs.de:8080/docportal/servlets/MCRFileNodeServlet/DocPortal_derivate_00007592/ediss.pdf;jsessionid=1E36842D37003C46301B4C28DA48EB49

8 Jacques-Bénigne Winslow était doyen d'âge en 1757 : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques-B%C3%A9nigne_Winslow

 

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03/11/2012 | Lien permanent

On ne peut cesser d'être persécuteurs sans avoir cessé auparavant d'être absurdes

"je vous conjure d'immoler vos raisonnements au bien de la bonne cause. "

A combien de dirigeants et combien de temps faudra-t-il dire et ressasser cette phrase ?

 

Persécuteurs du monde entier, combien vous êtes absurdes !

 

Volti, ami, merci, tu as encore vu juste !

persecution img_1147968120021.jpg

 

 

Persécution :http://www.deezer.com/listen-4957040

Machines absurdes ; parce que j'aime bien William Sheller :http://www.deezer.com/listen-2277081

Singeries, que je vous recommande, dans "le meilleur des mondes" :http://www.deezer.com/listen-2277081

Toute ressemblance avec des personnes existantes , etc. ...

 

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

 

13 de février [1764]

 

Gardez-vous bien, mon très cher philosophe, d'alarmer la foi des fidèles par vos cruelles critiques i. Je ne vous demande pas de changer d'avis, parce que je sais que les philosophes sont têtus ; mais je vous conjure d'immoler vos raisonnements au bien de la bonne cause. Le bon homme, auteur de La Tolérance ii, n'a travaillé qu'avec les conseils de deux très savants hommes iii. Vous vous doutez bien que ce n'est pas de son chef qu'il a cité de l'hébreu. Ces deux théologiens sont convenus avec lui, à leur grand étonnement, que ce peuple abominable, qui égorgeait, dit-on, vingt-trois mille hommes pour un veau iv, et vingt-quatre mille pour une femme v, etc., ce même peuple pourtant donne les plus grands exemples de tolérance ; il souffre dans son sein une secte accréditée de gens qui ne croient ni à l'immortalité de l'âme ni aux anges . Il a des pontifes de cette secte . Trouvez-moi sur le reste de la terre une plus forte preuve de tolérantisme dans un gouvernement . Oui, les Juifs ont été aussi indulgents que barbares ; il y en a cent exemples frappants ; c'est cette énorme contradiction qu'il fallait développer, et elle ne l'a jamais été que dans ce livre .

 

On a très longtemps examiné, en composant l'ouvrage, s'il fallait s'en tenir à prêcher simplement l'indulgence et la charité, ou si on ne devait pas craindre d'inspirer de l'indifférence . On a conclu unanimement qu'on était forcé de dire des choses qui menaient, malgré l'auteur, à cette indifférence fatale, parce qu'on n'obtiendra jamais des hommes qu'ils soient indulgents pour le fanatisme, et qu'il faut leur apprendre à mépriser, à regarder même avec horreur les opinions pour lesquelles ils combattent.

 

On ne peut cesser d'être persécuteurs sans avoir cessé auparavant d'être absurdes . Je peux vous assurer que le livre a fait une forte impression sur tous ceux qui l'ont lu, et en a converti quelques-uns. Je sais bien qu'on dit que les philosophes demandent la tolérance pour eux ; mais il est bien fou et bien sot de dire, que quand ils y seront parvenus, ils ne toléreront plus d'autre religion que la leur ; comme si les philosophes pouvaient jamais persécuter, ou être à portée de persécuter. Ils ne détruiront certainement pas la religion chrétienne, mais le christianisme ne les détruira pas, leur nombre augmentera toujours ; les jeunes gens destinés aux grandes places s'éclaireront avec eux, la religion deviendra moins barbare et la société plus douce . Ils empêcheront les prêtres de corrompre la raison et les mœurs . Ils rendront les fanatiques abominables, et les superstitieux ridicules . Les philosophes, en un mot, ne peuvent qu'être utiles aux rois, aux lois et aux citoyens . Mon cher Paul de la philosophie, votre conversation seule peut faire plus de bien dans Paris que le jansénisme et le molinisme n'y ont jamais fait de mal ; ils tiennent le haut du pavé chez les bourgeois, et vous dans la bonne compagnie . Enfin, telle est notre situation, que nous sommes l'exécration du genre humain, si nous n'avons pas pour nous les honnêtes gens ; il faut donc les avoir, à quelque prix que ce soit ; travaillez donc à la vigne, écrasez l'Infâme . Que ne pouvez-vous point faire sans vous compromettre ? Ne laissez pas une si belle chandelle sous le boisseau vi. J'ai craint pendant quelque temps qu'on ne fut effarouché de la Tolérance ; on ne l'est point , tout ira bien . Je me recommande à vos saintes prières et à celles des frères .

 

Le petit livret de la Tolérance a déjà fait au moins quelque bien . Il a tiré un pauvre diable des galères vii, et un autre de prison . Leur crime était d'avoir entendu en plein champ la parole de Dieu prêchée par un ministre huguenot. Ils ont bien promis de n'entendre de sermon de leur vie . On a dû vous donner Macare et Thélème viii; je crois d'ailleurs que Macare ix est votre meilleur ami, et vous le méritez bien.

 

N.B.- M. Gallatin était chargé pour vous de deux exemplaires cachetés . Ecr l'Inf, vous dis-je. »

 

i D'après la réponse de d'Alembert du 22 février, ceci concerne le tableau que V* fait des Juifs dans le Traité sur la Tolérance .

Voir lettre Page 197 : http://books.google.be/books?id=zzQHAAAAQAAJ&printsec...

 

ii V* lui donne le nom d'Herman ; cf. lettre à Damilaville du 4 mars :

page 405 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80036m/f410.image.p...

 

iii Les informations linguistiques de V* sont fournies par le pasteur genevois Moultou qui a pour amis le pasteur Vernes et Abauzit qui fut administrateur de la bibliothèque de Genève.

iv Trois mille pour le veau d'or : Bible, Exode XXXII, 28. http://www.biblia-cerf.com/BJ/ex32.html

 

v Vingt quatre mille pour la Madianite : Bible, Nombres XXV, 1-9. http://www.biblia-cerf.com/BJ/nb25.html

vi Évangile de Matthieu.

vii Claude Chaumont, condamné le 15 mars 1751 . V* écrira à son propos à Végobre, avocat : « M. le duc de Choiseul a délivré des galères le nommé Chaumont, dont tout le crime était d'avoir entendu un sermon au désert » et : « Il a quelques compagnons dont je ne désespère pas de briser les fers et les rames. » . V* demandait en effet au protestant Louis Necker, négociant à Marseille, de lui envoyer la liste de leurs « martyrs de la sottise, condamnés à ramer par le fanatisme » pour l'envoyer et faire « tout ce qui dépendra de moi pour qu'on ne fasse plus de martyrs »

viii Macare et Thélème, conte en vers de V*, 1764, imprimé dans les Contes de Guillaume Vadé. Page 63 : http://books.google.be/books?id=wZwMAQAAMAAJ&pg=PA67&...

ix « Macare », transcription du mot grec signifiant « bienheureux », ou comme l'écrit V* : « bonheur ».

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11/02/2011 | Lien permanent

J’ose espérer qu’on ne me lapidera pas avec de petits cailloux

"Comme, Dieu merci, je n’ai jamais fait aucun ouvrage que le clergé puisse me reprocher" , ni les laïcs ajouterais-je pour mon compte, je ne peux être en aucun cas taxé de calomnie ...

 

dieu.jpg

Dieu merci !

 

-"Il n'y a pas de quoi, James !

-"Mais, doux Jésus, je suis votre humble serviteur.

-"Relève toi, James, tu vas me faire rougir.

-"Je voudrais bien voir ça !

-"Va tranquille, James, la France, fille aînée de ma fille l'EGLISE catholique apostolique et romaine  est menée par un homme clairvoyant qui sait changer les couches ministres incompétents déplaisants  .

-"Oui, toi, Seigneur, tu as changé l'eau en vin, mais je crains bien que ce remaniement ne soit fait en vain .

-"Plus d'allusion à ce mariage où m'a trainé ma mère - que moi-même la bénisse!- ! Je n'ai même pas été invité à celui du petit grand avec sa muse préférée.

-"Toujours est-il qu'il a pistonné un homme cultivé pour diriger le ministère de la culture . Est-ce bien raisonnable ?

-"Oui, James ! Fais toi à cette idée qu'il y a parfois du bon à remplacer une femme par un homme .

-"Euh ! mon Jésus unique et préféré, je te signale que je suis croyant jusqu'à un certain point mais non pratiquant !! Est-ce qu'un PACS peut suffire ?

-"Malgré ma science infuse, je ne vois pas ce que tu veux dire, James mon fils indigne !

-"Ah ! oui , PACS : Petite Action Solidaire , tu vois ce que je veux dire, comme dit mon collègue Hammou !

-"Oui, maintenant que tu me le rappelles, chacun doit égoïstement se faire du bien en faisant la même chose pour son semblable ; c'est ce que j'avais dit il y a déjà un bon moment.

-"Oui, environ deux mille ans mais tu as laissé la direction des travaux à des fonctionnaires mitrés.

-"J'aurais mieux fait de me casser une patte ce jour là ! La croix ce n'est plus de mon âge .

-"Un petit coup d'éternité et il n'y paraitra plus.

-"Va, James et blogge pour tes frères humains !

-"OK ! JC , I must go !

 

 

 

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

 

 

                            Le Nekre [professeur Louis Necker, amant de « la femme de Vernes le marchand, frère de Vernes le prédicant ; Vernes le marchand lui avait « sanglé un coup de pistolet » en 1760], non pas le mari de la belle Nekre [Jacques Necker, financier, mari de Suzanne Curchod], mais l’ancien amant d’un cul pourri, mais l’assassiné, le banni, qui est actuellement un bon négociant de Marseille et qui a passé par son ancienne patrie, vous rendra cette lettre, ma chère nièce. Il faut que vous sachiez que tout le clergé est déchainé. Il s’imagine que c’est moi qui ai soulevé tous les esprits, et si on  s’est saisi d’Avignon [qui appartenait au pape], s’il y a une guerre entre les catholiques et les dissidents en Pologne, j’en suis la cause. Damilaville vous aura peut-être dit que le cardinal de Choiseul, archevêque de Besançon, a oublié son nom pour se souvenir seulement qu’il est cardinal et que c’est lui qui a persécuté Fantet [libraire], l’avocat général de la chambre des comptes, et Leriche [qui a écrit un mémoire en faveur de Fantet en 1766]. Il a même, le croiriez-vous ? écrit aux fermiers généraux pour faire révoquer Leriche qui est inspecteur des domaines en Franche-Comté. Il leur a mandé qu’il remplissait la Franche-Comté de mes livres prétendus. Comme, Dieu merci, je n’ai jamais fait aucun ouvrage que le clergé puisse me reprocher, je n’ai pas voulu être la victime de la calomnie. J’ai demandé en général une lettre de recommandation à M. le duc et à Mme la duchesse de Choiseul [lettre du 27 mai à la duchesse] auprès du cardinal sans leur dire de quoi il s’agissait. Je l’ai obtenue. J’ai écrit au cardinal une lettre flatteuse et mesurée dans laquelle je me suis bien gardé d’entrer dans aucun détail, et dont il ne pourra jamais abuser, quand même il aurait la malhonnêteté de ne point répondre.

 

 

                            Le maçon qui fût repris de justice à Paris dans le temps qu’il y était porte-Dieu [évêque J.-P. Biord, qui fût vicaire de la Sainte Chapelle basse et ayant refusé d’être entendu pour une affaire de billets de confession, il fut « décrété de prise de corps » ; V* demandera à son neveu d’Hornoy d se renseigner à ce sujet], et qui est à présent à ce qu’il dit évêque et prince de Genève, a voulu remuer aussi. Je lui ai fermé la bouche par une conduite sage et nécessaire très approuvée par les Italiens adroits et blâmée à Paris par des gens de lettres qui riraient si j’étais sacrifié pour eux.

 

 

                            Si je ne peux échapper à la calomnie, j’échappe du moins à la persécution. Si Damilaville s’en tire avec six mille livres de pension, c’est un sort très heureux. Mme de Sauvigny qui avait mis dans sa tête de frustrer Damilaville de la place à lui promise [place de directeur du vingtième où il était premier commis depuis longtemps], m’avait assuré qu’elle lui ferait donner une forte pension. Je suppose qu’elle a tenu parole. Il est heureux, le voilà récompensé, et peu soupçonné. Je suis dans un cas tout différent. Mais je laisse gronder les orages uniquement occupé du Siècle de Louis XIV et de Louis XV. J’aurai bientôt achevé ce monument que j’érige à l’honneur de ma patrie sans flatterie et sans médisance. J’ose espérer qu’on ne me lapidera pas avec de petits cailloux tandis que je bâtis ce grand édifice.

 

 

                            J’ai lu par un grand hasard les Conseils raisonnables, la Profession de foi des théistes [les Conseils raisonnables à M. Bergier pour la défense du christianisme, 1768 ; les deux autres brochures sont aussi de V*], l’Épitre aux Romains, et quelques autres drogues. Je me flatte qu’on ne m’imputera pas ces bagatelles tandis que je me consume jour et nuit sur une histoire qui contient cent trente années.

 

 

                            Pour l’histoire de notre petit pays de Gex, elle sera bien courte. On n’a encore tracé ni le port ni la ville de Versoix. On n’a rien fait mais on va commencer. Si M. le duc de Virtemberg ne m’avais pas remis à deux ans pour me payer les soixante-dix  mille livres qu’il me doit, je bâtirais à Versoix une maison pour faire ma cour à M. le duc de Choiseul et je crois que ce serait un assez bon effet pour vous. On y établira la poste dans huit jours. C’est Fabry qui l’a, car il a tout englouti. On donne à Racle l’entreprise du port. Racle au moins pourra se dédommager de la perte qu’il a faite en construisant sa ridicule maison, mais j’aurai toujours perdu ce que je lui ai prêté. Vous vous en tirerez un jour, à ce que j’espère.

 

 

                            Je fus bien surpris il y a six jours quand je vis arriver chez moi M. et Mme de Vaux [sœur et beau-frère de Dupuits époux de Marie-Françoise Corneille ; Mme de Vaux est surnommée « Pâté » par V* ; Mme Denis s’inquiète de leur présence], et une grande bâtarde de M. de Vaux et le petit Vau qui est très joli et la mie du petit Vau. . Les voilà établis ici. Je m’enferme dans ma chambre avec mes deux Siècles. Je parais seulement à la fin du diner et du souper, et cependant ils restent. Leur amusement est d’aller chez Mallet et chez Racle. On ne peut quitter un pays qui fournit des plaisirs si séduisants. Il est vrai que la moisson paraît belle, c’est-à-dire qu’on pourra bien avoir quatre pour un avec la paille. Voilà notre terre de promission. Elle est admirable pour quiconque a des yeux et des jambes. Mais ceux à qui ces organes manquent doivent y périr. Nous avons manqué un marché de deux cents mille livres. Vous n’en aurez jamais cinquante mille écus. Pour moi je la quitterais demain si je n’étais retenu par mes deux Siècles.

 

 

                            On prend, comme vous savez, le train de m’envoyer garnison. Il faut soulager le paysan, fournir des lits, des draps et  des meubles à quatorze officiers et à deux cents soldats. Cela ruine et personne n’en sait le moindre gré. Il a fallu que j’achetasse du linge pour eux. Il est vrai qu’heureusement ma porte est toujours fermée, et que je suis en prison chez moi.

 

 

                            Voilà, ma chère nièce, un compte exact de la manière dont j’achève une vie que je vous ai consacrée. Je vous embrasse tendrement.

 

 

                            V.

                            De Ferney 24 juin 1768. »

 

Projet Versoix par choiseul et Volti : http://images.google.fr/imgres?imgurl=http://www.athenaeu...

 

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24/06/2009 | Lien permanent

Vous me dites que le président est à plaindre d’avoir quatre-vingts ans . Ce sont ses amis qui sont à plaindre

... " Je ne suis ni satirique ni flatteur ; je dis hardiment la vérité."

Voltaire résume bien le problème U. S. et sait ce que vaut Joe Biden, et est encore réaliste en dénonçant ce qu'endurent les partisans de l'octogénaire plus tout à fait opérationnel . Le très bientôt octogénaire Trump , lui me semble bien mériter le châtiment voltairien : "pour les pirates, on les pend au mat de son vaisseau.", ce qui est possible dans ces USA qui ne savent plus quoi inventer pour occire leurs citoyens .

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« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand

30è juillet 1768 à Ferney

Voici des thèmes, Dieu merci, madame. Vous savez que mon imagination est stérile quand elle n’est pas portée par un sujet, et que, malgré mon attachement de plus de quarante années, je suis muet quand on ne m’interroge pas. Je suis un vieux Polichinelle qui a besoin d’un compère.

Vous me dites que le président est à plaindre d’avoir quatre-vingts ans . Ce sont ses amis qui sont à plaindre. D’ailleurs pensez-vous que soixante-quinze ans, avec des maladies continuelles, et des tracasseries plus tristes encore, ne vaillent pas bien quatre-vingts ans ? Nous sommes tous à plaindre, madame ; il faut faire contre nature bon cœur. Les tracasseries sont encore plus tristes ; et les tracasseries imprimées insupportables .Vous me parlez du janséniste ou de l’ex-janséniste La Bletterie . Je suis son serviteur. Il logeait autrefois chez ma nièce Florian, et ne cessait de dire du mal de moi. Il imprime aujourd’hui que j’ai oublié de me faire enterrer 1 . Ce tour est neuf, agréable, et très-bien placé dans une traduction de Tacite. Ai-je eu tort de lui prouver que je suis encore en vie 2 ? On m’a écrit que, dans une autre note aussi honnête, il se contredit : il veut qu’on m’enterre à la façon de Mlle Le Couvreur et de Boindin 3. Vous m’avouerez que, pour peu qu’on ait du goût pour les obsèques, on ne tient point à ces bonnes plaisanteries.

Sérieusement, je ne vous comprends pas, et je ne retrouve ni votre amitié, ni votre équité, quand vous me dites que je devais me laisser insulter par un homme qui a dédié une traduction à M. le duc de Choiseul. Je crois M. le duc de Choiseul et votre grand-mère trop justes pour m’immoler à La Bletterie. Vous m’affligez sensiblement.

Je n’aime ni la traduction de Tacite, ni Tacite même comme historien. Je regarde Tacite comme un satirique pétillant d’esprit, connaissant les hommes et les cours, disant des choses fortes en peu de paroles, flétrissant en deux mots un empereur jusqu’à la dernière postérité. Mais je suis curieux, je voudrais connaître les droits du sénat, les forces de l’empire, le nombre des citoyens, la forme du gouvernement, les mœurs, les usages : je ne trouve rien de tout cela dans Tacite : il m’amuse, et Tite-Live m’instruit. Il n’y a d’ailleurs dans Tacite ni ordre ni dates . Le président m’a accoutumé à aimer ces deux choses essentielles.

M. Walpole est d’une autre espèce que La Bletterie 4. On fait la guerre honnêtement contre des capitaines qui ont de l’honneur ; mais, pour les pirates, on les pend au mat de son vaisseau.

J’adresserai à votre grand-mère ce que je pourrai faire venir de Hollande. Je sais qu’elle est un très honnête homme. Je compte d’ailleurs sur sa protection, autant que je suis charmé de son esprit juste et délicat. Sans justesse d’esprit, il n’y a rien.

Souvenez-vous toujours, madame, que lorsque je cherche et que j’envoie ces bagatelles pour vous amuser, je vous conjure, au nom de l’amitié dont vous m’honorez depuis longtemps, de ne les confier qu’à des personnes dont vous soyez aussi sûre que de vous-même, et de ne pas prononcer mon nom. Il y a des gens qui diraient à peu près comme le curé de La Fontaine :

Autant vaut l’avoir fait que de vous l’envoyer5.

Je ne fais rien que mes moissons, et le Siècle de Louis XIV, que je pousse jusqu’à 1764. J’y rends justice à tous ceux qui ont servi la patrie, en quelque genre que ce puisse être, à tous ceux qui ont été Français, et non Welches. Je ne suis ni satirique ni flatteur ; je dis hardiment la vérité.

Voilà mes seules occupations ; je n’en suis pas moins persécuté par des fanatiques ; mais heureusement le fanatisme est sur son déclin, d’un bout de l’Europe à l’autre. La révolution qui s’est faite depuis vingt ans dans l’esprit humain est un phénomène plus admirable et plus utile que les têtes qui reviennent aux limaçons 6.

À propos, madame, le fait est vrai : j’en ai fait l’expérience . J’ai eu peine à en croire mes yeux. J’ai vu des limaçons à qui j’avais coupé le cou manger au bout de trois semaines. Saint Denis porta sa tête, comme vous savez, mais il ne mangea pas.

Adieu, madame ; conservez la vôtre. Hélas ! il revient des yeux aux limaçons. Adieu, encore une fois. Que je vous plains ! que je vous aime ! que la vie est courte et triste ! »

1 Voir la lettre du 20 juin 1768 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/02/03/l-absence-a-de-terribles-inconvenients-6483596.html

C'est en effet ce que dit d'Alembert ( voir lettre du 27 avril 1768 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/12/28/je-pourrais-bien-meme-faire-du-theatre-une-ecole-pour-les-pe-6477688.html ), mais on n'a pas retrouvé la note en question et l'on se demande si d’Alembert n'a pas pour quelque raison, malignement excité V* contre La Bletterie qu'il pouvait considérer comme un rival en fait de traduction de Tacite .

3 Même remarque que pour la note précédente ; on remarque d'ailleurs la formule : « On m'a écrit que ... » V* n'a donc pas lu lui-même le passage incriminé .

4 Sur la copie Wyart, Walpole a noté ceci : « Ceci regarde la préface du Château d'Otrante. »

5  La Fontaine, dans son conte intitulé Le Cas de conscience, termine par :

Autant vaut l’avoir vu que de l’avoir mangé.

Voir : https://textbase.scriptorium.ro/la_fontaine/contes_et_nouvelles_en_vers/livre_quatrieme/le_cas_de_conscience

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02/03/2024 | Lien permanent

Les gens qui sont dans la boue, à ce que vous dit d'Alembert, remuent quelquefois cette boue si fort qu'ils en barbouill

... Il n'est qu'à figurer parmi les utilisateurs des réseaux dits "sociaux" pour être tôt ou tard victime de médisance, menaces, cyber-harcèlement . Les pourris recrutent d'autres pourris, leur lâcheté est sans limite, et leur impunité les encourage . A l'heure où l'on se gargarise des prouesses ( ou prétendues telles ) de l'IA, qui sortira un programme dénonçant les agresseurs et les éradiquant aussi vite qu'ils se montrent ?

Ecrasons l'infâme ! est plus que jamais d'actualité, mon cher Voltaire .

 

 

« A Marie-Louise Denis

27è février 1769

Dupuits, sa femme , et sa petite fille sont arrivés sains et gaillards . Ils sont dans leurs États de Maconnex en Sibérie, entourés partout comme moi de deux pieds de neige . Mais pour nous consoler il y en a dix-huit pieds dans les montagnes .

Notre capitaine m'a apporté, ma chère amie, beaucoup de gros paquets, mais rien ne m'a plu comme votre lettre . J'écris par cette poste à M. le maréchal de Richelieu malgré son silence . Je ne veux pas qu'il ait aucun prétexte pour ne vous point payer .

Je n'ai fait que jeter un coup d’œil sur les paperasses de Laleu ; je vois que la succession de Guise me doit dix années ; cela se monte à vingt-cinq mille livres dont il faut déduire le dixième . Il est certain que les revenus des terres ont été touchés ; que sont-ils devenus ? Je suis un des premiers créanciers . Dès que M.le duc de Richelieu vous aura payée , dès que vous aurez arraché de lui l'argent qu'il vous doit, il faudra absolument que mon procureur fasse des diligences, sans quoi tout le monde partagerait hors vous .

Les gens qui sont dans la boue, à ce que vous dit d'Alembert, remuent quelquefois cette boue si fort qu'ils en barbouillent le visage des honnêtes gens .

Je ne suis point étonné que l'homme au nez haut 1 soit l'intime ami d'un nez à pustules 2 . Il eut autrefois un ami de cette trempe qui fut pendu (autant qu'il m'en souvient ) . Il faut bien avoir des amis partout .

L'abbé Binet 3 a quelquefois des lubies ; il est sensible à l'excès, mais il revient . Sa petite sœur, Mlle Binet, est infiniment aimable, et moins vive que lui .

Je ne crois pas les affaires du notaire 4 en bon train . J'ai peur qu'il n'y ait beaucoup de discrédit . Il faut bien toujours qu'il y ait quelques banqueroutiers dans Paris . C'est le pays où les uns font leur fortune, et où les autres la perdent . C'est le centre du luxe et de la misère , de la meilleure compagnie et de la plus détestable .

Je suis bien sûr que vous n'êtes pas entraînée dans le tourbillon et que vous vivez avec des amis choisis . On ne peut aspirer à rien de mieux . Cette consolation me manque absolument, et j'en serai privé jusqu'à mon dernier jour . J'ai été réellement en prison pendant une année entière ; je ne suis sorti qu'une seule fois de ma chambre , ; et je n'en sortirai à la fonte des neiges que pour aller voir rebâtir le Châtelard . Les souffrances continuelles auxquelles je suis condamné ne me permettent pas même de mener une autre vie ; et Paris n'est pas plus fait pour moi que la campagne ne l'est pour une Parisienne . Vous êtes rentrée dans votre élément, ma chère amie . Je tâcherai de faire en sorte que cet élément vous nourrisse . Tout sera arrangé très bien pour tout le monde . Plus je vieillis, plus le séjour des neiges m'accable, mais je n'en ai point d'autre, et il faut que je reste au coin de mon feu .

Je crois qu'il faut que je m'arme de patience sur la petite affaire de feu La Touche 5, tout vient avec le temps . Votre ami Lefèvre 6, les anges et Lekain étant dirigés par vous viendront probablement à bout de ce que vous aurez entrepris .

Ces Mélanges 7dont vous me parlez sont ridicules . C'est une sottise énorme que Gabriel Cramer a faite sans m'en donner la moindre connaissance . Il se conduit aussi mal en amitié qu'en typographie . Savez-vous bien qu'il s'est mis au rang de ceux qui voulaient acheter Ferney ? Il voulait faire un marché à la genevoise ; il n'a pas eu honte de proposer à vous donner soixante mille francs comptant, à condition qu'il s'emparerait à ma mort de la maison et des meubles, et ces soixante mille francs, vous savez qu'il les a gagnés avec moi . Cependant les polissons de Paris disent que j'ai fait une grande fortune par mes ouvrages .

S'il y a quelque chose touchant l'abbé Binet et les affaires de notre notaire, vous me ferez grand plaisir de m'en instruire . C'en est un très sensible de se parler à cœur ouvert de ses affaires . Mais je suis bien plus touché de celui que j'ai à vous dire combien je vous aime, et à quel point votre amitié me touche . Je vous embrasse de toutes mes forces . »

1 Sans doute Richelieu ; il fait sans doute partie des « gens qui sont dans la boue » cité ci-avant .

2Ce pourrait être Mme Du Barry . Mais qui fut pendu ?

3Nous avon sici un nouveau code, différend de celui de 1753. L'abbé Binet est Choiseul, et sa « petite soeur » Mme de Gramont, ou peut-être Mme de Saint-Julien .

4 Louis XV.

5 Les Guèbres .

6Il s'agit probablement du censeur Marin, fututr ennemi de beaumarchais .

7Ces « mélanges » sont sant doute les Nouveaux Mélanges, qui paraissent depuis 1765 ; voir lettre de juillet-août 1765 à Cramer : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/11/23/tout-sera-dans-l-ordre.html

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30/08/2024 | Lien permanent

Ah monsieur, vous riez de ce petit fétiche . Je ne ris pas . S'il a un visage de singe, il a un cœur de boue

... Mais qui donc correspond à ce portrait robot ? Un primate avide de primaires, l'agité de service , N. S. , Notre Saigneur qui est odieux, que ton nom soit supprimé, que ton règne ne vienne jamais, que ta volonté soit défaite, aux voix vas t'en pêcher, et ... casse-toi pauv'thon !     ! 

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« A Claude-Philippe Fyot de La Marche

A Ferney 20 octobre 1761 1

Votre charmante lettre du 5 octobre m'a trouvé mon très respectable ami, dans un moment d'enthousiasme et l'a redoublé . Vous avez été le génie qui m'a conduit . Vous devez savoir , en qualité de génie, que le sujet d'une tragédie me passait par la tête . Je ne vous lais ni de froide politique ni de froide rhétorique ni de froides amours . J'ai trouvé tout ce que les plus grands noms ont de plus imposant, tout ce que la religion secrète des anciens, si sottement calomniée par nous, avait de plus auguste, de plus terrible, et de plus consolant, ce que les passions ont de plus déchirant, les grandeurs de ce monde de plus vain et de plus misérable , et les infortunes humaines de plus affreux . Ce sujet s'est emparé de moi avec tant de violence que j'ai fait la pièce en six jours, en comptant un peu les nuits . Ensuite il a fallu corriger . Voilà pourquoi je vous remercie si tard de toutes les bontés dont vous m'honorez . Je suppose qu'enfin vous avez des nouvelles de Mme de Paulmy 2, et peut-être est-elle chez vous . Permettez que je vous en félicite et que je lui présente mon respect . Je suis ému plus qu'un autre des sentiments de la nature, car c'est ce qui domine dans la pièce dont je vous parle . C'est ce qui me faisait verser des larmes en écrivant cet ouvrage avec la rapidité des passions .

Vous avez dû cher et illustre bienfaiteur des arts, recevoir par M. de Varenne, secrétaire de la noblesse de Bourgogne, un paquet où étaient les dessins de votre graveur . Je vous ai conjuré de permettre qu'il travaillât pour Pierre, et que les Cramer lui donnassent un petit honoraire ; je persiste dans ma prière .

Je vous ai rendu grâce de l'arbitrage de monsieur votre frère 3 que vous daignez me proposer . Il eût été bien doux et bien honorable pour moi d'avoir toute votre famille pour arbitre . Mais M. de Brosses n'en veut point . Il veut plaider parce qu'il croit que ce qu'on appelle la justice de Gex n'osera le condamner, et que je n'oserai en appeler au parlement . C'est en quoi il se trompe . Je respecte trop votre auguste compagnie pour la craindre . Je lui ait écrit à lui-même une lettre très ample dans laquelle je lui mets devant les yeux tous ses procédés et je finis par lui dire que s'il y a un seul homme dans Dijon qui l'approuve, je me condamne . Ah monsieur, vous riez de ce petit fétiche . Je ne ris pas . S'il a un visage de singe, il a un cœur de boue .4

J'aurai l'honneur de vous envoyer copie de ma lettre 5. Elle répond à tout ce que vous me faites l'honneur de me dire . Tout y est expliqué . C'est un factum adressé à lui-même . Vous me jugerez .j'aimerais mieux vous envoyer ma tragédie mais venez la voir jouer sur mon théâtre . Il est joli . Nous y avons représenté Mérope, nous avons fait pleurer jusqu'à des Anglais . Oh que le cher Ruffey aurait dormi ! Vous ne pouvez savoir à quel point je vous respecte et je vous aime .

V. »

1Le manuscrit porte une mention erronée, qui semble contemporaine :  « 20 octobre 1762 / M. de Voltaire. »

3 Charles-Philippe Fyot de La Marche, premier président du parlement de Dôle .

4 Le passage « Ah monsieur …. cœur de boue . » supprimé par l'éditeur manque dans toutes les éditions suivantes .

 

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09/10/2016 | Lien permanent

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