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28/02/2013

Je vous adresse la lettre ci-jointe pour le chapeau rouge . Pour des coquineries, il n'y en a point; pour des douceurs, je n'en réponds pas

... Eh bien ! voici une femme qui  sait parler aux princes du clergé catholique romain . A mes yeux la démission de Benoit xvi est un non évènement qui ne changera pas la face du monde, du niveau de Splash, et du gangnam style .

Vale !

C'est écrit dans le ciel, aux couleurs papales .

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« De madame Sophie-Frédérique-Wilhelmine de Prusse , margravine de BAIREUTH.

Si mon corps voulait se prêter aux insinuations de mon esprit, vous recevriez toutes les postes de mes nouvelles. Je suis, me direz-vous, aussi cacochyme que vous, et cependant j'écris. A cela je vous réponds qu'il n'y a qu'un Voltaire dans le monde, et qu'il ne doit pas juger d'autrui par lui- même. Voilà bien du bavardage. Je vois votre impatience d'apprendre les choses qui vous intéressent. Une bataille gagnée 1. Breslau au pouvoir du roi; trente-trois mille prisonniers, sept cents officiers et quatorze généraux de pris, outre cent cinquante canons et quatre mille chariots de vivres, de bagages, et de munitions, sont des nouvelles que je puis vous donner. Je n'ai pas fini. Il est resté quatre mille morts sur le champ de bataille, quatre mille blessés se sont trouvés à Breslau, et on compte quatre mille cinq cents déserteurs. Vous pouvez compter que c'est un fait non-seulement avéré par le roi et toute l'armée, mais même par une foule de déserteurs autrichiens qui ont été ici. Les Prussiens ont cinq cents morts et trois mille blessés. Cette action est unique, et parait fabuleuse. Les Autrichiens étaient forts de quatre-vingt mille hommes: les Prussiens n'en avaient que trente- six mille. La victoire a été disputée mais toute l'affaire n'a duré que quatre heures. Je ne me sens pas de joie de ce prodigieux changement de la fortune. Je dois ajouter encore une anecdote, le corps que commandait le roi avait fait quarante-deux milles d'Allemagne en quinze jours de temps, et n'avait eu qu'un jour pour se reposer avant de livrer cette mémorable bataille. Le roi peut dire comme César Je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu. I1 me mande qu'il n'est embarrassé à présent que de nourrir et de placer ce prodigieux nombre de prisonniers. La lettre que vous lui avez écrite, où vous lui demandez la relation de la bataille de Mersbourg 2, a été enlevée avec la mienne. Heureusement il n'y avait rien qui puisse vous faire du tort. Je vous adresse la lettre ci-jointe pour le chapeau rouge 3. Pour des coquineries, il n'y en a point; pour des douceurs, je n'en réponds pas.
Nous avons eu, il y a trois jours, trois secousses d'un tremblement de terre, à quatre milles d'ici; on dit que la première était forte, et qu'on a entendu des bruits souterrains. Il n'a causé aucun dommage. On n'a point d'exemple d'un pareil phénomène dans ce pays; je vous laisse le soin d'en trouver la raison. Bien des compliments à Mme Denis. Soyez persuadé de toute mon estime.

Le 27 décembre[1757].
WILHELMINE »

1 Celle du 5 décembre.

2 Ou de Rosbach.

3 Le cardinal de Tencin.

 

 

 

27/02/2013

Il serait nécessaire que je le revisse afin que ne plaçasse point au mot Historiographe ce que j'aurais mis au mot Histoire et que je pusse mieux mesurer ces deux articles

 ... Je ne pense pas que l'imparfait du subjonctif soit  d'usage, même homéopathique, dans le livre de Miss Iacub et ses parties de jambes en l'air avec Dirty Silly Keutard . Ce dernier confirme sa vocation de souteneur en faisant payer les clients de son ex-compagne/conquête, il n'y a pas de petits profits . Aux dernières nouvelles il aurait refusé de se rendre au Salon de l'Agriculture, n'étant pas certain d'en ressortir autrement que dans une bétaillère en direction de l'abattoir .

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

Lausanne 29 de décembre [1757]

Tibi soli.

Mon cher et courageux philosophe je viens de lire et de relire votre excellent article Genève . Je pense que le Conseil et le peuple vous doivent des remerciements solennels : vous en méritez des prêtre mêmes ; mais ils sont assez lâches pour désavouer leurs sentiments que vous avez manifesté et assez insolents pour se plaindre de l'éloge que vous leur avez donné d'approcher un peu de la raison . Ils se remuent, ils aboient, ils voudraient engager les magistrats à solliciter à la cour un désaveu de votre part ; mais assurément la cour ne se mêlera pas de ces huguenots et vous soutiendrez noblement ce que vous avez avancé en connaissance de cause . Vernet, ce Vernet convaincu d'avoir volé des manuscrits, convaincu d'avoir supposé une lettre de feu Giannone 1, Vernet fit imprimer à Genève les deux détestables premiers volumes de cette prétendue Histoire universelle, Vernet qui reçut trois livres par feuille du libraire, Vernet le professeur de théologie n'a-t-il pas imprimé dans je ne sais quel catéchisme qu'il m'a donné et que j'ai jeté au feu, n'a-t-il pas imprimé, dis-je, que la révélation peut être de quelque utilité ?2 N'avez-vous pas vingt fois entendu dire à tous les ministres qu'ils ne regardèrent pas Jésus Christ comme Dieu ? Vous avez donc déclaré la vérité et nous verrons s'ils auront l'audace et la bassesse de la trahir .

Quelque chose qui arrive il demeurera consigné dans un livre immortel qu'il y a eu des prêtres ou soi-disant tels qui ont osé ne croire qu'un dieu et encore un dieu qui pardonne, un dieu pardonneur comme disent les Turcs .

Vous me donnez l'article Historiographe à traiter, mes chers maîtres . Je n'ai point ici la minute de l'article Histoire . Il me semble que je le fis bien vite et que je le corrigeai encore plus vite et encore plus mal . Il serait nécessaire que je le revisse afin que ne plaçasse point au mot Historiographe ce que j'aurais mis au mot Histoire et que je pusse mieux mesurer ces deux articles .

Si donc vous avez quinze jours devant vous renvoyez moi Histoire. Cela est ridicule je le sais bien mais je serais encore plus ridicule de donner un mauvais article. Je vous renverrai le manuscrit trois jours après l'avoir reçu . Ayez la bonté de l'envoyer contresigné à Lausanne .

Je cherche dans les articles dont vous me chargez à ne rien dire que le nécessaire et je crains de n'en pas dire assez ; d'un autre côté je crains de tomber dans la déclamation .

Il me paraît qu'on vous a donné plusieurs articles remplis de ce défaut ; il me revient toujours qu'on s'en plaint beaucoup . Le lecteur ne veut qu'être instruit et il ne l'est point du tout par ces dissertations vagues et puériles qui pour la plupart renferment des paradoxes, des idées hasardées, dont le contraire est souvent vrai, des phrases ampoulées, des exclamations qu'on sifflerait dans une académie de province qui sont bien indignes de figurer avec tant d'articles admirables .

M. le ministre Vernes vous a, je crois , donné l’article Humeur 3 ; mais si vous ne l'aviez pas de sa main je me serais proposé . Il me semble , par exemple, qu'on doit d'abord définir ce qu'on entend par ce mot, ensuite rechercher la cause de l'humeur, faire voir qu'elle ne vient que d'un mécontentement secret, d'une tristesse dans les hommes les plus heureux, en montrer les inconvénients ; cela ne demande à mon avis qu'une demi-page ; mais chacun veut étendre ses articles . On oublie, comme dit Pascal, qu'on est ligne et on se fait centre 4 . On veut occuper une grande niche dans votre panthéon ; on ose dire je et moi dans votre Dictionnaire . Ah que je suis fâché de voir tant de stras avec vos beaux diamants ! Mais vous répandez vite votre éclat sur les stras . J'attends avec impatience Le Père de Famille . Je salue et j'embrasse l'illustre auteur 5 . »

1 Jean-Jacob Vernet : Anecdotes ecclésiastiques … tirées de l'Histoire du royaume de Naples de [Pietro] Giannono .

2 Dans la seconde édition de l'Instruction chrétienne ou catéchisme familier pour les enfants, 1754, Vernet avait changé le titre de la première section ; d'abord intitulée Nécessité de la révélation, 1741, elle devint Utilité de la révélation, 1754 .

3 Vernes l'avait envoyé à Rousseau qui l'avait transmis à Diderot, mais d’Alembert ne l'avait pas vu .

4 Ce n'est pas dans l'édition de Port Royal des Pensées de Pascal que V* a trouvé cette phrase ; le reproche de « se faire centre » y est bien . V* pense à cette idée et a brodé sur elle .

26/02/2013

laisser aller le monde comme il va, recommander la morale et la bienfaisance, et regarder tous les hommes comme nos frères

 ... Belles intentions, mais hélas on voit les frères se déchirer pour l'héritage de cette terre, la fraternité a ses limites .

 

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« A M. Élie BERTRAND.

A Lausanne, 27 décembre [1757].
Je vous souhaite une bonne et tranquille année, mon cher philosophe, car rien de bon sans tranquillité. J'épargne une lettre inutile à monsieur le banneret et à madame 1 mais je m'adresse à vous pour leur présenter mes tendres respects, et mes vœux bien sincères pour leur conservation et pour leur félicité, dont ils sont si dignes. Ma nièce se joint à moi et partage tout mon attachement. Que nous serions flattés s'ils pouvaient honorer de leur présence ce séjour tranquille, cette petite retraite de Lausanne que nous avons ornée dans l'espérance de les y recevoir un jour avec vous ! Iste angulus mihi semper ridet 2. Je ne crois pas que j'aille jamais ailleurs, malgré les sollicitations qu'on me fait. Quand on est aussi agréablement établi, il ne faut pas changer. Patria ubi bene doit être ma devise.
J'ai lu enfin l'article Genève de l'Encyclopédie, qui fait tant de bruit.
Non nostrum inter vos tantas componere lites.3
Je trouve seulement les Genevois très-heureux de n'avoir que de ces petites querelles paisibles, tandis qu'on s'égorge depuis le lac des Puants 4 jusqu'à l'Oder, et qu'on teint de sang la terre et les mers.
Il faut que ceux qui sont destinés à prêcher la paix soient au moins pacifiques. Le grand mal, messieurs, qu'on vous accuse un peu de variations! Eh! qui n'a pas varié? Le premier siècle ressemble-t-il au quatrième? et milord Pierre 5 n'a-t-il pas couvert de rubans et de franges l'habit simple et uni qu'il avait reçu d'un père très-uni?
Les dogmes ne se sont-ils pas accumulés d'âge en âge? On dit que vous revenez à la simplicité des premiers temps, que vous abandonnez l'architecture gothique, chargée de vains ornements, pour la noble architecture des Grecs. Vous fait-on si grand tort? M. d'Alembert, à ce que vous dites, serait très-fâché que des inquisiteurs le louassent d'être tout prêt à faire brûler des hérétiques. Sans doute il recevrait fort mal ce bel éloge, qu'il n'a jamais mérité; mais en est-il de même de ceux qu'il loue de vouloir embrasser la simplicité des premiers temps? Il ne dit que ce qu'il leur a entendu dire vingt fois. Il révèle leur secret, je l'avoue; mais ce secret est celui de la comédie; rien n'est plus public parmi vous autres que ce secret 6. S'ils désavouent leurs sentiments, ils se feront peu d'honneur; s'ils les publient, ils s'attireront des disputes. Que faut-il donc faire? rien; se taire, vivre en paix, et manger son pain à l'ombre de son figuier; laisser aller le monde comme il va, recommander la morale et la bienfaisance, et regarder tous les hommes comme nos frères. C'est ce que je leur souhaite. Je vous embrasse tendrement, mon cher théologien, humain et philosophe. »

1 De Freudenreich.

2 Ce point de vue me sourit toujours ; Horace, Odes, II, 6,14 .

3 Il ne nous appartient pas au milieu de gens comme vous d'arbitrer de si grands débats ; Virgile Églogue, II, 108 .

4 Winnipeg vient de la peuplade des Winnipegs au Canada , « puants » et on attribua l'odeur au lac lui-même .

5 C'est-à-dire saint Pierre, ou plutôt le vicaire de Jésus-Christ, le pontife romain.

6 Le « secret » dont parle Voltaire était que l’Église de Genève était devenue socinienne, c'est à dire qu'elle répudiait la divinité du Christ et ne voyait plus guère dans le christianisme qu'un doctrine moral . Ceci constituait, si on peut dire, l'éloge de d'Alembert .

 

25/02/2013

Des préjugés sage ennemie, Vous de qui la philosophie,L'esprit, le cœur, et les beaux yeux, Donnent également envie A quiconque veut vivre heureux De passer près de vous sa vie

 ... Je crois bien Mam'zelle Wagnière que Voltaire s'adresse à vous .

Bientôt le printemps

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« A Louise-Florence-Pétronille d'Esclavelles d'ÉPINAY

A Lausanne, 26 décembre [1757].
Des préjugés sage ennemie,
Vous de qui la philosophie,
L'esprit, le cœur, et les beaux yeux.
Donnent également envie
A quiconque veut vivre heureux
De passer près de vous sa vie
;
Vous êtes, dit-on, tendre amie;
Et vous seriez encor bien mieux,
Si votre santé raffermie
Et votre beau genre nerveux
Vous en donnaient la fantaisie.

Heureux ceux qui vous font la cour, malheureux ceux qui vous ont connue et qui sont condamnés aux regrets . Le hibou des Délices est à présent le hibou de Lausanne il ne sort pas de son trou mais il s'occupe avec sa nièce de toutes vos bontés. Il se flatte qu'il y aura de beaux jours cet hiver, car après vous, madame, c'est le soleil qui lui plaît davantage. Il a dans sa masure un petit nid bien indigne de vous recevoir; mais quand nous aurons de beaux jours et des spectacles, peut-être, madame, ne dédaignerez-vous point de faire un petit voyage le long de notre lac. Vous aurez des nerfs, M. Tronchin 1 vous en donnera j'espère qu'il vous accompagnera. Tous nos acteurs s'efforceront de vous plaire; nous savons que l'indulgence est au nombre de vos bonnes qualités.
Je vous demande votre protection auprès du premier des médecins, et du plus aimable des hommes, et je lui demande la sienne auprès de vous. Mais si vous voyez la tribu Tronchin, et des Jallabert 2, et des Crommelin, etc., comme on le dit, vous ne sortirez point de Genève, vous ne viendrez point à Lausanne. L'oncle et la nièce en meurent de peur.
Recevez, madame, avec votre bonté ordinaire, le respect et le sincère attachement du hibou suisse.

V.
Me permettez-vous, madame, de présenter mes respects à M. l'abbé de Nicolaï 3? Je voudrais bien que monsieur votre fils, qui est si au-dessus de son âge et si digne de vous, et son aimable gouverneur 4, voulussent bien se souvenir du Suisse de Lausanne. »

1 Théodore Tronchin

2 Jean Jallabert, professeur de philosophie à Genève, où il mourut en 1768, voir lettre du 21 décembre 1757 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/23/monsieur-jallabert-va-allonger-sa-perruque-par-devant.html

. Quant à Crommelin, conseiller de Genève, Voltaire le nomme dans sa lettre du 24 décembre 1758, à Thieriot : http://www.genealogie-aisne.com/perso/icrommelin.htm

 

vous vous plaignez de n'être pas loués comme il faut. Que vous êtes heureux, dans votre petit coin de ce monde, de n'avoir que de pareilles plaintes à faire, tandis qu'on s'égorge ailleurs!

... Ce qui est toujours vrai de nos jours en Suisse , car la modestie est loin d'être leur vertu principale .

 Neutres et bas de plafond !

 


 

 

 

« A M. le ministre Jacob VERNES.

Chez monsieur son père

à Genève
A Lausanne, 24 décembre,[1757] au soir.
Voici, monsieur, ce que me mande M. d'Alembert 1« J'écris à votre ami M. Vernes; il pourra vous communiquer ma lettre. Il me parait que ces messieurs n'ont pas lu l'article Genève, ou qu'ils se plaignent de ce qui n'y est pas . » Or, puisque vous voilà mon ami déclaré à Paris, communiquez-moi donc, mon cher ami, cette lettre de M. d'Alembert. Je n'ai point encore le nouveau tome de l'Encyclopédie, et j'ignore absolument de quoi il s'agit. Je sais seulement, en général, que M. d'Alembert a voulu donner à votre ville des témoignages de son estime. Il dit que le clergé de France l'accuse de vous avoir trop loués, tandis que vous autres vous vous plaignez de n'être pas loués comme il faut. Que vous êtes heureux, dans votre petit coin de ce monde, de n'avoir que de pareilles plaintes à faire, tandis qu'on s'égorge ailleurs!
Puissent tous vos confrères perpétuer cette heureuse paix, cette humanité, cette tolérance qui console le genre humain de tous les maux auxquels il est condamné ! Qu'ils détestent le meurtre abominable de Servet, et les mœurs atroces qui ont conduit à ce meurtre, comme le parlement de Paris doit détester l'assassinat infâme dont on fit périr Anne du Bourg, et comme les Hollandais doivent pleurer sur la cendre des Barneveldt et des de Witt. Chaque nation a des horreurs à expier, et la pénitence qu'on en doit faire est d'être humain et tolérant.
Ne soyons ni calvinistes, ni papistes, mais frères, mais adorateurs d'un Dieu clément et juste. Ce n'est point Calvin qui fit votre religion il eut l'honneur d'y être reçu, et vous avez parmi vous des esprits plus philosophes et plus modérés que lui, qui font l'honneur de votre république.
Bonsoir. Quand il s'agit de paix et de tolérance, je suis trop babillard. Mes compliments à notre Arabe 2. »

1 Cette lettre n'a pas été retrouvée .

2 Firmin Abauzit à qui on croyait pouvoir donner une ascendance arabe , était né à Uzès en 1679, et est mort en 1767. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Firmin_Abauzit

 

24/02/2013

Malheur à quiconque est encore calviniste ou papiste !

... Ou musulman, ou juif, toutes religions confondues avec leurs dogmes à la noix, animistes et sorciers profiteurs, sectaires de tout poil, athées intolérants,... !

 A tous je dis "lachez-moi la grappe"

 lache moi la grappe.JPG

 

« A Élie Bertrand

premier pasteur à Berne

A Lausanne 24 décembre [1757]

Mon cher philosophe si votre thermomètre à l'air est si en dessous de la glace, je m'imagine que le thermomètre de votre appartement est comme le mien tout près de l'eau bouillante . Je compte passer mon hiver dans le climat doux que je me suis fait au milieu des glaces et que la liberté me rend encore plus doux .

Je plains le roi de Prusse d'acquérir tant de gloire aux dépends de tant de sang . Je plains les Français qui vont se faire tuer à deux cents lieues de leur pays et les Suisses qui les accompagnent, et les peuples qu'ils pillent et les ministres de Genève qui, lassés de leur vie douce veulent l'empoisonner en excitant contre eux-mêmes une tempête dont M. d'Alembert ne fera que rire . Je n'ai point vu l'article . Je sais seulement que d'Alembert n'a eu d'autre intention que de faire leur éloge . Il faut qu'ils le méritent par leur circonspection .

J'avais vu les petits vers de l'horloger de Genève 1. On les a un peu rajustés mais il est toujours singulier qu'un horloger fasse de si jolies choses .

Sa pendule va juste et il paraît penser comme vous . C'est aussi le sentiment de tous les magistrats

de Genève sans exception . Vous voyez que les mœurs se sont perfectionnées, on déteste les atrocités de ses pères, les misérables qui voudraient justifier l'assassinat de Servet ou de du Bourg ou de Barnevelt et de tant d'autres sont indignes de leur siècle . Quoi qu'en dise l'horloger, un historien n'a point tort de regarder la conduite de Calvin envers Servet comme criminelle . Un ministre de Genève a chargé depuis peu un de ses amis de consulter des manuscrits de Calvin qui sont à Paris dans la bibliothèque royale . Il croyait y trouver sa justification . Son ami y a trouvé tant de choses atroces qu'il en est honteux . Malheur à quiconque est encore calviniste ou papiste ! Ne se contentera-t-on jamais d'être chrétien ? Hélas Jésus Christ n'a fait brûler personne . Il aurait fait souper avec lui jean Hus et Servet .

J'ai acheté une maison auprès de Genève qui me coûte plus de cent mille livres . Voilà ce que je brûlerais demain si la tolérance et la liberté que j'ai cherchées étaient proscrites . J'ai quitté des rois pour cette liberté et je serais encore plus libre auprès d'eux quand je le voudrai, mais il vaut mieux être à soi-même qu'à un roi et c'est moi qui me retient sur les bords du lac Léman où je voudrais bien vous embrasser .

Mille respects à M. et Mme de Freidenrik .

V. »

1 V* donna son avis dans l'affaire de « l'âme atroce » comme on le voit dans sa lettre du 29 août 1757 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/12/13/il-y-a-des-sots-il-y-a-des-fanatiques-et-des-fripons-mais-je.html

L'occasion immédiate de ses Torts déclencha la veine poétique du l'horloger-poète David Rival qui décernait le blâme à toutes les personnes en cause, y compris Voltaire, en des vers malicieux :

Quant à vous , célèbre Voltaire,

Vous eûtes tort, c'est mon avis.

Vous vous plaisez dans ce pays,

Fêtez le saint qu'on y révère ...

 

23/02/2013

On n'a jamais tant combattu avec le fer et avec l'argent

... Tu ne crois pas si bien dire mon pauvre Volti ! A croire que tu lis encore les nouvelles de notre pauvre monde . Désolé de ne pouvoir t'offrir la vue d'humains tolérants et fraternels .

 http://carlpepin.com/

fer et argent de guerre.jpg

 

 

« A Jean-Robert Tronchin

à Lyon

21 décembre [1757] au soir à Lausanne

Heureusement mon cher correspondant les nouvelles d'un prétendu échec en Westphalie sont très fausses , mais celles de la bataille de Neumark sont très vraies .Un homme arrivé d'Angleterre dit qu'on est dans le dessein de donner 80000 livres sterling de subsides au roi de Prusse 1. C'est beaucoup et il a encore un trésor . On n'a jamais tant combattu avec le fer et avec l'argent . S'il est vrai qu'on en donne à la cour de Russie pour ne rien faire et qu'on se serve du reste pour nous battre, je ne suis pas surpris que le ministère de France fasse encore un nouvel emprunt de vingt millions . Je voudrais bien savoir à vue de pays ce qui peut me rester à la fin de cette année pour voir si on ne pourrait pas placer quelque chose pour Mme Denis . Je vous renouvelle mon tendre attachement .

V. »

1 Le Parlement après avoir, à son corps défendant, voté 164 000 livres pour l' « armée d'observation », avait sans tarder voté un crédit additionnel de 1 200 000 livres .