23/02/2013
monsieur Jallabert va allonger sa perruque par devant
... Tandis que moi j'ai tendance à avoir les cheveux qui poussent vers l'intérieur , sans douleur .
Jallabert ?
Perruqué ? non ! blond naturel, gelé mais pas surgelé, Findus tu n'auras pas ma peau !
« Voltaire et Marie-Louise Denis
à
Jean JALLABERT
conseiller d’État à Genève
Lausanne 21 décembre [1757]
L'oncle et la nièce apprennent avec le plus grand plaisir que monsieur Jallabert va allonger sa perruque par devant 1. Ils lui font les plus sincères compliments et se flattent que sa nouvelle dignité ne l'empêchera pas de venir quelquefois dans l'ermitage nommé les Délices où il trouvera deux solitaires pénétrés pour lui de tous les sentiments qu'ils lui doivent .
V. et D. »
1Jallabert était un homme de science d'une certaine originalité, directeur de la bibliothèque de Genève, et conseiller du Conseil des Deux Cents il est nommé au Petit Conseil à cette époque .http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Jallabert
19:56 | Lien permanent | Commentaires (0)
J'ose penser que cet homme sage attendra, il sait qu'on n'accommode guère les procès que quand les deux parties n'ont plus d'argent pour plaider
... Les plaideurs finissent souvent à poil, les avocats s'engraissent, la justice rame et ramasse .
Quelques cas exceptionnels , style Tapie, mais tout le monde n'est pas fortuné à ce point .
« A M. Jean-Robert TRONCHIN
à Lyon
Lausanne, 20 décembre [1757].
Vous savez mon cher monsieur, la nouvelle victoire du roi de Prusse 1 les cinquièmes jours du mois lui sont favorables. M. le maréchal Keith, qui m'écrit du 8 au milieu de ses-montagnes, ne me mande point que les Prussiens aient repris Breslau, comme on le dit.
Ce qu'il y a de plus triste, et ce que je ne veux pas croire, c'est qu'une lettre de l'armée de Richelieu parle aussi d'une bataille que nous venons de perdre contre les Hanovriens 2. Si malheureusement cette nouvelle se confirme, voilà cent mille hommes et deux cents millions de perdus, comme dans la guerre de 1741. Dans ces circonstances malheureuses, vous m'avouerez que les affaires générales seraient plus difficiles à ajuster que des billets de confession. Peut-être le résultat de tant de vicissitudes sera que la cour de France aurait pu donner la paix, il y a quatre mois, et ne pourra pas même la recevoir dans deux.
Dieu veuille que la nouvelle de la prétendue défaite de M. de Richelieu soit sans fondement, et que les prophéties de madame la margrave soient fausses . Ses desseins sont plus agréables que ses prophéties. Elle ne respire que la paix. Le chaos serait beau à débrouiller. Il serait bien rare de s'accommoder avec le roi de Prusse sans se brouiller avec l'impératrice, et de rester maître du Hanovre sans avoir à craindre le roi de Prusse. Mais je crois que les d'Ossat 3 et les Richelieu auraient peine à résoudre un pareil problème. Qui en sait plus qu'eux tous le résoudra. Mais il y a sur les bords de notre Rhône, et près de la. cathédrale où vous n'allez point, un homme 4 qui peut-être est le seul capable dans l'Europe de voir et de faire ce qui est convenable. J'ose penser que cet homme sage attendra, il sait qu'on n'accommode guère les procès que quand les deux parties n'ont plus d'argent pour plaider.
Me voici à Lausanne toujours sur les bords de mon lac dans une maison charmante qui même pourrait se passer de vos baguettes dorées que j'attends . J'y jouis d'un repos que je souhaite à quiconque est sur le Veser, sur l'Elbe ou sur l'Oder . Ma nièce et moi nous vous embrassons de tout notre cœur . »
1 Celle de Lissa ou Leuthen le 5 décembre 1757 près de Breslaw , entre le roi de Prusse et le prince Charles, qui est battu. La ville de Breslaw est obligée de se rendre aux Prussiens, qui reprennent ensuite une bonne partie de la Silésie, dont les Autrichiens s'étaient rendus maîtres. Dans l'espoir de prendre ses quartiers d'hiver en Silésie, le prince Charles et Daun avaient marché sur Leuthen, mais Frédéric II prévoyant ce mouvement manœuvra si bien que le 19 décembre il défit les Autrichiens tuant ou faisant prisonniers 53000 hommes sur un total de 90000, n'ayant lui-même que 40000 hommes combattant .
Le prince Charles-Joseph de Ligne (1735-1814), alors jeune officier au service d’Autriche, prit part aux campagnes en Europe centrale et fut mêlé de fort près à de nombreux combats ; voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles-Joseph_de_Ligne
3 Célèbre diplomate, né en 1536, mort en 1601 : http://fr.wikipedia.org/wiki/Arnaud_d%27Ossat
14:47 | Lien permanent | Commentaires (0)
22/02/2013
On a tué une centaine de ces affamés
... Pour le moins ! dit Jean-Claude Duvalier, ex- Baby Doc, en Haïti .
... Au bas mot ! se vante-t-on au Front Al-Nosra composé de terroristes ( pléonasme) salafistes djihadistes en Syrie .
... Pas encore, mais veut mieux faire ! clame le mouvement terroriste islamiste à Hyderabad .
... Petits joueurs ! affirme Laurent Gbagbo en Côte d'Ivoire .
... Par heure ! dit la mouche tsé tsé à son copain le moustique .
... Et on ne s'en tiendra pas là ! disent tous les hommes en arme des pays miséreux .
« A Jean-Robert Tronchin
à Lyon
17 décembre [1757]
Nous partons demain pour Lausanne mon cher correspondant . Je n'ai que le temps de vous le dire . Il faut aussi en courant vous parler de la petite affaire entre M. de Caraman 1 et 1200 Hanovriens et Hessois qui s'avisaient de poursuivre notre arrière-garde dans notre retraite . On a tué une centaine de ces affamés . Mais il est douloureux de se retirer .
Son éminence 2 doit avoir incessamment une lettre du montagneux pays de la Franconie . C'est toujours un commencement . Je vous supplie de lui présenter mes profonds respects et mes vœux pour sa santé et pour le bien public .
Je vous prierai quand vous serez de loisir de vouloir bien mettre au net mon petit compte pour mes étrennes .
Mme Denis et moi nous vous embrassons tendrement .
V. »
1 Victor-Maurice de Riquet , comte de Caraman, avait commandé avec succès l'arrière-garde française .http://fr.wikipedia.org/wiki/Victor_Maurice_de_Riquet_de_Caraman-Chimay et http://www.connaissancesdeversailles.org/t2522-le-premier-projet-des-jardins-anglo-chinois-du-petit-trianon
16:02 | Lien permanent | Commentaires (0)
On parle de je ne sais quelles croquignoles
... Qui chez moi ne sont pas féminines et bonnes à croquer !
Instinctivement, au masculin singulier, Croquignol me ramène aux jours d'été, jours de vacances pluvieux où je me jetais sur Les Pieds Nickelés chez mon grand-père et apprenais presque par coeur les aventures de Croquignol (au long nez, avec un petit côté Charles Trenet-Fou chantant), Filochard (borgne) et Ribouldingue (barbe en bataille). Leur ingéniosité dans la filouterie n'avait d'égal que leur invincible propension à perdre le bien mal acquis . Le système D dans toute sa beauté m'égayait, la morale triomphante (la police) me laissait avec un goût d'inachevé et quasi d'injustice . Aujourd'hui, le système D m'enchante toujours, et la police m'agace toujours , essentiellement quand je suis garé en zone bleue ou devant un parcmètre un jour sans monnaie .
« A Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg
Aux Délices 17 décembre [1757]
Et monsieur votre fils, madame, ? que devient-il ? J'ai toujours peur ; je vous prie de m’en dire des nouvelles . On parle de je ne sais quelles croquignoles que MM. de Hanovre nous ont données près de Harbourg 1. Monsieur votre fils est tout propre à s'être présenté là des premiers, et avoir fourré son nez plus avant que d'autres . Je vous supplie madame de dissiper mes inquiétudes . Je vais à Lausanne dans le moment . Je voudrais bien que l'île Jar 2 fut dans mon lac . C'est avec une douleur extrême que j'envisage cette éternelle séparation . Avez-vous toujours la consolation de Mme de Brumath 3? Je vous présente à toutes deux mes respects et mes regrets .
V. »
1 Voir : http://books.google.fr/books?id=RZBDAAAAcAAJ&pg=PA20&lpg=PA20&dq=guerre+de+sept+ans+%22harbourg%22&source=bl&ots=cxbTNQLGdB&sig=0cuCmGN6lqkEQeo0ecz5J4NjprI&hl=fr&sa=X&ei=bDInUcjYHvOp0AWV_4HoBg&ved=0CEcQ6AEwBA#v=onepage&q=guerre%20de%20sept%20ans%20%22harbourg%22&f=false
3 Mme Zuckmantel de Brumath, sœur de l’envoyé de Prusse à Mannheim, que V* appelle « sœur Broumath » , amie et dame de compagnie de la comtesse ..
10:13 | Lien permanent | Commentaires (0)
21/02/2013
Si j'étais plus jeune , si j'avais de la santé les choses ne se passeraient pas ainsi
... Oh ! là là !! vous verriez ce que vous verriez !
« A Charlotte-Sophie von Altenburg, comtesse Bentinck
Aux Délices 17 décembre [1757]
Puisque vous voulez madame mettre le portrait de votre saint 1 dans votre oratoire, voici l'antienne qui peut convenir à vos sentiments pour lui .
De l'auguste Thérèse il mérita le choix,
Il fait le bonheur de l'empire,
Le voir , l'entendre quelquefois
Est le bonheur que je désire .2
J'exprime mes idées avec les vôtres madame, mais je suis un vieux Suisse qui n'est pas fait pour prétendre à la jouissance comme vous . Si j'étais plus jeune , si j'avais de la santé les choses ne se passeraient pas ainsi . J'aurais fait mon pèlerinage à Vienne, j'aurais tâché d'entrevoir de loin l’immortelle Thérèse, de pouvoir m'approcher un peu du grand homme qui vous enchante, de remercier le très aimable M. de Durazzo 3, de faire quelques coquetteries à la belle Idamé 4 dont vous êtes si contente . Au lieu de me donner toutes ces belles fêtes, je vais quitter les neiges du voisinage de Genève pour les glaçons de Lausanne, je vais madame, au lieu de vers doux et galants en faire de tristes sur vos perfidies 5, sur vos inconstances, sur les promesses trompeuses que vous m'aviez faites de venir philosopher avec moi sur le beau billet que vous avez donné à Panchaud ; tantôt vous poursuivez votre procès, tantôt vous partez pour Venise, puis vous vous engagez pour le pays de Vaud, de là vous faites votre paquet pour Rome, et somme totale, vous restez à Vienne . Je le crois bien vraiment . La gloire de votre auguste Thérèse et les succès de votre grand homme, de belles victoires, de belles fêtes, tout cela vaut bien la Suisse . Souvenez-vous au moins de moi madame quand vous aurez gagné quelque nouvelle bataille et pris quelque capitale .
Mille respects,
V. »
1 Kaunitz ; voir lettre du 5 décembre 1757 à la comtesse : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/11/on-pouvait-avoir-au-printemps-une-paix-glorieuse-voila-ce-qu.html
3 Giacomo Durazzo qui fut ambassadeur de Gênes à Vienne : http://fr.wikipedia.org/wiki/Giacomo_Durazzo
4 Personnage de L'Orphelin de la Chine : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-l-orphelin-de-la-chine-avertissement-114073427.html
5 Voir les mêmes reproches dans sa lettre du 5 décembre 1757 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/02/11/on-pouvait-avoir-au-printemps-une-paix-glorieuse-voila-ce-qu.html
20:00 | Lien permanent | Commentaires (0)
En fait d'amour, il faut parler et faire
... En de justes proportions, ne pas faire sans parler, ni parler sans rien faire .
Ce que ne semble pas avoir compris Dirty Silly Keutard, d'après le dernier livre paru, écrit par une femme sans foi ni lois, avide de publicité et fric .
Je leur dédie ceci :
« A François de Chennevières
[vers décembre 1757]
Grand merci mon cher confrère de votre petite pastorale .
Vous possédez la langue de Cythère,
Si vos beaux faits égalent votre voix,
Vous êtes maître en l'art divin de plaire ;
En fait d'amour, il faut parler et faire ,
Ce dieu fripon ressemble assez aux rois :
Les bien servir n'est pas une petite affaire .
Hélas ! il est plus aisé mille fois
De les chanter que de les satisfaire .
Il se peut pourtant que vous ayez autant de talents pour le service de Misis que vous en avez pour faire de jolis vers 1. En ce cas je vous fait réparation d'honneur . Si vous avez quelque nouvelle intéressante, je vous prie de m'en faire part quoique en prose . Je vais faire lire Misis à Mme Denis la paresseuse qui n'écrit point mais qui vous aime véritablement . »
1 Voir : http://books.google.fr/books?id=J85sqGU0otIC&pg=PA376&lpg=PA376&dq=Fran%C3%A7ois+de+Chennevi%C3%A8res+misis&source=bl&ots=ZRj1aQS10g&sig=PLmdGmrK34zI2z0X11Asac5WNwE&hl=fr&sa=X&ei=CTUmUamVELO10QW0iIDoAg&ved=0CFoQ6AEwCA#v=onepage&q=Fran%C3%A7ois%20de%20Chennevi%C3%A8res%20misis&f=false
Pour Misis et Glaucé voir page 367 , lien précédent .
16:26 | Lien permanent | Commentaires (0)
Je demande aujourd'hui la permission de la robe de chambre
... Puis on terminera la journée par une soirée pyjama , natürlich !
« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay
[décembre 1757]
Je demande aujourd'hui la permission de la robe de chambre à Mme d'Epinay . Chacun doit être vêtu selon son état ; madame d'Epinay doit être coiffée par les Grâces et il me faut un bonnet de nuit . »
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