28/12/2017
Je ne fais cette cérémonie pour personne
... ou plutôt pour tout le monde à la fois" peut dire d'Emmanuel Macron qui n'aura pas la bêtise de tous ses prédécesseurs qui enquillaient neuf cérémonies de voeux pour les divers corps constitués, perte de temps et perte d'argent ridicules . Il en est qui le trouveront distant, en manque d'écoute ; à ceux-là je dis allez aux cérémonies des voeux de votre maire : discours - petits-fours - mousseux-décap'four, vous vous gobergerez aux frais de vos impôts -directement-, et resterez Gros-Jean comme devant pour ne pas changer, une année de plus .
Pas loin de la vérité !...
« A François Tronchin, Conseiller
d’État
Rue des Chaudronniers
à Genève
Les aveugles n'écrivent guère de leur main, et comme j'ai l'honneur de l'être, vous trouverez bon , mon cher ami, que je vous donne avis, comme je peux, du mariage de Mlle Corneille . Je ne fais cette cérémonie pour personne ; mais mon cœur est trop plein du bonheur d'autrui , pour ne pas s’en réjouir avec vous, et avec madame votre femme . J'en dis autant à tout Tronchin, que j'honore et vénère . Permettez que je vous embrasse de tout mon cœur .
V.
Ferney 30è janvier 1763. »
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27/12/2017
Je me crois autorisé à prendre la liberté de vous écrire ; l’amour de la vérité me l’ordonne.
... Also sprach Voltaire !
... und Zarathustra : https://www.youtube.com/watch?v=ETveS23djXM
« A Louis Thiroux de Crosne
A Ferney le 30 janvier [1763 ]1
Monsieur,
Je me crois autorisé à prendre la liberté de vous écrire ; l’amour de la vérité me l’ordonne.
Pierre Calas accusé d’un fratricide, et qui en serait indubitablement coupable si son père l’eût été, demeure auprès de mes terres : je l’ai vu souvent. Je fus d’abord en défiance ; j’ai fait épier, pendant quatre mois, sa conduite et ses paroles ; elles sont de l’innocence la plus pure et de la douleur la plus vraie. Il est près d’aller à Paris, ainsi que sa mère, qui n’a pu ignorer le crime, supposé qu’il ait été commis, qui dans ce cas, en serait complice, et dont vous connaissez la candeur et la vertu.
Je dois, monsieur, avoir l’honneur de vous parler d’un fait dont les avocats n’étaient point instruits ; vous jugerez de son importance.
La servante catholique , et qui a élevé tous les enfants de Calas, est encore en Languedoc ; elle se confesse et communie tous les huit jours ; elle a été témoin que le père, la mère, les enfants, et Lavaysse, ne se quittèrent point dans le temps qu’on suppose le parricide commis. Si elle a fait un faux serment en justice pour sauver ses maîtres, elle s’en est accusée dans la confession ; on lui aurait refusé l’absolution ; elle ne communierait pas. Ce n’est pas une preuve juridique ; mais elle peut servir à fortifier toutes les autres ; et j’ai cru qu’il était de mon devoir de vous en parler.
L’affaire commence à intéresser toute l’Europe. Ou le fanatisme a rendu une famille entière coupable d’un parricide, ou il a fasciné les yeux des juges jusqu’à faire rouer un père de famille innocent ; il n’y a pas de milieu. Tout le monde s’en rapportera à vos lumières et à votre équité.
J’ai l’honneur d’être avec respect, etc.»
1 V* a écrit une lettre similaire à d'Aguesseau, qui est perdue ( voir lettre du 4 février 1763 à Damilaville , datée ici du 1er février : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/06/correspondance-annee-1763-partie-5.html
) et celle du 30 janvier 1763 à Debrus .
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26/12/2017
En vous remerciant de l'épigramme sur le cocu du parlement
... Libre à vous d'en trouver le nom , s'il n'y en a qu'un ! ou qu'une ! [statistiquement le risque 0 est improbable, compte tenu de leurs emplois du temps flous .]
« A Germain-Gilles-Richard Président de
Ruffey
à Dijon
Ferney 30è janvier 1763
En qualité de quatre-vingts, je ne vous écrirai point de ma main, mon cher monsieur ; je bénis Dieu des rigueurs de M. de Cormont le père . Il s'est trouvé sur-le-champ un jeune gentilhomme, mon voisin, n'ayant ni père , ni mère, et dont les terres touchent précisément les miennes . Il n'est à la vérité que cornette de dragons mais il l'a emporté sur le capitaine et je fais dans quelques jours le mariage de Mlle Corneille . Je n'ai point d'enfants, et je m'en suis fait ; je suis heureux du bonheur des autres, et c'est la consolation de ma vieillesse .
Je souhaite passionnément que M. de La Marche rende la sienne heureuse, en finissant pour jamais toute discussion avec monsieur son fils . L'un et l’autre perdraient de leur considération à discuter davantage . C'est à eux d'être arbitres, et non à avoir besoin d'arbitres .
En vous remerciant de l'épigramme sur le cocu du parlement de Toulouse . Je souhaite que ce soit un des juges des Calas ; mais des cornes et des chansons sont une punition trop légère de l’abominable jugement qu'ils ont rendu .
J'espère que dans huit jours nous obtiendrons la révision au Conseil ; mille accidents nous ont retardés.
Pour les jésuites , je les trouve des fous, il faut avoir bien peu de raison pour se plaindre de retrouver la liberté avec un justaucorps et une pension, mais l’esprit de corps, et l'esprit de parti seront toujours plus forts que la philosophie ; ils ont imprimé une grande déclamation intitulée Apologie générale 1, qui ne leur fera pas de nouveaux amis ; ils y disent tant de bien d'eux, et tant de mal de leurs adversaires, ils sont si fiers dans ce qu'ils appellent leur malheur, ils se regardent comme des gens si considérable et si nécessaires au monde, qu'on serait tenté de les humilier encore davantage . Ce n'est pas le tout d'être chassé, il faut encore être modeste .
Je voudrais bien que votre parlement se remît un peu à être Perrin Dandin 2. J'ai une cause à lui mettre en mains, non pas pour moi, mais pour gens dont on a pris le bien, et qui ne peuvent mais de querelles du parlement avec les élus 3.
Adieu monsieur, mes respects très humbles à madame votre femme . Comptez sur la tendre amitié de votre très humble et très obéissant serviteur . »
1 Joseph-Antoine-Joachim Cérutti : Apologie générale de l'institut et de la doctrine des jésuites, 1763 ; sur la page de titre de son exemplaire, V* a écrit : « par M. Cérutti, Piémontais jésuite ». Voir : https://books.google.be/books?id=crdbAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
et : http://data.bnf.fr/11994146/joseph-antoine-joachim_cerutti/
2 Le parlement est toujours en grève .Voir : https://books.google.fr/books?id=VKmjAwAAQBAJ&pg=PT193&lpg=PT193&dq=gr%C3%A8ve+du+parlement+de+Dijon+1763&source=bl&ots=gc3LgvNVF2&sig=e1XE62JmDuPKzFADTXJDpouinpY&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwidq7-8_qfYAhVHpKQKHfaSAJIQ6AEIODAC#v=onepage&q=gr%C3%A8ve%20du%20parlement%20de%20Dijon%201763&f=false
3 Les élus sont les juges de l'élection, tribunal financier de première instance dans les pays autres que « les pays d’État » . Plus précisément ici, les Élus étaient des commissaires représentant les États de Bourgogne durant l'intervalle des sessions , qui étaient triennales. C'était en leur nom que Varenne avait attaqué, dans un Mémoire, la possession où était le Parlement de refuser l'enregistrement d'un édit bursal, lors même que l'impôt avait été voté par les États.
17:19 | Lien permanent | Commentaires (0)
il veut éloigner les coups qu'on lui porte, et par cela même il fait voir qu'il les mérite
... Ce qui correspond à ceci :
http://www.lepoint.fr/politique/lrem-castaner-concede-une...
« A Philippe Debrus
à Genève
[29 janvier 1763]1
Je regarde, monsieur, la saisie faite à Montpellier 2 comme une insolence punissable . Des mémoires juridiques signés de quinze avocats, présentés au Conseil sont assurément plus respectables que l'arrêt du parlement de Toulouse . C'est intervertir l'ordre de la justice, que de supprimer des factums d'avocats qui demandent justice . Le parlement de Toulouse n'en a pas le droit, mais il veut éloigner les coups qu'on lui porte, et par cela même il fait voir qu'il les mérite . Cette démarche, Dieu merci, le rendra odieux au Conseil ; il pense sauver son malheureux honneur, et il se couvre de honte . Laissez faire nous aurons justice . »
1 Datée à l'arrivée par Debrus : « Re[çu] le 30 jan[vie]r » ; une autre main a ajouté « 29 jan[vie]r 1764 [corrigé en 1765] »
2 La suppression d'une réimpression du « Mémoire des Calas ».
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25/12/2017
Si je ne consultais que moi, je n’aurais assurément aucune répugnance ; mais tout le monde n’est pas aussi philosophe que votre serviteur
... En toute franchise, quel est le père d'une jeune fille qui n'a pas un jour fait cette réflexion , -debout sur les freins d'un mariage qui semble inenvisageable ,- qui ressemble à cette fameuse dénégation "moi, hostile à l'émigration ? s'il ne tenait qu'à moi, il n'y aurait plus de contrôle aux frontières , oui monsieur !".
Sacré Voltaire, père ( même adoptif) jusqu'au bout des ongles .
A propos d'immigration , un peu d'info , ça ne fait pas de mal : https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2010-1-page-12.h...
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental
29è janvier 1763 1
Vraiment, mes anges, j’avais oublié de vous supplier d’empêcher François Corneille, père, de venir à la noce. Si c’était l’oncle Pierre, ou même l’oncle Thomas, je le prierais en grande cérémonie, mais pour François, il n’y a pas moyen . Il est singulier qu’un père soit un trouble-fête dans une noce ; mais la chose est ainsi, comme vous savez . On prétend que la première chose que fera le père, dès qu’il aura reçu quelque argent, ce sera de venir à Ferney. Dieu nous en préserve ! Nous nous jetons aux ailes de nos anges, pour qu’ils l’empêchent d’être de la noce . Sa personne, ses propos, son emploi 2 , ne réussiraient pas auprès de la famille dans laquelle entre Mlle Corneille 3 . M. le duc de Villars et les autres Français qui seront de la cérémonie feraient quelques mauvaises plaisanteries . Si je ne consultais que moi, je n’aurais assurément aucune répugnance 4 ; mais tout le monde n’est pas aussi philosophe que votre serviteur, et patriarcalement parlant, je seras fort aise de rendre le père et la mère témoins du bonheur de leur fille.
C’est bien de la faute du père de M. de Colmont , si un autre que lui épouse Mlle Corneille . Il a été un mois sans lui répondre, et enfin sa mère a écrit à M. Micault 5 quand il n’était plus temps . Il faut avouer aussi que ce Colmont s’est conduit de la manière la plus gauche ; enfin il n’était point aimé, et notre petit Dupuits l’est ; il n’y a pas à répondre à cela.
Je ne cesse d’importuner mes anges, et de leur demander pardon de mes importunités ; c’est ma destinée, mais que M. d’Argental me parle donc de ses yeux ; car comme je suis en train de perdre les miens, je voudrais savoir en quel état les siens se trouvent . Il ne m’en dit jamais mot ; cela vaut pourtant la peine qu’on en parle.
Est-il vrai que M. de Courteilles est assez mal ? J’en serais bien fâché . Mme Denis, Mlle Corneille et moi nous baisons vos ailes.
V. »
1 L'édition de Kehl ,d' après la copie Beaumarchais donne une version incomplète du dernier paragraphe, suivie par les autres éditions .
2 Jean-François Corneille était « facteur de la petite poste dans les rues de Paris » dit V*
3 Voir lettre du 24 janvier à Damilaville
4 Cependant V* écrivit aux d’Argental le 10 janvier : « Mlle Clairon ayant dit qu’elle allait marier Mlle Corneille, Lekain nous écrivit qu’elle épouserait un comédien … J’estime les comédiens quand ils sont bons, et je veux qu’ils ne soient ni infâmes dans ce monde, ni damnés dans l’autre, mais l’idée de donner la cousine de M. de La Tour du Pin à un comédien est un peu révoltante… »
5 Micault, aide-major dans l’armée d’Estrées, neveu de Paris-Montmartel, était venu se faire soigner par T. Tronchin
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24/12/2017
Comptez que vous viendrez glorieusement à bout de ce que vous avez si généreusement entrepris
... Ah que j'aimerais affirmer ceci à nos gouvernants !
J'attends patiemment le 30 mai , à Ferney ...
« A Philippe Debrus
à Genève
Il faut que je vous dise, monsieur, ce que vous savez peut-être , que M. de Beaumont ayant travaillé deux heures tête à tête avec le rapporteur 1, ils ont été si contents l'un de l'autre, qu'ils se sont embrassés . Ce M. de Beaumont est une belle âme, il a fait une petite collecte, et l'a portée à Mme Calas . Cet exemple a été suivi de quelques personnes . Jugez à présent si nous devons craindre les fanatiques . Comptez que vous viendrez glorieusement à bout de ce que vous avez si généreusement entrepris . Ce sera un beau jour que celui où nous apprendrons la décision du Conseil .
V.
Vendredi soir [28 janvier 1763] 2»
1 Voir lettre du 20 février 1763 à Debrus .
2 Cette lettre est manifestement contemporaine de la lettre du même jour à Damilaville, d'où la date , confirmée par ailleurs par la mention à l'arrivée par Debrus : « Re[çu] le 30 [janvier], malgré l'ajout d'une autre main « 29 janvier 1767 [changé en 1764] » ; le 28 était bien un vendredi .
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23/12/2017
Nous sommes dans un étrange temps où il faut craindre qu'un parlement ne falsifie des pièces .
... en Espagne en voie d'être amputée par une bande d'égoïstes indépendantistes menés par un Carles à tête de Playmobil .
« A Etienne-Noël Damilaville
28 janvier 1763 1
M. de Beaumont, mon cher frère, est donc aussi un de nos frères . Il n'y a qu'un philosophe qui puisse faire tant de bien . Il se trouvera que Mme Cals aura beaucoup plus d’argent qu'elle n'en aurait eu en reprenant tranquillement sa dot et son douaire . Tout cela est d'un bien bon augure pour la révision . J'attends l'Histoire du Languedoc où l'on trouvera peut-être de quoi faire un cadre au tableau de toute cette aventure .
Nous sommes dans un étrange temps où il faut craindre qu'un parlement ne falsifie des pièces .
Aurai-je l'Appel à la raison 2 pour lequel on dit que Kroust et Griffet et feu Berner sont décrétés 3? Toute cette aventure des jésuites fait rire les philosophes, car il est permis au sage de rire .
Quand je dis que frère Thieriot est un philosophe trop apathique, ce n'est pas parce qu'il n'écrit point ( quoique j'écrive étant presque aveugle ) mais c'est qu'étant curieux de tous les rogatons nouveaux, il ne m'en envoie aucun . Il ne fait aucun pas pour m'en déterrer un seul . Sur ce j'embrasse mes frères .
Écrasez l’infâme . »
1 L'édition de Kehl amalgame cette lettre avec une autre en la datant du 30 janvier 1763 : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/06/correspondance-annee-1763-partie-4.html
2 V* a appris l'existence de cette pièce par une lettre de d'Alembert du 12 janvier 1763 ; c'est l'ouvrage anonyme intitulé Appel à la raison, des écrits et libelles publiés par la passion contre les jésuites de France, 1762 . selon Sommervogel, Dictionnaire des ouvrages anonymes et pseudonymes publiés par des religieux de la compagnie de Jésus , 1884, l'ouvrage serait d'André-Christophe Balbany, et Caveyrac n'aurait écrit que le Nouvel appel à la raison, 1762 . Voir : https://books.google.fr/books?id=I0dGAAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
3 C'est encore d'Alembert qui, dans la même lettre du 12 janvier, apprend à V* que Caveyrac était déclaré de prise de corps par le Châtelet, et que Griffet avait pris la fuite pour la même affaire ; voir des extraits de cette lettre dans http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/01/16/jean-jacques-fait-des-lacets-dans-son-village-avec-les-monta.html
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