16/09/2024
Pourquoi les carpes vivent-elles plus que les hommes ? cela est ridicule
.... Plouf !
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
12 mars 1769
Mon cher ange, j’ai envoyé à ma nièce une espèce de testament, moitié sérieux, moitié gai. C’est une Épître à Boileau , dans laquelle je fais mes remerciements à M. de Saint-Lambert 1. J’attends la décision de mes anges pour savoir si mon testament est valable . J’y ajouterai tous les codicilles qu’ils voudront.
Mon ange ne me dit rien du tripot (je parle du tripot de la Comédie), de la nouvelle pièce de de Belloy 2, des querelles des acteurs et des auteurs, des talents de Mlle Vestris, de sa réception. Pour moi, je n’ai d’autre nouvelle à mander, sinon qu’il neige autour de moi, et que la neige me tue.
Vous avez lu sans doute les Saisons de Saint-Lambert . Je l’ai remercié dans mon testament adressé à Nicolas3. Je ne sais si ma tête est jeune, mais mon corps est bien vieux. Si je ne m’amusais pas à faire des testaments, je serais bientôt mort d’ennui. Votre amitié me fait prendre la fin de ma vie en patience. Portez-vous bien, vous et Mme d’Argental. On ne vit pas assez longtemps. Pourquoi les carpes vivent-elles plus que les hommes ? cela est ridicule.4
V.»
1 Épître à Boileau, vers 113-116 : https://www.theatre-classique.fr/pages/theorie/VOLTAIRE_EPITREBOILEAU.htm
Oui, déjà Saint-Lambert, en bravant vos clameurs,
Sur ma tombe qui s'ouvre a répandu des fleurs ;
Aux sons harmonieux de son luth noble et tendre,
Mes mânes consolés chez les morts vont descendre.
2 Le Siège de Calais ; voir lettre du même jour à Mme Denis .
3 Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome10.djvu/411
4 Le contenu de ce paragraphe est étrange : V* semble oublier qu'il vient de parler du même sujet au début de la lettre. Les éditeurs de Kehl auraient-ils emprunté ce passage à une autre lettre ? On sait que ce procédé ne leur est que trop familier .
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15/09/2024
qui connaît très particulièrement la présidente et qui m'en a dit de bonnes
... Oui, qui ? Surement pas les deux femmes qui en savent tellement plus que nous pour oser diffamer connement Brigitte Macron
« A Marie-Louise Denis
12è mars 1769
Il neige depuis trois jours, ma chère nièce ; que faire pendant la neige ? J'ai fait cette épître 1 qui est une espèce de testament moitié gai, moitié sérieux . J'ai fait bien d'autres choses depuis quinze jours . Prenez toujours cela à compte . Montrez-le aux anges pour les amuser, ou renvoyez-leur copie .
On dit que la pièce de Du Belloy a un grand succès, mais quelle pièce ?2 Est-ce Le Siège de Calais ? Est-ce La Dame de Vergy ?
Le prince Camille 3 est revenu chez moi de Malte, où il est général des galères, avec un brave chevalier normand très aimable, qui connaît très particulièrement la présidente et qui m'en a dit de bonnes .
Ne craignez point la banqueroute du notaire ; il a été beaucoup plus mal dans ses affaires .
À propos, il serait bon que Saint-Lambert vit le petit remerciement que j'ai glissé pour lui dans l’Épître à Boileau . Je lui enverrai un exemplaire ; mais je n'ai pas assez de mains pour copier ce que mon imagination me dicte .
Je vous embrasse bien fort, et le plus tendrement du monde .
Je me suis amusé ce matin à faire une épître contre le livre des Trois imposteurs 4. Je viens de la finir . Je vous l'enverrai . Je crois l'athéisme aussi pernicieux que la superstition . »
1 Épître à Boileau ou Mon Testament : https://www.theatre-classique.fr/pages/theorie/VOLTAIRE_EPITREBOILEAU.htm
et
2 Le Siège de Calais qui vient d'être représenté à bureaux fermés .
3 Le prince Eugène-Hercule-Camille de Rohan Rochefort, chevalier de Malte, grand sénéchal des galères de l'ordre de Malte (1767), législateur de la langue de France de l'ordre de Malte (1776), maréchal des camps et armées du Roi de France (1780), émigré, sert dans l'armée de Condé, puis dans l'armée autrichienne (6 avril 1737 – 1795) 4. Sans postérité.
4 Épître à l'auteur du livre des Trois Imposteurs ; la phrase qui suit est très significative : elle ouvre la voie à l'Histoire de Jenni .
Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56870299/f6.item.langEN
et : https://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99Histoire_de_Jenni_ou_le_Sage_et_l%E2%80%99Ath%C3%A9e
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14/09/2024
Voici de petites nonnoteries qui pourront ne pas déplaire
... Merci Voltaire . A l'heure où on dévoile les actes sexuels délictueux de l'abbé Pierre, voici quelques réflexions sur les apôtres dont la sexualité est parfaitement occultée par l'Eglise officielle , elle qui désire uniquement le célibat pour les prêtres : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/02/dictionnaire-ph...
« A Charles-Frédéric-Gabriel Christin
Comment se porte notre cher philosophe ? Quand viendra-il chez nous faire ses Pâques ? On a écrit encore fortement à M. de La Borde .
Voici de petites nonnoteries 1 qui pourront ne pas déplaire . On l'embrasse bien tendrement.
11è mars 1769.
W. 2 vous prie d'en envoyer un à M. de Mailly 3. »
1 Il doit s'agir de la Lettre anonyme dont V* demandait l'impression le 7 février ; voir lettre du 7 février 1769 à Rieu : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/09/12/je-pense-d-ailleurs-que-la-reponse-vous-amusera-6514384.html
2 Wagnière, la lettre est de sa main .
3 Augustin-Joseph de Mailly (?) membre de l'Académie des Sciences, des Lettres et des Arts d'Amiens : https://fr.wikipedia.org/wiki/Augustin-Joseph_de_Mailly
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13/09/2024
un pour lui, un autre pour M. Vasselier, et le troisième pour M. Des Bordes
... Que l'on peut actualiser par "une de Grande-Bretagne, une d'Allemagne, une d'Italie " en parlant de déclarations de ministres d'Affaires étrangères , qui , à ce jour, n'ont donné aucun résultat tangible ( comme toujours me direz-vous quand on parle de déclarations politiques ): https://france-allemagne.fr/fr/actualites/declaration-con...
« A Jean-François-René Tabareau
10è mars 1769
Le bibliothécaire de monsieur Tabareau lui envoie ces trois volumes qu'il vient de recevoir d'Allemagne, l'un pour lui, un autre pour M. Vasselier, et le troisième pour M. Des Bordes .
On fait mille compliments à monsieur Tabareau et à M. Vasselier. »
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12/09/2024
de la hauteur dans la façon de penser; mais les Parisiens sont-ils capables de goûter le mérite
...Certains ont semblé goûter et apprécier les J.O. et les athlètes et leurs performances ; qu'en penseront-ils encore dans trois mois, six mois, un an , usés par les embouteillages et la vie chère ?
« A Jean-François La Harpe
À Ferney, ce 10 mars 1769 1
Mon cher panégyriste de Henri IV,
Et vitula tu dignus, et hic 2. Vous avez bien du talent en vers et en prose. Puisse-t-il servir à votre fortune comme il servira sûrement à votre réputation ! Je vous ai écrit, au sujet du tripot, la lettre ostensible 3 que vous demandiez : j’ai écrit aussi à M. le maréchal de Richelieu 4. Je crois à présent toutes choses en règle.
L’ouvrage de M. Lambert 5 me paraît, à plusieurs égards, fort au-dessus du siècle où nous sommes. Il y a de l’imagination dans l’expression, du tour, de l’harmonie, des portraits attendrissants, et de la hauteur dans la façon de penser; mais les Parisiens sont-ils capables de goûter le mérite de ce poème ? Ils ne connaissent les quatre saisons que par celle du bal, celle des Tuileries, celle des vacances du parlement, et celle où l’on va jouer aux cartes à deux lieues de Paris, au coin du feu, dans une maison de campagne. Pour moi, qui suis un bon laboureur, je pense à la Saint-Lambert.
Il m’est venu trois ou quatre A, B, C6 d’Amsterdam. Si vous voulez je vous en enverrai un. Je vous embrasse de tout mon cœur, sans cérémonie.
V.»
1 Original ; éd. Mercure de France ( avril 1769 ), qui ne donne que le second paragraphe, introduit par cette note : « Ne pouvant placer dasn ce volume le compte que nous nous proposons de rendre du nouveau poème des Saisons ,par M. de S.-L., nous croyons au moins faire plaisir à nos lecteurs de rapporter à ce sujet l'extrait d'une lettre de M. de Voltaire à M. de La Harpe . »
2 C’est à Gaillard et La Harpe que Voltaire applique ces premiers mots du vers 109 de la 3e églogue de Virgile : Et toi, et celui-ci êtes dignes d'une jeune génisse […]
Voir lettre du 23 janvier 1769 à Gaillard : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/08/05/je-suis-charme-que-vous-ayez-eu-le-prix-et-qu-il-ait-eu-l-accessit-quiconqu.html
et celle du 5 janvier à La Harpe : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/07/15/l-arret-porte-qu-on-lui-arrachera-la-langue-qu-on-lui-couper-6507108.html
3 Cette lettre ostensible est perdue.https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome27.djvu/319 Elle ne semble pas pouvoir être comme le propose M. Besterman, le second paragraphe de la présente lettre . Le « tripot » fait toujours allusion aux Comédiens-Français, or V* parle ici du poème des Saisons, qui n'a rien à voir avec le théâtre .
4 Cette lettre est aussi perdue ; car ce ne peut être celle du 27 février 1769 dont parle ici Voltaire.
5 Le poème des Saisons ; voir lettre du 7 mars 1769 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/09/09/c-est-chez-moi-que-murit-la-figue-a-cote-du-melon-6513860.html
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11/09/2024
je suis pénétré de tout ce que vous daignez faire
... Entre autres https://www.francetvinfo.fr/jeux-paralympiques/paris-2024...
« A Joseph Audra
10 mars 1769 au château de Ferney
Voici enfin, monsieur, l’infortuné Sirven qui paraît devant vous . Il perdra ce titre d’infortuné grâce à vos bontés et à celles de M. l’avocat de La Croix 1. Je peux vous assurer qu’on ne verra dans lui que l’innocence et la vertu même. Il est bien digne de vous et de M. de La Croix de protéger une famille si cruellement persécutée. S’il faut interroger ses deux filles, je les enverrai dès que M. de La Croix m’aura donné ses ordres . Sentez, monsieur, je vous prie, à quel point je suis pénétré de tout ce que vous daignez faire.
J’ai l’honneur d’être, avec tous les sentiments que je vous dois, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire.»
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10/09/2024
Ce qu’il y a de très triste, c’est que la chose n’est pas aisée, attendu que j’ai l’âme un peu fière.
... Serait-ce du Michel Barnier dans le texte ? Ou un des pressentis qu gouvernement ? Les orgueilleux sont légion toujours avec une modestie de façade . Il va falloir les supporter -un certain temps-. Money time : https://www.youtube.com/watch?v=zPe9XwwgAA0&ab_channe...
« A Marie de Vichy de Chamrond , marquise Du Deffand
8è mars 1769
Que je vous plains, madame ! vous avez déjà perdu l’âme de votre ami le président Hénault, et bientôt son corps sera réduit en poussière. Vous aviez deux amis, lui et M. de Formont ; la mort vous les a enlevés : ce sont des biens dont on ne retrouve pas même l’ombre. Je sens vivement votre situation.
Vous devez avoir une consolation bien touchante dans le commerce de votre grand-maman ; mais elle ne peut vous voir que rarement. Elle est enchaînée dans un pays qu’elle doit détester, vu la manière dont elle pense. Je vous vois réduite à la dissipation de la société, et, dans le fond du cœur, vous en sentez tout le frivole. L’adoucissement de cette malheureuse vie serait d’avoir auprès de soi un ami qui pensât comme nous, et qui parlât à notre cœur et à notre imagination le langage véritable de l’un et de l’autre.
Je crois bien (vanité à part) qu’il y a quelque ressemblance entre votre cervelle et la mienne. La dissipation ne m’est pas si nécessaire, à la vérité, qu’à vous ; mais pour le tumulte des idées, pour la vérité dans les sentiments, pour l’éloignement de tout artifice, pour le mépris qu’en général notre siècle mérite, pour le tact 1 de certains ridicules, je serais assez votre homme, et mon cœur est assez fait pour votre cœur . Je voudrais être à la fois à Saint-Joseph et à Ferney ; mais je ne connais que l’Eucharistie qui ait le privilège d’être en plusieurs lieux en même temps.
Voilà les neiges de nos montagnes qui commencent à fondre, et mes yeux qui commencent à voir. Il faut que je fasse tout ce que Saint-Lambert a si bien décrit. La campagne m’appelle ; deux cents bras travaillent sous mes yeux ; je bâtis, je plante, je sème, je fais vivre tout ce qui m’environne. Les Saisons de Saint-Lambert m’ont rendu la campagne encore plus précieuse. Je me fais lire à dîner et à souper de bons livres par des lecteurs très intelligents, qui sont plutôt mes amis que mes domestiques. Si je ne craignais d’être un fat, je vous dirais que je mène une vie délicieuse. J’ai de l’horreur pour la vie de Paris, mais je voudrais au moins y passer un hiver avec vous.
Ce qu’il y a de très triste, c’est que la chose n’est pas aisée, attendu que j’ai l’âme un peu fière.
Je songe réellement à vous amuser, quand je reçois quelques bagatelles des pays étrangers. Vous avez peut-être pris l’histoire de saint Cucufin pour une plaisanterie ; il n’y a pas un mot qui ne soit dans la plus exacte vérité. Vous aurez dans un mois quelque chose qui ne sera qu’allégorique 2 . Il faut varier vos petits divertissements.
Vous ne m’avez point répondu sur les Singularités de la nature 3 ; ainsi je ne vous les envoie pas, car c’est une affaire de pure physique qui ne pourrait que vous ennuyer.
Vous me faites grand plaisir, madame, de me dire que vous ne craignez rien pour M. Grand -maman 4. J’ai un peu à me plaindre d’une personne 5 qui lui veut du mal, et je m’en félicite. J’aime à voir des Racine qui ont des Pradons pour ennemis . Cela me fait penser à la queue du Siècle de Louis XIV, que j’ai eu l’honneur de vous envoyer. Votre exemplaire, sauf respect, est précieux, parce qu’il est corrigé en marge. Faites-vous lire « La prison de La Bourdonnais 6» et « La mort de Lally 7», et vous verrez comme les hommes sont justes. Quand je serai plus vieux, j’y ajouterai la mort du chevalier de La Barre et celle de Calas 8, afin que l’on connaisse dans toute sa beauté le temps où j’ai vécu. Selon que les objets se présentent à moi, je suis Héraclite ou Démocrite 9 ; tantôt je ris, tantôt les cheveux me dressent à la tête : et cela est très à sa place, car on a affaire tantôt à des tigres, tantôt à des singes. Le seul homme presque, de l’âme de qui je fasse cas, est M. Grand-maman ; mais je me garde bien de le lui dire. Pour vous, madame, je vous dis très naïvement que j’aime passionnément votre façon de penser, de sentir, et de vous exprimer ; et que je me tiens malheureux, dans mon bonheur de campagne, de passer ma vieillesse loin de vous. Mille tendres respects.
V.
Faites-moi savoir, je vous prie, comment vont l’âme et le corps de votre ami. »
1 Littré définit le tact comme un « jugement fin et délicat en matière de goût » et pas seulement en matière »de convenances, d'usage du monde ». De ce premier usage, il cite le présent exemple, des exemples de d'Alembert, Buffon, Diderot et de Mme de Genlis : https://www.littre.org/definition/tact
2 La tragédie des Guèbres ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome6.djvu/493
3 Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome27.djvu/133
4 Le duc de Choiseul.
5 Mme Du Barry.
6 Voir : Précis du Siècle de Louis XV, chap XXIV :
https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome15.djvu/341
7 Ibid ; chap . XXXIV ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome15.djvu/375
8Sur ces différentes affaires, voir L'Affaire Calas et autres affaires, édition présentée, établie et annotée par Jacques Van den Hendel, 1975 : https://uspc-bsb-psb.primo.exlibrisgroup.com/discovery/fulldisplay?docid=alma990000016520605803&context=L&vid=33USPC_BSB:BSB&lang=fr&adaptor=Local%20Search%20Engine&tab=LibraryCatalog&query=creator,exact,Saint%20Girons%20Baldine%201945-....,AND&facet=creator,exact,Saint%20Girons%20Baldine%201945-....&mode=advanced&offset=0
9 Sur le couple Héraclite-Démocrite, voir lettre du 2 mars à Gaillard : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/09/05/rire-et-meme-faire-rire-si-on-n-avait-pas-ce-palliatif-contr-6513359.html
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