04/07/2012
Le grand homme échappe au vulgaire
... Ce qui vaut pour le président en activité.
"Vous me paraissez bien plus grand,
Puisque vous êtes plus aimable."
Ce fut loin, oh ! bien loin d'être la première qualité de feu Sarko que j'ai trouvé d'une vulgarité crasse ( à nettoyer au Kärcher ! et à la paille de fer ) qui, elle, n'a pas eu besoin de perquisitions pour être mise au jour .
J'ai vu en page titre aujourd'hui que Carla, -oui, LA Carla !-, est atteinte de douleurs effroyables qui l'empêchent même de porter sa petite Giulia , que faire ? En aurait-elle plein le dos, déjà, de son vibrionnant époux déçu*/déchu* (Note * : ce qui est équivalent pour un Auvergnat ! fouchtra !! ) ? Si je puis me permettre, il est un remède facile à trouver : travailler pour gagner son pain, ça fait oublier ses maux .
Et comme une "mauvaise" nouvelle ne vient jamais seule, peut-être, je dis bien peut-être , arrivera ceci ?

« A M. le maréchal duc de RICHELIEU
Aux Délices, 3 mai [1756]
Mon héros, recevez mon petit compliment, il aura du moins le mérite d'être le premier 1. Je n'attends pas que les courriers soient arrivés. Il n'y aurait pas grand mérite à vous envoyer de mauvais vers quand tout le monde vous chantera. Je m'y prends à l'avance; c'est mon droit de vous deviner. Je vous crois à présent dans Port-Mahon, je crois la garnison prisonnière de guerre et si la chose n'est pas faite quand j'ai l'honneur de vous écrire, elle le sera à la réception de mon petit compliment. Une flotte anglaise peut arriver. Eh bien elle sera le témoin de votre triomphe. Enfin pardonnez-moi si je me presse. Vous vous pressez encore plus d'achever votre expédition. Il y a longtemps que je vous ai entendu dire que vous étiez primesautier 2.
Depuis plus de quarante années
Vous avez été mon héros;
J'ai présagé vos destinées.
Ainsi quand Achille à Scyros
Paraissait se livrer en proie
Aux jeux, aux amours, au repos,
Il devait un jour sur les flots
Porter la flamme devant Troie .
Ainsi quand Phryné dans ses bras
Tenait le jeune Alcibiade,
Phryné ne le possédait pas,
Et son nom fut dans les combats
Égal au nom de Miltiade.
Jadis les amants, les époux,
Tremblaient en vous voyant paraître
Près des belles et près du maitre
Vous avez fait plus d'un jaloux;
Enfin c'est aux héros à l'être.
C'est rarement que dans Paris,
Parmi les festins et les ris,
On démêle un grand caractère;
Le préjugé ne conçoit pas
Que celui qui sait l'art de plaire
Sache aussi sauver les États
Le grand homme échappe au vulgaire.
Mais lorsqu'aux champs de Fontenoi
Il sert sa patrie et son roi
Quand sa main des peuples de Gènes
Défend les jours et rompt les chaines;
Lorsque, aussi prompt que les éclairs,
Il chasse les tyrans des mers
Des murs de Minorque opprimée,
Alors ceux qui l'ont méconnu
En parlent comme son armée.
Chacun dit Je l'avais prévu.
Le succès fait la renommée.
Homme aimable, illustre guerrier,
En tout temps l'honneur de la France,
Triomphez de l'Anglais altier,
De l'envie, et de l'ignorance.
Je ne sais si dans Port-Mahon
Vous trouverez un statuaire;
Mais vous n'en avez plus affaire
Vous allez graver votre nom
Sur les débris de l'Angleterre;
Il sera béni chez l'Ibère,
Et chéri dans ma nation.
Des deux Richelieu sur la terre
Les exploits seront admirés;
Déjà tous deux sont comparés,
Et l'on ne sait qui l'on préfère.
Le cardinal affermissait
Et partageait le rang suprême
D'un maître qui le haïssait;
Vous vengez un roi qui vous aime.
Le cardinal fut plus puissant,
Et même un peu trop redoutable
Vous me paraissez bien plus grand,
Puisque vous êtes plus aimable.
Pardon, monseigneur, d'un si énorme bavardage vous avez bien autre chose à faire. »
1 Richelieu était entré à Port- Mahon vers le 20 avril; mais il ne parvint à s'emparer du fort Saint-Philippe que le 28 juin suivant.
2 Montaigne, Les Essais livre II, chapitre x : Des livres : http://www.bribes.org/trismegiste/es2ch10.htm
« ...car j'ay un esprit primesautier …. Je ne fay rien sans gayeté ... »
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03/07/2012
Il n'y a que le cœur qui soit inépuisable. Je voudrais bien que les talents fussent comme l'amitié, qu'ils augmentassent avec les années.
... Et cet homme génial a prouvé jusqu'à son dernier souffle sa fidèlité en amitié et la qualité de ses talents .
Si mes talents sont relatifs, avec ce qu'on peut appeler une bonne marge de croissance, mon amitié affectueuse pour Mam'zelle Wagnière se confirme à chaque rencontre , et je la crois bien inépuisable.
« A M. le comte d'ARGENTAL.
Aux Délices, 3 mai [1756]
Thieriot me mande, mon divin ange, que vous avez été content de l'édition de mes sermons, que ma morale vous a plu, que les Notes ont eu votre approbation mais vous saviez l'affront qu'on venait de faire au père de l'Église des sages, à Bayle 1. On venait de le traiter comme le père Berruyer et comme la Christiade; on l'associait à l'évêque de Troyes. On bullait tout, et Ancien et Nouveau Testament, et mandements, et philosophie. Cette capilotade est assez singulière, et le discours de M. Joly peu courtois pour le philosophe de Rotterdam. Mon mauvais ange voulut que, précisément dans ce temps-là, il se soit glissé au bout de mon Petit Carême une note sur Bayle qui devient tout juste la satire d'un jugement que j'ignorais, et du discours éloquent de M. Joly de Fleury, que je n'avais pu deviner. Je n'ai été informé que par les gazettes de l'arrêt contre l'Écriture sainte et contre Bayle. J'ai écrit aussitôt à Thieriot, l'éditeur; je l'ai prié de réformer ma scandaleuse note faite si innocemment. Je ne veux pas être brûlé avec la Bible; à moi n'appartient tant d'honneur. Il est certain qu'il y a deux ou trois petits mots qui doivent déplaire beaucoup à M. Joly de Fleury « Que ceux qui se déchainent contre Bayle apprennent de lui à raisonner et à être modérés » et, à la fin de la note: « C'est qu'ils sont injustes. » Encore une fois, je ne pouvais deviner que des hommes qui raisonnent, qui sont modérés et justes, traitassent Bayle comme ils l'ont fait; mais je ne dois pas le leur dire. Vous venez toujours à mon secours, mon ange; mais en est-il temps? et Thieriot n'a-t-il pas déjà fait imprimer ma bévue? Je vous supplie aussi de ne pas permettre qu'on gâte ce vers
L'empereur ne peut rien sans ses chers électeurs 2.
Le mot de cher est celui dont il se sert en leur écrivant. Ce sont ces mots propres et caractéristiques qui font le mérite d'un vers. Qu'avec ses électeurs est dur et faible. Je voudrais bien n'être ni brûlé ni mutilé.
Je mérite ces grâces de vous, puisque je vous fais faire deux tragédies à la fois sous mes yeux. La première est ce Botoniate, ce Nicéphore, que le conseiller 3 genevois raccommode, la seconde est Alceste, à laquelle votre très-humble servante, ma nièce, travaille tout doucement. Il ne reste plus que moi mais je vous ai déjà dit qu'il me fallait du temps, de la santé, et flatus divinus 4. J'attends le moment de la grâce. Si mon état continue, je serai un juste à qui la grâce aura manqué. Je ne peux d'ailleurs songer à présent qu'à Port-Mahon. Je me flatte que vous apprendrez bientôt la réduction de toute l'île. Ce sera là un beau coup de théâtre, un beau dénoûment; mais, en vérité, il est plus aisé de prendre Minorque que de faire une bonne tragédie à mon âge. Je ne connais plus les acteurs, je suis loin de vous. Les sujets sont épuisés, et moi aussi. Il n'y a que le cœur qui soit inépuisable. Je voudrais bien que les talents fussent comme l'amitié, qu'ils augmentassent avec les années. Adieu mille tendres respects à tous les anges. »
1 Voir lettre précédente du 30 avril à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/07/03/les-hommes-sont-inconsequents-c-est-qu-ils-sont-injustes-ce.html
2 La Loi naturelle, seconde partie, v. 19, page 378, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80005b/f384.tableDesMatieres
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" ... les hommes sont inconséquents, c'est qu'ils sont injustes. » Ces mots étaient une prophétie; supprimons-la
... Et coupons toutes les têtes qui dépassent !
"Les hommes, lorsqu'ils ne sont plus que l'ombre d'humains résonnent comme des cruches et raisonnent comme leurs pieds !" : paroles de pigeon voyageur .
En attendant le TGV, le 30/6/2012
« A M. THIERIOT.
Aux Délices, 30 avril [1756]
Je viens de lire la gazette, et, en conséquence, je vous prie, mon ancien ami, de faire corriger la note 1 sur Bayle, s'il en est temps. Je ne veux point me brouiller avec gens qui traitent si durement Pierre Bayle. Le parlement de Toulouse honora un peu plus sa mémoire; mais altri tempi, altre cure. L'auteur des Notes sur le Sermon de Lisbonne ne pouvait prévoir qu'on ferait une Saint-Barthélemy de Bayle, du pauvre jésuite Berruyer 2, de l'évêque de Troyes 3, et de je ne sais quelle Christiade 4. Il faut retrancher tout ce passage « Je crois devoir adoucir ici, etc. » (page 20), et mettre tout simplement: « Tout sceptique qu'est le philosophe Bayle il n'a jamais nié la Providence, etc. » et, à la fin de la note, il faut retrancher ces mots: « C'est que les hommes sont inconséquents, c'est qu'ils sont injustes. » Ces mots étaient une prophétie; supprimons-la. Les prophètes n'ont jamais eu beau jeu dans ce monde. Mettons à la place « C'est apparemment pour d'autres raisons qui n'intéressent point ces principes fondamentaux, mais qui regardent d'autres dogmes non moins respectables. » Je vous prie, mon ancien ami, de ne pas négliger cette besogne; elle est nécessaire. Il se trouve, par un malheureux hasard, que la note, telle qu'elle est, deviendrait la satire du discours d'un avocat
général 5 et d'un arrêt du parlement; on pourrait inquiéter le libraire, et savoir mauvais gré à l'éditeur le pauvre père Berruyer sera de mon avis. Tâchez donc, mon ancien ami, de raccommoder par votre prudence la sottise du hasard.
Je crois actuellement M. de Richelieu dans Port-Mahon, il n'est pas allé là par la cheminée 6.
Je vous embrasse de tout mon cœur. »
1 Voir la lettre du 3 mai à d'Argental . L'arrêt de la cour de parlement du 9 avril 1756, sur le réquisitoire d'Omer Joly de Fleury, condamnait à être supprimés ou lacérés et brulés, non le Dictionnaire de Bayle, mais son Analyse raisonnée (par le jésuite de Marsy), 1755, 4 vol. in-12 (auxquels Robinet en ajouta quatre en 1773); la Christiade, dont il est parlé tome XX, page 32; les première et seconde parties de l'Histoire du peuple de Dieu, par Berruyer.
2 Isaac-Joseph Berruyer ; http://fr.wikipedia.org/wiki/Isaac-Joseph_Berruyer
et : http://www.berruyer.fr/celebres/genealogie-3-3-isaac.html
4Voir page 195 : http://books.google.fr/books?id=Ke4Ta49QQToC&pg=PA195&lpg=PA195&dq=1.+arr%C3%AAt+de+la+cour+de+parlement+du+9+avril+1756&source=bl&ots=dRqFuR8QYP&sig=LDYGuaUap26krt-_1gzQwmSXITg&hl=fr&sa=X&ei=COvxT8_UHsKf0QXD49TMDQ&ved=0CDsQ6AEwAA#v=onepage&q=1.%20arr%C3%AAt%20de%20la%20cour%20de%20parlement%20du%209%20avril%201756&f=false
5 Omer Joly de Fleury .Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Famille_Joly_de_Fleury
00:26 | Lien permanent | Commentaires (0)
02/07/2012
Je ne suis pas le seul qui parie pour vous.
... Monsieur le président .
J'en connais d'autres, qui misent sur vous, dont une que j'ai fait attendre en plein soleil samedi (voir la preuve en image suivante), qui sont partie prenante .
Hassan II is alive !!
Note de dernière seconde, sur Antenne 2, le commentateur du résumé de l'étape se terminant à Tournai vient de ressusciter un mort , Hassan II, qui selon lui honore de sa présence l'arrivée du jour . Mort de rire, je suis, d'autant plus que Gérard Holz , emporté par un enthousiasme que je ne partage pas, attribue le titre de "roi du commentaire" au magnifique gaffeur . Je ne sais qui va remporter ce tour, mais la palme de l'autosatisfaction et de l'à-peu-près me semble difficile à enlever à ces deux bazus .Je crois que la boite à coïonneries est largement ouverte !
Quant à Hassan II, il ne lui reste plus, après une bonne douche, qu'à se recoucher dans son cercueil pour récupérer , l'étape de demain ne sera pas facile . Le verra t'on à Boulogne ?
« A M. le maréchal duc de RICHELIEU.
Aux Délices, près de Genève, avril [1756]
Prenez Port-Mahon, mon héros; c'est mon affaire. Vous savez qu'un fou d'Anglais parie vingt contre un, à bureau ouvert dans Londres, qu'on vous mènera prisonnier en Angleterre avant quatre mois. J'envoie commission à Londres de déposer vingt guinées contre cet extravagant, et j'espère bien gagner quatre cents livres sterling 1, avec quoi je donnerai un beau feu de joie le jour que j'apprendrai que vous avez fait la garnison de Saint- Philippe prisonnière de guerre. Je ne suis pas le seul qui parie pour vous. Vous vengerez la France, et vous enrichirez plus d'un Français. Je me flatte que, malgré la fatigue et les chaleurs, la gloire vous donne de la santé, à vous et à M. le duc de Fronsac.
Vous avez auprès de vous toute votre famille. Permettez-moi de souhaiter que vous buviez tous à la glace dans ce maudit fort de Saint-Philippe, couronnés de lauriers comme des Romains triomphant des Carthaginois.
Je n'ose pas vous supplier d'ordonner à un de vos secrétaires de m'envoyer les bulletins mais, si vous pouvez me faire cette faveur, vous ne pouvez assurément en honorer personne plus intéressé à vos succès.
Permettez que les deux Suisses vous présentent leur tendre respect. »
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29/06/2012
Il se passe toujours des scènes sanglantes en Asie, tant en Perse que dans l'Indoustan
... Eh ! mon pauvre Voltaire, ça dure encore !
On ne peut pas dire Otros tiempos, Otros hombres :
http://www.deezer.com/music/track/15043941
Alors , Machine gun , à tout va !
http://www.deezer.com/music/track/4180407

http://www.raremaps.com/gallery/detail/27429/Indoustan_ou...
« A madame la duchesse de SAXE-GOTHA
Aux Délices, près de Genève, 26 avril [1756]
Madame, je me doutais bien de quel avis serait Votre Altesse sérénissime. Le plaisant de l'affaire, c'est qu'à Paris, quand on a vu l'ouvrage adressé à une princesse, on a cru que cette princesse était une sœur de.1 et on l'a imprimé avec son nom. Je n'ai eu qu'à me taire, et je laisse les prêtres et les philosophes se battre.
Les Français et les Anglais doivent se battre, à présent, un peu plus sérieusement. M. de Richelieu attaque à présent le Port-Mahon, et la flotte anglaise n'a pas encore paru pour le défendre. Si elle n'arrive que pour être témoin de la prise, l'Angleterre perdra son crédit dans l'Europe.
Il est toujours très-confirmé, par les lettres que je reçois de Buenos-Ayres, que les jésuites font, de leur côté, très-respectueusement la guerre au roi d'Espagne, et qu'ils empêchent les peuples du Paraguai de lui obéir.
Les mêmes lettres m'apprennent les détails inouïs de la destruction de Quito, au Pérou. C'est bien pis qu'à Lisbonne, la terre y a tremblé pendant trois mois. Le Tout est bien est un peu dérangé en Amérique, en Europe et en Afrique. Il se passe toujours des scènes sanglantes en Asie, tant en Perse que dans l'Indoustan. Jugez, madame, s'il est doux de vivre à Gotha. On dit, à Genève, que Votre Altesse sérénissime pourrait bien y envoyer le prince son second fils, pour y faire quelque temps ses études. Que ne suis-je assez heureux pour que cette nouvelle soit vraie ou plutôt, que ne puis-je, dès à présent, venir faire la cour à la mère, et mettre à ses pieds un cœur qui sera toujours pénétré pour elle et pour toute son auguste famille du plus profond respect et du plus inviolable attachement . »
16:28 | Lien permanent | Commentaires (0)
à toutes les questions que vous me faites, commençons par le moins intéressant, et le plus aisé
... Je suis toujours Gessien , bienheureux d'être proche du château de Voltaire, qui grouille de monde ces jours-ci, pour cause de préparation de la Fête à Voltaire, laquelle fête , cette année me déplait souverainement car on va honorer ce dadais méchant : JJ Rousseau .
Au milieu de tout ce chambardement, le géant roupille, et je peux vous assurer qu'il n'ouvrira pas un oeil pour voir l'arrivée du JJR
«De M. le duc de la VALLIÈRE
A Versailles, ce 22 avril 1756.
Je vais répondre avec le plus grand plaisir du monde, mon cher Voltaire, à toutes les questions que vous me faites, commençons par le moins intéressant, et le plus aisé. J'habite toujours Montrouge; je suis comme Proserpine, juste la moitié de ma vie à Versailles, l'autre moitié dans ma retraite délicieuse à tous égards; jamais un moment à Paris; je ne vais plus à Champs; il m'est impossible, à la vie que je mène, d'en jouir, et je le regarde précisément comme une maîtresse qui serait allée s'établir au nouveau monde. Il se pourrait quelquefois qu'il m'en revint des images agréables, mais je ne m'en croirais pas moins dans le cas d'en prendre une autre. Quant à l'abbé de Voisenon, hélas dans ce moment-ci c'est une brebis égarée; l'Amour me l'a ravi. Plus épris qu'un jeune écolier, il ne quitte plus l'objet de sa tendresse, et je crains d'autant plus pour sa santé que je ne crois point du tout qu'elle soit d'accord ni avec son ardeur ni avec son bonheur. Deux accès d'asthme ne me l'ont point encore ramené; il touche au troisième, et je le reverrai mauvais moment, comme vous voyez, pour lui proposer ce que je désire; et puis, à tout seigneur tout honneur 1.
Passons au plus intéressant. Un rayon de la grâce a éclairé, mais sans ivresse 2; quelques changements médiocres en sont le seul témoignage. On ne va plus au spectacle, on a fait maigre trois jours de la semaine, pendant tout le carême, mais sous la condition qu'on n'en serait point incommodée. Les moments qu'on peut donner à la lecture sont vraisemblablement employés à de bons livres; au reste, la même vie, les mêmes amis, et je me flatte d'être du nombre; aussi aimable qu'on a jamais été, et plus de crédit que jamais. Voilà la position où l'on est, et qui fait qu'on voudrait des psaumes de votre façon. L'on vous connait, on vous a admiré, et l'on veut vous lire encore; mais l'on est bien aise de vous prescrire l'objet de ses lectures. Ainsi, je vous le répète, il faut que vous nous donniez une heure par jour, et bientôt vous verrez que vous aurez satisfait et à nos désirs, et à votre réputation. Je vous le dis encore, et en vérité sans fadeur, de tout temps vous avez été destiné à faire cet ouvrage. Vous vous le devez, et à nous aussi, et c'est une marque d'attention à laquelle le bon prophète sera très-sensible; je le serai aussi très-sincèrement à cette preuve d'amitié de votre part, et j'en attends incessamment les heureux essais .
A l'égard de l'opéra prussien (Mérope), de la fin de la Pucelle que vous m'avez promise, et des autres choses que vous me faites espérer, envoyez- les à Genève, à M. Vasserot de Châteauvieux 3, il me les enverra par le premier ballot qu'il m'adressera. Je vous demande deux exemplaires de vos deux poèmes avec les notes 4, l'un pour Mme de Pompadour, l'autre pour moi. Envoyez-les-moi par la poste avec une première enveloppe à mon nom, et par-dessus une autre à M. de Malesherbes, premier président de la cour des aides. Il est accoutumé à en recevoir beaucoup pour moi. Vous feriez bien d'y joindre un ou deux psaumes, je vous en remercie d'avance 5 »
1. On peut conjecturer de ce que dit ici le duc de La Vallière que Voltaire, en éludant la demande qu'on lui faisait touchant des psaumes, aurait engagé le duc à s'adresser à l'abbé de Voisenon, qu'on appelait l'évêque de Montrouge, pour remplir un thème qui était plus de sa compétence que de celle d'un laïque.
2 Il s'agit ici de Mme de Pompadour.
3 Jean Vasserot de Chateauvieux, avocat, fils de Jean Vasserot (noble français protestant exilé en Hollande où il avait fait fortune ), possède le domaine de Dardagny uni à Châteauvieux et Confignon, proche de Genève, depuis 1731 .
5 Voltaire ne fit point de psaumes. Voir tome IX, page 481 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411325t/f483.image
et ci-après la lettre à Thieriot du 11 juin 1759, citée dans : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/06/07/i...
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28/06/2012
si les Anglais ont été assez malavisés pour ne pas prendre de justes mesures, ils auront la réputation d'avoir été de bons pirates et de très-mauvais politiques.
... Oui, celà est ! N'est il pas ?*
Mister Cameron, vous devez mettre le nez dans votre caca , et bien vous laver avant de faire la leçon au reste de l'Europe .
http://www.20minutes.fr/monde/953301-scandale-ecoutes-cam...

* En VO : Yes, it is ! Is n't it ?
« A M. Joseph PARIS-DUVERNEY 1
Aux Délices, le 26 avril [1756]
Il y a un mois, monsieur, que je devais vous renouveler mes remerciements, car il y a un mois que je jouis du plaisir de voir s'épanouir sous mes fenêtres les belles fleurs que vous eûtes la bonté de m'envoyer l'an passé. Je fais d'autant plus de cas des plaisirs de cette espèce que malheureusement je n'en ai plus guère d'autres. Pour vous, monsieur, vous jouissez d'un bonheur plus précieux, de la santé, de la considération, et de la gloire que vous avez acquise. Ce sont là de belles fleurs qui valent mieux que des jacinthes, des renoncules, et des tulipes.
Je crois que ni vous ni moi ne serons fâchés d'apprendre la prise de Minorque par M. le maréchal de Richelieu. Vous vous êtes toujours intéressé à sa gloire, comme je l'ai vu prendre à cœur tout ce qui vous regardait. S'il venge la France des pirateries anglaises, il lui faudra une nouvelle statue à Port-Mahon et si les Anglais ont été assez malavisés pour ne pas prendre de justes mesures, ils auront la réputation d'avoir été de bons pirates et de très-mauvais politiques.
Adieu, monsieur conservez-moi un souvenir qui me sera toujours infiniment précieux. Vous voulez bien que je présente ici mes très-humbles obéissances à monsieur votre frère 2. Je le crois à présent à Brunoy, comme vous à Plaisance 3, n'ayant plus l'un et l'autre que des occupations douces qui exercent l'esprit sans le fatiguer. Vivez l'un et l'autre plus que le cardinal de Fleury, avec le plaisir et la gloire d'avoir fait plus de bien à vos amis que jamais ce ministre n'en a fait aux siens, supposé qu'il en ait eu. »
1 Joseph Pâris-Duverney, le troisième des quatre frères Pâris, créateur de l'École militaire, dont il fut intendant; mort le 17 juillet 1770.
Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fr%C3%A8res_P%C3%A2ris
et : http://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_P%C3%A2ris_Duverney
2 Jean Paris de Montmartel. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_P%C3%A2ris_de_Monmartel
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