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21/07/2012

il y a un peu d'amour- propre à moi de voir que l'Europe vous regarde des mêmes yeux que je vous ai vu depuis plus de vingt ans

... Il y a un peu d'amour-propre à moi de voir que le monde vous regarde des mêmes yeux que je vous ai vu, depuis trop peu d'années je dois l'avouer, -oserais-je paraphraser,- mon cher Voltaire .

Et je vous salue .

 

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Voltaire, par Emile Lambert, Maison Fusier à Ferney-Voltaire


 

 

 

« A M. le maréchal duc de RICHELIEU.

Aux Délices, 16 juillet [1756]

Mon héros et celui de la France, en vertu du petit billet 1 dont vous daignâtes m'honorer après votre bel assaut, j'eus l'honneur de vous dire tout ce que j'en pense, et de vous écrire à Compiègne. Vous allez être assassiné de poèmes et d'odes. Un jésuite de Diécon, un abbé de Dijon, un bel esprit de Toulouse, m'en ont déjà envoyé . Je suis le bureau d'adresses de vos triomphes. On s'adresse à moi comme au vieux secrétaire de votre gloire.
Ce qui me fait le plus de plaisir, c'est une Histoire de la révolution de Gênes, très-sagement écrite et très-exacte, qui paraît depuis peu en italien. On m'en a apporté la traduction en français on vous y rend toute la justice qui vous est due 2. Je vais incessamment la faire imprimer. J'avoue qu'il y a un peu d'amour- propre à moi de voir que l'Europe vous regarde des mêmes yeux que je vous ai vu depuis plus de vingt ans mais, en vérité, il y a cent fois plus d'attachement que de vanité dans mon fait. On dit que M. le duc de Fronsac 3 était fait comme un homme qui vient d'un assaut, quand il a porté la nouvelle. Il était, avec les grâces qu'il tient de vous, orné de toutes celles d'un brûleur de maisons. Il tient cela de vous encore. Demandez à votre écuyer si vous n'aviez pas votre chapeau en clabaud, et si vous n'étiez pas noir comme un diable, et poudreux comme un courrier, à la bataille de Fontenoy.
Je vous importune; pardonnez au bavard. »

 

1 Daté du 29 juin, jour où Port-Mahon capitula.

3 Louis-Antoine-Sophie de Vignerot du Plessis , fils unique du duc de Richelieu : voir page 353 : http://books.google.fr/books?id=I0sWAAAAYAAJ&pg=PA353&lpg=PA353&dq=duc+de+fronsac+1756+richelieu&source=bl&ots=eNlyTagEft&sig=E9IYuNDYNwLoAxm8FLPUYJBBhrA&hl=fr&sa=X&ei=lp8KUNKXE_C10QXIn8jgCg&ved=0CEwQ6AEwCA#v=onepage&q=duc%20de%20fronsac%201756%20richelieu&f=false

Ce duc, qui avait montré de la valeur au siège de Port-Mahon, venait de recevoir la croix de Saint-Louis pour récompense.

 

20/07/2012

Nous autres voisins du Rhône, nous savons toujours les nouvelles quelques jours avant vous autres Parisiens

... Et pan sur le bec !

N'est-il pas vrai Mam'zelle Wagnière ?

 

au fil du rhone 6703.jpg

 Et qu'il me soit permis, tel ce grand fleuve Rhône charriant furieusement ce tronc, de vous faire part d'une nouvelle qui me hérisse le poil, qui une fois de plus ne me rassure pas, venant de czar Poutine 1er et de l'église orthodoxe qui reprend bêtement des attitudes dépassées .

"Halte à la censure imbécile !"  ou "halte à la censure, imbéciles !" ( l'un et l'autre se dit, ou se disent) :

http://www.lepoint.fr/culture/priere-anti-poutine-les-pussy-riot-restent-en-detention-jusqu-en-2013-20-07-2012-1487752_3.php

 

 

 

« A M. le comte d'ARGENTAL.

Aux Délices, 16 juillet [1756]

Mon cher ange, on voit bien que vous ne m'écrivez pas les secrets de l'État, car vous m'envoyez vos lettres sans les cacheter. M. Tronchin, le conseiller de Genève 1, voit que vous attendez toujours avec impatience une tragédie; il y a grande apparence que la sienne 2 sera la première que vous aurez. Je vous servirai un peu plus tard. Il est permis d'être lent à mon âge. Vous me pardonnerez bien de préférer quelque temps Louis XIV aux héros de l'antiquité. Je ne pourrai être absolument à leurs ordres et aux vôtres que quand j'aurai mis le Siècle de Louis XIV dans son nouveau cadre.
Souffrez que je me défie un peu de toutes les anecdotes; celle des campements du prince Eugène, depuis le Quesnoi jusqu'à Montmartre, est plus que suspecte. Comment veut-on qu'on ait pris à Denain ce projet de campagne? Le prince Eugène n'avait pas son portefeuille dans les retranchements de Denain, où il n'était pas. Je ne veux pas ressembler à ce La Beaumelle, qui répète tous les bruits de ville à tort et à travers, qui paraît avoir été le confident de Monseigneur et de Mlle Choin, et qui parle du duc d'Orléans comme s'il avait souvent soupé avec lui.
Si jamais on imprime les Mémoires du marquis de Dangeau, on verra que j'ai eu raison de dire qu'il faisait écrire les nouvelles par son valet de chambre. Le pauvre homme était si ivre de la cour qu'il croyait qu'il était digne de la postérité de marquer à quelle heure un ministre était entré dans la chambre du roi. Quatorze volumes sont remplis de ces détails. Un huissier y trouverait beaucoup à apprendre, un historien n'y aurait pas grand profit à faire. Je ne veux que des vérités utiles. J'ai cherché à en dire depuis le temps de Charlemagne jusqu'à nos jours. C'est peut-être l'emploi d'un homme qui n'est plus historiographe, car ceux qui l'ont été ont rarement dit la vérité. Il y en a à présent de bien agréables à dire à M. le maréchal de Richelieu. J'étais fâché que ma prophétie courût, parce qu'on pouvait me soupçonner d'en avoir fait les honneurs mais j'étais fort aise d'être le premier à lui rendre justice. Il eut la bonté de me mander, le 29 du mois passé, l'accomplissement de ma prophétie. Nous autres voisins du Rhône, nous savons toujours les nouvelles quelques jours avant vous autres Parisiens.
M. le duc de Villars avait encore Mlle Clairon il y a trois jours. Je lui ai écrit, à cette Idamé; et si ma santé le permettait, j'irais l'entendre à Lyon mais je sens que je ne me transplanterais que pour venir vous voir, mon cher ange. Je pourrais bien faire cette partie l'année prochaine, avec quelques héros à cothurne et quelques héroïnes. Il n'est pas mal de se tenir quelque temps à l'écart c'est presque le seul préservatif contre l'envie et contre la calomnie, encore n'est-il pas toujours bien sûr.
Je ne sais pas comment Sémiramis aura réussi sans Mlle Clairon. Si la demoiselle Dumesnil continue à boire, adieu le tragique! Il n'y a jamais eu de talents durables avec l'ivrognerie. Il faut être sobre pour faire des tragédies et pour les jouer.
On me parait de tous côtés très-indigné contre La Beaumelle. Plusieurs personnes même trouvent assez étrange que cet homme soit tranquille à Paris, et que je n'y sois pas mais ces gens-là ne voient pas que tout cela est dans l'ordre. Adieu, mon divin ange; mes nièces vous embrassent. Mme de Fontaine est un miracle de Tronchin, si cela continue, vous la reverrez avec des tetons. Il fait bien chaud pour jouer Sémiramis; mais Crébillon ne fera-t-il pas jouer la sienne? c'est un de ses ouvrages qu'il estime le plus. Adieu; mille respects à tous les anges. »

 

le bonheur réel est dans vous, dans votre esprit sage et élevé; il est dans la satisfaction d'être aimée

... Ah ! comme Volti sait consoler et réconforter . Il est un bon coach !

 Et voici le sourire du bonheur

 

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« A Madame la duchesse de SAXE-GOTHA

Aux Délices, près de Genève, 12 juillet [1756]

Madame, mon attachement, ma sensibilité extrême pour tout ce qui intéresse Votre Altesse sérénissime, avaient prévenu la bonté que vous avez eue de daigner me parler de votre perte 1.
Je suis persuadé qu'elle éprouve tous les jours de nouvelles consolations dans des enfants si chers, si dignes d'elle et si bien élevés. Elle les voit croître sous ses yeux; elle est témoin de leurs progrès. Ce sera là, madame, le plus solide plaisir de votre vie. D'autres vont le chercher à Venise et à Naples; mais le bonheur réel est dans vous, dans votre esprit sage et élevé; il est dans la satisfaction d'être aimée. J'y compte pour beaucoup la grande maîtresse des cœurs je me flatte que les alarmes sur sa santé sont évanouies.
On a reconnu, dans Paris, que les Mémoires de Mme de Maintenon sont autant d'impostures, et que ses lettres, qui sont véritablement d'elle, ne contiennent pas beaucoup d'anecdotes intéressantes. Je suis persuadé qu'un esprit comme le vôtre s'amusera peu de tous ces détails inutiles.
La prise de Port-Mahon et les nouveaux traités occupent l'Europe davantage. Un homme de l'Académie des sciences, à Paris, nommé l'abbé de Gua 2, a voulu la faire trembler. Il a prédit un tremblement de terre pour le 9 de ce mois je me flatte qu'il n'aura pas été prophète.
Ce fameux Tronchin 3, qui a été à Paris inoculer nos princes et guérir tant de personnes, est chez moi actuellement avec une de mes nièces 4, qu'il a tirée des portes de la mort. J'aurais bien voulu qu'il eût été à Gotha dans ses voyages c'est véritablement un grand homme; mais je suis encore plus incurable qu'il n'est habile. Il faut se soumettre à sa destinée. La mienne, madame, est d'être dévoué à Votre Altesse sérénissime et à toute votre auguste famille, avec le plus profond respect et le plus tendre attachement. »

 

3 Théodore Tronchin, célèbre médecin .

4 Mme Marie-Elisabeth de Fontaine, sœur de Mme Marie-Louise  Denis .

 

19/07/2012

Vous trouveriez les environs de Genève bien changés; ils sont dignes des regards d'un homme qui a tout vu.

... Et qui connait pire et mieux .

Une urbanisation foisonnante, un manque de terrains à bâtir (et terrains trop chers), une population frontalière énorme sont en effet des choses qui n'étonnent pas par leur rareté, mais simplement par leur ampleur dans le pays de Gex et la Haute-Savoie .   D'où loyers disproportionnés boostés par les "riches" Suisses et un prix du m2 de terrain et de logement digne de Paris ou des bons coins sur la Côte d'Azur .

"L'homme qui a tout vu" a fort intérêt se dire qu'il a encore à voir le château de Voltaire .

En voila un qui fait une sieste à rallonge, hébergé par Voltaire

 

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« A M. le comte ALGAROTTI

Aux Délices, 7 juillet [1756]

Ho ricevuto colla più viva gratitudine, caro signor mio, ciô che ho letto col più gran piacere. Siete giudice d' ogni arte, e maestro d' ogni stile, et doctus sermonis cujuscumque lingux 1. Onm'assure que vous êtes parti de Venise après l'avoir instruite, que vous allez à Rome et à Naples. On me fait espérer que vous pourrez faire encore un voyage en France, et repasser par Genève; je le désire plus que je ne l'espère. Vous trouveriez les environs de Genève bien changés; ils sont dignes des regards d'un homme qui a tout vu. Je n'habite que la moindre maison de ce pays-là; mais la situation en est si agréable que peut-être, en voyant de votre fenêtre le lac de Genève, la ville, deux rivières 2, et cent jardins, vous ne regretteriez pas absolument Potsdam. Ma destinée a été de vous voir à la campagne, ne pourrais- je vous y revoir encore?
Ella troverà difficilmente un pittore tal quale lo vuole, e più difficilmente ancora un impresario, o un Swerts, che possa far rappresentare un opera conforme aile vostre belle regole; ma troverà nel mio ritiro des Délices, un dilettante appassionato di tutto ciô che scrivete, e non meno innamorato della vostra gentilissima conversazione.
Je suis trop vieux, trop malade, et trop bien posté pour aller ailleurs. Si je voyageais, ce serait pour venir vous voir à Venise; mais si vous êtes en train de courir, per Dio, venite a Ginevra.
Farewell, farewell I love you sincerely, and for ever. »

1 Horace, livre III, ode VIII, vers 5 .

2 L'Arve et le Rhône. Voltaire parle d'un troisième « fleuve » (l'Aire) dans sa lettre à Adhémar, de juillet 1757.

 

18/07/2012

Mais la politique et les armes Ne font pas mes félicités.

... Et je ne tiens pas à me fourrer dans ces domaines .

Il suffit à mon bonheur, entre autres, de me promener sous les charmilles du château de Volti, en rejoignant par la pensée deux personnes qui me sont chères  et l'esprit d'un petit toutou que j'aimais bien .

A toute personne qui a quelque sympathie ou curiosité envers Voltaire, je conseille cette promenade qui est un régal .

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 NB- Ce n'est pas l'auteur de la photo qui penche , épris de boisson, ce sont les charmilles !

 

« A M. le maréchal duc de RICHELIEU 1

Aux Délices, juillet [1756]

Mon héros, je vais aussi brûler de la poudre; mais je tirerai moins de fusées que vous n'avez tiré de coups de canon 2. Ma prophétie a été accomplie encore plus tôt que je ne croyais, en dépit des malins qui niaient que je connusse l'avenir et que vous en disposassiez si bien. Je vous vois d'ici tout rayonnant de gloire.

 


Ce n'est plus aux Anacréons
De chanter avec vous à table;
La mollesse de leurs chansons
N'aurait plus rien de convenable
A vos illustres actions.
Il n'appartient plus qu'aux Pindares
De suivre vos fiers compagnons,
Aux assauts de cent bastions,
Devers les Iles Baléares.
J'attends leurs sublimes écrits;
Et s'il est vrai, comme il peut l'être,
Qu'il soit parmi vos beaux esprits
Peu de Pindares dans Paris,
Vos succès en feront renaître.
Ils diront qu'un roi modéré
Vit longtemps avec patience

L'attentat inconsidéré
D'un peuple un peu trop enivré
De sa maritime puissance;3
Qu'on a sagement préparé
La plus légitime vengeance;
Et qu'enfin l'honneur de la France
Par vos exploits est assuré.
Mais pour moi, dans ma décadence,
Faible et sans voix je me tairai;
Jamais je ne me mêlerai
De ces querelles passagères.
Je sais qu'aux marins d'Albion
Vous reprochez, avec raison,
Quelques procédés de corsaires;
Ce ne sont pas là mes affaires.
Milton, Pope, Swift, Addison,
Ce sage Locke, ce grand Newton,
Sont toujours mes dieux tutélaires.
Deux peuples en valeur égaux
Dans tous les temps seront rivaux,
Mais les philosophes sont frères.
Vos ministres, par leurs traités,
Ont assujetti la fortune;
Vos vaisseaux, de héros montés,
Ont battu les fils de Neptune;
Une prudence peu commune
A conduit vos prospérités;
Mais la politique et les armes
Ne font pas mes félicités.

Croyez qu'il est encor des charmes
Sous les berceaux que j'ai plantés.
Je vis en paix, peut-être en sage,
Entre ma vigne et mes figuiers;
Pour embellir mon ermitage,
Envoyez-moi de vos lauriers:
Je dormirai sous leur ombrage. »



1 C'est à tort, croyons-nous, qu'on a toujours donné à cette lettre la date du 27 juillet; elle doit être du 7. (Georges Avenel)

2 Prise de Fort Philippe à Minorque le 29 juin 1756 .

3 Les Anglais depuis plusieurs mois se sont attaqués aux navires français , bien avant toute déclaration de guerre ouverte .

 

Vous triompherez des difficultés, des Anglais, des sots, et des jaloux.

... Disait Voltaire à Thomas Voeckler ce matin avant cette magnifique étape dans les Pyrénées .

 

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« A M. le maréchal duc de RICHELIEU.

Aux Délices, 5 juillet [1756]

(A Vous seul.)

Pardonnez à mes importunités, mon héros. Je me flatte que vous prendrez, ce mois-ci, le rocher et les Anglais. Tant mieux que la besogne soit difficile, vous en aurez plus de gloire. Vous connaissez Paris et Versailles vous savez comme on a murmuré que la ville de l'Europe la plus forte après Gibraltar n'ait pas été prise en quatre jours; et, si vous aviez pu l'emporter d'emblée, on aurait dit Cela était bien aisé. Vous triompherez des difficultés, des Anglais, des sots, et des jaloux.
Tronchin 1 est revenu de Paris; il en a été l'idole, et jamais idole n'a reçu plus d'offrandes. Il a tout vu, tout entendu il connaît tous ceux qui osent vous porter envie. Une certaine personne 2 lui a parlé avec une confiance étonnante. «  Je n'ai qu'un reproche à me faire, lui a-t-elle dit, c'est d'avoir fait du mal à M. de M. 3; mais j'ai été trompée, etc., etc. »
On a parodié la petite lettre 4 que j'avais eu l'honneur de vous écrire; tant mieux encore. Je vais préparer des fusées, et je compte donner un feu le jour que j'apprendrai que vous êtes entré dans la place. En vérité, vous devriez bien me faire savoir par un de vos secrétaires dans quel temps à peu près vous souperez dans le fort Saint-Philippe; vous feriez là une bonne œuvre. Élève du maréchal de Villars et son successeur, battez les ennemis de la France et les vôtres.
Il y a dans le monde un petit coin de terre où vous êtes adoré. Le lac de Genève retentit de votre nom. Recevez mes vœux, mon encens, mon attachement, mon tendre respect. »

1 Théodore Tronchin, le médecin .

2 Mme de Pompadour, sans doute .

3 Maupertuis .

 

Il se trouverait, en cas de malheur, que mes compliments n'auraient été qu'un ridicule

 ... C'est confirmé, les femmes sont plus intelligentes que les hommes !

http://lci.tf1.fr/science/nouvelles-technologies/c-est-confirme-les-femmes-sont-plus-intelligentes-que-les-hommes-7420233.html

 Et tant pis si l'égalité est bousculée .

Mais bien sûr, il ne s'agit là que de résultats statistiques, n'est-ce pas messieurs ? Individuellement,  il va sans dire que chaque homme dispose d'un égo d'une taille inversement proportionnelle à son estimation du  QI féminin . Grand bien lui fasse, le royaume de Dieu est accordé aux simples d'esprit !

Petit test, pour vérifier

 

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« A M. LE COMTE D'ARGENTAL.

Aux Délices, 2 juillet [1756]

Avez-vous reçu enfin, mon cher ange, cette édition 1 qui est en chemin depuis plus d'un mois? C'est une pièce complexe, à ce que je vois, que celle de Port-Mahon. Nous ne touchons pas encore au dénoûment, et bien des gens commencent à siffler. Ma petite lettre, non trop tôt écrite, mais trop tôt envoyée par M. d'Egmont à Mme d'Egmont 2, donne assez beau jeu aux rieurs. On en a supprimé la prose, et on n'a fait courir que les vers, qui ont un peu l'air de vendre la peau de l'ours avant qu'on l'ait mis par terre 3. Si M. de Richelieu ne prend pas ce maudit rocher, il retrouvera à Versailles et à Paris beaucoup plus d'ennemis qu'il n'y en a dans le fort Saint-Philippe. Il faut, pour mon honneur, et pour le sien surtout, qu'il prenne incessamment la ville. Il se trouverait, en cas de malheur, que mes compliments n'auraient été qu'un ridicule. Je vous prie de bien dire, mon cher ange, que je n'ai pas eu celui de répandre des éloges si prématurés. Si M. d'Egmont avait été un grand politique, il ne les aurait fait courir qu'à la veille de prendre la garnison prisonnière.
La Beaumelle m'embarrasse un peu davantage il est triste d'être obligé de lui répondre cependant il le faut. Son livre a trop de cours pour que je laisse subsister tant d'erreurs et tant d'impostures. Il attaque cent familles, il prodigue le scandale et l'injure sans la moindre preuve; il parle de tout au hasard; et plus il est audacieux dans le mensonge, plus il est lu avec avidité. Je peux vous répondre qu'il y a peu de pages où l'on ne trouve des mensonges très-aisés à confondre. Il faut les relever, la preuve en main, dans des notes au bas des pages du Siècle de Louis XIV, sans aucune affectation, et par le seul intérêt de la vérité. Si vous et vos amis vous aviez remarqué quelque chose d'important, je vous serais bien obligé d'avoir la bonté de m'en avertir; peut-être même les yeux du public commencent-ils à s'ouvrir sur cette insolente rapsodie. On me mande que les gens un peu instruits en pensent comme moi à la longue ils dirigent le sentiment du public. Nous voilà bien loin de la tragédie, mon cher ange; j'ai besoin pour ce travail de n'en avoir aucun autre sur les bras, de quelque nature que ce soit. Tronchin 4 est revenu je lui donne ma santé à gouverner, et mon âme à vous.

Mille tendres respects à tous les anges."


1 Imprimée par les frères Cramer.

2 MIle de Richelieu, née à Montpellier le 1er mars 1740; mariée le 10 février 1756 au comte d'Egmont-Pignatelli, nommé lieutenant général en 1762.

3 La Fontaine, livre V, fable xx.

4 Théodore Tronchin , fameux médecin genevois .