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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

je vous garderai jusqu'au tombeau les sentiments qui m'amenèrent à vos pieds, lorsque je quittai pour vous tout ce que j

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Dans le domaine "serments d'ivrognes", je crois bien en tenir un de première grandeur . C'est vrai que Volti fait les choses bien, qu'on ne peut douter un instant de sa parfaite et indéfectible volonté, de sa sincèrité, jusqu'à ce que les évènements , la dure loi de la vie, viennent bouleverser les meilleurs intentions du monde . Première option !

Seconde option, ce qu'on suppose être de parfaits sentiments d'amour n'en sont pas, et les sentiments qu'on verra exprimés par la suite, beaucoup moins flatteurs, beaucoup plus critiques et réalistes, sont ceux qui au fond de son coeur étaient là de toute éternité, dès la déchirure de la mort d'Emilie et l'exil choisi (?) outre-Rhin .

Dans les deux cas, Volti est fidèle à sa parole et conforme à ses idées . Génial !

 

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vérité pinocchio.jpg

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Tout autre ton . A ras le bitume ! belle chanson de Catherine Lara : La Vérité sort de la bouche du Métro :

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« A Frédéric II, roi de Prusse

 

28 avril [1753] à Gotha

 

Ce que j'ai vu dans les gazettes est-il croyable ? On abuse du nom de Votre Majesté pour empoisonner les derniers jours d'une vie que je vous avais consacrée . Quoi ! L'on avance que je vous ai averti que König écrivait contre vos ouvrages !i Ah ! Sire, il en est aussi incapable que moi . Votre Majesté sait ce que je lui en ai écrit ii. Je vous ai toujours dit la vérité, et je vous la dirai jusqu'au dernier moment de ma vie . Je suis au désespoir de n'être point allé à Bareith iii. Une partie de ma famille iv, qui va m'attendre aux eaux, me force d'aller chercher une guérison que vos bontés seules sauraient me donner . Je vous serai toujours tendrement dévoué, quelque chose que vous fassiez . Je ne vous ai jamais manqué, je ne vous manquerai jamais . Je reviendrai au mois d'octobre à vos pieds ; et, si la malheureuse aventure de La Beaumelle n'est pas vraie ; si Maupertuis en effet n'a pas trahi le secret de vos soupers, et ne m'a point calomnié pour exciter La Beaumelle contre moi v; s'il n'a pas été par sa haine l'auteur de mes malheurs, j'avouerai que j'ai été trompé, et je lui demanderai pardon devant Votre Majesté et devant le public . Je m'en ferai une vraie gloire . Mais si la lettre de La Beaumelle est vraie vi, si les faits sont constatés, si je n'ai pris d'ailleurs le parti de König qu'avec toute l’Europe littéraire, voyez, Sire, ce que les philosophes Marc-Aurèle et Julien auraient fait en pareil cas . Nous sommes tous vos serviteurs, et vous auriez pu d'un mot tout concilier . Vous êtes fait pour être notre juge, et non notre adversaire . Votre plume respectable eût été dignement employée à nous ordonner de tout oublier ; mon cœur vous répond que j'aurais obéi . Sire, ce cœur est encore à vous ; vous savez que l'enthousiasme m'avait amené à vos pieds, il m'y ramènera . Quand j'ai conjuré Votre Majesté de ne plus m'attacher à elle par des pensions vii, elle sait bien que c'était uniquement préférer votre personne à vos bienfaits . Vous m'avez ordonné de recevoir ces bienfaits, mais jamais je ne vous serai attaché que pour vous-même ; et je vous jure encore entre les mains de S. A. R. Madame la margrave de Bareuth, par qui je prends la liberté de faire passer ma lettre, que je vous garderai jusqu'au tombeau les sentiments qui m'amenèrent à vos pieds, lorsque je quittai pour vous tout ce que j'avais de plus cher et quand vous me jurâtes que vous daigneriez toujours m'aimer . Je suis etc. »


 

i Frédéric a fait reproduire par les gazettes sa lettre de congédiement du 16 mars , précédée d'un avertissement sur le paiement de la pension de V* et accompagnée d'un commentaire suivant lequel V* aurait accusé König de vouloir écrire contre les ouvrages du roi .

Page 56 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f60.image.r=...

ii Effectivement, V* a seulement écrit le 12 mars à Frédéric : « Je suis ami de König... » ; Page 55 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f59.image.r=...

iii V* avait quitté Leipzig le 18 avril et envisagé d'aller à Bayreuth chez la sœur du roi à qui il avait même proposé un « capital de quinze mille écus », mais était allé à Gotha où il restera jusqu’au 25 mai .

iv Mme Denis.

v Le 3 février, V* écrivit à Roques : « Ce fut le marquis d'Argens qui avertit (le roi) à souper de la manière dont La Beaumelle avait parlé de sa cour, ainsi que de plusieurs autres cours, dans son livre intitulé Le Qu’en-dira-t-on . Le marquis d'Argens sait que, loin de vouloir porter ces misères aux oreilles du roi, je lui mis presque la main sur la v bouche ...(le roi) doit voir clairement que Maupertuis ne m'a calomnié ainsi auprès de (La Beaumelle) que pour l'exciter à écrire contre moi ... ».

Voir page 31: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f35.image.r=...

La Beaumelle : http://dictionnaire-montesquieu.ens-lyon.fr/index.php?id=...

Pour Roques, voir aussi : http://www.voltaire-integral.com/Html/15/03ROQUES.html

vi Toujours dans la lettre du 3 février à Roques , V* « rapporte mot pour mot » un passage d'une lettre écrite par La Beaumelle à Roques et que celui-ci a cité le 17 décembre : « Maupertuis me dit qu'un jour ... »  

vii Voir lettre à Darget de la mi-février 1751 :

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/02/14/c...

et un passage de la lettre au roi du 19 ou 20 février 1751 : page 280 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800327/f285.image.r...

et lettre du 11 mars 1753 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/03/11/d...

 

 

 

 

 

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C’est de mon fumier que j’ai l’honneur de vous écrire

Le titre exagère un peu sur ma situation réelle ; je suis en réalité sur un fauteuil gris-bleu décoré de poils de chien blanc qui ne demandent qu'à se coller sur le velours noir de mon pantalon ; la brosse va chauffer ! Que dire ce jour qui ne soit pas du réchauffé ? Si ce n'est de souhaiter une bonne route au Grand Jacques et à Luna .Et pour rester éveillé, un extrait de Black cat,White cat qui parle d'un chien plus mordant que la gentille Luna : http://www.youtube.com/watch?v=Wkzg4EIvdIA&feature=re... . Decoiffant , non ?!

Et maintenant sans transition ...dans la veine du roi du coq à l'âne ...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

choiseul duchesse.jpg« A Louise-Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul

 

 

                            Job à Madame de Barmécide, [les Barmécides, persans très influents et très généreux tombèrent en disgrâce en 803, et V* a écrit en janvier à la duchesse « Épitre : Benaldaki à Caramouflée femme de Giafar le Barmécide », après la disgrâce de Choiseul]

 

 

                            Le diable avait oublié de crever les yeux à l’autre Job, il s’est perfectionné depuis. Ainsi, Madame, vous avez actuellement une petite-fille [Mme du Deffand] et un vieux serviteur aux Quinze-Vingts.

 

                           

 

 

job et sa femme.jpg C’est de mon fumier que j’ai l’honneur de vous écrire avec un têt de pot cassé. Madame votre petite-fille est la plus heureuse aveugle qui soit au monde ; elle court, elle soupe, elle veille dans Babylone, elle compte même aller à Chanteloup [propriété des Choiseul, exilés ], ce qui est, dit-on, la suprême félicité. Job n’y prétend point, il compte mourir incessamment dans ses neiges, et voici ce qu’il dit de la part du Seigneur à l’illustre Barmécide :

                            Votre nom répandra toujours une odeur de suavité dans les nations ; car vous faisiez le bien au point du jour, et au coucher du soleil ; vous n’avez point fait de pacte avec le diable, mais vous avez fait un pacte de famille [alliance entre les Bourbons de France et d’Espagne en 1761] qui est de Dieu .Vous avez une fois donné la paix à Babylone [terminé la Guerre de Sept ans en 1763], et vous avez une autre fois empêché la guerre, et une autre fois pour vous amuser vous avez donné une île au commandeur des croyants [la Corse pour le roi de France en 1768]; aussi je vous ai écrit dans le Livre de vie, très petit livre où n’a pas de place qui veut .

 

                            J’encadrerai avec vous la sultane Barmécide, ma philosophe, dont l’éternel s’est complu à former la belle âme, et je mettrai dans le même cadre votre sœur de la grande montagne [la duchesse de Gramont (jeu de mot Grand mont)] en qui mérite abonde. Et j’ai dit : Ils seront bien partout où ils seront, parce qu’ils seront bien avec eux-mêmes, et que les cœurs généreux sont toujours en paix.

 

                            Et si vous voulez vous amuser de rogatons par A,B,C,D,E [premiers articles des Questions sur l’Encyclopédie ], comme Abbaye, Abraham, Adam, Alcoran, Alexandre, Anciens et modernes, Âne, Ange, Anguilles, Apocalypse, Apôtre, Apostat, on vous fera parvenir ces facéties honnêtes par la voie que vous aurez la bonté d’indiquer .Facéties d’ailleurs pédantesques et très instructives pour ceux qui veulent savoir des choses inutiles .

 

                            Si Job pouvait occuper un moment le loisir de la maison Barmécide, il serait trop heureux, mais que peut-il venir de bon des précipices et des neiges du mont Jura ? C’est dans les belles campagnes de Chanteloup que se trouvent l’esprit, la raison et le génie ; ainsi je me tais et je m’endors sur mon fumier en me recommandant au néant.

 

                            En attendant, je supplie madame Barmécide de me conserver se bontés qui font ma consolation pour le moment qui me reste à vivre, et d’agréer mon profond respect.

 

 

                            Le vieil ermite

                            13 mars 1771. »

 

 

 

 

 

Et pour revenir sur des choses plus actuelles qui me tiennent à coeur : http://www.rhonealpes.dondusang.net/donami/sang.php

Qui n'a pas donné va donner, qui a donné ..."les cœurs généreux sont toujours en paix." Toujours valable !!!

 

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14/03/2009 | Lien permanent

Je voudrais que vous écrasassiez l'infâme; c'est là le grand point

... Le plus grand point !

Notre infâme du XXIè siècle mélange fanatisme religieux -vrai ou parfaitement frelaté- et avidité matérielle, et ne semble pas être supprimée de sitôt . A la suite de Voltaire, continuons le combat sans relâche et n'économisons pas notre peine .

 

voltaire-ecraser-linfc3a2me.jpg

 

 

« A Jean Le Rond d'ALEMBERT.
Je voudrais que Thieriot m'envoyât les nouveautés, et surtout le Mémoire de M. Lefranc de Pompignan, natif de Montauban; et Thieriot m'abandonne.
Je voudrais avoir perdu toutes mes vaches, et qu'on n'eût pas mêlé Mme de Robecq dans la Vision, parce que c'est un coup terrible à la bonne cause, parce que tous les amis de cette dame lui cachaient son état, parce que le prophète lui a appris ce qu'elle ignorait, et lui a dit : Morte morieris 1; parce que c'est avancer sa mort ; parce qu'elle n'avait d'autre tort que de protéger une pièce dont elle ne sentait pas les conséquences ; parce qu'elle n'avait jamais persécuté aucun philosophe; parce que cette cruauté de lui avoir appris qu'elle se meurt est ce qui a ulcéré M. le duc de Choiseul ; parce que je le sais, et je le sais parce qu'il me l'a écrit ; et je vous le confie, et vous n'en direz rien.
Je voudrais que mon cousin Vadé eût pu parler de la querelle présente ; mais, comme il est mort deux ans auparavant, et qu'il n'était pas prophète, il ne pouvait avoir une vision 2.
Je voudrais voir, après ces déluges de plaisanteries et de sarcasmes, quelque ouvrage sérieux, et qui pourtant se fît lire, où les philosophes fussent pleinement justifiés et l'infâme confondue.
Je voudrais que les philosophes pussent faire un corps d'initiés, et je mourrais content.
Je voudrais pouvoir vous envoyer une seconde réponse que je viens de faire 3 à une seconde lettre de Palissot 4, réponse qui passe par M. d'Argental, réponse dans laquelle je lui prouve qu'il a déféré et calomnié le chevalier de Jaucourt, ce qu'il me 5 niait; qu'il a confondu La Mettrie avec les philosophes ; qu'il a falsifié les passages de l'Encyclopédie, etc. Je lui parle paternellement; je lui fais un tableau du bien que l'Encyclopédie faisait à la France; puis vient un Abraham Chaumeix qui fournit des mémoires absurdes à maître Joly de Fleury, frère de l'intendant de ma province. Joly croit Chaumeix, le parlement croit Joly ; on persécute, et c'est dans ces circonstances que vous venez percer, vous Palissot, des gens qu'on a garrottés! vous les calomniez! Votre feuille peut être lue de la reine et des princes qui lisent volontiers une feuille, et qui ne confronteront point sept volumes in-folio, etc. Vous faites donc un très-grand mal. Qu'y a-t- il à faire ? Votre pièce a réussi ; il faut ajouter à ce succès la gloire de vous rétracter. Il n'en fera rien, et alors j'aurai l'honneur de vous envoyer ma lettre. Je la crois hardie et sage ; nous verrons si M. d'Argental la trouvera telle.
Je voudrais savoir quel est l'ouvrage auquel vous vous occupez. On dit qu'il est admirable ; je le crois : il n'y a que vous qui écriviez toujours bien, et Diderot parfois; pour moi, je ne fais plus que des coïonneries 6. Je voudrais vous voir avant de mourir.
Je voudrais que Rousseau ne fût pas tout à fait fou, mais il l'est. Il m'a écrit une lettre 7 pour laquelle il faut le baigner, et lui donner des bouillons rafraîchissants.
Je voudrais que vous écrasassiez l'infâme; c'est là le grand point. Il faut la réduire à l'état où elle est en Angleterre, et vous en viendrez à bout, si vous voulez. C'est le plus grand service qu'on puisse rendre au genre humain.
Adieu, mon grand homme ; je vous embrasse tendrement.

 

23 [juin 1760] 8»

 

 

1 Tu es en train de mourir de ta mort ; I. Rois, XXII, 16; Ézéchiel, XXXIII, 8.

 

2 Dans la satire du Pauvre Diable.

 

 

4 Cette lettre datée du 17 juin 1760 est conservée ; elle est très longue et d'un ton modéré .

 

5 Me est ajouté au dessus de la ligne sur le manuscrit .

 

6 Cette phrase est ajoutée entre les lignes .

 

7 Voyez sa lettre du 17 juin 1760 : « Je ne vous aime point monsieur ; [,,,] . Je vous hais, enfin , [,,,] » ; page 422 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6514333b.texte.r=rousseau.f436

, qu'il reproduira dans Les Confessions en notant que V* ne lui répondit pas ; voir les lettres de Voltaire des 19 mars 1761 et 9 janvier 1765.

 

8 Le manuscrit porte d'une main plus tardive un post-scriptum ajouté puis rayé : « Vous pensez bien que je ne parle que de la superstition, car pour la religion, je l'aime et la respecte comme vous . »

 

 

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28/06/2015 | Lien permanent

Vous avez en Turquie, comme en pays chrétien, des exemples qui vous autorisent.

... à rien du tout !... "

... à l'heure où des "végans" qui se permettent, eux, tueurs de carottes et de salades, de détruire le bien et l'outil de travail d'autrui :

https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/les-actualites-de-...

Au passage, je me permettrai de leur rappeler que même les plantes sont carnivores, et que ne tuer aucun animal amènerait à la désertification, ces chers protégés ne manquant pas de brouter, grignoter, raser toute végétation d'une part, et se faire dévorer tout cru par les protégés carnivores d'autre part . Qui gagnera , du grain de maïs ou du sanglier ? de la salade ou du lapin ? du campagnol ou de la carotte ?

Que faire du chien et du chat, ces prédateurs sanguinaires (et qui depuis des millénaires font leur travail de dératiseurs ), les convertir aux  croquettes végans ?

L'intégrisme de ces bouffeurs de végétaux me conforte dans l'idée que l'intolérance a encore de mauvais jours à nous accorder . Certains humains sont décidément vraiment cons .

Résultat de recherche d'images pour "plante carnivore"

J'offre le champagne au premier qui me donne une drosera végétarienne .

 http://www.plantecarnivore.fr/

 

 

« Au cardinal François-Joachim de Pierre de Bernis

A Ferney 28 septembre 1763

Monseigneur, dans la dernière lettre dont Votre Éminence m’honora 1, elle me disait qu’on vous avait fait la niche de vous accuser d’avoir fait des vers à l’âge de trente-deux ans. Votre devancier le cardinal de Richelieu en faisait à cinquante ans passés. La différence entre vous et lui, c’est que ses vers étaient détestables. On vous a donc reproché d’être plein d’esprit, de goût, et de grâces : assurément on ne vous a pas calomnié, et vous seriez forcé de vous avouer coupable en justice réglée. Et que direz-vous du roi de Prusse ? il fait encore des vers . Ce qui est permis à un roi ne l’est-il pas à un cardinal ? Et regibus æquiparantur.2

Pour moi, chétif, qui ne suis roi ni rien 3, je barbouille des rimes à soixante-dix ans, sans craindre autre chose que les sifflets. Je fais plus, je lime, je rabote, je suis les conseils que vous avez bien voulu me donner. Ayez toujours la bonté de me garder un secret de conspirateur sur le petit drame que vous avez bien voulu lire 4.

J’admire que vous soyez toujours moine de Saint-Médard 5 . Cela peut être fort bon pour la vie éternelle, mais il me semble que vous étiez fait pour une vie plus brillante. Vous êtes assez philosophe pour être aussi heureux à Vic-sur-Aisne qu’à Versailles, et je suis persuadé que vous avez dit cela en vers. Mais vous les gardez dans votre sacré portefeuille. Il n’y aura donc que mes petits-neveux qui verront vos charmants amusements, tels qu’ils sont sortis de votre plume ! et vous laissez de maudits libraires défigurer aujourd’hui ce qui fera un jour les délices de tous les honnêtes gens. On vient d’imprimer en Angleterre, les Lettres de Mme de Montaigu 6, morte à quatre-vingt-douze ans. Il y avait cinquante ans qu’elles étaient écrites. C’est cette dame à qui nous devons l’inoculation de la petite-vérole, et par conséquent le beau réquisitoire de messire Omer Joly de Fleury. On trouve dans ces lettres des vers turcs d’un gendre du grand-seigneur pour sa femme 7. Je vous avoue que, quoiqu’ils aient été faits dans la patrie d’Orphée, ils ne valent pas les vôtres . Mais voilà encore de quoi fermer la bouche à vos accusateurs. Vous avez en Turquie, comme en pays chrétien, des exemples qui vous autorisent.

Je suis quelquefois fâché d’être vieux et profane. Sans ces deux qualités, je viendrais vous faire ma cour . Mais je n’ai et je n’aurai que la consolation de vous assurer, du pied des Alpes, du respect et de l’attachement inviolable du vieux de la montagne. 

V.»

1 Lettre du 3 septembre 1763, conservée .

3 D'après Marot dans Épîtres, XXIX : Au roi, pour avoir été dérobé : https://www.poemes.co/epitre-au-roi-pour-avoir-ete-derobe.html

et voir : http://www.wikipoemes.com/poemes/clement-marot/index.php

4 Bernis écrit le 3 septembre 1763 : « … vos roués peuvent être de grands hommes, quand vous vous serez donné le temps de leur faire parler votre langue, qui est sublime .[...] Voici ce que je pense en gros de vos triumvirs : les trois premiers actes ont besoin d'être plus fortement écrits ; ce qui n'est qu'esquisse deviendra tableau . [...] Votre Octave ne développe pas assez [...] la profondeur de sa politique et les replis de son caractère [...] adoucissez un peu la férocité d'Antoine [...] que le jeune Pompée [...] efface par l'idée de la valeur et de l’héroïsme la honte d'un assassinat nocturne [...] . Vos deux derniers actes sont plus chauds et plus intéressants [...] . »

5 Bernis répond le 7 octobre 1763 : « Je ne m'ennuie point d'être moine de Saint-Médard, ni d'habiter le château que Berthe au grand pied donna à cette abbaye . »

7 V* le traduisit en français dans son compte rendu des Lettres […] .

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23/09/2018 | Lien permanent

Voici, monsieur, mon ultimatum

... On croirait entendre Martine Aubry s'adressant à Manuel Vals !

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Ici qui est Judas ?

 

« A Etienne-Noël Damilaville

A Ferney, le 3 mars [1761]

Voici, monsieur, mon ultimatum à M. Deodati 1. Monsieur le censeur hebdomadaire, à qui je fais mes compliments, peut insérer ce traité de paix dans son journal .

Je regarde le jour du succès du Père de famille comme une victoire que la vertu a remportée, et comme une amende honorable que le public a faite d'avoir souffert l’infâme satire intitulée : La Comédie des philosophes .

Je remercie tendrement M. Diderot de m'avoir instruit d'un succès auquel tous les honnêtes gens doivent s'intéresser 2. Je lui en suis d'autant plus obligé que je sais qu'il n'aime pas à écrire . Ce n'est que par excès d'humanité qu'il a oublié sa paresse avec moi . Il a senti le plaisir qu'il me faisait . Je doute qu'il sache à quel point cette réussite était nécessaire . Les affaires de la philosophie ne vont point mal ; les monstres qui la persécutaient seront du moins humiliés .

J'avais demandé à M. Thieriot L'Interprétation de la nature 3, il m'a oublié .

Mille tendresses à tous les frères . »

1 Les Stances à M. Deodati de Tovazzi, ultimatum par plaisanterie, parurent dans le Mercure de France d'avril 1761, II, 12-13 .Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-stance-a-m-deodati-de-tovazzi-121557152.html

2 Dans la lettre du 26 février 1761 , Diderot écrit : « Ce n'est pas moi qui l'ai voulu, mon cher maître, ce sont eux qui ont imaginé que l'ouvrage pourrait réussir au théâtre ; et puis les voilà qui se saisissent de ce triste Père de famille et qui le coupent, le taillent, le châtrent, le rognent à leur fantaisie . Ils se sont distribués les rôles entre eux et ils ont joué sans que je m'en sois mêlé . Je n'ai vu que les deux dernières répétitions et je n'ai encore assisté à aucune représentation . J'ai réussi à la première autant qu'il est possible quand presque aucun des acteurs n'est et ne convient à son rôle . Je vous dirais là-dessus des choses assez plaisantes si l'honnêteté toute particulière dont les comédiens ont usé avec moi ne m'en empêchait . Il n'y a que Brizard , qui faisait le père de famille, et Mme Préville, qui faisait Cécile, qui s'en soient bien tirés . Ce genre d'ouvrage leur était si étranger que la plupart m'ont avoué qu'ils tremblaient en entrant sur la scène comme s'ils avaient été à la première fois . […] On m'a dit, car je n'y étais pas, que le pièce s’était soutenue de ses propres ailes et que le poète avait enlevé les suffrages en dépit de l'acteur . A la seconde représentation, ils y étaient un peu plus ; aussi le succès a-t-il été plus soutenu et plus général, quoiqu’il y eût une cabale formidable […] tandis qu'on me joue pour la troisième fois, je suis à la table de mon ami Damilaville et je vous écris sous sa dictée que si le jeu des acteurs eût un peu plus répondu au caractère de la pièce, j'aurais été ce qu'ils appellent aux nues, et que, malgré cela, j'aurai le succès qu'il faut pour contrister mes ennemis . Il s'est élevé du milieu du parterre des voix qui ont dit : Quelle réplique à la satire des Philosophes ! Voilà ce que je voulais entendre . Je ne sais quelle opinion le public prendra de mon talent dramatique et je ne m'en soucie guère, mais je voulais qu'on vit un homme qui porte au fond de son cœur l'image de la vertu et le sentiment de l'humanité profondément gravés, et on l'aura vu […] On a osé faire à la reine l'éloge de mon ouvrage . C'est Brizard qui m'a apporté cette nouvelle de Versailles . » Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_P%C3%A8re_de_famille_%28...

et : http://www.theatre-classique.fr/pages/programmes/edition....

3 V* avait fait cette demande de l'ouvrage de Diderot dès le mois de juin 1760 : voir lettre du 9 juin 1760 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/06/09/m... . Voir l'ouvrage  : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pens%C3%A9es_sur_l'interpr%...

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25/02/2016 | Lien permanent

j'ai été obligé d'avertir que je ne recevais point de lettres d'inconnus

... Ce qui n'empêche pas ma BAL de déborder de ces fichus courriels à classement vertical identique à celui des pubs débordant des boites et que les malheureux facteurs sont obligés de se coltiner .

Gaspi ! ô Grand Gaspi ! tu règnes en maître ! (et, je l'espère, pour le moins de temps possible )

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http://www.wallyandosborne.com/comic/the-internet-spam/

 

 

« A Pierre-Joseph Thoulier d'Olivet

A Ferney 19 mars 1761 pays de Gex

Vos lettres sont venues à bon port mon très cher maître . Les veredarii 1 sont exacts parce qu'ils leur en revient quelque chose . Il est vrai que j'ai été obligé d'avertir que je ne recevais point de lettres d'inconnus ; et vous trouverez que j'ai eu raison quand vous saurez que très souvent la poste m'apportait pour cent francs de paquets de gens discrets qui m'envoyaient leurs manuscrits à corriger ou à admirer . Le nombre des fous mes confrères quos scribendi cacoetes tenet,2 est immense . Celui des autres fous à lettres anonymes n'est pas moins considérable ; mais pour vous mon cher abbé qui êtes très sage, et qui m'aimez, sachez qu'une de vos lettres est un de mes plus grands plaisirs, et serait ma plus chère consolation si j'avais besoin d'être consolé . Vous parlez de brochures ; il y a autant de feuilles dans Paris qu'à mes arbres , mais aussi la chute des feuilles est fréquente . On en a imprimé une de moi où il est question de vous et de la langue française 3 à laquelle vous avez rendu tant de services . C'est une réponse que j'avais faite à un Deodati Tovasi, qui disait un peu trop de mal de notre langue .

Je savais que l'archidiacre de Fontenelle et de La Motte était admis, pour compiler, compiler des phrases à notre tripot, et qu'on vous accusait d'avoir molli en cette occasion . Je crois mon cher maître qu'on vous calomnie .

L'abbé Trublet m'avait pétrifié .4

Mais pourquoi ne serait-il pas de l'Académie ? L'abbé Cotin en était bien . J'attends l'abbé Le Blanc avec une impatience extrême . J'ai une querelle avec vous sur les vers croisés 5. Je trouve qu'ils sauvent l'uniformité de la rime, qu'on peut se passer avec eux de frères lais et qu'ils sont harmonieux . Licentia sumpta pudenter,6 n'est pas mal, mais je vous dirai à l'oreille que c'est un écueil . Il y a dans ce genre de vers un rythme caché fort difficile à attraper . Si quelqu'un m'imite, il courra des risques . J'aimerais passionnément à m'entretenir avec vous de littérature, et à pleurer sur la nôtre . Mais vous vous moquez de moi avec votre banlieue . Il faudrait que je fusse devenu imbécile de quitter les deux lieues de pays que je possède, et où je suis indépendant pour Arcueil ou pour Gentilly 7. Tenez, tenez, voici ma réponse dans ce paquet, ad urbem non descendet vates tuus 8; omittet mirari beatae fumum et opes strepitumque Paris 9. Je n'ai eu d'idée du bonheur que depuis que je suis chez moi dans la retraite ; mais quelle retraite ! J’ai quelquefois cinquante personnes à table ; je les laisse avec Mme Denis qui fait les honneurs et je m'enferme . J'ai bâti ce qu'en Italie on appellerait un palazzo, mais je n'en aime que mon cabinet de livres , senectutem alunt 10. Vivez mon cher abbé, on n'est point vieux avec de la santé . Je veux avant de mourir vous adresser une épître sur le peu d'usage que font nos littérateurs de vos préceptes et de vos exemples . Quel style que celui d'aujourd'hui ! Ni nombre, ni harmonie, ni grâces, ni décence . Chacun cherche à faire des sauts périlleux . Je laisse les gilles sur leur corde lâche, et je cultive comme je peux mes champs et ma raison .

M. de Chimènes vous remercie . Il a du goût, il étudie beaucoup, il a lu vos ouvrages . Il aime mieux votre préface sur natura deorum 11 et votre histoire de la philosophie 12 que les tours de force de Jean-Jacques , lequel Jean-Jacques mérite la petite correction qu'il a reçue .

Adieu encore une fois .

V. »

1 Courriers .

2 Que tient la maladie incurable d'écrire ; Juvénal, Satires, VII, 51-52 : http://www.roma-quadrata.com/juvenal.html#sa7

3 Lettre du 24 janvier 1761 à Deodati Tovazzi : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/01/22/s...

5 Tancrède est écrit tantôt en vers croisés et tantôt suivis ; ces derniers vers sont les « frères lais » dont il est question plus loin .

6 Une licence prise avec retenue ; Horace, Art poétique, 51 . Page 8 : http://dico.ea.free.fr/juxta_lal/ARSPOET.PDF

7 Arcueil et Gentilly, au sud de paris ne sont pas éloignés de Chateany-Malabry où est né V* .

8 Le prêtre de ton culte ne descend pas en ville ; d'après Horace, Épîtres, I, 7, 11 : « Ad mare descendet vates tuus, et sibi parcet. »

9 Il se gardera d'admirer les fumées, les richesses et le bruit de l'opulent Paris ; Horace, Odes, III, 29, 11-12 : http://www.roma-quadrata.com/horaceodes.html#o329

10 Ils sont l'aliment de la vieillesse ; Cicéron, Pro Archia, VII : pages 28-29 : http://remacle.org/bloodwolf/orateurs/archias.htm

11 Entretiens de Cicéron sur la nature des dieux, traduit par l'abbé d'Olivet, publié par le président J. Bouhier 1721, et dont la préface est de l'abbé d'Olivet .

12 D'Olivet n'a publié aucune histoire de la philosophie , V* pense sasn doute à l'introduction de l'ouvrage précédent .Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre-Joseph_Thoulier_d'Olivet

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07/03/2016 | Lien permanent

La musique change, c'est une affaire de goût et de mode ; mais le cœur humain ne change pas

... https://www.youtube.com/watch?v=Fk0V_GGa2XM&list=RDFk0V_GGa2XM#t=9

 Shine on you ! crazy men !!

 

resto du coeur.jpg

 

« Au comte Francesco ALGAROTTI.
Aux Délices, 10 décembre 1759
Quando mi capito la vostra gentile epistola, stava bene, e ne fui allegro tutto il giorno ; ma sono ricaduto, sto male, e sono pigro, attristato, malinconico, ho abbandonato un mese i miei armenti, e l'istoria, e la poesia, ed ancora voi stesso, Cigno di Padova, che cantate adesso sulle sponde del picciol Reno, parvique Bononia Reni 1.
Vi parlerô prima dell' opéra rappresentata nella corte di Parma,
Che quanto per udita io ve ne parlo ;
Signor, miraste, e feste altrui mirarla.2

Il vostro
Saggio sopra l' Opéra1 in musica 3 fu il fondamento della riforma del regno de' castrati. Il legame delle feste e dell' azione, a noi Francesi si caro, sarà forse un giorno l' inviolabil legge dell' opera italiana 4.

Notre quatrième acte de l'opéra de Roland 5, par exemple, est en ce genre un modèle accompli. Rien n'est si agréable, si heureux que cette fête des bergers qui annoncent à Roland son malheur ; ce contraste naturel d'une joie naïve et d'une douleur affreuse est un morceau admirable en tout temps et en tout pays. La musique change, c'est une affaire de goût et de mode ; mais le cœur humain ne change pas. Au reste la musique de Lulli était alors la vôtre ; et pouvait-il, lui qui était un valente buggerone di Firenze 6, connaître une autre musique que l'italienne ? Je compte envoyer incessamment à M. Albergati la pièce que j'ai jouée sur mon petit théâtre de Tournay, et qu'il veut bien faire jouer sur le sien, en cas qu'il ne soit point effrayé d'avoir commerce avec une espèce d'hérétique, moitié Français, moitié Suisse. Je crois, messieurs, que, dans le fond du cœur, vous ne valez pas mieux que nous ; mais vous êtes heureusement contraints de faire votre salut.
M. Albergati m'a mandé qu'il avait vraiment une permission de faire venir des livres. 0 Dio ! o Dei immortales !7 Les jacobins avaient-ils quelque intendance sur la bibliothèque d'un sénateur romain ? Yes, good sir, I am free and far more free than all the citizens of Geneva. Libertas, que, sera, tamen respexit sed non inertem.8 C'est à elle seule qu'il faut dire : Tecum vivere amem tecum obeam libenter 9. Cependant j'écris l'histoire du plus despotique bouvier 10 qui ait jamais conduit des bêtes à cornes ; mais il les a changées en hommes. J'ai chez moi, au moment que je vous écris, un jeune Soltikof, neveu de celui qui a battu le roi de Prusse ; il a l'âme d'un Anglais, et l'esprit d'un Italien.

Le plus zélé et le plus modeste protecteur des lettres que nous ayons à présent en Europe est M. de Schouvalow, le favori de l'impératrice de Russie : ainsi les arts font le tour du monde. J'ai bien peur que bientôt ils ne périssent à Berlin . Le roi de Prusse me mandait le 17 novembre : je vous écrirai dans trois jours de Dresde … et au bout de trois jours il perd vingt mille hommes .

Du triomphe, à la chute il n'est souvent qu'un pas 11.
Niente dal vostro librajo ; ve l' ho detto, a un mancatore 12. Annibal et Brennus passèrent les Alpes moins difficilement que ne font les livres. Intérim, vive felix, and dare to come to us 13.

V. »

1 Silius Italicus, Les Guerres Puniques, VIII, 599 ; voir : http://agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/Silius_puniquesVIII/lecture/6.htm

2 « Qui, à ce qu'en dit la renommée / A été admirée de vous et que vous avez fait admirer aux autres . » Arioste, Orlando furioso, chant XL, 1, citation inexacte ; « che quanto per udita io ve ne parlo,
Signor, miraste, e feste altrui mirarlo », voir :http://www.atuttascuola.it/orlando/orl40.htm

3 Essai d'Algarotti publié pour la première fois en 1755 . Le chevalier de Chastellux publiera une traduction de cet Essai en 1773.

4 Traduction : Quand je reçus votre gentille lettre, j'étais bien portant, et je fus allègre tout le jour. Mais je suis retombé malade, et redevenu paresseux, triste, mélancolique; j'ai abandonné mes troupeaux, et l'histoire, et la poésie, et vous-même, cygne de Padoue, qui chantez maintenant sur les bords du petit Rhin, « du petit Rhin de Bologne ». Je vous parlerai d'abord de l'opéra représenté à la cour de Parme, quoique je n'en parle que d'après ce que j'en ai ouï dire : vous l'avez admiré et l'avez fait admirer. Votre Essai sur l'Opéra a amené la réforme du règne des castrats. Le lien des fêtes et de l'action, si cher à nous autres Français, sera un jour l'inviolable loi de l'opéra italien.[NB : on a traduit par tragédie le mot opera qui peut signifier aussi bien œuvre dramatique qu'opéra ; l’œuvre jouée à parme était La Sémiramis, tragédie en musique d'après Sémiramis de V* ; voir lettre du 24 septembre 1759 au marquis Cappacelli : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/10/11/m... ]

5 Paroles de Quinault, musique de Lulli; 1685. Voir : http://sitelully.free.fr/livretroland.htm

et écouter : https://www.youtube.com/watch?v=sovAsG6kHL8

6 Un fameux bougre de Florence ; les mots de « bougre » et homme de Florence » sont appliqués par La Fontaine à Lully dans son épître satyrique du Florentin ; voir : http://sitelully.free.fr/contemporains.htm

Algarotti a donné b... ; le mot est pris dans la copie Beaumarchais .

7 Latin et italien mélés : ô Dieu ! Ô Dieux immortels .

8 Oui, mon bon monsieur, je suis libre et bien plus libre que tous les citoyens de Genève . La liberté qui a enfin daigné me favoriser, moi qui pourtant n'était pas inactif . La dernière phrase est adaptée de Virgile, Bucoliques, I,27 avec addition de la conjonction sed et de la négation non, ce qui renverse le sens .

9 Avec toi j'aimerais vivre, avec toi je mourrais de bon cœur . Horace, Odes, III, ix, 24 : Tecum vivere amem, tecum obeam libens .

10 Pierre le Grand .

11 Ce vers tragique n'est pas identifié .

12 Rien de votre libraire ; je vous l'ai dit, c'est un homme sans parole .

13 En attendant vis heureux, et ose venir jusqu'à nous

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17/12/2014 | Lien permanent

elle assemblerait dans sa grand’salle, des idolâtres, des musulmans, des grecs, des latins, des luthériens, qui tous dev

... Marine Le Pen ? Elle n'est pas tsarine, impératrice, elle n'est que le cheffaillon d'un parti parmi d'autres avec quelques millions de sympatisants , des aigris ; elle joue sur la division, le sectarisme, et ça a dû lui faire mal au ventre de participer, comme bien d'autres, à la rencontre président- chefs de partis .

Cette "réunion" ne donnera pas d'"enfants" au président , on n'est pas dans le monde des Bisounours, les râleurs restent des râleurs , tant pis pour eux .

https://www.lemonde.fr/politique/live/2023/08/31/rencontr...

 

 

« A Catherine II, impératrice de Russie

29 janvier [1768] 1

Madame,

On dit qu’un vieillard, nommé Siméon, en voyant un petit enfant, s’écria dans sa joie : Je n’ai plus qu’à mourir puisque j’ai vu mon salutaire 2. Ce Siméon était prophète, il voyait de loin tout ce que ce petit Juif devait faire.

Moi qui ne suis ni juif, ni prophète, mais qui suis aussi vieux que Siméon, je n’aurais pas deviné en 1700 qu’un jour la raison, aussi inconnue au patriarche Nicou qu’au Sacré Collège, et aussi malvoulue 3 des papas et des archimandrites que des dominicains, viendrait à Moscou, à la voix d’une princesse née en Allemagne, et qu’elle assemblerait dans sa grand’salle, des idolâtres, des musulmans, des grecs, des latins, des luthériens, qui tous deviendraient ses enfants.

C’est ce triomphe de la raison qui est mon salutaire ; et en qualité d’être raisonnable, je mourrai sujet, dans mon cœur, de Votre Majesté impériale, bienfaitrice du genre humain.

Je suis retiré auprès de la petite ville de Genève, où il n’y a pas vingt mille habitants, et la discorde règne depuis quatre ans dans ce trou, dans le temps que Catherine seconde, qui est bien la première, réunit tous les esprits dans un empire plus vaste que l’Empire romain.

Je ne suis pas en tout de l’avis du respectable auteur de l’Ordre essentiel des sociétés 4 ; je vous avoue, madame, qu’en qualité de voisin de deux républiques, je ne crois point du tout que la puissance législatrice soit, de droit divin, copropriétaire de mes petites chaumières ; mais je crois fermement que, de droit humain, on doit vous admirer et vous aimer.

Feu l’abbé Bazin disait souvent qu’il craignait horriblement le froid, mais que s’il n’était pas si vieux, il irait s’établir au midi d’Astrakan, pour avoir le plaisir de vivre sous vos lois.

J’ai rencontré ces jours passés son neveu, qui pense de même. Le professeur en droit Bourdillon 5 est dans les mêmes sentiments ; ce pauvre Bourdillon s’est plaint à moi amèrement de ce qu’on l’avait trompé sur l’évêque de Cracovie . Je l’ai consolé en lui disant qu’il avait raison sur tout le reste, et que l’événement l’a bien justifié. Votre Majesté Impériale ne saurait croire à quel point ce pédant républicain vous est attaché, toute souveraine que vous êtes.

Je ramasse, madame, toutes les sottises sérieuses ou comiques de feu l’abbé Bazin et de son neveu, et même celles qu’on leur attribue ; il y en a qu’on n’oserait envoyer au pape, mais qu’on peut mettre hardiment dans la bibliothèque d’une impératrice philosophe. Ce recueil assez gros partira 6 dès qu’il sera relié.

L’empereur Justinien et le grand capitaine Bélisaire 7 ont été impitoyablement déclarés damnés par la Sorbonne. J’en ai été très affligé, car je m’intéressais beaucoup à leur salut. Je ne sais pas encore bien positivement si votre Église grecque est damnée aussi ; je m’en informerai, madame, car je vous suis encore plus attaché qu’à l’empereur Justinien. Je souhaite que vous viviez encore plus longtemps que lui.

Que Votre Majesté Impériale daigne agréer le profond respect, l’admiration, et l’attachement inviolable du vieux solitaire, moitié Français, moitié Suisse, cousin-germain du neveu de l’abbé Bazin. »

1 Le manuscrit est incomplet et daté du 19 ; on a donc suivi le texte de Kehl.

2 Évangile de Luc, II, 30: https://saintebible.com/luke/2-30.htm

3 Malvoulu, à qui on veut du mal, est un mot rare, employé pourtant par Saint-Simon et admis par l'Académie dans l'édition de son Dictionnaire de 1798 .

4 L’économiste Lemercier de la Rivière, que Catherine appela en consultation. (Georges Avenel)

Sur cet ouvrage, voir lettre du 8 août 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/03/29/j...

5 Le pseudo-Bourdillon, donc V* (voir lettre du 25 août 1767 à Vorontsov : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/04/13/j... ) , dans son Essai historique sur les dissensions des églises de Pologne, a cité, vers la fin de l'ouvrage, l'évêque de Cracovie Kajetan Soltyk comme un évêque tolérant . L'évêque ayant été emprisonné entre-temps, il n'était plus question qu'il fût tolérant . Aussi V* corrigea-t-il son erreur dans les éditions suivantes de son ouvrage .

Voir Emmanuel Rostworowski : « Voltaire et la Pologne », Studies […] 1968, LXII, 116, note.

6 Il devait partir le 15 mars 1768 ; voir lettre du 15 novembre 1768 à Catherine II : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-35511192.html

7 Le Bélisaire , de Marmontel.

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31/08/2023 | Lien permanent

Notre chute des anges qui a produit le diable qui a produit la damnation du genre humain, et la mort de Dieu pour une po

 

Rédigé le 20 juillet 2011 pour parution le 21 décembre 2010

 

 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse

 

A Ferney , le 21 décembre [1775]

 

Sire,

Il n'y a jamais eu ni de roi ni de goutteux plus philosophe que vous . Il faut que vous soyez comme celui qui disait : Non , la goutte n'est pas un mal 1. Vos réflexions sur cette machine qui a, je ne sais comment, la faculté d'éternuer par le nez et de penser par la cervelle valent mieux que tout ce que les docteurs en grec et en hébreu ont jamais dit sur cette matière .

 

Votre majesté est actuellement dans le cas de Xénophon, qui s'occupait de l'agriculture dans le loisir de la paix . Mais ce n'est pas après une retraite de dix mille, c'est après des victoires de cinquante mille .

 

Je crois que vous aurez un peu de peine à faire produire à votre sablonnière du Brandebourg d'aussi riches moissons que celles des plaines de Babylone, quoique à mon avis vous valiez beaucoup mieux que tous les rois de ce pays-là . Mais du moins vos soins rendront la Marche et la nouvelle Marche 2 et la Poméranie plus fertiles que le pays de Salomon, qu'on appela si mal à propos la Terre promise, et qui était encore plus sablonneux que le chemin de Berlin à Sans-Souci .

 

Votre Majesté est trop bonne de daigner jeter les yeux sur mes petits travaux rustiques . Elle m'encourage en m'approuvant . Je n'ai qu'un petit coin de terre à défricher, et encore est-il un des plus mauvais d'Europe . Vous daignez encourager de même ma chétive faculté intellectuelle, en me persuadant qu'une demi- apoplexie n'est qu'une bagatelle : je ne savais pas que Votre Majesté eût jamais affaire à un pareil ennemi 3. Vous l'avez vaincu comme tous les autres, et vous triomphez enfin de la goutte qui est plus formidable . Vous tendez une main protectrice du haut de votre génie à ma petite machine pensante : je serai assez hardi dans quelque temps pour mettre à vos pieds des lettres assez scientifiques, assez ridicules, que j'ai pris la liberté d'écrire à M. Paw sur ses Chinois, ses Egyptiens et ses Indiens 4.

 

La barbare aventure du général Lally, le désastre et les friponneries de notre Compagnie des Indes m'ont mis à portée de me faire instruire de bien des choses concernant l'Inde et les anciens brahmanes . Il m'a paru évident que notre sainte religion chrétienne est uniquement fondée sur l'antique religion de Brahma . Notre chute des anges qui a produit le diable qui a produit la damnation du genre humain, et la mort de Dieu pour une pomme, ne sont qu'une misérable et froide copie de l'ancienne théologie indienne . J'ose assurer que Votre Majesté trouvera la chose démontrée .

 

Je ne connais point M. Paw . Mes lettres sont d'un petit bénédictin tout différend de M. Pernetty 5. Je trouve ce M. Paw un très habile homme, plein d'esprit et d’imagination, un peu systématique à la vérité, mais avec lequel on peut s'amuser et s'instruire .

 

J'espère mettre dans un mois ou deux ce petit ouvrage de saint Benoît à vos pieds .

 

On me mande qu'on a imprimé à Berlin une traduction fort bonne d'Ammien Marcellin avec des notes instructives 6 ; comme cet Ammien Marcellin était contemporain du grand Julien, que nos misérables prêtres n'osent plus appeler apostat, souffrez, Sire, que je prenne une liberté avec celui auquel il n'a manqué, selon moi, pour être en tout très supérieur à ce Julien, que de faire à peu près ce qu'il fît 7, et que je n'ose pas dire .

 

Cette liberté est de supplier Votre Majesté d'ordonner qu'on m'envoie par les Michelet et Gérard un exemplaire de cet ouvrage . Je vous demande très humblement pardon de mon impudence : tout ce qui regarde ce Julien m'est précieux , mais vos bontés me le sont bien davantage .

 

Je me mets à vos pieds plus que jamais ; je me flatte qu'ils ne sont plus enflés du tout . »

 

1 Mot attribué à Posidonius lors d'une visite de Pompée ; http://www.cosmovisions.com/Posidonius.htm

voir lettre à Bertrand, pasteur, du 18 février 1756 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/02/18/l-optimisme-est-desesperant-c-est-une-philosophie-cruelle-so.html

2 Respectivement le Brandebourg et les territoires pris à la Pologne lors du partage .

3 En 1747, Frédéric l'en avait alors informé .

4 Lettres chinoises, indiennes et tartares, de V* présentées comme adressées à « M. Paw par un bénédictin » . http://books.google.com/books?id=8jIHAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

Sur Paw, voir lettre du 5 septembre 1774 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/05/24-jour-de-la-st-barthelemy-je-ne-sais-par-quelle-fatalite-s.html

5 Cornélius de Pauw avait publié en 1768-69 à Berlin des Recherches philosophiques sur les Américains, ou mémoires intéressant pour servir à l'histoire de l'espèce humaine ; une nouvelle édition avait paru en 1770 « augmentée d’une dissertation critique, par dom Pernety, et de la défense de l'auteur des Recherches contre cette dissertation ». http://www.archive.org/details/recherchesphilos17701pauw

6 Ammien Marcellin, ou les dix-huit livres de son histoire qui nous sont restés, traduits en français (par Guillaume de Moulines) , 1775. http://catalog.hathitrust.org/Record/008587933

7 Julien abjura le christianisme , il fut tolérant, mais devant l'attitude des chrétiens il alla jusqu'à leur interdire l'enseignement et les emplois civils et militaires .

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21/12/2010 | Lien permanent

Il me semble que celui qui veut s’instruire doit préférer ses yeux à ses oreilles ; mais, pour celui qui ne veut que s’a

... Facebook, Instagram, Twitter etc. permettent l'exact contraire, les bagatelles sont écrites, plutôt mal ; l'instructif est donné essentiellement par la radio; c'est du moins ce que je crois maintenant .

 

 

« A James Marriott

26è février 1767

Monsieur, je prends le parti de vous écrire par Calais plutôt que par la Hollande, parce que, dans le commerce des hommes comme dans la physique, il faut toujours prendre la voie la plus courte. Il est vrai que j’ai passé près de trois mois sans vous répondre ; mais c’est que je suis plus vieux que Milton, et que je suis presque aussi aveugle que lui. Comme on envie toujours son prochain, je suis jaloux de milord Chesterfield, qui est sourd 1. La lecture me paraît plus nécessaire dans la retraite que la conversation. Il est certain qu’un bon livre vaut beaucoup mieux que tout ce qu’on dit au hasard. Il me semble que celui qui veut s’instruire doit préférer ses yeux à ses oreilles ; mais, pour celui qui ne veut que s’amuser, je consens de tout mon cœur qu’il soit aveugle, et qu’il puisse écouter des bagatelles toute la journée.

Je conçois que votre belle imagination est quelquefois très ennuyée des tristes détails de votre charge. Si on n’était pas soutenu par l’estime publique et par l’espérance, il n’y a personne qui voulût être avocat général. Il faut avoir un grand courage, quand on fait d’aussi beaux vers que vous, pour s’appesantir sur des matières contentieuses, et pour deviner l’esprit d’un testateur et l’esprit de la loi.

Ma mauvaise santé ne m’a jamais permis de me livrer aux affaires de ce monde ; c’est un grand service que mes maladies m’ont rendu. Je vis depuis quinze ans dans la retraite avec une partie de ma famille . Je suis entouré du plus beau paysage du monde. Quand la nature ramène le printemps, elle me rend mes yeux, qu’elle m’a ôtés pendant l’hiver . Ainsi j’ai le plaisir de renaître, ce que les autres hommes n’ont point.

Jean-Jacques, dont vous me parlez, a quitté son pays pour le vôtre, et moi j’ai quitté, il y a longtemps, le mien pour le sien, ou du moins pour le voisinage. Voilà comme les hommes sont ballottés par la fortune. Sa sacrée Majesté le Hasard décide de tout.

Le cardinal Bentivoglio, que vous me citez, dit à la vérité beaucoup de mal du pays des Suisses, et même ne traite pas trop bien leurs personnes ; mais c’est qu’il passa du côté du mont Saint-Bernard, et que cet endroit est le plus horrible qu’il y ait dans le monde 2. Le pays de Vaud au contraire, et celui de Genève, mais surtout celui de Gex, que j’habite, forment un jardin délicieux. La moitié de la Suisse est l’enfer, et l’autre moitié est le paradis.

Rousseau a choisi, comme vous le dites, le plus vilain canton de l’Angleterre : chacun cherche ce qui lui convient ; mais il ne faudrait pas juger des bords charmants de la Tamise par les rochers de Derbyshire. Je crois la querelle de M. Hume et de Jean-Jacques terminée, par le mépris public que Rousseau s’est attiré, et par l’estime que M. Hume mérite. Tout ce qui m’a paru plaisant, c’est la logique de Jean-Jacques, qui s’est efforcé de prouver que M. Hume n’a été son bienfaiteur que par mauvaise volonté . Il pousse contre lui trois arguments qu’il appelle trois soufflets sur la joue de son protecteur 3. Si le roi d’Angleterre lui avait donné une pension, sans doute le quatrième soufflet aurait été pour Sa Majesté. Cet homme me paraît complètement fou. Il y en a plusieurs à Genève. On y est plus mélancolique encore qu’en Angleterre ; et je crois, proportion gardée, qu’il y a plus de suicides à Genève qu’à Londres. Ce n’est pas que le suicide soit toujours de la folie. On dit qu’il y a des occasions où un sage peut prendre ce parti ; mais, en général, ce n’est pas dans un accès de raison qu’on se tue.

Si vous voyez M. Franklin 4, je vous supplie, monsieur, de vouloir bien l’assurer de mon estime et de ma reconnaissance. C’est avec ces mêmes sentiments que j’ai l’honneur d’être avec beaucoup de respect, monsieur, votre, etc. »

1 Voltaire a publié, en 1775, Les Oreilles du comte de Chesterfield et Le chapelain Goudman ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Oreilles_du_Comte_de_Chesterfield_et_le_Chapelain_Goudman

2 Guide Bentivoglio, Lettere, ed. Borgioli, 1807, P ; 3-5.

3 Dans la lettre de J.-J. Rousseau à Hume, du 10 juillet 1766, il y a troisième soufflet sur la joue de mon patron.

4 Benjamin Franklin, né en 1706, mort en 1790. En réalité Marriott n'est pas aussi étroitement associé à Franklin que le croit V*.

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29/07/2022 | Lien permanent

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