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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

il n’y en ait pas un qui s’empresse à porter au moins un peu d’eau quand il voit la maison de ses voisins en flammes. La

... Voltaire a peut-être inspiré Jacques Chirac quand il disait "La maison brûle et nous regardons ailleurs !", paroles qui doivent être suivies d'effets, et qui ne le sont que rarement .

https://www.dailymotion.com/video/x7lqyto

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« A Etienne-Noël Damilaville

15è octobre 1764

J’ai parcouru, mon cher frère, la critique   des sept volumes de l’Encyclopédie 1. Je voudrais bien savoir qui sont les gadouards 2 qui se sont efforcés de vider le privé d’un vaste palais dans lequel ils ne peuvent être reçus . Je leur appliquerai ce que l’électeur palatin me faisait l’honneur de m’écrire au sujet de maître Aliboron , Tel qui critique l’église de Saint-Pierre de Rome n’est pas en état de dessiner une église de village 3Belles paroles, et bien sensées, et qui prouvent que la raison a encore des protecteurs dans ce monde.

Je crois que le public ne se souciera guère qu’une des îles Mariannes s’appelle Agrignon ou Agrigan, ni qu’il faille prononcer Barassa ou Bossera . Mais je crains que les ennemis de la philosophie ne regardent cette critique comme un triomphe pour eux.

Je suis surtout indigné de la manière dont on traite M. d’Alembert, pages 172 et 178 4.

Pour M. Diderot, il est maltraité dans tout l’ouvrage. Ce qu’il y a de pis, c’est que ces misérables sonnent le tocsin. Ils sont bien moins critiques que délateurs ; ils rappellent, à la fin du livre, quatre articles des arrêts du Conseil et du parlement contre l’Encyclopédie . Ils ressemblent à des inquisiteurs qui livrent des philosophes au bras séculier. Voilà donc la persécution visiblement établie ; et si on ne rend pas ces satellites de l’envie aussi odieux et aussi méprisables qu’ils doivent l’être, les pauvres amis de la raison courent grand risque. Je ne conçois pas que, parmi tant de gens de lettres qui ont tous le même intérêt, il n’y en ait pas un qui s’empresse à porter au moins un peu d’eau quand il voit la maison de ses voisins en flammes. La sienne sera bientôt embrasée, et alors il ne sera plus temps de chercher du secours.

Je voudrais bien que M. d’Alembert suspendît pour quelques jours ses autres occupations, et que, sans se faire connaître, sans se compromettre, il fît, selon son usage, quelque ouvrage agréable et utile, dans lequel il daignerait faire voir en passant l’insolence, la mauvaise foi et la petitesse de ces messieurs. Il est comme Achille qui a quitté le camp des Grecs ; mais il est temps qu’il s’arme et qu’il reprenne sa lance, je l’en prie comme le bon homme Phœnix 5, et je vous prie de vous joindre à moi.

Il est assez triste que le Dictionnaire philosophique paraisse dans ce temps-ci, et il est bien essentiel qu’on sache que je n’ai nulle part à cet ouvrage, dont la plupart des articles sont faits par des gens d’une autre religion et d’un autre pays.

Avez-vous à Paris la traduction du plaidoyer de l’empereur Julien contre les Galiléens, par le marquis d’Argens 6? Il serait à souhaiter que tous les fidèles eussent ce bréviaire dans leur poche. Adieu, mon cher frère, recommandez-moi aux prières des fidèles, et surtout écr. l’inf. »

2Mot en usage dans la région lyonnaise pour vidangeurs .

3 La citation de cette lettre de l’Électeur palatin, du 1er octobre 1764, est exacte, à la modification du temps des verbes près .

4 Page 172, l'auteur des Lettres sur l'Encyclopédie préfère les Mélanges d'histoire et de littérature de Vigneul-Marville (pseudonyme de Bonaventure d'Argonne) aux Mélanges de d'Alembert ; à la page 178, il accuse d’Alembert d'avoir suggéré que les pasteurs de Genève qui avaient fait brûler Servet méritaient de l'être au même titre que lui . 

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8626481s/f7.image

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bonaventure_d%27Argonne

et : https://classiques-garnier.com/export/html/melanges-de-litterature-d-histoire-et-de-philosophie-avertissement.html?displaymode=full

5 Iliade, IX, 424, d'Homère .Voir Phoinix dans : https://mediterranees.net/mythes/troie/iliade/chant9.html

6 Défense du paganisme par l'empereur Julien, en grec et en français, avec des dissertations et des notes pour servir d'éclaircissement au texte et pour en réfuter les erreurs, par M. le marquis d'Argens. V* publia lui-même une nouvelle édition de ce texte sous le titre plus explicite de Discours de l'empereur Julien contre les chrétiens, 1768.

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k61992d.texteImage

et : https://fr.wikisource.org/wiki/Discours_de_l%E2%80%99empereur_Julien/%C3%89dition_Garnier

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01/12/2019 | Lien permanent

Je renvoie trois cahiers de La Pucelle, qu'on ne peut pas honnêtement présenter pour présent de noces

... J'adore l'humour de ce Voltaire qui sait par ailleurs être aussi grivois en imageant le mariage comme étant une "ouverture de pâté" . Marlène Schiappa aurait-elle été capable de faire virer le patriarche de l'Académie comme France 2 a vidé Tex suite à la plainte portée par la demi-ministre féministe intégriste ?

http://www.leparisien.fr/culture-loisirs/tv/les-z-amours-... 

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Comprenne qui veut !

 

 

« A Gabriel Cramer

à Genève

[vers le 25 janvier 1763] 1

Je ne renvoie point la feuille T qu'on vient de m'envoyer . Il me faut un peu de temps pour adoucir certaines choses qui pourraient effaroucher, et nuire à la facilité du débit .

Si dans le reste du volume il se trouvait quelque chose d'un peu trop gai sur les Juifs on offrirait de faire un carton, et deux même, s'il le faut . Ce que je demande instamment, c'est que je ne sois pas nommé . .
Maintenant, venons à l'ouverture du pâté ; c'est un officier de cavalerie, devenu maître des comptes à Dole, qui se saisit de ce morceau, c'est un homme d'une très belle figure, et qui paraît fort aimable . Il faudra seulement vingt-quatre mille francs au mois de juin, ou au commencement de juillet . C'est Pierre Corneille qui marie toute la famille, voilà pourquoi je me suis adressé à monsieur Cramer . S'il peut faire fournir cet argent au commencement de juillet il faut qu'il prenne pour le reste les temps qui lui conviendront, et faire du total une somme ronde 2. Il pourrait même se charger des deux cents exemplaires qui resteront de la czarine 3. M. de Schouvaloff n'en a jamais demandé qu'une douzaine d'exemplaires, mais je crois qu'il en faudrait quelques uns de reliés .

J'ai toujours très approuvé, toutes les mesures, toutes la propositions, comme tous les soins que monsieur Cramer a bien voulu prendre . L'avantage que la famille Dupuits trouvera, me paraît considérable, je suis content, tout le monde doit l'être, et le sera . C'est à moi seul de régler avec monsieur Cramer, puisque c'est moi seul qui ait fait cette entreprise . Monsieur Cramer ne doit en aucune manière soupçonner qu'il y ait personne qui fasse la moindre difficulté, et qui ait le moindre scrupule ; tout ira très bien, moyennant vingt-quatre mille francs qu'on donnera à la fin de juin à celui qui doit ouvrir incessamment le pâté .

Je me flatte que monsieur Cramer se porte mieux, il n'en est pas de même de moi . Je renvoie trois cahiers de La Pucelle, qu'on ne peut pas honnêtement présenter pour présent de noces . Je prie monsieur Cramer de vouloir bien m'en faire avoir trois autres . On lui apportera T demain sans faute. »

1 L'édition Gagnebin place la lettre en février, ce qui est un peut trop tard .

2 V* ira jusqu'à estimer le produit du Corneille à 100 000 livres ( lettre à La Harpe du 22 janvier 1773 : http://www.monsieurdevoltaire.com/2016/04/correspondance-... ) ; il ne descendra jamais en dessous de 50 000 livres . Ces considérations sont éclairées dans une certaine mesure par une lettre de Mme Denis à Cramer qui doit être sensiblement contemporaine : «  Mon cher ami nous marions Mlle Corneille à M. Dupuits, cela n'est décidé que d'hier, et il est très essentiel que ce mariage ne se déclare que dans quinze jours . Vous êtes et serez la seule personne à qui j'en ferai part avant ce temps-là, ainsi je vous demande le secret . Nous avons présenté l'affaire des souscriptions comme un objet qui peut aller au moins à cinquante mille francs comme j'ai tout lieu de l'espérer, et je vous supplie qu'en cas que Dupuits s'en informe à vous de ne nous pas démentir . Effectivement si nous pouvons avoir deux mille cinq cents souscriptions comme j'ai tout lieu de le croire cela ira beaucoup au-delà . Du reste nous sommes enchantés de l'affaire que nous faisons . Mlle Corneille trouve un jeune homme aimable qui a beaucoup de bien mais motus et vantez beaucoup nos souscriptions .

Je suis fort fâchée de n''avoir pas été à votre bal . Je n'ai pu quitter mon oncle et j'avais cette affaire à cœur . Adieu, gardez-moi le secret et surtout ne dégoûtez point de nos souscriptions . Je vous embrasse et vous aime de tout mon cœur . Denis . »

3 Ainsi Cramer pouvait vendre ne seconde fois des exemplaires qui étaient souscrits mais qui ne devaient pas être effectivement livrés . C'est dire à quel point V* avait bien conçu son projet, tant sur le plan financier que sur le plan « publicitaire » . La liste des souscripteurs comporte un total de 2992 exemplaires . Plusieurs centaines au moins ne furent pas livrés ; voir lettre du 20 février 1763 à Cramer : « … le roi ne veut point du tout qu'on lui envoie deux cents exemplaires, qu'il n'en demande que douze ... »

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16/12/2017 | Lien permanent

je me couche toujours dans l’espérance de me moquer du genre humain en me réveillant. Quand cette faculté me manquera, c

... C'est dit ! c'est bon ! A suivre ... par exemple : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/bouquet-l...

 

 

 

« A Marie de Vichy de Chamrond , marquise Du Deffand

22è février 1769

Votre grand’maman, madame, doit vous avoir communiqué la Canonisation de frère Cucufin, par laquelle Rezzonico a signalé les dernières années de son sage pontificat. J’ai cru que cela vous amuserait, d’autant plus que cette histoire est dans la plus exacte vérité.

Je lui ai aussi adressé pour vous quatre volumes du Siècle de Louis XIV, pour mettre dans votre bibliothèque. Les faits de guerre ne sont pas trop amusants, et je dis hardiment qu’il n’y a rien de si ennuyeux qu’un récit de batailles, et surtout de ces batailles inutiles, qui n’ont servi qu’à répandre vainement le sang humain . Mais il y a dans le reste de l’histoire des morceaux assez curieux, et vous y verrez assez souvent les noms des hommes avec qui vous avez vécu depuis la Régence.

Je voudrais pouvoir fournir tous les jours quelques diversions à vos idées tristes . Je sens bien qu’elles sont justes. La privation de la lumière et l’acquisition d’un certain âge ne sont pas des choses agréables. Ce n’est pas assez d’avoir du courage, il faut des distractions. L’amusement est un remède plus sûr que toute la fermeté d’esprit. J’ai le temps de songer à tout cela dans ma profonde solitude, avec des yeux éteints et ulcérés, couverts de blanc et de rouge.

Si vous vous souciez d'un petit livre intitulé Les Singularités de la nature, je vous l'enverrai ainsi qu'à votre grand’maman ; vous passerez les chapitres qui vous ennuieront et vous vous ferez lire les autres 1.

Vous me demandez, madame, si j’ai lu des Lettres sur les Animaux 2, écrites de Nuremberg . Oui, j’en ai lu deux ou trois, il y a plus d’un an. Vous jugez bien qu’elles m’ont fait plaisir, puisque l’auteur pense comme moi. Il faudrait qu’une montre à répétition fût bien insolente pour croire qu’elle est d’une nature absolument différente de celle d’un tournebroche. S’il y a dans l’empyrée des êtres qui soient dans le secret, ils doivent bien se moquer de nous.

La montre du président Hénault est donc détraquée ? C’est le sort de presque tous ceux qui vivent longtemps. Mon timbre commence à être un peu fêlé, et sera bientôt cassé tout à fait. Il vaudrait mieux n’être pas né, dites-vous ; d’accord, mais vous savez si la chose a dépendu de nous. Mais non seulement la nature nous a fait naître sans nous consulter, mais elle nous fait aimer la vie malgré que nous en ayons. Nous sommes presque tous comme le bûcheron d’Ésope et de La Fontaine 3. Il y a tous les ans deux ou trois personnes sur cent mille qui prennent congé ; mais c’est dans de grands accès de mélancolie. Cela est un peu plus fréquent dans le pays que j’habite. Deux Genevois de ma connaissance se sont jetés dans le Rhône, il y a quelques mois . L’un 4 avait cinquante mille écus de rente, l’autre 5 était un homme à bons mots. Je n’ai point encore été tenté d’imiter leur exemple : premièrement, parce que mes abominables fluxions sur les yeux ne me durent que l’hiver ; en second lieu, parce que je me couche toujours dans l’espérance de me moquer du genre humain en me réveillant. Quand cette faculté me manquera, ce sera un signe certain qu’il faut que je parte.

On m’a mandé depuis peu, de Paris, tant de choses ridicules que cela me soutiendra gaiement encore quelques mois. À l’égard du ridicule de ce B***6 il est a faire vomir.

Je me suis extrêmement intéressé à toutes les tracasseries qu’on a faites au mari de votre grand’maman 7. Vous ne m’en parlez jamais ; vous avez tort, car il n’y a personne qui lui soit plus attaché que moi ; et vous savez bien qu’on peut tout écrire sans se compromettre.

Bonsoir, madame ; je vous aimerai jusqu’à la dernière minute de ma montre. »

1 Ce paragraphe est omis dans la copie Wyart et dans l'édition de Kehl .

2 Par Charles-Georges Le Roy. Hennin a signalé cet ouvrage à V* : Lettres sur les animaux, 1768, etc. La Correspondance littéraire en parle également ( VIII, 252). La marquise Du Deffand a appris à V* que ces Lettres sur les animaux est d'un nommé « Le Roy inspecteur des chasses du parc de Versailles » : voir lettre du 8 février 1769 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1769/Lettre_7477

Voir : https://books.google.fr/books?id=kbINAAAAYAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

3 La Fontaine : Livre Ier page 17 , « La Mort et le Bucheron »: https://www.texteslibres.fr/pdf/oeuvre/1

et « Le Vieillard et la Mort » d'Esope : https://fr.wikisource.org/wiki/Fables_d%E2%80%99%C3%89sope_%28trad._Chambry%2C_1927%29/Le_Vieillard_et_la_Mort

5 Les archives genevoises ne font pas mention de ce second suicide .

6 Bélestat, dont a parlé Mme Du Deffand dans la lettre à laquelle répond V* .

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25/08/2024 | Lien permanent

Que Socrate, Platon, Lucrèce, Epictète, Marc-Antonin, Julien, Bayle, Shaftesburi, Bolingbroke, Middleton, aient tous mes

... Telle fut la conclusion du discours de Manuel Valls  [ NDLR --  James estime que le "Bonne chance" adressé à Hamon était un peu sec et méritait développement ], hier au soir, partagé entre les larmes ( dur de se retrouver au chomedu ) et la satisfaction de se tirer de ce guépier électoral qui n'allait que faire reculer l'échéance de la défaite de deux mois et demi . Je peux me tromper .

Il veut se "réinventer", selon ses termes, ce qui signifie qu'il va encore jouer, je dis bien "jouer" un nouveau rôle, parader ? ou faire un ré-inventaire avant soldes ? Mais quand sera-t-il lui-même ?

 Pour ceux qu'un rien émeut , sortez vos mouchoirs : http://www.huffingtonpost.fr/2017/01/29/primaire-de-la-ga...

 Et pour ceux qui aiment l'humour : http://www.tuxboard.com/gaspard-proust-et-le-discours-de-...

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C'est fait ! Bravo Manuel ! Parole tenue : Hamon ( rassembleur ?! ) est choisi .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

8 février [1762]

Cher frère, que le Dieu de nos pères m’a donné, lisez cette lettre 1 à cachet volant, et envoyez-la.

Puisqu’il n’y a eu que neuf représentations 2, il faut, mon cher frère, en donner tout le profit à frère Thieriot ; je trouverai d’ailleurs le moyen de récompenser la personne qui devait partager. Je ne vois pas sur quoi l’on s’obstine à me croire l’auteur de L’Écueil du Sage, puisque j’ai toujours mandé que je ne le suis pas. Si les comédiens avaient une certitude que cette pièce est de moi, ils seraient très fâchés que j’en eusse abandonné le profit à d’autres qu’à eux. Au reste, Nanine n’eut pas tant de représentations, et le Droit du Seigneur vaut mieux que Nanine.

Oh ! le bon livre que le Manuel 3 des monstres inquisitoriaux ! ut, ut, est 4. Mon frère aura un Meslier 5 dès que j’aurai reçu l’ordre : il paraît que mon frère n’est pas au fait. Il y a quinze à vingt ans qu’on vendait le manuscrit de cet ouvrage huit louis d’or. C’était un très gros in-4° ; il y en a plus de cent exemplaires dans Paris 6. Frère Thieriot est très au fait. On ne sait qui a fait l’Extrait ; mais il est tiré tout entier, mot pour mot, de l’original. Il y a encore beaucoup de personnes qui ont vu le curé Meslier . Il serait très utile qu’on fît une édition nouvelle de ce petit ouvrage à Paris : on peut la faire aisément en trois ou quatre jours. On dit, mes chers frères, qu’on y a imprimé une petite feuille intitulée le Sermon du rabbin Akib. M. le duc de La Vallière, qui est ramasseur de rogatons, me prie de chercher cette feuille, que je ne peux trouver : il est expédient que mes frères l’envoient à Versailles, à M. le duc de La Vallière. Au reste, il est bien à désirer que le nom du frère ermite ne soit jamais prôné quand il s’agit de petits envois aux frères.

Les frères Cramer supprimeront soigneusement la préface de l’Oriental. Helvétius est véhémentement soupçonné d’avoir fait cet ouvrage. Est-il à Paris, frère Helvétius ?

Je voudrais savoir quel est l’auteur d’un libelle de l’année passée, oublié cette année-ci, intitulé le Citoyen de Montmartre (4)7.

Que Socrate, Platon, Lucrèce, Epictète, Marc-Antonin, Julien, Bayle, Shaftesburi, Bolingbroke, Middleton, aient tous mes chers frères en leur sainte et digne garde ! »

 

3 Le Manuel des inquisiteurs .

4 Quoi qu'il en soit .

6 Tout cela est exact . Voir Andrew R. Morehouse : Voltaire et Jean Meslier, 1936 ; Le Testament de Jean Meslier fut publié en entier par Rudolph Charles d'Ablaing von Giessengurg, 1864 .

7 Pensées philosophiques d'un citoyen de Montmartre, 1756, de Pierre Sennemaud, qui signait « Jacques Denis » ses attaques contre les philosophes ; voir lettre du 8 mai 1756 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/07/05/chers-electeurs-est-le-mot-propre-et-on-est-trop-heureux-qua.html

 

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30/01/2017 | Lien permanent

Nul monarque avant moi sur le trône affermi N’a quitté ses États pour chercher un ami

...  A dit Emmanuel Macron, se confiant à Joe Biden lors du repas intime de prestige hier soir . Félicitations au passage à notre première dame impeccablement chic .

Brigitte Macron aux États-Unis : sa robe blanche fendue sur le côté fait  perdre la tête à Emmanuel Macron !

Rien à droite ? rien à gauche ? on peut traverser !

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

16 mai 1767

Je dépêche aujourd’hui à M. d’Argental, par M. le duc de Praslin, trois exemplaires d’une nouvelle édition de Genève. Je vous enverrai incessamment celle de Lyon, qui sera, je crois, plus correcte. Je n’impute toutes ces éditions qu’on s’empresse de faire qu’à cet heureux contraste des mœurs républicaines et agrestes avec les mœurs fardées des cours. Je ne pense pas que la pièce ait un grand mérite ; cependant, si vous nous l’aviez vu jouer, je crois que vous en seriez assez content. Lekain trouverait peut-être du plaisir à dire 

Nul monarque avant moi sur le trône affermi

N’a quitté ses États pour chercher un ami ;

Je donne cet exemple, et ton maître te prie ;

Entends sa voix, entends la voix de ta patrie,

Celle de ton devoir, qui doit te rappeler,

Et des pleurs qu’à tes yeux mes remords font couler.1

J’ai aussi un peu fortifié sa scène avec Indatire, afin qu’il ne fût pas tout à fait écrasé par le Scythe.

Le quatrième acte, au moyen de quelques légers changements, a fait une très grande sensation ; les deux vieillards ont fait verser des larmes. C’est un grand jeu de théâtre, c’est la nature elle-même. Les galants Velches ne sont pas encore accoutumés à ces tableaux pathétiques. Je n’ai jamais vu sur notre théâtre un vieillard attendrissant ; Sarrazin même ne jouait Lusignan que comme un capucin.

Madame de La Harpe a fait pleurer dès sa première scène, en disant :

Laisse dans ces déserts ta fidèle Obéide 2.

Quand je dois tant haïr ce funeste Athamare .

Tranquilles, sans regrets, sans cruels souvenirs …

Il faut convenir que ce rôle est très neuf au théâtre, et, en vérité, c’est quelque chose que de faire du neuf aujourd’hui. Ce vers :

Quand je dois tant haïr ce funeste Athamare ;

et ceux-ci : 

Va, si mon cœur m’appelle aux lieux où je suis née,

Ce cœur doit s’en punir, il se doit imposer

Un frein qui le retienne, et qu’il n’ose briser ;

ces vers, dis-je, contiennent tout le monologue qu’on propose ; et ils font un bien plus grand effet dans le dialogue. Il y a cent fois plus de délicatesse, plus d’intérêt de curiosité, plus de passion, plus de décence, que si elle commençait grossièrement par se dire à elle-même, dans un monologue inutile, qu’elle aime un homme marié.

Il n’y a personne de nos acteurs de Ferney qui ne sente vivement combien ce monologue gâterait le rôle entier d’Obéide, à quel point il serait déplacé, et combien il serait contradictoire avec son caractère. Comment irriter, par degrés, la curiosité du spectateur ? comment lui donner le plaisir de deviner qu’Obéide idolâtre un homme qu’elle doit haïr, quand elle aura dit platement, dans un très froid monologue, ce qu’elle doit, ce qu’elle veut se cacher à elle-même ?

Je n’aime pas assurément les longs et insupportables romans de Paméla et de Clarisse 3. Ils ont réussi, parce qu’ils ont excité la curiosité du lecteur, à travers un fatras d’inutilités : mais si l’auteur avait été assez malavisé pour annoncer, dès le commencement, que Clarisse et Paméla aimaient leurs persécuteurs, tout était perdu, le lecteur aurait jeté le livre.

Serait-il possible que ces insulaires connussent mieux la nature que vos Velches ? Ne sentez-vous pas que ce qui est à sa place dans Alzire serait détestable dans Obéide ?

La pièce a été mal jouée sur votre théâtre, il faut en convenir, et la malignité a pris ce prétexte pour accabler la pièce : c’est ce qui m’est toujours arrivé On s’est attaché à de petits détails, à des mots, pour justifier cette malignité. J’ai ôté ce prétexte autant que je l’ai pu ; mais je ne puis vous donner des acteurs. Lekain n’est point assez jeune, et mademoiselle Durancy ne sait point pleurer ; vos vieillards sont à la glace. Il n’y a pas un rôle dans la pièce qui ne dût contribuer à l’harmonie du tableau. Les confidents mêmes y ont un caractère ; mais où trouver des confidents qui sachent parler avec intérêt ?

Malgré cette disette, mademoiselle Durancy, les Lekain, les Brizard, les Molé, en jouant avec un peu plus de chaleur et de véhémence (c’est-à-dire comme nous jouons), pourraient certainement attirer beaucoup de monde, et subjuguer enfin la cabale, comme ils ont fait dans Adélaïde du Guesclin, laquelle ne vaut pas certainement les Scythes.

Le rôle d’Athamare est actuellement plus favorable à l’acteur. Il arrivait au deuxième acte sans parler ; il faut qu’il attire sur lui toute l’attention. Ce sont de ces défauts dont je ne me suis aperçu que sur notre théâtre.

Je m’attendais que les comédiens répondraient à toutes les peines que je me suis données, et à tous les services que je leur ai rendus depuis cinquante ans. Ils devaient reprendre les représentations des Scythes ; c’est une loi dont ils ne se sont écartés que pour moi. Ils ont mieux aimé manquer à ce qu’il me doivent, et jouer les Illinois 4 pour faire mieux tomber les Scythes. Ils savent bien que c’est à peu près le même sujet. Leur conduite est le vrai secret de dégoûter le public d’un sujet neuf qu’ils vont rendre trivial. Je ne méritais pas cette ingratitude de leur part. Ma consolation est qu’il y a plus d’éditions des Scythes que les comédiens n’en ont donné de représentations. »

1Les Scythes, Act. II, sc. IV, avec de légères modifications.

2 Ibid.Ac. II, sc. 1, ainsi que les citations qui suivent .

4 Hirza ou les Illinois d'Edmé-Louis Billardon de Sauvigny, représenté le 27 mai 1767, retiré après une seule représentation, repris le 22 juin et joué alors treize fois . Pendant ce temps les comédiens refusaient de reprendre Les Scythes .

Voir : https://books.google.fr/books?id=kqOIygAACAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Edme-Louis_Billardon_de_Sau...

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02/12/2022 | Lien permanent

il est nécessaire que nous fassions notre compte, afin que nous puissions voir comment nous sommes ensemble, et quels ar

... On dirait bien un fragment de conversation pré-électorale, du style Hamon-Mélenchon, ou Poutou-Arthaud, toute autre convention d'entente de la part des autres candidats me semblant improbable, sinon impossible (mais que ne ferait-on pas quand on a l'ambition de gouverner un pays ! ).

 

Grincements de dents ... gauche en panne contre gauche spectacle

 https://i2.wp.com/actuendessins.fr/wp-content/uploads/2017/02/candidature-unique-jm.jpg

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 Sourires sympathiques, des convictions mais pas de détestations entre eux .

 

« A François Guillet , baron de Monthoux

à Annemasse

recommandée à M. Mirabaud

Monsieur,

Ma mauvaise santé ne me permets plus les détails du ménage . Mme Denis , à qui je donne Ferney et les Délices veut bien avoir la bonté de s'en charger . Si vous avez celle de lui envoyer de l'avoine, elle vous la paiera argent comptant . Mais au préalable, il est nécessaire que nous fassions notre compte, afin que nous puissions voir comment nous sommes ensemble, et quels arrangements nous prendrons . Je vous prie, monsieur, de vouloir bien venir aux Délices, ou d'y envoyer un homme chargé de votre procuration .

J'ai l'honneur d'être avec les sentiments les plus respectueux,

monsieur

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire . 

Aux Délices 31è mai 1762»

 

 

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18/04/2017 | Lien permanent

Traitez-nous comme notre situation le demande et comme la nature l’indique. Si vous mettez à grands frais des barrières

... Il est remarquable que toutes les négociations avec les gouvernants et les fonctionnaires, au XVIIIè siècle comme de nos jours, soit basée sur la perspective d'un profit pour l'Etat et par ricochet pour tous les menus rouages impliqués .

De nos jours, passer la douane Pays de Gex-Genève est symbolique, et routinière pour les travailleurs frontaliers français, banale pour les Genevois qui viennent acheter chez nous ce qui est trop cher chez eux (paradoxalement, le Gruyère est moins cher en France qu'en Suisse ! ) .

Que la France ou la Suisse bloque la frontière, et nous aurons quarante mille chomeurs d'un seul coup en France et l'arrêt immédiat de tous services en République genevoise . Alors vive l'entente cordiale ! Gagnant-gagnant !

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Ce que pense le reste de la Suisse sur le canton de Genève ...

 http://www.20min.ch/ro/news/suisse/story/-Les-Valaisans-b...

 

 

«A Etienne-Michel Bouret 1

A Ferney 20 novembre 1761 par Genève 2

Vous êtes une belle âme, monsieur, tout le monde le sait, j’en ai des preuves, et je vous dois de la reconnaissance. Monsieur votre frère est une belle âme aussi ; il veut le bien public et celui du roi, qui sont les mêmes.

S’il avait vu le petit pays de Gex que j’ai choisi pour finir mes jours doucement, il n’en croirait pas les faux mémoires qu’on lui a donnés.

Les ennemis de notre pauvre petite province en imposent à MM. les fermiers-généraux, en disant que ce pays est peuplé et riche, et que les fonds s’y vendent au denier soixante.

Je suis la cause malheureuse des louanges cruelles qu’on nous donne. Je suis le seul qui, depuis trente ans, ai acheté des terres dans cette province : je les ai achetées trois fois plus cher qu’elles ne valent : mais de ce que je suis une dupe, il ne s’ensuit pas que le terrain soit fertile.

Je certifie que, dans toute l’étendue de la province, la terre ne rend pas plus de trois pour un : ainsi elle ne vaut pas la culture. Le paysage est charmant, je l’avoue, mais le sol est détestable.

Sur mon honneur, nous sommes tous gueux ; et j’ai l’honneur de le devenir comme les autres pour avoir acheté, bâti, et défriché très chèrement.

Nous manquons d’habitants et de secours. Le pays, qui possédait, il y a soixante ans, seize mille habitants et seize mille bêtes à cornes, n’en a plus guère que la moitié. Nous sommes tous obligés de faire cultiver nos terres par des Suisses et par des Savoyards, qui emportent tout l’argent du pays. Donnez-nous quelque facilité, le pays se repeuplera, et les fermes du roi y gagneront.

Je peux vous assurer, monsieur, vous et MM. vos confrères, que trois Genevois étaient déjà prêt à acheter des domaines dans le pays, sur la nouvelle que le conseil de Sa Majesté allait retirer les brigades des employés, et qu’il daignait faire pour nous un arrangement utile.

Nous avons compté sur cet arrangement fait par les membres du conseil les plus expérimentés et les plus instruits : jugez combien il serait cruel de nous priver d’un bien que leur équité nous avait promis !

Pour peu qu’on jette les yeux sur la carte de la province, on verra clairement que vos brigades, répandues dans le plat pays, ne servent à rien du tout qu’à vous coûter beaucoup de frais ; placez-les dans les gorges des montagnes, quatre hommes y arrêteraient une armée de contrebandiers ; mais dans le plat pays, les contrebandiers suisses, savoyards et autres ont mille routes. Pour nos paysans, ils ne font d’autre contrebande que de mettre dans leurs chausses une livre de sel et une once de tabac pour leur usage, quand ils vont à Genève.

A l’égard de la grande contrebande, toute la noblesse du pays la regarde comme un crime honteux, et nous vous offrons notre secours contre tous ceux qui voudraient forcer les passages.

5°/ On allègue que, depuis quelques mois, les bandes armées se sont multipliées. Oui, elles ont été une fois dans le plat pays 3. Ne divisez plus vos forces, et il ne passera pas un contrebandier.

On allègue que si on retirait les brigades du plat pays, si on s’abonnait avec nous, si on suivait le règlement proposé, nous nous vêtirions d’étoffes étrangères, au préjudice des manufactures du royaume.

Nous prions instamment MM. les fermiers-généraux d’observer que la capitale de notre opulente province n’a pas un marchand, pas un artisan tolérable, et que, quand on a besoin d’un habit, d’un chapeau, d’une livre de bougie et de chandelle, il faut aller à Genève.

Que le conseil nous accorde cet abonnement utile à jamais pour les fermes du roi et maintenant pour nous (abonnement proposé par plusieurs de vos confrères), nous deviendrons les rivaux de Genève, au lieu d’être ses tributaires.

On nous oppose que le port franc de Marseille n’a pas les privilèges que nous demandons. Mais, monsieur, peut-on comparer nos huit à neuf mille pauvres habitants à la ville de Marseille, qui n’a nul besoin d’un pareil abonnement ? D’autres provinces, dit-on, seraient aussi en droit que nous de demander ces privilèges.

Considérez, je vous prie, que nulle province n’est située comme la nôtre. Elle est entièrement séparée de la France par une chaîne de montagnes inaccessibles, dans lesquelles il n’y a que trois passages à peine praticables 4. Nous n’avons de communication et de commerce qu’avec Genève. Traitez-nous comme notre situation le demande et comme la nature l’indique. Si vous mettez à grands frais des barrières (d’ailleurs inutiles) entre Genève, et nous, vous nous gênez, vous nous découragez, vous nous faites déserter notre patrie, et vous n’y gagnez rien.

Enfin, monsieur, c’est sur un mémoire de plusieurs de vos confrères mêmes que M. de Trudaine arrangea notre abonnement du sel forcé, et qu’il écrivit à M. l’intendant de Bourgogne. Nous acceptâmes l’arrangement. Faut-il qu’aujourd’hui, sur les calomnies de quelques regrattiers de sel intéressés à nous nuire, on révoque, on désavoue le plan le plus sage, le plus utile pour tout le monde, dressé par M. de Trudaine lui-même !

Je vous supplie, monsieur, de faire remarquer à MM. les fermiers, vos confrères, les expressions de la lettre de M. de Trudaine à M. l’intendant de Bourgogne, du 16 Août 1761 : « Je vous prie de faire goûter ces bonnes raisons à ceux qui sont à la tête de l’administration du pays. Je ferai expédier, sans retardement, l’arrêt et les lettres patentes. »

Il est évident qu’on avait discuté le pour et le contre de cet abonnement, qu’on avait consulté messieurs des fermes, qu’on attendait de nous l’acceptation de leurs bonnes raisons : nous les avons acceptées ; nous avons regardé la lettre de M. de Trudaine comme une loi ; nous avons compté sur la convention faite avec vous.

Qu’est-il donc arrivé depuis, et qui a pu changer une résolution prise avec tant de maturité ?

Quelque préposé au sel a craint de perdre un petit profit ; il a voulu surprendre l’équité de M. votre frère ; il a voulu immoler le pays à ce petit intérêt.

Toute la province vous conjure, monsieur, d’examiner nos remontrances avec M. votre frère, en présence de M. de Trudaine, et de finir ce qui était si bien commencé ; elle vous aura autant d’obligations que vous en a eu la Provence 5.

En mon particulier, je sentirai votre bonté plus que personne. J’ai l’honneur d’être, etc. »

2 Copie par Jean-Louis Wagnière, date autographe, avec mention de Wagnière (sauf le premier mot) : « Copie de la lettre de M. de Voltaire , du 20è novembre1761, à M. Bouret, fermier général ».

3 Note du manuscrit : c'est à dire que quatre paysans étrangers voulant passer du tabac, tuèrent un garde, il y a près de deux ans, pruve évidente que ces ardes dispersés dans la plkat pays ne servent à rien . La dixièeme parie placée dans les gorges des moontagnes, formeraient une barrière impénétrable . 

4 Col de La Faucille, col de Saint Cergue et passage du Fort-L'Ecluse .

5 Trudaine, en 1744, avait fourni la Provence en grains pendanrt une famine , et une médaille avait été frappée en son honneur .

 

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26/11/2016 | Lien permanent

ils se sont servis de la confession, qui met les sots dans la dépendance des prêtres

... Lesquels peuvent passer pour les psy des pauvres ? Le péché , merveilleuse invention des religieux pour se rendre indispensables, grosses gommes à effacer, au nom de dieu, les fautes répertoriées qu'un peuple abruti reconnaissent servilement .

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La crédulité n'a pas de limite

 

 

« A Jean-Marie Arnoult

Le 6 juillet 1761, à Ferney

Je vous suis obligé, monsieur, des éclaircissements que vous me donnez. Je pensais qu’il n’était pas permis à un official de citer des séculiers sans l’intervention de la justice du roi ; et il est clair que cet imbécile de Pontas 1 rapporte fort mal l’ordonnance de 1627. L’official de Gex est dûment official ; mais je crois qu’il a très indûment instrumenté le 8 Juin. Deux témoins sont prêts à déclarer qu’il les a voulu induire à déposer contre moi. Et de quoi s’agit-il, pour faire tant de vacarme ? d’une croix de bois qui ne peut subsister devant un portail assez beau que je fais faire, et qui en déroberait aux yeux toute l’architecture. Il a fait dire à un malheureux que j’ai appelé cette croix figure ; à un autre que je l’ai appelée  poteau : il prétend que six ouvriers qu’il a interrogés déposent que je leur ai dit, en parlant de cette croix de bois qu’il fallait transplanter Otez-moi cette potence. Or de ces six ouvriers quatre m’ont fait serment, en présence de témoins, qu’ils n’avaient jamais proféré une pareille imposture, et qu’ils avaient répondu tout le contre. Des deux témoins qui restent, et que je n’ai pu rejoindre, il y en a un qui est décrété de prise de corps depuis quatre mois, et l’autre est convaincu de vol.

Au reste, monsieur, je suis bien aise de vous dire que cette croix de bois, qui  sert de prétexte aux petits tyrans noirs de ce petit pays de Gex, se trouvait placée tout juste vis-à-vis le portail de l’église que je fais bâtir ; de façon que la tige et les deux bras l’offusquaient entièrement, et qu’un de ces bras, étendu juste vis-à-vis le frontispice de mon château, figurait réellement une potence, comme le disaient les charpentiers. On appelle potence, en terme de l’art, tout ce qui soutient des chevrons saillants ; les chevrons qui soutiennent un toit avancé s’appellent potence ; et, quand j’aurais appelé cette figure potence, je n’aurais parlé qu’en bon architecte.

J’ai de plus passé un acte authentique par devant notaire avec les habitants, par lequel nous sommes convenus que cette croix de village serait placée comme je le veux. Vous remarquerez encore qu’on ne la dérangea qu’avec le consentement du curé.

Ainsi vous voyez, monsieur, que voilà le plus impertinent prétexte que jamais les ennemis de la justice du roi et des seigneurs puissent prendre pour inquiéter un bienfaiteur assez sot pour se ruiner à bâtir une belle église, dans un pays où Dieu n’est servi que dans des écuries. Ceux qui me font ce procès devraient être plutôt à une mangeoire qu’à un autel. Ils n’ont rien fait depuis le 8 de juin, mais ils menacent toujours de faire, et ils me paraissent aussi insolents que menteurs.

Vous aurez sans doute vu, monsieur, par l’affaire d’Ancian, que parmi ces animaux-là il y en a qui ruent. Si ce curé Ancian esr brutal comme un cheval, il est malin comme un mulet, et rusé comme un renard ; mais, malgré ses ruses, je crois que vous le prendrez au gîte. Je puis vous assurer que lui et ses confrères ont employé toutes les friponneries profanes et sacrées pour avoir de faux témoins ; ils se sont servis de la confession, qui met les sots dans la dépendance des prêtres. Je n’ai point vu les procédures, mais je puis vous assurer, sur mon honneur et sur ma vie, que ce curé Ancian est un scélérat des plus punissables que nous ayons dans l’Eglise de Dieu. Il ne peut empêcher, malgré tous ses artifices et tous ceux de ses confrères, que de Croze n’ait eu  le crâne fendu dans la maison où ce curé alla faire le train au milieu de la nuit la plus noire, avec quatre coupe-jarrets. Je ne veux que ce fait : tout le reste me paraît peu de chose. Le père de Croze peut envoyer aux juges trois serviettes qu’il conserve teintes du sang de son fils ; elles devraient servir à étrangler le curé de Moëns, pourvu que préalablement il fût  bien confessé.

Je suppose, monsieur, que vous avez envoyé votre mémoire à M. de Greilly ; c’est encore un curé à relancer. Je vous ai envoyé à la chasse aux prêtres : si vous voulez venir reconnaître votre gibier au mois de septembre, comme vous me l’avez fait espérer, je compte bien que le rendez-vous de chasse sera chez moi.

Je viens d’écrire au bureau des postes de Genève ; pour savoir si ce n’est point quelque prêtre-commis des postes qui a fait la friponnerie de faire payer deux fois le port.

Nota bene que je ne mets point mon curé au nombre des bêtes puantes que vous devez chasser ; je suis d’accord avec lui en tout. Il est très reconnaissant, du moins quant à présent ; et il peut servir de piqueur dans la chasse aux renards que nous méditons. J’ai l’honneur d’être, en bon laïque, monsieur, votre, etc. »

1 Jean-Pontas, casuiste, né en 1638, mort en 1718. Bien connu comme l'auteur du Dictionnaire de cas de conscience, 1715, avec plusieurs rééditions, ainsi que de divers autres traités concernant les sacrements de baptême, d'extrême-onction, etc. Mais il est difficile de voir auqyuel de ces ouvrages V* peut ici penser . Ne sougerait-il pas putôt à celui qu'il a réclamé par sa lettre du 31 mai à Thieriot et Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/05/30/il-faut-defendre-les-vivants-et-les-morts-contre-les-gens-d.html

Voir page 2424 : https://books.google.fr/books?id=JwpEAQAAMAAJ&pg=PA2424&lpg=PA2424&dq=Jean-Pontas,+casuiste,+n%C3%A9+en+1638&source=bl&ots=NZrMQDkH6b&sig=lhLXiUgUZ-PS9QdwX5pVAQK1aQY&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjPoOOUvp3NAhVCmBoKHXc_CfcQ6AEILDAC#v=onepage&q=Jean-Pontas%2C%20casuiste%2C%20n%C3%A9%20en%201638&f=false

Voir : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k209866p

et : http://livresanciens-tarascon.blogspot.fr/2012/11/le-dictionnaire-des-cas-de-conscience.html

Voir : https://books.google.fr/books?id=jfWwAAAAMAAJ&pg=RA1-PA266&lpg=RA1-PA266&dq=La+pratique+de+la+juridiction++eccl%C3%A9siastique,+volontaire,+gracieuse,+et+contentieuse,+fond%C3%A9e+sur+le+droit+commun+et+sur+le+droit+particulier+du+royaume,+de+Fran%C3%A7ois+Ducasse&source=bl&ots=M6oGUqBfQD&sig=z2Nih3l5bXHmgWGgo3RHRTN3e4Q&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwj1rKDzwJ3NAhWClxoKHVASBI0Q6AEIJTAA#v=onepage&q=La%20pratique%20de%20la%20juridiction%20%20eccl%C3%A9siastique%2C%20volontaire%2C%20gracieuse%2C%20et%20contentieuse%2C%20fond%C3%A9e%20sur%20le%20droit%20commun%20et%20sur%20le%20droit%20particulier%20du%20royaume%2C%20de%20Fran%C3%A7ois%20Ducasse&f=false

 

 

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10/06/2016 | Lien permanent

Je m'occupe à ensemencer mes terres, à les rendre fécondes; et les filles aussi

... "Ah ! ce Voltaire, quel tempérament , quel blagueur aussi !", allez-vous dire .

Pardonnez-moi, mais je résiste rarement à une occasion de donner un extrait de lettre qui attire l'oeil égrillard de mes contemporains, et ces occasions ne manquent pas avec un vif argent comme lui .

http://www.derouletontapis.com/blogue/charrue/

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Plus sérieusement, je m'attache davantage à ceci : "mes terres, terres libres comme moi, terres dont je veux conserver l'indépendance comme celle de ma façon de penser.", moi qui suis sur terre sans terres , indépendant pour autant que possible, y compris dans ma liberté de penser/pensées .

 Combien de terres libres restera-t-il après la main-mise de territoires convoités par ces salopards d'islamistes qui tuent au nom du prophète pour cacher leur lâcheté, qui se foutent d'Allah comme de leurs premières babouches, qui veulent vivre en esclavagistes, en prédateurs tout simplement . Trop fainéants pour travailler, parasites , vermine à éradiquer . Inch'Allah !

 

 

« A Louis-César de La Baume Le Blanc, duc de LA VALLIÈRE.1
Aux Délices [vers le 25 juin 1759].
N'ai-je pas tout l'air d'un ingrat, monsieur le duc? Il me semble que je devrais passer une partie de ma vie à vous remercier de vos bontés, et l'autre à tâcher de vous plaire; cependant je ne fais rien de tout cela. Je cultive la terre; je fais quelquefois de mauvais vers; mais je me garde de les envoyer aux ducs et aux pairs qui ont de l'esprit et du goût. Vous n'allez plus à la Comédie, et par conséquent je ne veux plus en faire ; mais comment peut-on avoir une bibliothèque complète de théâtre 2 et ne point entendre Mlle Clairon ? Comment peut-on acheter fort cher des pièces de Hardi,3 et ne pas aller à celles de Corneille?
Avez-vous la tragédie de Mirame 4, dont les trois quarts sont du cardinal de Richelieu? La pièce est bien rare; c'était un détestable rimailleur que ce grand homme. Le cardinal de Bernis faisait mieux des vers que lui, et cependant il n'a pas réussi dans son ministère; cela est inconcevable. C'est apparemment parce qu'il avait renoncé à la poésie. Le roi de Prusse n'en use pas ainsi; il fait plus de vers que l'abbé Pellegrin 5; aussi a-t-il gagné des batailles.

Je ne veux point mourir sans vous avoir envoyé une ode pour Mme de Pompadour 6. Je veux la chanter fièrement, hardiment, sans fadeur: car je lui ai obligation. Elle est belle, elle est bienfaisante , sujet d'ode excellent. Elle a eu la bonté de recommander à M. le duc de Choiseul un mémoire pour mes terres, terres libres comme moi, terres dont je veux conserver l'indépendance comme celle de ma façon de penser.
Je me suis fait un drôle de petit royaume dans mon vallon des Alpes; je suis le Vieux de la Montagne 7, à cela près que je n'assassine personne. Mme de Pompadour a favorisé ma petite souveraineté écornée. Savez-vous bien, monsieur le duc, que j'ai deux lieues de pays qui ne rapportent pas grand'chose, mais qui ne doivent rien à personne?

Que les dieux ne m'ôtent rien,
C'est tout ce que je leur demande.


On m'a écrit que M. de Silhouette faisait de très-bonne besogne. Il est vrai que celui-là n'a point fait de vers; mais il a traduit Pope, et voilà pourquoi il est bon ministre. Monsieur le duc, vous avez fait de très-jolis vers de ma connaissance; fourrez-vous dans le ministère, vous réussirez infailliblement. Je me jette du mont Jura au pied de Mont-Rouge 8. Je m'occupe à ensemencer mes terres, à les rendre fécondes; et les filles aussi, non pas en les semant 9, mais en les mariant . Je suis bon citoyen. Oh ! le roi le saura, monsieur le duc, et je vois d'ici qui lui en fera ma cour. Jouissez de votre vie charmante, et continuez vos bontés au Suisse V.

2 Le duc de La Vallière avait une immense bibliothèque; et la partie du théâtre français était une de celles à laquelle il apportait le plus de soin. (Beuchot.) Collectionneur et bibliographe passionné des questions théâtrales, le duc est l'auteur d'une compilation intitulée Ballets, opéras et autres ouvrages lyriques, 1760 ; et la Bibliothèque du Théâtre français, ouvrage collectif fut composée à l'aide des secours fournis par sa bibliothèque . La bibliothèque de l'Arsenal conserve une partie importante de ses livres .

Voir : http://books.google.fr/books?id=54UPAAAAQAAJ&pg=PA135&lpg=PA135&dq=Ballets,+op%C3%A9ras+et+autres+ouvrages+lyriques&source=bl&ots=YFezuZnKXc&sig=YKR9qTDRaG7XqgoSpOx0qAD1_8o&hl=fr&sa=X&ei=Xd_nU7CdBqeP0AW2_4HACw&ved=0CD0Q6AEwBA#v=onepage&q=Ballets%2C%20op%C3%A9ras%20et%20autres%20ouvrages%20lyriques&f=false

et : http://www.bnf.fr/fr/collections_et_services/anx_fds_col/a.collection_la_valliere.html

4 Mirame a été imprimée en 1641, in-folio avec figures; Voltaire parle de cette pièce, tome XIV, page 64.Cette tragédie fut représentée pour la première fois lors de l'inauguration de la grande salle du Palais-Cardinal ; on l'attribue généralement à Desmarets de Saint-Sorlin, et V* dit lui-même dans le Siècle de Louis XIV, à l'article de cet écrivain , qu'il « travailla beaucoup à la tragédie de Mirame du cardinal de Richelieu »

Voir aussi : http://biblioweb.hypotheses.org/11857

6 Ce projet n'a pas eu de suite. (Beuchot.) . Sur les écrits de V* dédiés à Mme de Pompadour, voir Jean Malcolm , Table de la bibliographie de Voltaire par Bengesco, 1953, qui ne mentionne pas l'ode : pages 141 et suiv. : http://visualiseur.bnf.fr/Visualiseur?Destination=Gallica&O=NUMM-23351

7 Voir l'article Assassin des Questions sur l'Encyclopédie dans lequel V* traite du « Vieux de la montagne » en relation avec le problème de l'origine du mot assassin .Voir page 266 : http://books.google.fr/books?hl=fr&id=qzsHAAAAQAAJ&q=assassin#v=snippet&q=assassin&f=false

9 Decroix, l'un des éditeurs de Kehl, proposait de mettre ensemençant. Beuchot a laissé semant, qu'on lit dans les éditions de Kehl.

 

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10/08/2014 | Lien permanent

Je ne suis pas juge de votre mérite, mais je me flatte de le sentir

... Chère Mam'zelle Wagnière, notre ami V* vous écrit ! Il est sincère et ne se trompe pas .

Les 30 raisons qui font que vous n'êtes toujours pas heureux (alors que  vous avez une vie géniale) | So Busy Girls

 

 

 

« A Giuseppe Colpani

à Brescia

Monsieur,

Je ne puis vous exprimer ni le plaisir que m’ont fait vos beaux vers 1, ni la reconnaissance que je vous dois. Je ne puis avoir l’honneur de vous répondre dans cette belle langue italienne à laquelle vous prêtez de nouveaux charmes. L’état où je suis me permet à peine de dicter dans la mienne. La vieillesse et les maladies qui m’accablent m’empêchent de vous témoigner de ma main ma sensibilité, mais ne la diminuent pas. Je ne suis pas juge de votre mérite, mais je me flatte de le sentir. Les grâces sont de tous les pays, celles de votre style ne m’échappent pas. Vous avez ce que Pétrone aime tant dans Horace : curiosam felicitatem.2

Agréez les sentiments bien véritables de la respectueuse reconnaissance avec lesquels j’ai l’honneur d’être,

monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire,

gentilhomme de la chambre du roi.

Au château de Ferney, par Genève, 10 janvier 1766.3 »

1 Colpani a écrit une pièce Al signor de Voltaire, qui commence par ces vers :

Mentr'io nell ozio delle amiche selve,

spirto immortal, sulle tue dotte carte

pasco la mente di si eletto e raro

cibo, che il nettar non invidio ai Dei […]

(Pendant que dans le loisir des forêts amies, esprit immortel, sur tes doctes écrits je repais mon esprit d'une nourriture si choisie et si rare que je n'envie pas aux dieux leur nectar [...]

2 Pétrone applique ces mots à Horace dans le Satyricon ; faisant l'éloge du fondu dans le style, il cite comme modèles Homère et les lyriques , « Virgile le romain et le bonheur d'expression d'Horace. »

3 (Inédite.) Communiquée par le docteur Pelizzari, bibliothécaire de la Queriniana, à Brescia, par l’intermédiaire de M. Melzi.

L'édition Opere del cavaliere Giuseppe Colpani donne 6 comme quantième et quelques erreurs ou écarts négligeables .

Voir : https://www.tesionline.it/tesi/lettere-e-filosofia/%27%27...

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01/05/2021 | Lien permanent

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