Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Je me guéris moi-même par le régime et par la patience ... et jusqu’ici je m'en suis bien trouvé

... "Virus de tous pays, tenez-le vous pour dit !"

signé : Le Concombre masqué ( mon modèle de prophylaxie ).

Le Concombre masqué. | Dessin, Petits dessins, Dessin original

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

Envoyé de Parme

etc.

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental 1

Extrait de la lettre de Luc du 1er janvier ;

arrivée à Ferney le 19 à cause des détours.2

« … détrompé dès longtemps des charlataneries qui séduisent les hommes, je range le théologien, l'astrologue, l'adepte, et le médecin dans la même catégorie . J'ai des infirmités et des maladies . Je me guéris moi-même par le régime et par la patience … Dès que je suis malade je me mets à un régime rigoureux ; et jusqu’ici je m'en suis bien trouvé … quoique je ne jouisse pas d'une santé bien ferme, cependant je vis, et je ne suis pas du sentiment que notre existence vaille qu'on se donne la peine de la prolonger ... »

Voilà les propres mots qui font soupçonner à mon avis qu'on n'a ni santé ni gaieté .

Mon divin ange j'ai encore moins de santé mais je suis aussi gai qu'homme de ma sorte . Je n’ai actuellement que la moitié d'un œil et vous voyez que j’écris très lisiblement . Je soupçonne avec vous que le tyran du tripot a contre vous quelque rancune qui n'est pas du tripot . N'y a-t-il pas un fou de bordeaux nommé Vergy qui aurait pu vous faire quelque tracasserie 3? Ce monde est hérissé d'anicroches . Jean-Jacques Rousseau est aussi fou que les d’Éon et les Vergy ; mais il est plus dangereux .

Voulez-vous bien mon divin ange présenter à M. le duc de Praslin mes tendres et respectueux remerciements du passeport qu'il veut bien accorder au vieux Moultou et à sa famille pour aller montrer sa vessie à Montpellier ? Je me flatte que mon autre ange madame d'Argental tousse moins .

N.B. – Vous serez peut-être surpris que Luc m'écrive toujours . J'ai trois ou quatre rois que je mitonne, comme je suis fort jeune il est bon d'avoir des amis solides pour le reste de sa vie .

Divins anges ces quatre rois-là ne valent pas une plume de vos ailes .

A Ferney 24 janvier [1765]. »

1 L'édition Cayrol est limitée au post-scriptum et datée à tort du 24 février 1765 .

2 Les passages cités sont en effet empruntés avec exactitude à la lettre de Frédéric II du 1er janvier 1765 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1765/Lettre_5865

Lire la suite

08/04/2020 | Lien permanent

Je vous supplie de vouloir bien me dire ce qu'il faut que je fasse dans cette conjoncture délicate

... déclarerait Jade Halliday : https://www.closermag.fr/people/jade-hallyday-avec-david-...

Je ne lui ferait rien dire de plus, la vie des fortunés membres du clan Halliday ne m'intéressant pas plus que la couleur de mes premières chaussettes .

 Image associée

https://www.rtl.fr/culture/medias-people/laeticia-hallyda...

 

 

« A Antoine-Jean-Gabriel Le Bault

Au château de Ferney,

1er novembre 1763

Monsieur,

Il y a environ six semaines que j'eus l'honneur de vous écrire 1 par le plus jeune de vos confrères, que j'appelais l'Adonis du parlement . Je vous demandais un tonneau de votre meilleur vin ; mais permettez qu'aujourd'hui j'aie l'honneur de vous parler d'une affaire plus essentielle ; ayez la bonté de préparer votre patience .

Lorsque Henri IV, de divine mémoire, acquit le pays de Gex, il s'engagea par le traité à maintenir tous les droits des seigneurs, toutes les aliénations de dîmes, et d'autres possessions faites en leur faveur . Il ratifia les anciens traités qui stipulaient ces droits . Louis XIV les confirma solennellement par le traité d'Arau en 1658, et Louis XV les a toujours maintenus quand on les a réclamés en son Conseil .

Je me suis trouvé dans ce cas en achetant la terre de Ferney . MM. de Budé qui me l'ont vendue, soutenaient au Conseil du roi leurs droits, et particulièrement celui des dîmes, que le curé revendiquait .

Le roi a fait écrire en dernier lieu par M. le duc de Praslin à monsieur le premier président 2, que son intention était que les traités subsistassent dans toute leur force ; que les seigneurs du pays de Gex ne fussent inquiétés dans aucun de leurs droits, attendu que ces droits intéressent la Savoie, Berne et Genève .

M. le duc de Praslin prie au nom du roi monsieur le premier président d'empêcher qu'il soit fait aucune procédure au sujet des dîmes contre les seigneurs qui en sont en possession . M. le duc de Praslin m'ayant fait part de cette résolution du roi et de la lettre qu'il écrivait à monsieur le premier président, j’eus l'honneur d'écrire à ce magistrat, pour lui demander sa protection . J'en use de même avec vous, monsieur . Je sens bien que le parlement pourrait faire des difficultés sur la lettre de M. le duc de Praslin, qu'on peut regarder comme n'étant pas dans les règles ordinaires, et qu'alors il faudrait obtenir un arrêt du Conseil en forme 3. Mais monsieur, cette affaire étant de pure conciliation, ne puis-je pas me flatter qu'en voulant bien vous joindre à monsieur le premier président, on imposera le silence à mon curé, et l'on nous épargnera les longueurs et les frais d'un procès au Conseil du roi ? Vous rendriez en cela la plus exacte justice . Ce prêtre jouit de plus de douze cents livres de rente, et demande encore une dîme à laquelle ses prédécesseurs ont renoncé, et pour laquelle ils ont transigé : il veut plaider au parlement, parce qu'il dit que le parlement ne connait point les traités, et ne juge que sur le droit commun . S'il avait la dîme, la terre de Ferney lui vaudrait plus qu'au seigneur . Il joint à ses procédures le procédé d'un ingrat . Nous l'avons accablé de bienfaits, et il s'arme aujourd'hui de nos bienfaits contre nous-mêmes.

Voilà, monsieur, sur quoi je réclame vos bontés ; j'ajouterai que cette affaire regarde M. Le président De Brosses autant que moi ; car si je perdais ma dîme il perdrait celle de la terre de Tournay, qu'il m'a vendue à vie . Je vous supplie de vouloir bien me dire ce qu'il faut que je fasse dans cette conjoncture délicate ; permettez-moi de m'en rapporter à vos lumières et à votre bienveillance .

J'ai l'honneur d'être avec respect, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur .

Voltaire. »

3 V* a peut-être déjà reçu la lettre suivante, que Jean-Philippe Fyot de La Marche lui a écrite le 30 octobre 1763 : «  Il n'est que trop commun, monsieur, qu'avec de mauvais précédés on ait quelquefois un bon procès . Peut-être serait-il à craindre que votre curé de Ferney ne fût dans ce cas ; le droit commun lui est favorable, vous en convenez, et les traités que vous opposez à ses prétentions n'ont jamais été enregistrés au parlement de Dijon, vous en convenez encore . Je ne vois à cela que deux remèdes ; l'un, que je ne puis honnêtement vous conseiller, c'est d'obtenir une seconde fois l'évocation de l'affaire au conseil, l'autre est de faire enregistrer au parlement les traités dont il s'agit . M. le duc de Praslin m'a fait l’honneur de m'écrire à cette occasion ; mais vous connaissez les maximes des compagnies, la lettre d'un ministre , toute respectable qu'elle est, ne remplace pas les formalités indispensables . Recevez je vous prie , les nouvelles assurances de l'inviolable attachement, etc. / La Marche .

Lire la suite

22/10/2018 | Lien permanent

personne ne pense à remédier à ces abominables abus...Nous serons longtemps fous et insensibles au bien public. On fait

... Il est bien désespérant que ce triste constat voltairien soit encore d'actualité en notre XXIè siècle .

 

 

« A Jean-Jacques Paulet

Je crois, monsieur, que don Quichotte n’avait pas lu plus de livres de chevalerie que j’en ai lu de médecine. Je suis né faible et malade, et je ressemble aux gens qui, ayant d’anciens procès de famille, passent leur vie à feuilleter les jurisconsultes, sans pouvoir finir leur procès. Il y a environ soixante-quatorze ans que je soutiens comme je peux mon procès contre la nature. J’ai gagné un grand incident, puisque je suis encore en vie ; mais j’ai perdu tous les autres, ayant toujours vécu dans les souffrances.

De tous les livres que j’ai lus, il n’y en a point qui m’ait plus intéressé que le vôtre 1. Je vous suis très obligé de m’avoir fait faire connaissance avec Rahzès 2. Nous étions de grands ignorants et de misérables barbares, quand ces Arabes se décrassaient. Nous nous sommes formés bien tard en tout genre, mais nous avons regagné le temps perdu . Votre livre surtout en est un bon témoignage. Il m’a beaucoup instruit ; mais j’ai encore quelques petits scrupules sur la patrie de la petite-vérole.

J’avais toujours pensé qu’elle était native de l’Arabie déserte, et cousine-germaine de la lèpre, qui appartenait de droit au peuple juif, peuple le plus infecté en tout genre qui ait jamais sali notre malheureux globe.

Si la petite vérole était native d’Égypte, je ne vois pas comment les troupes de Marc-Antoine, d’Auguste, et de ses successeurs, ne l’auraient pas apportée à Rome. Presque tous les Romains eurent des domestiques égyptiens, verna Canopi 3. Ils n’en eurent jamais d’arabes. Les Arabes restèrent presque toujours dans leur grande presqu’île jusqu’au temps de Mahomet. Ce fut dans ce temps-là que la petite-vérole commença à être connue. Voilà mes raisons ; mais je me défie d’elles, puisque vous pensez différemment.

Vous m’avez convaincu, monsieur, que l’extirpation serait très préférable à l’inoculation. La difficulté est de pouvoir attacher une sonnette au cou du chat. Je ne crois pas les princes de l’Europe assez sages pour faire une ligue offensive et défensive contre ce fléau du genre humain . Mais, si vous parvenez à obtenir des parlements du royaume qu’ils rendent quelques arrêts contre la petite-vérole, je vous prierai aussi sans aucun intérêt de présenter requête contre sa grosse sœur. Vous savez que le parlement de Paris condamna, en 1497, tous les vérolés qui se trouveraient dans la banlieue à être pendus. J’avoue que cette jurisprudence était fort sage, mais elle était un peu dure et d’une exécution difficile, surtout avec le clergé, qui en aurait appelé ad apostolos 4.

Je ne sais laquelle de ces deux demoiselles a fait le plus de mal au genre humain ; mais la grosse sœur me paraît cent fois plus absurde que l’autre. C’est un si énorme ridicule de la nature d’empoisonner les sources de la génération 5, que je ne sais plus où j’en suis quand je fais l’éloge de cette bonne mère. La nature est très aimable et très respectable sans doute, mais elle a des enfants bien infâmes.

Je conçois bien que si tous les gouvernements de l’Europe s’entendaient ensemble, ils pourraient à toute force diminuer un peu l’Empire des deux sœurs. Nous avons actuellement en Europe plus de douze cent mille hommes qui montent la garde en pleine paix ; si on les employait à extirper les deux virus qui désolent le genre humain, ils seraient du moins bons à quelque chose . On pourrait même leur donner encore à combattre le scorbut, les fièvres pourprées, et tant d’autres faveurs de ce genre que la nature nous a faites.

Vous avez dans Paris un Hôtel-Dieu où règne une contagion éternelle, où les malades, entassés les uns sur les autres, se donnent réciproquement la peste et la mort. Vous avez des boucheries dans de petites rues sans issue, qui répandent en été une odeur cadavéreuse, capable d’empoisonner tout un quartier. Les exhalaisons des morts tuent les vivants dans vos églises, et les charniers des Innocents, ou de Saint-Innocent, sont encore un témoignage de barbarie qui nous met fort au-dessous des Hottentots et des Nègres 6.

Cependant personne ne pense à remédier à ces abominables abus. Une partie des citoyens ne pense qu’à l’opéra-comique, et la Sorbonne n’est occupée qu’à condamner Bélisaire, et à damner l’empereur Marc-Antonin. Nous serons longtemps fous et insensibles au bien public. On fait de temps en temps quelques efforts, et on s’en lasse le lendemain. La constance, le nombre d’hommes nécessaire, et l’argent, manquent pour tous les grands établissements. Chacun vit pour soi : Sauve qui peut ! est la devise de chaque particulier. Plus les hommes sont inattentifs à leur plus grand intérêt, plus vos idées patriotiques m’ont inspiré d’estime.

J’ai l’honneur d’être, avec tous les sentiments que vous méritez, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

gentilhomme ordinaire

de la chambre du roi.

A Ferney par Genève le 23 avril 1768. 7»

1 Jean-Jacques Paulet : Histoire de la petite vérole, avec les moyens d’en préserver les enfants et d'en arrêter la contagion en France, suivie d'une traduction française du traité de la petite vérole de Rhasès, 1768 :

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k63374506.texteImage

et https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6337451m/f1.item

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Jacques_Paulet

2 Rhazes ou plus exactement Abù Bakr Muhammad ibn Zakariyyà al-Ràzi qui fut le premier auteur à décrire la petite vérole : https://fr-academic.com/dic.nsf/frwiki/44277

3Juvénal, Satires, I,26 . Traduction : esclave de Canope . Canope est une ville de Haute-Egypte . Par extension Canope désigne poétiquement l’Égypte .

4Aux apôtres .

5 Voir la même expression dans L'Homme aux quarante écus : page 97 et suiv. :https://beq.ebooksgratuits.com/vents/Voltaire-quarante.pdf

6 L'idée est chère à V* depuis longtemps ; il l'exprime déjà dans Le Monde comme il va : page 4 et suiv. https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Monde_comme_il_va

7 Minute corrigée par V*, intitulée par lui : à M. Paulet médecin de la faculté de Montpellier 22 avril 1768 ; effectivement la Correspondance littéraire fait état de la lettre avec cette date dans de nombreuses copies contemporaines : par Wyart, ...vicomte Harcourt, Stanton Harcourt, Oxon, Beaumarchais-Kehl ; édition : « Lettre de M. de Voltaire à M. Paulet, au sujet de l'histoire de la petite vérole »,Mercure de France, juillet 1768.

Lire la suite

26/12/2023 | Lien permanent

Il y a bien du temps que j'ai fait vœu de ne lire aucun journal

... Je suis las des nouvelles de chiens écrasés et des stériles bisbilles politiques . Le rapport qualité/prix des baveux flirte avec le néant, d'où mon enthousiasme chaque jour renouvelé pour la correspondance voltairienne .

Que dire de mieux ?

lire un journal.jpg

 

 

« A David-Louis CONSTANT de REBECQUE, seigneur d'HERMENCHES 1

Aux Délices 12 septembre [1757]

Vous avez grande raison monsieur ; la passion a plus de part que l'intérêt à tous ces grands mouvements et jamais on n'a pu mieux appliquer le vers d'Horace

Quidquid delirant reges plectuntur Achivi 2

 Je doute fort des quatre-vingt-cinq mille hommes . Le roi de Prusse vient de m'écrire qu'il ne lui reste qu'à vendre cher sa vie et les restes de la liberté germanique etc 3. J'ai été attendri de sa lettre et je me suis souvenu que je l'avais aimé . Mais mon goût pour la liberté et pour la retraite l'emporte sur tous les rois . Puissent tous ces grands tourbillons qui entrainent tant de provinces ne vous point empêcher de venir cet hiver donner le mouvement et la vie à Lausanne . Venez être sultan, roi, républicain, et amant . Sous quelque forme que vous paraissiez vous serez les délices de la société . Je n'ai plus qu'une vieillesse languissante à vous offrir mais vous la ranimerez . Les tailleurs et les plumassiers vont être employés . On vous cherche des virtuoses pour votre orchestre . Votre présence hâtera tous les préparatifs . Il se pourra faire que quelques Parisiens viennent à nos fêtes . Si les hommes étaient sages voilà à quoi ils passeraient une partie de leur temps . Cela vaut un peu mieux que de s'égorger et de se nuire .

 J'ai entendu dire comme vous, monsieur, qu'on avait imprimé une prétendue lettre de moi dans le Mercure galant 4 à Paris il y a sept ou huit mois et que cette lettre a occasionné quelques sottises et quelques réponses à ces sottises dans une Mercure de Neuf Châtel 5. Je n'ai rien lu de ces ennuyeuses bagatelles . Elles sont méprisées à Genève où il y a beaucoup de gens d'esprit et de bon sens . Il y a bien du temps que j'ai fait vœu de ne lire aucun journal , ils sont presque tous faits par de pauvres diables qui prennent le parti qu'on veut pour un écu et qui inondent le public de pauvretés et de mensonges, être l'objet de leurs rapsodies c'est être condamné aux bêtes .

 On dit ici que la flotte anglaise a déjà débarqué à Stade 6. Cet événement pourrait bien changer la face des affaires . On n'a point vu depuis Charlemagne tant de bruit pour si peu de chose . Vous regardez le spectacle de plus près et vous pourriez bien devenir acteur . Vous réussirez dans ce genre de tragédie comme dans le nôtre et je m'intéresserai toujours monsieur à tous vos succès avec le plus tendre attachement . Mme Denis vous présente comme moi ses obéissances .

 J'oubliais de vous dire que monsieur votre frère 7 nous a crevés à la Sablière . Mon Dieu la belle situation ! Celle des Délices n'en approche pas . Adieu monsieur conservez vos bontés pour votre nouveau Suisse

 V... »

 1  http://en.wikipedia.org/wiki/User:EE_Project/David_Louis_Constant_de_Rebecque,_seigneur_d%27Hermenches

 2  De toutes les folies des rois, ce sont les Achéens qui portent la peine

 3 Voir lettre du 29 août 1757 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/12/13/i...

 4 Le Mercure de France s'est nommé galant jusqu'en 1716, et V* ironise en continuant à le qualifier ainsi .

 5 Voir encore lettre du 29 août à d'Alembert .

 6 La prétendue « armée d'observation » s'était retirée à Stade où elle devait être dissoute lorsque la convention de Klosterzeven serait ratifiée ; elle ne le fût pas , ce qui changera le cours des évènements .

 7 Marc-Sanuel-François de Rebecque époux de Charlotte Pictet, habitait la Chablière près de Lausanne . Voir : http://gw0.geneanet.org/bourelly?lang=fr;pz=philippe+laurent+paul;nz=bourelly;ocz=0;p=marc+samuel+francois;n=constant+de+rebecque

 

Lire la suite

19/12/2012 | Lien permanent

je persiste à penser que cent mille hommes qui ont vu ressusciter un mort pourraient bien être cent mille hommes qui aur

... Et à plus forte raison, un homme voyant deux cent mille personnes sur une place incapable d'en contenir la moitié, est un homme affligée de berlue, ce qui serait  grave, ou qui veut sciemment nous tromper, ce qui est impardonnable . Il me rappelle ces vantards de cours de récréation qui disent avoir "la plus grande" !

Cet homme, vous l'avez reconnu, l'agité du Trocadéro, Zébulon 1er, que le Musée de l'Homme tout proche se propose d'empailler comme modèle d'Homo sapiens mendax mendax .

Et je lui dis "chante beau merle !"

 

chantebeaumerle4928.JPG


 

 

 

« A M. D'ALEMBERT

A Monrion, 28 décembre [1755]

Voilà Figuré 1 plus correct; Force, dont vous prendrez ce qu'il vous plaira, Faveur de même Franchise et Fleuri, item. Tout cela ne demande, à mon gré, que de petits articles. Français et Histoire sont terribles. Je n'ai point de livres dans ma solitude de Monrion, je demande un peu de temps pour ces deux articles.
J'ajoute Fornication, je ne peux ni faire ni dire beaucoup sur ce mot. J'enverrai incessamment l'Histoire des flagellants 2. Que diable peut-on dire de Formaliste, sinon qu'un homme formaliste est un homme insupportable?
En général, je ne voudrais que définitions et exemples: définitions, je les fais mal , exemples, je ne peux en donner, n'ayant point de livres, et n'ayant que ma pauvre mémoire, qui s'en va comme le reste. Mes maîtres encyclopédiques, est-ce que vous aimez les choses problématiques? M. Diderot avait bien dit, à mon gré, que quand tout Paris viendrait lui dire qu'un mort est ressuscité il n'en croirait rien. On vient dire après cela que si tout Paris a vu ressusciter un mort, on doit en avoir la même certitude que quand tous les officiers de Fontenoy assurent qu'on a gagné le champ de bataille 3 . Mais, révérence parler, mille personnes qui me content une chose improbable ne m'inspirent pas la même certitude que mille personnes qui me disent une chose probable et je persiste à penser que cent mille hommes qui ont vu ressusciter un mort pourraient bien être cent mille hommes qui auraient la berlue.
Adieu, mon cher confrère; pardonnez à un pauvre malade ses sottises et son impuissance. Ce malade vous aime de tout son cœur, et Mme Denis aussi. »

 

1 Les articles FIGURÉ, FAVEUR, et FLEURI, parurent dans le tome VI de l'Encyclopédie; FRANCHISE fut inséré dans le tome VII ils sont tous dans le Dictionnaire philosophique. Quant aux articles FORCE, FRANÇAIS (ou FRANÇOIS), HISTOIRE, et FORNICATION, voir la lettre du 9 .décembre au même : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/04/24/a-l-egard-de-fornication-je-suis-d-autant-plus-en-droit-d-ap.html

3 Dans l'Encyclopédie, au mot CERTITUDE voir aussi ce mot dans le Dictionnaire philosophique, tome XVIII, page 117; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-34269835.html

et encore la XLVIe des Pensées philosophiques de Diderot : voir page 36 : http://books.google.fr/books?id=8XoHAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

 

Lire la suite

01/05/2012 | Lien permanent

Nous sommes défaits des jésuites, mais je ne sais si c'est un grand bien ; ceux qui prendront leur place se croiront obl

Le récent remaniement ministériel ne me semble pas dicté par des motifs d'appartenance religieuse, quoique, au fond, je considère la politique des partis comme la pratique de religions de différentes sectes avec gourous .

Oserai-je le dire ?

Oui ! je suis satisfait de n'avoir plus  sous les yeux la mine satisfaite de Mauvaise Audience Maximum (MAM pour les intimes ! ), et serai plus méfiant vis -à-vis du renard flamboyant Tunoulébrise Heurtafaux ( je fais ici un rappel de ses qualités capillaires ) qui va devenir à coup sûr un loup gris qui mordra dans l'ombre bienveillante de son "grand" (et ici je ne parle pas de la taille ) ami .

 

entrelacs celtiques.jpg

 

Ci dessus, un bel exemple de ce qui représente le gouvernement : entrelacs !

 

 

 

« A François Achard Joumard Tison, marquis d'Argence

 

A Ferney le 2 mars 1763

 

Je vois, Monsieur, par votre lettre du 18 février que vous êtes l'apôtre de la raison . Vous rendez service à l'humanité en détruisant autant que vous le pouvez dans votre province i la plus infâme superstition qui ait jamais souillé la terre . Nous sommes défaits des jésuites, mais je ne sais si c'est un grand bien ; ceux qui prendront leur place se croiront obligés d'affecter plus d'austérité et plus de pédantisme . Rien ne fut plus atrabilaire et plus féroce que les huguenots, parce qu'ils voulaient combattre la morale relâchée . Nous nous sommes défaits des renards, et nous retombons dans la main des loups . La seule philosophie peut nous défendre . Il serait à souhaiter que le Sermon des cinquante ii fut dans beaucoup de mains, mais malheureusement je ne puis plus en trouver .

 

J'ai trouvé un Testament de Jean Meslier iii, que je vous envoie . La simplicité de cet homme, la pureté de ses mœurs, le pardon qu'il demande à Dieu et l'authenticité de son livre doivent faire un grand effet .

 

Je vous enverrai tant d'exemplaires que vous voudrez du testament de ce bon curé . L'affaire des Calas a été rapportée iv; elle est en très bon train ; je réponds du succès . C'est un grand coup porté à la superstition, j'espère qu'il aura d'heureuses suites .

 

J'ai marié Mlle Corneille à un jeune gentilhomme de mon voisinage v, infiniment aimable ; c'est un de nos adeptes, car il a du bon sens . Adieu, Monsieur, cultivez la vigne du Seigneur, conservez-moi vos bontés, et soyez persuadé de mon tendre respect .

 

Christmoque. vi»


i D'Argence habitait au château de Dirac, près d'Angoulême ; voir lettre du 18 janvier à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/01/16/j...

iii Voir à ce propos , -Extraits des sentiments de Jean Meslier adressés à ses paroissiens ... (extrait fait par V*),-

la lettre à d'Alembert du 10 février 1762 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/02/13/l...

http://www.voltaire-integral.com/Html/24/48_Meslier.html...

http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Meslier

iv Au Conseil du roi .

 

vi A propos de cette signature provocante, voir : http://www.sculfort.fr/articles/etoes/18e/voltaire/infame...

 

Lire la suite

01/03/2011 | Lien permanent

il est physiquement impossible que l'océan soit ailleurs . Il peut bien gagner quarante ou cinquante lieues sur les terr

... Jusque là le patriarche a tout juste , même s'il ne mesure pas les dégâts correspondants, puis il se prend les pieds dans le tapis, tout comme les climato-sceptiques actuels :"Et il me paraît démontré que toutes les choses ont toujours été comme elles sont." Si on songe à la bêtise humaine, c'est évidemment tout juste . Mais il est indéniable que nous allons souffrir des conséquences de l'exploitation déraisonnable de la planète .

Ocean.png

https://www.uved.fr/fiche/ressource/locean-au-coeur-de-lhumanite

 

 

« A Anne-Robert-Jacques Turgot

A Ferney 8è février 1768 1

Votre souvenir m'enchante, monsieur, l'état présent des hommes m'importe beaucoup , et l’état passé du globe n'importe guère à personne . Il se peut que l'axe de la terre tourne sur lui-même en deux millions quatre cent mille années . Ce mouvement ne peut jamais changer la situation de l’océan . La loi de la gravitation le retient toujours à sa place, et il est physiquement impossible que l'océan soit ailleurs . Il peut bien gagner quarante ou cinquante lieues sur les terres, ou les perdre, mais voilà tout . Et il me paraît démontré que toutes les choses ont toujours été comme elles sont 2.

C'est moi qui suis dans le pays des grands phénomènes de la nature . Des montagnes couvertes de neige éternelle, de pierres de toutes figures, de pétrifications de toute espèce . En vérité, les physiciens se moquent de nous . J'ai vu toutes les pierres calcaires de mon maudit pays, tout le gypse qui a servi à mes plafonds . J'ai vu mille cornes d'Ammon, et des glossopètres, et des dendrites de toute espèce, et des coquilles . Les bords du Rhône en sont tapissées à sa naissance, et à son éruption du lac de Genève . Je n'y ai jamais vu une seule coquille de mer ; et les pierres calcaires ne m'ont paru que les pierres . Si j’étais jeune , j'irais voir le falun de Touraine . Je soupçonne fort que ce falun est une production très terrestre, une mine particulière, car si la mer avait déposé ces coquilles dans cet endroit, pourquoi n'aurait-elle pas fait la même faveur à la Normandie, à la Bretagne, à la Picardie et aux côtes d'Angleterre ?

Pesez bien cette raison, je vous en supplie, et voyez si on n'a pas voulu nous en imposer . J'aime autant ce fou de Descartes qui prenait notre globe pour un soleil encroûté que ceux qui veulent nous persuader que la mer a formé les Alpes et le Caucase .

Que dirions-nous d'une mite qui en se promenant sur une orange prendrait les grains de cette orange pour des montagnes affreuses que mille révolutions dans l'orange auraient élevées ? La nature de l'orange est d'avoir des grains sur son écorce, et la nature de la terre est d'avoir aussi ses grains qu'on appelle des montagnes .

J'ai vu M. Dubois qui doit vous envoyer, monsieur, par la première occasion des échantillons de petites étoffes que vous demandez pour en établir des manufactures dans votre intendance . Il en enverra aussi à M. Saint-Yon, mais cela demande un peu de temps et de soins . L'interruption de commerce a porté depuis peu un grand préjudice aux négociants ; mais je ferai l'impossible pour vous satisfaire .

J'ai été désespéré qu'on ait rejeté la requête de la pauvre famille Sirven, signée de dix-huit avocats . Ou ces avocats avaient tort, ou le Conseil a préféré la forme au fond . Je sais bien que les formes sont nécessaires, mais ne serait-il pas nécessaire aussi de tendre les bras à l'innocence opprimée .

Soyez bien persuadé, monsieur, du tendre et respectueux attachement que j'aurai pour vous pour le peu de temps que j'ai encore à ramper sur le globule 3 de la Terre .

V. »

1 Original, initiale autographe ; édition « Lettres inédites » ,1905, incomplète, car faite sur une copie elle-même incomplète des deuxième et troisième paragraphes avant la fin .

2 Le « fixisme » de V* apparaît dans cette formule et jusque-là la fin de la lettre avec une netteté particulière ? Ce trait est, bien entendu, en accord avec les aspects profonds de sa personnalité, et notamment avec ses idées esthétiques .

Lire la suite

20/09/2023 | Lien permanent

les honnêtes gens sont bien peu honnêtes: ils voient tranquillement assassiner les gens qu'ils estiment, et en disent se

... Que ce soit à souper ou à déjeuner, nous avons eu une excellente démonstration, il y a quelques mois, des affirmations de Voltaire .

Sans effusion de sang, les chefs politiques de tous bords, -si, si, de tous bords-, candidats aux postes les plus élevés, se réjouissent en loucedé des peaux de bananes jetées sous les pas des rivaux dont ils se prétendent hypocritement alliés . Je ne pense pas qu'on puisse actuellement m'offrir un démenti à ce sujet, un exemple de franche coopération me comblerait . 

 

soif de pouvoir.jpg

 

 

« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'ÉPINAY 1
25 avril [1760].
Je ne vous ai point encore remerciée, ma belle philosophe, de votre jolie lettre et de votre pierre philosophale : car c'est la vraie pierre philosophale que la multiplication du blé dont vous m'avez envoyé le secret. J'irai présenter la première gerbe devant votre portrait, au temple d'Esculape 2, à Genève. Ce portrait sera mon tableau d'autel ; j'en fais bien plus de cas que de l'image de mon ami Confucius. Ce Confucius est, à la vérité, un très-bon homme, ami de la raison, ennemi de l'enthousiasme, respirant la douceur et la paix, et ne mêlant point le mensonge avec la vérité; mais vous avez tout cela comme lui, et vous possédez de plus deux grands yeux, très-préférables à ses yeux de chat et à sa barbe en pointe. Confucius est un bavard qui dit toujours la même chose, et vous êtes pleine d'imagination et de grâce. Vous êtes probablement, madame, aujourd'hui dans votre belle terre, où vous faites les délices de ceux qui ont l'honneur de vivre avec vous, et où vous ne voyez point les sottises de Paris ; elles me paraissent se multiplier tous les jours. On 3 m'a parlé d'une comédie contre les philosophes, dans laquelle Préville doit représenter Jean-Jacques marchant à quatre pattes. Il est vrai que Jean- Jacques a un peu mérité ces coups d'étrivières par sa bizarrerie, par son affectation de s'emparer du tonneau et des haillons de Diogène, et encore plus par son ingratitude envers la plus aimable des bienfaitrices 4 ; mais il ne faut pas accoutumer les singes d'Aristophane à rendre les singes de Socrate méprisables, et à préparer de loin la ciguë que maître Joly de Fleury voudrait faire broyer pour eux par les mains de maître Abraham Chaumeix.
On dit que Diderot, dont le caractère et la science méritent tant d'égards, est violemment attaqué dans cette farce. La petite coterie dévote de Versailles la trouve admirable ; tous les honnêtes gens de Paris devraient se réunir au moins pour la siffler; mais les honnêtes gens sont bien peu honnêtes: ils voient tranquillement assassiner les gens qu'ils estiment, et en disent seulement leur avis à souper. Les philosophes sont dispersés et désunis, tandis que les fanatiques forment des escadrons et des bataillons. Les serpents appelés jésuites, et les tigres appelés convulsionnaires, se réunissent tous contre la raison, et ne se battent que pour partager entre eux ses dépouilles. Il n'y a pas jusqu'au sieur Lefranc de Pompignan qui n'ait l'insolence de faire l'apôtre, après avoir fait le Pradon.5
Vous m'avouerez, ma belle philosophe, que voilà bien des raisons pour aimer la retraite. Nos frères du bord du lac ont reçu une douce consolation par les nouvelles qui nous sont venues de la bataille donnée au Paraguai, entre les troupes du roi de Portugal et celles des révérends pères jésuites 6. On parle de sept jésuites prisonniers de guerre, et de cinq tués dans le combat : cela fait douze martyrs, de compte fait. Je souhaite, pour l'honneur de la sainte Église, que la chose soit véritable. Je me crois né très humain , mais quand on étranglerait deux ou trois jésuites, avec les boyaux de deux ou trois jansénistes, le monde s'en trouverait-il plus mal ?7
Je ne vous écris point de ma main, ma belle philosophe, parce que Dieu m'afflige de quelques indispositions dans ma machine corporelle. Je ne suis pas précisément mort, comme on l'a dit, mais je ne me porte pas trop bien. Comment aurais-je le front d'avoir de la santé quand Esculape a la goutte ?
Adieu, ma belle philosophe ; vous êtes adorée aux Délices, vous êtes adorée à Paris, vous êtes adorée présente et absente. Nos hommages à tout ce qui vous appartient, à tout ce qui vous entoure. »

 

 

 

1 Manuscrit original avec date et dernier paragraphe autographes

 

 

 

4 Mme d'Epinay elle-même .

 

5 Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Pradon «  Ci-gît le Poëte Pradon,

Qui durant quarante ans, d’une ardeur sans pareille,
Fit à la barbe d’Apollon,
Le même métier que Corneille. »

 

6 Le 15 mai 1758, le cardinal Saldanha, visiteur et réformateur de la Société de Jésus ordonna aux jésuites du Paraguay de cesser leurs opérations commerciales ; mais ils refusèrent de s'incliner et résistèrent même aux troupes d'Espagne (et no du Portugal comme le dit V* ), et furent finalement chassés du pays en 1769 . on sait le parti que V* en a tiré dans Candide .

 

7 Cette phrase est omise dans toutes les éditions .

 

 

Lire la suite

25/04/2015 | Lien permanent

Il m'a donné de plus un dieu qui en vaut bien un autre . C'est le phallum . Il m'a l'air d'en porter sur lui une belle c

... Merci papa !

 

Mis en ligne le 8/8/2017 pour le 8/10/2015

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

8 octobre 1760

J'ai eu mon très cher maître, votre discours et M. de Maudave, et j'ai été bien content de l'un et de l'autre . Indépendamment de vos bontés pour moi, j'aime tout ce que vous faites . Vous avez un style ferme qui fait trembler les sots . Je vous sais bon gré de n'avoir pas mis la tragédie dans la foule des genres de poésie qu'on ne peut lire . Je vous prie à propos de tragédie de ne pas croire que j'aie fait Tancrède comme on le joue à Paris . Les comédiens m'ont cassé bras et jambes . Vous verrez que la pièce n'est pas si dégingandée 1. Heureusement le jeu de Mlle Clairon a couvert les sottises dont ces messieurs ont enrichi ma pièce pour la mettre à leur ton . Nous l'avons jouée ici, et si vous y revenez nous la rejouerons pour vous . Vous seriez très étonné de nos acteurs . Grâce au ciel j'ai corrompu Genève, comme m'écrivait votre fou de Jean-Jacques 2. Il faut que je vous conte pour votre édification que j'ai fait un singulier prosélyte 3. Un ancien officier, homme de grande condition retiré dans ses terres à 150 lieues de chez moi, m'écrit sans me connaître, me confie qu'il a des doutes, fait le voyage pour les lever, les lève, et me promet d'instruire sa famille et ses amis . La vigne du Seigneur n'est pas mal cultivée . Vous prenez le parti de rire, et moi aussi . Mais

En riant quelquefois on rase

D'assez près ces extravagants

A manteaux noirs, à manteaux blancs,

Tant les ennemis d'Athanase,

Honteux ariens de ce temps,

Que les amis de l'hypostase,

Et ces sots qui prennent pour base

De leurs ennuyeux arguments

De Baïus quelque paraphrase .

Sur mon bidet nommé Pégase

J'éclabousse un peu ces pédants.

Mais il faut que je les écrase

En riant 4.

Laissons là ce rondeau . Ce n'est pas la peine de le finir . Le temps est trop cher . M. le chevalier de Maudave m'a donné des commentaires sur le Vedam 5 qui en valent bien d'autres . Il m'a donné de plus un dieu qui en vaut bien un autre . C'est le phallum 6. Il m'a l'air d'en porter sur lui une belle copie . Duclos m'a envoyé le T pour rapetasser cette partie du dictionnaire 7 . Signa T supra caput dolentium 8. Je n'ai pas encore eu le temps d'y travailler . Il nous faut jouer la comédie deux fois par semaine . Nous avons eu dans notre trou quarante neuf personnes à souper qui parlaient toutes à la fois comme dans L’Écossaise . Cela rompt le chainon des études . Je donnerais ces 49 convives pour vous avoir . À propos vous frondez la perruque de Boileau 9. Vous avez la tête bien près du bonnet . S'il avait fait une épître à sa perruque, bon, mais il en parle en un demi-vers pour exprimer en passant une chose difficile à dire, dans une épître morale et utile .

Si j’ai le temps et le génie je ferai une épître à Clairon 10 et je vous promets de n'y point parler de ma perruque .

Il n’y a a point de metum judeorum 11. Nous avons ici deux maîtres des requêtes qui m'ont annoncé M. Turgot . Nous allons avoir un conseiller de grand-chambre 12. C'est dommage qu'Omer Joly de Fleury n'y vienne pas .

Luc est remonté sur sa bête, et sa bête est Daun .

Aimez-moi un peu et s'il y a à Paris quelque bonne et grave impertinence ne me la laissez pas ignorer .

V. »

 

1 Au sens ancien de « disloqué » .

2 A la fin de la lettre du 17 juin 1760, dans un passage déjà cité dans la lettre du 23 juin à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/06/28/je-voudrais-que-vous-ecrasassiez-l-infame-c-est-la-le-grand-5647116.html

3 D'Argence .

4 On a ici le seul rondeau de V* qui juge ce genre « gothique et puéril » dans l'article « Épigramme » du Dictionnaire philosophique . Les « manteaux noirs » sont le jésuites ou les Bénédictins , les « manteaux blancs » les Dominicains . Les « ennemis d'Athanase » (ce dernier étant un fameux docteur de l’Église qui combattit les ariens ) sont les ariens adversaires de la Trinité et de la divinité de Jésus-Christ ; au contraire, les « amis de l'hypostase » sont les partisans de la double nature du Christ et du mystère de l'Incarnation . Baïus est un fameux théologien catholique (1513-1584) qui fonda l'enseignement de la théologie non sur la scolastique mais sur la Bible . Il embrassa des opinions augustiniennes ; persécuté par les Jésuites et condamné par le pape, il n'en devint pas moins chancelier de l'université de Louvain, puis inquisiteur général des Pays-Bas .

5 Voir la lettre du 22 février 1761 à Algarotti où V* se réjouit du commentaire du Vedam :

En fait il ne s'agit nullement d'un ancien commentaire du Vedam mais de l’œuvre d'un missionnaire ; voir Francis Ellis : Accounts of a discovery of a modern imitation of the Vedas, with remarks on the genuine works, 1822 . Quoi qu'il en soit cette oeuvre exerça sur V* une grande influence dont on trouve trace notamment dans les Lettres d'Amabed : .

6 Ce « dieu » n'est pas une nouveauté pour V* .

7 Pour la participation de V* au Dictionnaire de l'Académie, voir lettre du 11 août 1760 à Pinot Duclos :

8 D'après Ézéchiel : Les signes T sur le front de ceux qui souffrent .

9 Dans son essai, d'Alembert avait trouvé des passages « bas » dans l'épître où Boileau parle de sa perruque (X,26).

10 Sur les pièces dédiées par V* à Mlle Clairon, voir Jean Malcolm, Table de la bibliographie de V* par Bengesco, 1953 :

11 Évangile de Jean : vii, 13 : crainte des Juifs .

12 D'Espagnac .

Lire la suite

08/10/2015 | Lien permanent

Je sais bien mauvais gré, mon cher ami, à l’épidémie des maux de gorge, qui jointe à mes fluxions sur les yeux, me met h

... A une pathologie près, je suis comme toi mon cher Volti .

Un mètre, un mètre cinquante, deux mètres, quatre mètres-carrés, masque, gel hydro-alcoolique , bien malin celui qui, le double-mètre d'une main et le flacon de l'autre,  peut embrasser ou être embrassé . Nous sommes tous des pestiférés en puissance , selon la police ; tous d'une innocuité remarquable et d'une immunité innée selon les démasqués . Covid-19 fera le tri !

 

 

« A François Tronchin

Conseiller d’État

à Genève

A Ferney 21è mars 1765

Je sais bien mauvais gré, mon cher ami, à l’épidémie des maux de gorge, qui jointe à mes fluxions sur les yeux, me met hors d'état de vous embrasser aujourd’hui comme je l'espérais . Il a fallu me borner à donner à Mme Denis une procuration . Elle signera tout ce que vous voudrez qu'on signe ; elle est comme moi à vos ordres ; je me faisais une fête de ce dîner dans lequel j'aurais renouvelé à tout ce qui porte votre nom, mon tendre et respectueux attachement . Vos bontés me consolent de tous les maux que la nature me fait souffrir . Je vous embrasse bien tendrement .

V. »

Lire la suite

19/06/2020 | Lien permanent

Page : 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79