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23/04/2011

elle ne veut point de second rang , et préfère sa gloire aux intérêts de sa patrie . Tout le monde doit se rendre à des sentiments si nobles .

http://www.deezer.com/listen-311093

 

Puisque le citoyen qui est censé mener la patrie vers des jours meilleurs, -avec l'aide (?) d'un parti  dont il n'a jamais cessé d'être le chef occulte, -  se lance dans la course à sa succession, je pense également à trois candidates qui correspondent au titre de cette note : préférer sa gloire aux dépends des intérêts de la patrie . Je les mets tous dans le même panier (de crabes, inmangeables ) .

 

Les-Sentiers-de-la-gloire.jpgA tous ceux qui rêvent seulement de gloire !

http://www.deezer.com/listen-311100

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

 

23è avril 1764 aux Délices

 

Quoique Mme de Pompadour eût protégé la détestable pièce de Catilina i, je l'aimais cependant tant j'ai l'âme bonne ; elle m'avait même rendu quelques petits services ii, j'avais pour elle de l'attachement et de la reconnaissance, je la regrette, et mes divins anges approuveront mes sentiments . Je m'imagine que sa mort iii produira quelque nouvelle scène sur le théâtre de la cour ; mes anges ne m'en diront rien, ou peu de choses . Olympie est morte pour Versailles iv, et je pense que Mlle Clairon veut l'enterrer aussi à Paris . Elle est comme César, elle ne veut point de second rang v, et préfère sa gloire aux intérêts de sa patrie . Tout le monde doit se rendre à des sentiments si nobles .

 

J'envoie à mes anges pour leur divertissement un petit extrait qui peut être inséré dans la Gazette littéraire vi, pour laquelle ils m'ont inspiré un grand intérêt . J'espère que leur protection y fera insérer ce mémoire, quand même les auteurs auraient déjà parlé du sujet . Je me résigne à la volonté de Dieu sur toutes les choses de ce monde, et particulièrement sur les droits des pauvres terres du pays de Gex . Je tremble d'être obligé de plaider à Dijon . Je demande en grâce à mes anges de me dire bien nettement à quoi je dois m'attendre . Les bontés de M. le duc de Praslin me sont encore plus chères que mes dîmes vii,et cependant mes dîmes me tiennent terriblement à cœur . Mes divins anges, priez pour nous en ce saint temps de Pâques .

 

Je reconnais la bonté de mes anges à ce qu'ils font pour Pierre Corneille , je crois qu'on peut donner quelques exemplaires à Lekain, et qu'on ne peut mieux les placer, quoique dans mes remarques je condamne quelquefois les comédiens qui mutilent les pauvres auteurs . »


i De Crébillon . Voir lettre du 18 janvier 1749 à Mme Denis : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/01/18/v...

et du 28 août 1749 aux d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/08/28/0...

ii Elle l'avait protégé en 1745 particulièrement, aurait été favorable à son retour en 1759, et l'aurait encore aidé pour obtenir la conservation des droits seigneuriaux à Ferney .

iii Le 15 avril 1764 .

iv Le 6 janvier, V* écrivit aux d'Argental : « On m'a écrit qu'on voulait voir Olympie à Versailles ... »

v Elle fit tant de difficultés pour accepter ce rôle d'Olympie que V* avait changé le titre de sa pièce ( Statira, puis Cassandre, puis Olympie ) et donné le nom de ce personnage pour la persuader que c'était le premier rôle ; voir lettre du 22 février 1762 aux d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/02/22/v...

vi Article paru dans la Gazette littéraire du 6 juin . V*, profitant du compte-rendu d'un ouvrage de Hooke paru dans la Gazette du 28 mars, expose sa conception de l'histoire ancienne ; voir sa Philosophie de l'histoire et la polémique qui s’ensuivit avec Larcher : http://www.archive.org/stream/laphilosophiedel01volt#page...

);

voir billet à Moultou vers juin 1764 : « Tout ce qui est contre la vraisemblance doit au moins inspirer des doutes, mais l'impossible ne doit jamais être écrit .... »

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/06/28/temp-53c91fc1590e46c128995688ad1d44b0.html

vii Ce sont les dîmes que V* ne veut toujours pas payer au curé de Ferney ; affaire qu'il veut mener devant le Consil du roi avec la protection du duc de Praslin, alors que le curé la porte devant le parlement de Dijon .

22/04/2011

Il faut être bien avec son curé, fût-il un imbécile, ou un fripon

"Ô c'est bien vrai ça !!" comme disait la mère Denis .

Elle parlait, certes de machine à laver le linge, et moi par la voix de Volti, j'en reviens aux laveurs de péchés patentés . Dieu les garde s'il sait le fond de leur âme, et qu'il m'en garde autant que possible .

Période pascale, période de repentance, et de pardon aux repentis sincères (?) .

Période qui ne signifie plus grand chose à mes yeux de catho non praticant . Le son des cloches me rappelle en écho les sermons, liquoreux dans le meilleur des cas, insipides le plus souvent, imbéciles parfois .

Le progrès n'a pas laissé les gens d'Eglise sur la touche , aussi je vous propose un lien vers Le CyberCuré : trop forts !  Galilée n'est plus condamné, les femmes ont une âme, Voltaire est béatifié !.. Oups ! je crois que je m'emporte ...

http://catholique-nanterre.cef.fr/faq/faq.htm

 

Ce vendredi dit "saint",  n'est pas sain pour tous, je peux vous l'assurer après un passage dans un supermarché du pays de Gex ; il faut savoir que c'est un jour férié chez nos voisins calvinistes- capitalistes helvétiques et qu'ils n'ont, en de telles occasions, qu'une envie "s'en mettre plein la panse" pour le moins cher possible, d'où le succès jamais démenti de la vente de boustifaille en ces veilles de fêtes . Belle affaire côté français . Il va y avoir de la viande saoule ce week end, et des taux de cholestérol d'un niveau à faire envie pour un sondage de président (Sarko dit " le pieux hypocrite " ) ou candidats (que je ne nommerai pas, faute de place ) .

 Pour en revenir aux curés, il en est un qui est cher à mon coeur : dom Camillo qui n'est ni imbécile ni fripon, lui .

 

don_camillo4.jpg


 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

 

22 avril 1768

 

Mon divin ange, mes raisons pour avoir changé ma table ouverte contre la sainte table i pourront ennuyer un excommunié comme vous ii; mais je me crois dans la nécessité de vous les dire . Premièrement, c'est un devoir que j'ai rempli avec Mme Denis une fois ou deux, si je m'en souviens bien iii.

 

Secondement il n'en est pas d'un pauvre agriculteur comme vous autres seigneurs parisiens qui en êtes quittes pour vous aller promener aux Tuileries à midi . Il faut que je rende le pain bénit en personne dans ma paroisse ; je me trouve seul de ma bande contre deux cent cinquante consciences timorées ; et quand il n'en coûte qu'une cérémonie prescrite par les lois pour les édifier, il ne faut pas s'en faire deux cent cinquante ennemis .

 

Je me trouve entre deux évêques iv qui sont du XIVè siècle, et il faut hurler avec ces sacrés loups .

 

Il faut être bien avec son curé, fût-il un imbécile, ou un fripon, et il n’y a aucune précaution que je ne doive prendre après la lettre de l'avocat Caze v.

 

5° Soyez sûr que si je vois passer une procession de capucins j'irai au devant d'elle chapeau bas pendant la plus forte ondée vi.

 

6° M. Hennin, résident à Genève, a trouvé un aumônier tout établi ; il le garde par faiblesse . Ce prêtre est un des plus détestables et des plus insolents coquins qui soient dans la canaille à tonsure . Il se fait l'espion de l'évêque d'Orléans, de l'évêque d'Annecy et de l'évêque de Saint-Claude . Le résident n'ayant pas le courage de le chasser, il faut que j'aie le courage de le faire taire vii.

 

7° Puisque l'on s'obstine à m'imputer les ouvrages de Saint-Hyacinthe viii, de l'ex-capucin Maubert ix, de l'ex-mathurin Laurent x et du sieur Robinet xi, tous gens qui ne communient pas, je veux communier ; et si j'étais dans Abbeville xii je communierais tous les quinze jours .

 

On ne peut me reprocher d'hypocrisie, puisque je n'ai aucune prétention .

 

9° Je vous demande en grâce de brûler mes raisons après les avoir approuvées ou condamnées . J'aime beaucoup mieux être brûlé par vous qu'au pied du grand escalier xiii.

 

Je rends de très sincères actions de grâce à la nature et au médecin qui l'a secondée, d'avoir enfin rendu la santé à Mme d'Argental .

 

Je vous amuserai probablement par la première poste de La Guerre de Genève, imprimée à Besançon xiv. C'est un ouvrage, à mon gré , très honnête et qui ne peut déplaire dans le monde qu'à deux ou trois mille personnes ; encore sont-elles obligées de rire .

 

Je suis hibou, je l'avoue, mais je ne laisse pas de m'égayer quelquefois dans mon trou, ce qui diminue les maux dont je suis accablé . C'est une recette excellente .

 

Je suis comme votre ville de Paris, je n'ai plus de théâtre . Je donne à mon curé les aubes des prêtres de Sémiramis ; il faut faire une fin . Je me suis retiré sans pension du roi dans ma soixante-quinzième année . Je ne compte pas égaler les jours de Moncrif ; mais si j'ai les moyens de plaire xv à mes deux anges, je me croirai pour le moins aussi heureux que lui . Je me mets à l'ombre de vos ailes avec une vivacité de sentiments qui n'est pas d'un vieillard .

 

V. »

 

i V* a fait ses Pâques.

ii D'Argental est envoyé de Parme à Paris . Et le 30 janvier 1768, le pape Clément XIII , le 30 janvier a excommunié Ferdinand duc de Parme (qui a expulsé les jésuites, promulgué des édits visant à libérer le duché de la tutelle pontificale) et tous ses conseillers .

iii Le 29 juin, à Richelieu : « Mme Denis doit se souvenir qu'elle a communié avec moi à Ferney (en 1761 sans doute ; il le lui rappellera le 27 avril), et qu'elle m'a vu communier à Colmar (en 1754) » .

Voir lettre page 131 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80039n/f136.image.r...

iv Les évêques d'Annecy et de Saint-Claude .

v Sans doute « Cassen », expéditeur prétendu de la Relation du chevalier de La Barre à monsieur le marquis de Beccaria .

http://www.voltaire-integral.com/VOLTAIRE/Labarre.htm...

vi Rappel du procès et de la condamnation du chevalier de La Barre ; voir lettre du 14 juillet 1766 à Damilaville .

Voir page 19 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800389/f24.image.r=...

 

vii V* l'accuse de l'avoir calomnié auprès de l'évêque d’Annecy, Jean-Pierre Biord .

viii Que V* prétend auteur du Dîner du comte de Boulainvilliers, et du Militaire philosophe qui est lui de Naigeon notamment .

Voir : http://www.voltaire-integral.com/Html/26/27_Boulainvillie...

et : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques-Andr%C3%A9_Naigeon

Le Militaire philosophe : Ou Difficultés sur la religion proposées au père Malebranche : de Paul-Henri Thiry d' Holbach et Jacques Naigeon

ix Maubert que V* accuse d'avoir , avec Grasset, diffusé une version de La Pucelle .

x Laurent que V* prétend auteur de La Théologie portative qui est en fait du baron d'Holbach, et de la Relation du bannissement des jésuites de la Chine qui est de V*.

Voir : http://fr.wikisource.org/wiki/Th%C3%A9ologie_portative,_o...

et : http://www.voltaire-integral.com/VOLTAIRE/Relation.htm

xi Il a soupçonné Jean-Baptiste Robinet, censeur royal, et naturaliste, d'avoir publié les Lettres secrètes de M. de Voltaire, 1765, et surtout des Lettres de Voltaire à ses amis du Parnasse, 1766 .

Voir page 85 : http://books.google.fr/books?id=NdUUAAAAQAAJ&pg=PA86&...

xii Où fut condamné le chevalier de La Barre .

xiii Les livres condamnés étaient brûlés au pied du grand escalier du parlement .

xiv Titre de La Guerre civile de Genève : La Guerre civile de Genève ou les Amours de Robert Covelle, poème héroïque avec des notes instructives . A Besançon, chez Nicolas Grandvel (Cramer à Genève, en réalité, 1768)

http://www.voltaire-integral.com/Html/09/09GUERCI.htm

xv Référence à l'ouvrage de François-Augustin de Moncrif intitulé Essais sur la nécessité et sur les moyens de plaire, Paris, 1738.

http://books.google.fr/books?id=ZLmz3XtsqbwC&printsec...

 

 

20/04/2011

les dames du bon ton ne seraient pas fâchées de voir une bégueule doucement punie et corrigée

 Complètement kitch : Mario le charbonnier ( je peux vous assurer qu'il n'a rien de super, mais ma maman était fan de Georges Guétary ! alors ... ) : http://www.deezer.com/listen-3471334

 Et pendant ce temps là, pour se rapprocher du peuple j'en connais un qui rame (pour lui, pas pour nous !  hélas !  ) , mais je ne crains pas le naufrage pour celui qui a une confortable bouée ( bouée de taille présidentielle modèle Ego XXXL  ) ...

Petite note sur le style : il s'y prend comme un manche, pas de médaille olympique à espérer, je pense qu'il n'a jamais tenu une pagaie de canoé avant (ni après ) la photo  ; il est vrai qu'il y a handicap notable : un déséquilibre dû au poids de la Rolex ?

Admirez le style , un coup à gauche, un coup à droite, etc ., etc.

 

sarko rame.jpg

Plus près de l'ouvrier , tu meurs !

   2012 en vue !


 

 

 

« A Claude-Henri de Fuzée de Voisenon

 

Mon très cher, et très aimable confrère, quoique je sois mort au monde, je sens cependant que je suis encore en vie pour vous . Je présente à votre révérendissime gaieté, ce petit conte i qui m'est tombé entre les mains . Je crois avoir entendu dire que vous aviez un ami qui daignait quelquefois inspirer les muses badines de l'opéra-comique ii et leur prêter des grâces . Il me parait que cet ami pourrait faire un drôle d'opéra de ce petit conte . Peut-être le contraste du palais de Psyché et d'un charbonnier ferait un plaisant effet . Peut-être les dames du bon ton ne seraient pas fâchées de voir une bégueule doucement punie et corrigée .

 

Quoi qu'il en soit, je vous envoie le conte pour avoir une occasion de vous dire que je vous serai attaché jusqu'au dernier moment de ma vie .

 

V.

 

A Ferney 20è avril 1772 »

 

i La Bégueule, conte moral , de V* . http://www.voltaire-integral.com/Html/10/09_Begueule.html

ii Favart, qui s'en inspirera effectivement dans La Belle Arsène représentée à Fontainebleau en 1773, puis sous une autre forme à la Comédie-Italienne en 1775 .

http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles-Simon_Favart

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5697456v/f1.image.r...

 

18/04/2011

Il est beau à Votre Majesté d'avoir fait le panégyrique d'un cordonnier dans un temps où depuis l'Elbe jusqu'au Rhin les peuples vont nu-pieds

 Point de lettre en date du 18 avril, inédite, à  mettre sous le museau du mulot . Tant pis, celle-ci, du 22 mars me convient .

http://www.deezer.com/listen-299072

http://www.deezer.com/listen-277405

http://www.deezer.com/listen-7271030

1634-Le-cordonnier.jpg

 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse

 

Au château de Tournay par Genève,

ce 22 mars 1759

 

 

Je vous le dirai jusqu'à la mort, content ou mécontent de Votre Majesté, vous êtes le plus rare homme que la nature ait jamais formé . Vous pleurez d'un œil et vous riez de l'autre ; vous donnez des batailles, vous faites des élégies ; vous enseignez les peuples et les rois ; vous faites en noble satirique le procès de la satire, et enfin en faisant marcher cent soixante mille hommes vous donnez l'immortalité à Jacques Mathieu Reinhart, maitre cordonnier i. On croirait d'abord sur le titre de cette oraison funèbre que votre ouvrage ne va pas à la cheville du pied ; mais quand on le lit avec un peu de réflexion, on voit bien que vous jouez plus d'un trône et plus d'un autel par dessous la jambe . Je voudrais avoir été un des garçons de Mathieu Reinhart ; mais comme à vos yeux tous les hommes sont égaux, j'aime autant faire des vers que des souliers . Il est beau à Votre Majesté d'avoir fait le panégyrique d'un cordonnier dans un temps où depuis l'Elbe jusqu'au Rhin les peuples vont nu-pieds . C'est bien dommage que maître Reinhart n'ait pas fait des bottes, ou que vous ayez oublié ce grand article dans son oraison funèbre . Un héros toujours en bottes comme vous aurait bien dû faire un chapitre des bottes , comme Montaigne ii; rien n’eût été plus à sa place .

 

Quelques talons rouges de Versailles se plaignent que vous n'ayez pas fait mention d'eux dans le panégyrique de cet immortel cordonnier ; ils disent qu'ayant vu leurs talons, vous deviez bien en parler un peu .

 

Je suis très édifié de la piété de Mathieu Reinhart qui ne voulait lire que l'Apocalypse et les prophètes . Certainement , il aurait chaussé gratis les auteurs de ces beaux livres ; car il est à croire que ces messieurs n'avaient pas de chausses . Le discours sur les satiriques iii est très beau et très juste ; mais permettez-moi de dire à Votre Majesté que ce ne sont pas toujours des gredins obscurs qui combattent avec la plume ; vous n'ignorez pas que c'est un des chefs du bureau des affaires étrangères qui a fait les Lettres d'un Hollandais iv. Votre Majesté connait les auteurs des invectives imprimées en Allemagne ; elle a vu ce qu'avait écrit milord Tyrconnel v.

 

C'est l'évêque du Puy vi qui avec un abbé de condition nommé Caveirac vient donner l'apologie de la révocation de l’Édit de Nantes vii, livre dans lequel on parle de votre personne avec autant d'indécence, de fausseté et de malignité que de vos Mémoires de Brandenbourg viii. Vous forcerez vos ennemis à la paix par vos victoires et au silence par votre philosophie . La postérité ne juge point sur les factums des parties ; elle juge, comme Votre Majesté le dit très bien, sur les faits avérés par l'histoire de mon siècle ; ce sera un grand honneur pour moi, et une grande preuve de vérité, si dans ce que j'oserai avancer, je me rencontre avec ce que Votre Majesté daignera certifier . La voix dans le désert annonçait qui vous savez ; et quoiqu'on ne soit pas digne de chausser certaines gens, cependant on est précurseur .

 

Je ne peux écrire de ma main, parce qu'il fait un vent de bise qui me tue, et que d'ailleurs je ne veux pas que les housards connaissent mon écriture . Si vous aviez connu mon cœur, j'aurais vécu auprès de vous sans m’embarrasser des housards.

A vos pieds avec un profond respect .

 

V. »

 

i Panégyrique du sieur Jacques Mathieu Reinhart, maitre cordonnier, prononcé le 13è mois de l'an 2899 dans la ville de L’Imagination, par Pierre Mortier, diacre de la cathédrale, avec permission de monseigneur l'archevêque de Bonsens , 1759, de Frédéric. Page 93 : http://books.google.fr/books?id=baNBAAAAYAAJ&pg=RA3-P...

ii Le chapitre de Montaigne est « Des Boiteux » ; page 1 : http://books.google.fr/books?id=jzpGAAAAcAAJ&pg=PA1&a...

iii Discours sur les satiriques, 1759, de Frédéric . Page 691 : http://books.google.fr/books?id=Kdlm5NC_eTgC&pg=PA698...

iv Jacob-Nicolas Moreau, avocat, ne semble pas avoir rempli ses fonctions aux Affaires étrangères ; voir lettre du 19 février 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/02/20/s...

; le 24 février, d’Alembert avait écrit que Moreau était « pensionné de la cour pour ses Lettres hollandaises » ; page 221 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80034x/f5.image.r=....

v V* évoque-t-il le fait qu'il attribue à Tyrconnel, envoyé de France en Prusse, ce pamphlet Idée de la personne, de la manière de vivre et de la cour du roi de Prusse, 1753 . En septembre 1753, V* attribuait ceci à La Beaumelle alors qu'on l'attribuait à V*. Page 362 : http://books.google.fr/books?id=BfRq68poYGoC&pg=PA362...

vi Jean-Jacques Lefranc de Pompignan, dont d'Alembert avait écrit le 24 février que Caveirac était « protecteur et protégé ».

vii Voir lettre à d'Alembert du 19 février 1759 .

viii L'authenticité et la véracité de ces Mémoires étaient contestés.

 

 

 

toutes les querelles de cette espèce ont commencé par des gens oisifs et qui étaient à leur aise ; quand la populace se mêle de raisonner, tout est perdu

Note rédigée et mise en ligne le 12 juin 2011 .

 

 

populace.jpg

« A Etienne-Noël Damilaville

 

1 avril 1766

 

Le Philosophe sans le savoir 1, mon cher ami , n'est pas à la vérité une pièce faite pour être relue, mais bien pour être rejouée . Jamais pièce, à mon gré, n'a dû favoriser davantage le jeu des acteurs, et il faut que l'auteur ait une parfaite connaissance de ce qui doit plaire sur le théâtre, mais on ne relit que les ouvrages remplis de belles tirades, de sentences ingénieuses et vraies, en un mot que des choses éloquentes et intéressantes .

 

Je crois que nous ne nous entendons pas sur l'article du peuple que vous croyez digne d'être instruit 2. J'entends par peuple la populace qui n'a que ses bras pour vivre . Je doute que cet ordre de citoyens ait jamais le temps ou la capacité de s'instruire, ils mourraient de faim avant de devenir philosophes, il me parait important qu’il y ait des gueux ignorants . Si vous faisiez valoir comme moi une terre, et si vous aviez des charrues vous seriez bien de mon avis, ce n'est pas le manœuvre qu'il faut instruire, c'est le bon bourgeois, c'est l'habitant des villes, cette entreprise est assez forte et assez grande . Il est vrai que Confucius a dit qu'il avait connu des gens incapables de sciences, mais aucun incapable de vertu ; mais il ne doit pas perdre son temps à examiner qui avait raison de Nestorius ou de Cyrille, d'Eusèbe ou d'Athanase, de Jansénius ou de Molina, de Zwingle ou Œcolampade, et plût à Dieu qu'il n'y eût jamais eu de guerre de religion, nous n'aurions jamais eu de St Barthélémy, toutes les querelles de cette espèce ont commencé par des gens oisifs et qui étaient à leur aise ; quand la populace se mêle de raisonner, tout est perdu . Je suis de l'avis de ceux qui veulent faire de bons laboureurs des enfants trouvés 3, au lieu d'en faire des théologiens ; au reste, il faudrait un livre pour approfondir cette question, et j'ai à peine le temps, mon cher ami, de vous écrire une petite lettre .

 

Je vous prie de vouloir bien me faire un plaisir, c'est d'envoyer l'édition complète de Cramer à M. de La Harpe ; ce n'est pas qu'assurément je prétende lui donner des modèles de tragédies ; mais je suis bien aise de lui montrer quelques petites attentions dans son malheur 4 en cas que je ne lui aie pas déjà fait ce présent, car il me vient un scrupule en vous écrivant . Gardez donc l'exemplaire, mon cher ami, jusqu'à ce que je sois instruit s'il en a eu de ma part .

 

Je suis beaucoup plus inquiet du mémoire pour les Sirven 5, je vous supplie de m'en dire des nouvelles . Je vais faire retirer les lettres pour M. d'Alembert 6, qui probablement ne pourront partir que vendredi prochain 4 avril . J'ai été si malade que je n'ai pu vous écrire la poste dernière .

 

Je n'ai point reçu le panégyrique fait par M. Thomas 7. Surement on fait examiner secrètement le Dictionnaire des sciences 8, puisqu'il n'est pas encore délivré aux souscripteurs . Mais qui sont les examinateurs en état d'en rendre un compte fidèle ? Faudrait-il qu'un scrupule mal fondé ou la malignité d'un pédant fit perdre aux souscripteurs leur argent, et aux libraires leurs avances ? J’aimerais autant refuser le paiement d'une lettre de change, sous prétexte qu'on en pourrait abuser .

 

J'attends toujours quelque chose de Fréret 9. on dit que ma nièce de Florian passera son temps bien agréablement à Hornoy ; vous irez la voir, elle est bien heureuse . Adieu, mon très cher ami .

 

Je vous prie de me dire s'il y a eu en effet une troisième remontrance du parlement de Paris sur les affaires du parlement de Bretagne 10; je ne le crois pas, cela serait bien peu convenable . »


2 V* reviendra sur cette question le 13 avril : « Le bas peuple en vaudra certainement mieux quand les principaux citoyens cultiveront la sagesse et le vertu... » ; voir page 392 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80037z/f397.image.r...

 

3 Idée du physiocrate François-Thomas Moreau de La Rochette, auquel V* écrira le 1er juin : « Il est vrai que j'avais fort applaudi à l'idée de rendre les enfants trouvés et ceux des pauvres utiles à l’État et à eux-mêmes . J'avais dessein d'en faire venir quelques uns chez moi pour les élever. » Moreau de La Rochette , inspecteur des pépinières royales, fit planter près de Melun une grande pépinière modèle où travaillaient des enfants trouvés.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois-Thomas_Moreau_...

http://www.inrp.fr/edition-electronique/lodel/dictionnair...

4 La tragédie de La Harpe, Gustave Vasa, jouée le 3 mars 1766, fut un échec. Le 12 mars, à Damilaville : « Je plains ce pauvre La Harpe ... » ; page 378 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80037z/f383.image.r...

Le 12 mai, à d'Argental : « La Harpe n'a pas pu trouver cinquante (écus d'un libraire ) pour son beau Gustave Vasa » ; page 405 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80037z/f410.image.r...

5 Le mémoire d'Elie de Beaumont .

6Cette phrase est éclairée par la lettre du 5 à d'Alembert : « J'avais ordonné ... qu'on retirât toutes (les lettres) qui vous seraient adressées d'Italie . Je n'ai trouvé que celle-là dans mon paquet ( qu'il a décachetée par erreur et qu'il lui envoie ) »

7 Éloge de feu mgr le dauphin de France, 1766 . V* l'a reçu le 4 avril et il écrira le Petit commentaire sur l'éloge du dauphin de France par M. Thomas, ce qui n'est pas une critique ; voir page 237 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800238/f242.tableDe...

8 L’Encyclopédie .

9 Examen critique des apologistes de la religion chrétienne, 1766 : http://www.archive.org/stream/examencritiquede00fruoft#pa...

Sur l'exemplaire que possédait V*, il a écrit : « Je ne crois pas que ce livre soit de M. Fréret, il est très dangereux pour la foi. » La copie de la lettre qui a été conservée porte « quelques choses ».

10 Dans son lit de justice du 3 mars, Louis XV avait affirmé l'autorité royale ; son discours fut publié sous le titre Réponse faite par le roi, tenant son parlement de paris, le 3 mars 1766, aux remontrances de ladite cour suprême sur ce qui s'est passé à Pau et en Bretagne, et V* en fit l'éloge à ses correspondants . Le parlement de Paris soutenait contre le duc d'Aiguillon, représentant du roi, (et contre le roi) le parlement de Bretagne et son procureur général La Chalotais, alors emprisonné . Voir lettre aux d'Argental du 27 novembre 1765 : page 306 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80037z/f311.image.r...

Après le lit de justice le parlement de Paris ne dit mot .

 

17/04/2011

Ce sang innocent crie, mon cher ange, et moi je crie aussi ; et je crierai jusqu'à ma mort

Permettez-moi de vous inviter à faire un don , de vous-même, très exactement, un peu de votre sang et de votre temps .

Rendez-vous à Gex le lundi 18 avril pour ceux qui vivent dans le pays de Gex ou alors renseignez vous grâce à ce lien :

http://www.dondusang.net/rewrite/site/37/etablissement-francais-du-sang.htm?idRubrique=756

Voir aussi le lien ci joint dans le rubrique "J'y tiens et vous y viendrez"

 

http://www.deezer.com/listen-7246038  An innocent man !

http://www.acupoftim.com/article-16029409.html

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

 

16è avril 1775

 

Mon cher ange, je reçois votre lettre du 10è avril . Mme de Luchet n'est plus que garde-malade i. Vous l'avez vue marquise très plaisante, et très amusante, mais les mines de son mari ont un peu allongé la sienne ii. Ce mari est à la vérité un homme de condition, plus marquis que le marquis de Florian ; mais il a bien plus mal fait ses affaires que Florian . Il est actuellement à Chambéry, et ni lui ni sa femme ne m'ont pleinement instruit de leur désastre . Il y a dans toutes les confessions un péché qu'on n'avoue pas .

 

J'avais cru longtemps que la maladie de Mme Denis n'était qu'un rhume ordinaire . Nous n'avons été détrompés que depuis le premier jour d'avril . La maladie a été depuis ce temps-là très sérieuse et très inquiétante jusqu'au 16 . Je ne commence à être rassuré que d'aujourd'hui ; nous avons été dans des transes continuelles . Malheureusement je ne suis bon à rien avec mes quatre-vingt et un ans, et ma constitution déplorable ; je ne suis qu'un vieux malade qui en garde un autre, et qui s'acquitte fort mal de cette fonction . Jugez si je suis en état de courir après une soixantaine de vers épars dans une vieille copie mise dès longtemps au rebut, et à moitié brûlée iii. Altri tempi, altri cure iv. La tête me tourne , mon cher ange, de l'affaire de notre jeune homme v. Il est plus sage que moi, il est tranquille sur son sort, et moi je m'en meurs .

 

Il y a peut-être quelque légère différence entre son mémoire et l'extrait de M. d'Hornoy . Je lui mande qu'il peut aisément corriger ces petites erreurs en deux traits de plume . Mais nous ne fondons point du tout notre consultation sur des interrogatoires faits par des scélérats à des enfants intimidés vi. Nous la fondons principalement sur l'illégalité punissable avec laquelle un procureur marchand de cochons, soi-disant avocat, et déclaré non admissible en cette qualité par un acte juridique de tous les avocats du siège, a osé se porter pour juge dans une affaire criminelle, et verser le sang innocent de la manière la plus barbare . Voila notre grief, ou plutôt le crime que nous dénonçons, et dont nous n'avons que trop de preuves . Pourquoi s'attacher à des minuties quand il s'agit d'un objet si important ?

 

Ce fait ne se trouve certainement pas dans l'énorme procédure dont M. d'Hornoy a bien voulu faire l'extrait . Il a lu cet extrait à M. le garde des Sceaux vii, mais il ne lui a point parlé du seul objet principal dont il s'agit ; et voilà ce qui arrive dans presque toutes les affaires .

 

Nous venons de découvrir un mémoire fait en 1766, pour trois coaccusés dans cet infâme procès criminel, mémoire qui ne fut malheureusement imprimé avec la consultation des avocats que quelque temps après l'arrêt du parlement . La consultation est signée par huit avocats, Cellier, d'Outremont, Muyart de Vouglans, Gerbier, Timbergue, Benoît, Turpin, Linguet .

 

Les moyens de nullité sont très bien discutés dans le mémoire et dans la consultation . C'est dans ce mémoire, pages 16 et 17, qu'il est dit expressément que la compagnie des avocats d’Abbeville s'est opposée par un acte juridique à la réception de notre prétendu avocat, prétendu juge, réellement procureur, et marchand de cochons et de bœufs .

 

C’est là qu'il est dit que les sentences des consuls d’Abbeville enjoignent à ce procureur marchand, à ce juge aussi infâme que barbare, de produire ses livres de comptes .

 

Y a-t-il rien de plus monstrueux, mon cher ange ? y a-t-il rien qui doive plus exciter l'indignation du roi et de son garde des Sceaux ? faut-il chercher d'autres preuves de l'injustice la plus horrible, et d'un assassinat plus prémédité ? pourquoi n'en a-t-on pas parlé à M. de Miromesnil ? Hélas ! c'était la seule chose qu'il lui fallait dire . N'est-il pas palpable que ce misérable marchand de bestiaux n'avait été choisi pour assassiner juridiquement d'Etallonde et La Barre, que par la vengeance du conseiller nommé Saucourt qui voulait perdre à quelque prix que ce fût des enfants innocents , et se venger sur eux de trois procès que les pères de ces enfants, et Mme Faydeau de Brou lui avaient fait perdre ?

 

Ce sang innocent crie, mon cher ange, et moi je crie aussi ; et je crierai jusqu'à ma mort viii. Je crie à vous, je vous dis : vous êtes ami de MM. Target ix et de Beaumont x; parlez-leur, je vous en conjure . Je suis outré, je suis désespéré . Quoi ! Le sage et brave d'Etallonde ne pourra pas trouver en 1775 un avocat, tandis que des enfants accusés des mêmes choses que lui en ont trouvé huit en 1766 ? Cela est affreux, cela est incompréhensible . Il n'y a donc plus ni raison, ni humanité dans le monde ?

 

Au nom de cette humanité qui est dans votre cœur, parlez à M. Target, dites-lui tout ce que je vous dis. Je vous répète que nous ne voulons point de lettres de grâce, que grâce, de quelque manière qu'elle soit tournée, suppose crime, et que nous n'en avons point commis . De plus grâce exige qu'on la fasse entériner à genoux et c'est ce que nous ne ferons jamais xi. Il n'y a ni l'ombre de la justice, ni de la pitié, ni de la raison dans tout ce qu'on m'a écrit sur cette aventure exécrable .

 

Comment voulez-vous, mon cher ange, que dans l'effervescence où est l'intérieur de ma pauvre vieille machine, je vous parle à présent de l'édition in-4° de Corneille ? Il y a sans doute beaucoup de choses nouvelles dans les notes, mais ces choses là vous les savez mieux que moi . Vous savez combien les froids raisonnements alambiqués, écrits en style bourgeois, sont impertinents dans une tragédie ; que le boursouflé est encore plus condamnable, que l’impropriété continuelle des expressions est ridicule etc. J'ai fait sentir tous ces défauts dans la nouvelle édition, et j'ai dû le faire ; j'ai dû n'avoir aucune condescendance pour le mauvais goût et pour la mauvaise foi de ceux qui m'avaient fait des reproches trop injustes . J'ai dit enfin la vérité dans toute son étendue, comme elle doit toujours être dite . De Tournes et Panckoucke, qui ont fait cette édition, ne m'en ont donné qu'un seul exemplaire . Si j'en avais deux, il y a longtemps que vous auriez le vôtre .

 

Je ne puis, mon cher ange, finir ma lettre sans vous dire un mot de l'homme dont j'avais pris le parti , et dont vous me parlez xii. M. de Malesherbes , qui est assurément une belle âme, m'a mandé que c'était ce même homme qui avait déterminé l'arrêt funeste xiii dont l'Europe a eu tant d'horreur, que sans lui les voix auraient été partagées . Je me tais, et je me tairai sur cet homme ; mais cette nouvelle a achevé de m'accabler . Je me jette entre vos bras .

 

V. »

 

i  Auprès de Mme Denis .

ii  V* se moquera un peu de ce chercheur d'or ; Luchet avait fait de malheureuses spéculations sur des mines d'or .

Voir lettre du 1er mai à d'Argental : page 43 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80042j/f48.image.r=...

et 5 mai à Mme de Saint-Julien : page 45, même adresse .

iii  C'est Dom Pèdre , pièce à propos de laquelle il écrivait à d'Argental le 3 avril : page 30 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80042j/f35.image.r=... : «J'ai abandonné totalement dom Pèdre et Duguesclin ... » 

Dom Pèdre

voir : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113232/f242.image

iv  Autres temps, autres soucis .

v  D'Etallonde condamné, en même temps que La Barre, par contumace ; voir lettres de juillet 1766 .

vi  C'est-à-dire à Moinel, dont V* proposait d'escamoter le témoignage ; voir lettre du 11 décembre 1774 à Condorcet : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2008/12/11/c...

et 30 décembre à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/12/30/f...

vii  Miromesnil .

viii  Daté 30 juin, il va publier Le Cri du sang innocent . http://www.voltaire-integral.com/VOLTAIRE/Crisang.htm

Élie de Beaumont s'est occupé des affaires Calas et Sirven .

xi  Vers le 30 avril, V* écrira à Condorcet : « Il manquerait d'ailleurs essentiellement au roi son maître (Frédéric II) et il se déshonorerait s'il allait faire entériner à genoux ces lettres de grâce par ses bourreaux en portant l'habit uniforme des vainqueurs de Rosback ! »

xii  Maupéou, dont V* a loué la réforme en 1771 . Plus explicitement, V* le 17 mars écrit à l'abbé Mignot : «  ... je ne sais que depuis peu à qui on doit principalement imputer le double assassinat dont la postérité fera justice . C'est à ce même homme qui vous avait installé , à ce même homme qui vous devait tant de récompenses, et qui ne vous en a donné aucune ; à ce même homme dont j'avais pris le parti ; à ce même homme qui est à présent l'exécration de la France ».

xiii  Contre La Barre et d'Etallonde .

 

 

16/04/2011

Que m'importe qu'un auteur tragique ait du génie, si aucune de ses pièces ne peut être représentée en aucun pays du monde

http://www.deezer.com/listen-1502132

 

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« A George Keate

Nandos Coffee house

London

 

Aux Délices 16 avril 1760

 

Ce n'est pas, mon cher Monsieur, parce que vous m'écrivez en anglais que je me borne à vous répondre en français, c'est parce que je ne peux écrire , et que je suis obligé de dicter ; je n'ai point encore vu votre compatriote, qui devait m'apporter votre poème i sur Rome ancienne et moderne, soyez sûr que de tous les voyageurs, ce gentilhomme est celui que je désire le plus de voir ; j'attends avec bien de l'impatience le contraste de Rome la grande et de Rome la sainte ; de la Rome des Titus et des Trajan, et celle des papes et des cardinaux ; du Capitole où triompha Paul Émile, et du Capitole où des récollets disent la messe . Vous faites bien de l'honneur à Genève ii, elle ne vaut ni Rome l'ancienne, ni celle d'aujourd'hui ; il s'en faut beaucoup qu'on soit à Genève aussi libre qu'en Angleterre ; c'est un couvent assez ennuyeux, dans lequel il y a des gens de beaucoup d'esprit . Je n'ai choisi ma retraite dans les environs de ce petit pays que pour me consoler de ne pouvoir vivre à Londres . Je ne veux point me brouiller avec vous pour Shakespeare ; je conviens avec vous que la nature avait fait beaucoup pour lui ; elle lui donna tous ses diamants, mais son siècle ne permit pas qu'ils fussent polis . Que m'importe qu'un auteur tragique ait du génie, si aucune de ses pièces ne peut être représentée en aucun pays du monde . Cimabue iii avait du génie pour la peinture, mais ses tableaux ne valent rien ; Lully avait un très grand génie pour la musique, mais personne en Europe ne chante ses airs, excepté nous, encore commençons-nous à en être dégoûtés .

 

Les jardins d'Alcinoüs iv étaient fort beaux dans leur temps ; aujourd'hui ils composeraient à peine le jardin d'un bon fermier .

 

Personne ne sent plus que moi les beaux endroits qui se trouvent par-ci par-là dans Shakespeare ; mais je vous dirai avec Pope , que ce n'est pas un nez et un menton qui font un beau visage, et qu'il faut un assemblage régulier .

 

Si Addison v avait pu mettre plus de chaleur dans son Caton, il eût été mon homme . Vous avez encore un Thomson qui ne fait pas mal des vers, mais son génie était à la glace ; Otway vi était plus chaud, mais on voit un homme qui prend Shakespeare pour son modèle, et qui n'en approche point ; je ne saurais souffrir le mélange du tragique et du bouffon , cela me paraît un monstre . D'ailleurs je ne vous donne pas mon avis comme bon, mais comme mien ; je vous expose mon goût comme Dieu me l'a donné ; nous sommes tous à table, chacun mange et boit ce qu'il lui plaît ; je ne me querellerai pas avec mon voisin s'il aime le bœuf, et moi le mouton .

 

J'ai fait venir d'Angleterre toutes les œuvres de Middleton vii, j'aime cet homme-là passionnément ; je trouve aussi Warburton viii bien savant, mais je n'ai que ses deux premiers tomes de la Légation de Moïse ; je ne sais comment m'y prendre pour avoir les deux derniers volumes ; je suis bien curieux de savoir comment il s'y prend pour prouver que l'ignorance de l'immortalité de l'âme est une démonstration qu'on est conduit par Dieu même . Il prouvera aisément que les Juifs n'attendaient point une autre vie et qu'ils bornaient toute leur félicité à prêter à usure quand ils pouvaient ; mais il ne prouvera que cela, et on le tiendra quitte du reste .

 

Adieu, Monsieur, je vous ennuie, mais je vous aime de tout mon cœur .

 

Your for ever .

 

V. »

 

i George Keate : http://fr.wikipedia.org/wiki/George_Keate .

Ancient and modern Rome . A poem . Written at Rome in the year 1755, 1760 .

ii En écrivant A short account of the ancient history, present government and laws of the Republic of Geneva, 1761 .

viii William Warburton : http://fr.wikipedia.org/wiki/William_Warburton

 

Nando's coffe house , see Round St Paul's in :