28/01/2021
Je suis condamné à rester chez moi ; mais j'espère être consolé quand je pourrai vous y assurer des tendres et respectueux sentiments
... J'anticipe sur l'ordre de confinement prochain . En passant , je demande à tous ceux qui refusent cette mesure d'hygiène préventive de se retrouver sur le périphérique parisien (ou toute autre voie à grande circulation ), et , à pied, traverser les yeux bandés (avant 18h, bien sûr ! ) ; ça fera des économies de vaccin .
Pas possible encore
« A Pierre-Michel Hennin, Résident
du roi
à Genève
A Ferney 29 septembre 1765
Je suis outré monsieur de m'être défait des Délices où j'ai eu le bonheur de vous voir ; mais heureusement je suis encore votre voisin . Jugez avec quelle joie j'ai appris que vous allez résider 1 à Genève . C'est un bénéfice simple tout fait pour un prêtre de la philosophie tel que vous êtes . Je suis devenu bien vieux et bien faible depuis votre voyage en ce pays-là . Mais mon cœur n'a point vieilli . Il est pénétré pour vous de la même estime et de la même amitié . Je suis condamné à rester chez moi ; mais j'espère être consolé quand je pourrai vous y assurer des tendres et respectueux sentiments avec lesquels je serai toute ma vie, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire. »
1 Nomination annoncée à Genève par une lettre du 26 septembre 1765, remise au Conseil le 30 ; Hennin prendra ses fonctions le 16 décembre 1765 . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Michel_Hennin
et : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1760/Lettre_4051
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27/01/2021
dire la vérité comme elle doit être dite, sans aucun ménagement aucun pour l'erreur
... Messieurs et mesdames du gouvernement, c'est à vous !
On vous écoute .
Bas les masques
« A Jean Lafosse, Médecin
rue de l'Université
à Montpellier
Au château de Ferney par Genève
28 septembre 1765 1
Je juge monsieur par votre lettre que votre livre 2 sera excellent . Je vous exhorte à le faire imprimer sans délai, et à dire la vérité comme elle doit être dite, sans aucun ménagement aucun pour l'erreur .
Je vous prie instamment de me dire le nom de ce malheureux père accusé d'avoir donné la mort au fils qu'il pleurait, de m'apprendre quels étaient les prétextes de cette horrible accusation si souvent renouvelée dans votre province, de m'instruire si ce père de famille est protestant, jusqu’où son procès a été poussé, s'il a été mis dans les fers, et s'il prend encore ses juges à partie . Ces détails pourront être utiles à la cause des Sirven . Il ne faut manquer aucune occasion de venger l'humanité des horreurs du fanatisme .
Je vous prie monsieur de vouloir bien faire mes sincères compliments à M. Mallet de La Brossière et de lui dire combien j'ai été content de ses réflexions sur l'aventure des Calas . Je ne lui ai point écrit, il était en Bretagne et je suis malade . Je suis vieux et faible, mais je suis encore sensible, et surtout à votre mérite et à celui de M. de La Brossière .
J’ai l'honneur d'être avec ces sentiments
monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire
gentilhomme ordinaire
de la chambre du roi. »
1 La réponse de Lafosse a été conservée, ainsi qu'une lettre de lui à Mallet de La Brossière, toutes deux conséquences de la présente lettre . Voir page 624 : https://books.google.fr/books?id=B9ZbKwjfAEQC&pg=PA624&lpg=PA624&dq=voltaire+jean+lafosse+28+septembre+1765&source=bl&ots=mzu1FCkvUE&sig=ACfU3U1TyGDXqyE8Rd48tUUTjByCnE5nxA&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwivv5DOtLfuAhWyxYUKHS6RCNIQ6AEwAnoECAUQAg#v=onepage&q=voltaire%20jean%20lafosse%2028%20septembre%201765&f=false
Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_La_Fosse
et sur Julien Mallet de La Brossière, médecin : https://c18.net/18img/nv-specimen.pdf
2 Ouvrage sur le suicide qui ne sera pas publié : Essai médicinal sur le suicide qui aurait dû être imprimé sous le titre Du suicide considéré relativement à la médecine, avec un abrégé des rapports qu'on doit faire en justice, refusé d'impression « sur ordre supérieur ». Voir page 233 et suiv. : https://www.persee.fr/doc/abpo_0399-0826_1979_num_86_2_2979
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ce que je dis à tous les étrangers qui passent par Bâle
... "Les passagers arrivant par l'EuroAirport doivent présenter au départ dans le pays de provenance un résultat de test PCR réalisé moins de 72 heures avant le vol ne concluant pas à une contamination par la COVID-19. Le test doit détecter la protéine "N".
Vous devez présenter une Attestation de déplacement et de voyage lorsque vous entrez en France."
Etc. : https://www.euroairport.com/fr/voyager-en-securite.html
Bon voyage ! Bon vol ! Bon atterrissage !
https://www.arcinfo.ch/articles/regions/canton/coronaviru...
« A Emmanuel Bernouilli 1
Ferney, 28 septembre 1765 2
Aimable fils de Jean, petit-fils de Jean, tous deux grands hommes, je n'ai jamais dit à M. le marquis de Prie 3 que ce que je dis à tous les étrangers qui passent par Bâle ; je les supplie de dire à monsieur votre père combien je le respecte ; j'ajouterai dorénavant que je le félicite d'avoir un fils tel que vous . Je vous prie d'être persuadé de tous les sentiments avec lesquels j’ai l'honneur d'être
monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire. »
2 D'après copie contemporaine, et l'édition Paul-Émile Schazmann « Une visite d'Emmanuel Bernoulli au patriarche de Ferney » Journal de Genève 21 juin 1937, et Otto Spiess « Voltaire und Basel »Basler Zeitschrift für Geschichte und Altertumskunde , 1948.
3 Est-ce bien François Léonor, marquis de Prie ? Voir XVI de http://www.societehistoriquedelisieux.fr/?p=15844
et voir Précis du siècle de Louis XV .
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26/01/2021
apparemment que les condamnés, étant dûment confessés, s’en vont droit en paradis
... Serait-ce la seule excuse qu'ait trouvée Donald Trump pour n'accorder ni sursis ni grâce en sa fin de règne de mégalomane ? Sans être particulièrement méchant, j'en viens à lui souhaiter de choper une bonne vieille maladie incurable pour voir ce que ça fait d'être condamné à mort , à petit feu, pour ce joueur de golf se retrouver dans le trou à mille au dessus du par !
Pour mémoire (triste ): https://www.ouest-france.fr/monde/etats-unis/etats-unis-u...
« A Jean-Baptiste-Jacques Élie de Beaumont
26 septembre 1765 1
Vous entreprenez, monsieur, un ouvrage digne de vous, en essayant de réformer la jurisprudence criminelle. Il est certain qu’on fait trop peu de cas en France de la vie des hommes. On y suppose apparemment que les condamnés, étant dûment confessés, s’en vont droit en paradis. Je ne connais guère que l’Angleterre où les lois semblent plus faites pour épargner les coupables que pour sacrifier l’innocence. Croyez que partout ailleurs la procédure criminelle est fort arbitraire.
Le roi de Prusse a fait un petit code intitulé le code selon la raison 2, comme si le digeste était selon la folie .
Mais, dans ce code, le criminel est oublié. Le meilleur usage établi en Prusse, comme dans toute l’Allemagne et en Angleterre, est qu’on n’exécute personne sans la permission expresse du souverain. Cette coutume était établie en France autrefois. On est un peu trop expéditif chez vous : on y roue les gens de broc en bouche 3, avant que le voisinage même en soit informé ; et les cas les plus graciables échappent à l’humanité du souverain.
J’ai écrit en Suisse, selon vos ordres. Je ne peux mieux faire que de vous envoyer la réponse de M. de Correvon, magistrat de Lausanne . Mais vous trouverez sûrement plus de lumières dans vous que dans les jurisconsultes étrangers.
Voilà un beau champ pour votre éloquence. La rage d’accuser en Languedoc les pères de tuer les enfants subsiste toujours. Un enfant meurt d’une fièvre maligne à Montpellier . Le médecin va voyager . Pendant son voyage, on accuse le père d’avoir assassiné son fils. On allait le condamner, lorsque le médecin arrive, parle aux juges, les fait rougir, et le père prend actuellement les juges à partie. Cette aventure pourrait bien mériter un épisode dans votre mémoire. Je vais écrire au médecin pour savoir le nom de ce brave père. Adieu, monsieur , j’ai le malheur de n’avoir vu ni madame de Beaumont ni vous, mais j’ai le bonheur de vous aimer tous deux de tout mon cœur.
V.
A l’égard des Sirven, M. de Lavaysse me mande que l’ordonnance du parlement de Toulouse, portant permission à un juge subalterne d’effigier 4 son prochain, n’est point regardée comme une confirmation de sentence. Voilà, je vous l’avoue, une singulière logomachie. Quoi ! la permission de déshonorer un homme, et de confisquer son bien, n’est pas un jugement ! Le parlement donne donc cette licence au hasard ! Ou la sentence lui paraît juste ou inique , il en ordonne l’exécution . Il confirme donc la justice ou l’iniquité. Il ne peut ordonner cette exécution qu’en connaissance de cause. De bonne foi est-ce une simple affaire de style d’ordonner la ruine et la honte d’une famille ? »
1 L'édition de Kehl suivant la copie Beaumarchais insère le post scriptum dans le corps de la lettre .
2 Corpus juris fredericiani, compilé par Samuel de Cocceji et autres, traduit par Alexandre-Auguste de Campagne sous le titre : Projet du corps de droit Frédéric, ou corps de droit [...] fondé sur la raison et sur les constitutions du pays, 1751 .Voir : https://books.google.fr/books?id=ka8UGkNA2T0C&pg=PT24&lpg=PT24&dq=Corpus+juris+fredericiani&source=bl&ots=SNx6qKdlg9&sig=ACfU3U3iJ16egHfs0G8iU10d7R_uxks1Lg&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjywpb5kLDuAhXExYUKHUJPAsEQ6AEwAHoECA8QAg#v=onepage&q=Corpus%20juris%20fredericiani&f=false
et https://www.abebooks.co.uk/Code-Fr%C3%A9d%C3%A9ric-corps-Droit-Etats-Majest%C3%A9/8846226907/bd
et https://boowiki.info/art/juristes-allemands/samuel-von-cocceji.html
et https://data.bnf.fr/fr/12594576/alexandre_auguste_de_campagne/
3 Expression procédant de de broche en bouche, qui se comprend simplement . La forme qu'on a ici se trouve déjà chez Rabelais, issue de la forme picarde de broche (broque), interprétée à tort comme broc .
4 Exécution en effigie .
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25/01/2021
aussi bien dans le comique que dans le tragique
... le spectacle vivant , et son cousin le cinéma, sont dans le coma . Pas de soins intensifs et pronostic pessimiste, quelques perfusions pour donner l'impression qu'on ne veut pas la mort du sujet, et valse hésitation quant aux décisions à prendre . Le remède est pourtant simple : les laisser respirer . Difficile ? J'attends des explications cohérentes, le galimatia j'en ai eu ma surdose , pas besoin de piqure de rappel, alors ?
« A Gabriel Cramer
[vers le 25 septembre 1765]
Puisque monsieur Cramer joue aussi bien dans le comique que dans le tragique, je me flatte qu'il s’intéressera à l’Église grecque autant qu'à l’Église latine 1. Le philosophe Damilaville part incessamment . On attend l'épreuve avec impatience . On fait mille tendres compliments à monsieur Gabriel . »
1 Allusion au Mandement du révérendissime père en Dieu Alexis, archevêque de Novgorod la Grande, 1765 , de Voltaire . Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Mandement_de_l%E2%80%99archev%C3%AAque_Alexis/%C3%89dition_Garnier
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24/01/2021
je ne puis avoir soin des dames que le jour
... Comme disent les anciens, la nuit c'est fait pour ... ? ... dormir ? Dormir ! grand bien leur fasse ! C'est aussi le moment de faire quelques découvertes agréables, comme hier celle de Suzane, chez Ruquier, une chanteuse , une vraie , un régal : https://www.youtube.com/watch?v=uHxXsDDwcmI avec une mention spéciale pour SLT (Bats-toi fillette ! ) https://greatsong.net/paroles-slt-suzane
« A Louise-Catherine de Malivert de Conflans de Pingon, comtesse de Sallenove 1
Madame,
Je voudrais avoir des lits pour vous, pour les jeunes mariées, et pour vous coucher toutes deux à deux, mais je n'ai que des pierres et des maçons . On joue la comédie vendredi à quatre heures . Si vous voulez y venir avec la noce vous nous ferez beaucoup d'honneur et de plaisir . Mais il faudrait vous précautionner pour savoir où, et comment vous passerez la nuit . Ma pauvre maison est si en désordre que je ne puis avoir soin des dames que le jour . Faites comme vous pourrez et comptez sur le respectueux attachement de votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire.
Mercredi 25è septembre 1765 à Ferney . »
1 Epouse de Hyacinthe de Pingon ; voir : http://archives-en-ligne.savoie.fr/ir_pdf/ANC/B/AD073_B_IR211.pdf avec contrat dotal du 29 juillet 1740 .
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23/01/2021
C’est un homme d’un rare mérite que
... Omar Youssef Souleimane : https://www.lepoint.fr/societe/c-est-grace-au-coran-que-je-suis-devenu-athee-03-01-2018-2183734_23.php
et , côté féminin , de mérite aussi sans conteste , Maryam Manazie : https://www.lepoint.fr/societe/maryam-namazie-il-y-a-un-tsunami-d-atheisme-dans-le-monde-musulman-04-01-2018-2183922_23.php
Je persiste dans l'athéisme, me direz-vous ; oui, car comment concevoir un dieu ou des dieux et esprits angéliques ou sataniques, et un monde féérique ou infernal après la mort ? Pures inventions romanesques, -pour enfants crédules et abrutis,- dont on a fait des armes de domination . Bah !
Avec l'approbation de M. de Voltaire
« A Charles-Augustin Ferriol , comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
23 [Septembre 1765] 1
Or mes anges, voilà donc mon ami Fabry agent par intérim de la parvulissime république de Genève 2. Mais quand vous voudrez, vous m’enverrez les Roués ; et, en attendant, permettez que je vous adresse ce petit mot pour le duc de Vendôme 3.
Je viens de lire le sublime Éloge de Descartes, par M. Thomas. J’aime mieux lire, je vous jure, le panégyriste que le héros. C’est un homme d’un rare mérite que ce Thomas ; et ni Thomas d’Aquin, ni Thomas Didyme, ni Thomas de Cantorberi, n’approchent de lui. Il avait bien voulu m’envoyer son ouvrage, et le paquet contre-signé Praslin était resté chez ce pauvre Montpéroux pendant sa dernière maladie.
Vous voyez donc bien que je reçois mes paquets contresignés, à moins que les résidents ne soient morts, et que c’est pure malice si vous ne m’envoyez pas les Roués, et pure malice encore si Lekain ne me fait pas tenir sa vieille Adélaïde . Car, encore une fois, je suis très en peine de savoir laquelle des trois copies est la passable.
Vous [vous] souciez 4 fort peu de savoir que l’impératrice de Russie, la bonne amie de l’abbé Bazin, voulait avoir des filles pour enseigner le français aux petites filles de son empire. Plusieurs étaient déjà parties. Le conseil de Genève a trouvé cela fort mauvais , et sans aucun respect pour l’impératrice ; il 5 a fait arrêter ces filles dans l’État de Berne, qui a favorisé leur enlèvement 6. L’auguste et ferme Catherine sera très courroucée, et moi je le suis aussi. Cette action me paraît brutale et tyrannique. Je ne prends plus le parti du Conseil genevois que pour mes dîmes.
Voici un placet pour Lekain, sur lequel je vous demande votre protection. »
1 Date complétée par d'Argental.
2 Après que Montpéroux a été suppléé automatiquement par Etienne-Marie Recville, aumonier de la résidence, entre le 7 septembre et le 27 octobre 1765, ce fut Fabry qui occupera le poste du 27 octobre au 16 décembre 1765 .
3 Lekain , bien sûr .
4 Un emploi apparemment comparable est dans une lettre de 1764 ; on a corrigé l'original ici , vous souciez : si soucier se trouve quelquefois à la forme non pronominale, jsuqu'à l'époque classique, le sujet est toujours, dans ce cas, la chose qui cause le souci . Du reste la faute s'explique sur le plan paléographique, et de tels lapsus calami sont fréquent chez V*.
5 V* a d'abord écrit elle, rayé .
6 Il est fait plusieurs fois mention de cette affaire dans les archives de Genève ( CCLXV, 384, 388-389, 397-398, 43, 419-420, 425-427, 430-431, 434, 437-438, etc. )
18:07 | Lien permanent | Commentaires (0)