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01/09/2019

l’ouvrage pourrait se relever. On ne risque rien à hasarder la révision

... Qu'on se le dise, au gouvernement comme ailleurs, revoir sa copie n'est pas un défaut, en particulier concernant les "nouveaux boulots" .

https://www.franceinter.fr/emissions/interception/interce...

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

12 juillet [1764]

Mes divins anges, je suis plus affligé des rhumatismes dont vous me parlez que de la petite disgrâce de l’ex-jésuite 1. Est-il possible que l’un de mes anges souffre ? cela est bien injuste.

J’ai communiqué au petit défroqué l’histoire de son infortune . Il m’a demandé le secret. Il craint que, s’il était connu, cela ne l’empêchât d’avoir un bénéfice . Mais surtout il vous supplie de recommander le secret à M. de Chauvelin. Il vous demande une grâce, c’est de revenir en requête civile, et de hasarder deux ou trois représentations , car ce pauvre Poinsinet 2 ayant protesté que le délit n’a pas été commis par lui, il se pourra que le public soit moins barbare. Un acteur pourrait annoncer que la pièce n’est point de celui à qui on l’attribuait, et qu’un jeune homme docile en étant l’auteur, et ayant fait quelques changements, on compte sur un peu d’indulgence. Je pense qu’alors l’ouvrage pourrait se relever. On ne risque rien à hasarder la révision. Voyez ce qui est arrivé à Oreste, et même à Zaïre. Vous pourriez, mes anges, en venir à votre honneur , car enfin, si vous croyez la pièce passable, il faut bien qu’elle le soit.

On ne pourra refuser à Lekain, qui a proposé la pièce, de la rejouer . Mais enfin, si la chose était impraticable, en ce cas, je vous supplierais de redemander à Lekain l’exemplaire, et de vouloir bien me le renvoyer pour ce pauvre ex-jésuite.

J’attends tous les jours des livres d’Italie . Je ne perds pas assurément de vue la Gazette littéraire.

N.B.  – Mes anges, ne vous découragez pas sur le drame de l’ex-jésuite, à moins que vous n’y ayez senti du froid, car à cette maladie point de remède. »

1 Octave (Le Triumvirat ), du prétendu  « ex-jésuite », v* lui-même bien sûr, a été représenté le 5 juillet 1764 et c'est le premier échec total de V* à la scène . La pièce est retirée après la cinquième représentation et ne sera pas reprise .

31/08/2019

Il est rempli de pensées fortes , très heureusement exprimées ; c'est assurément un ouvrage de génie

... Ce qui n'est pas tout à fait l'avis des enseignants face à la réforme de M. Blanquer.

https://actu.orange.fr/france/rentree-des-profs-dans-l-in...

 

 

« A Antoine Maillet du Clairon 1

11 juillet 1764, à Ferney 2

Je suis très flatté, monsieur, de l'honneur que vous me faites, et non moins content de l'ouvrage que vous avez bien voulu m'envoyer 3 . Il est rempli de pensées fortes , très heureusement exprimées ; c'est assurément un ouvrage de génie, et on ne peut le lire sans vous estimer beaucoup . Je ne peux vous témoigner ma reconnaissance qu'en vous priant d’accepter les œuvres de notre maître, que vous imitez si bien . Un de mes amis, nommé M. Damilaville, directeur de vingtièmes 4, et qui n'en est pas moins philosophe et homme de lettres, a, je crois, encore un exemplaire de Corneille qu'il ne peut mettre en de meilleures mains que les vôtres . Il demeure quai Saint-Bernard 5.

J'ai l'honneur d'être, avec toute l'estime et tous les sentiments que vous méritez, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur .

Voltaire. »

2 Le manuscrit original était conservé dans les Archives de l'académie de Mâcon, mais ne peut plus y être retrouvé ; on a l'édition Gaudier «  Sur divers autographes extraits des archives de la Société , et notamment sur des lettres de Voltaire. », 1870. Voir : http://www.ader-paris.fr/html/fiche.jsp?id=4495078&np...=

4 Il faut lire des vingtièmes . Le vingtième est un impôt de 5% sur les revenus .Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Vingti%C3%A8me

5 Phrase rajoutée en marge .

30/08/2019

Si je pouvais compter seulement sur un mois d’un état tolérable

... pense M. Blanquer en ce jour de rentrée pour les professeurs . 

Image associée

 

 

« A Cosimo Alessandro Collini

A Ferney, 11 Juillet 1764. 1

Je ne crois pas, mon cher ami, qu’il me soit permis de solliciter auprès de Son Altesse Sérénissime. pour un homme d’Église  ; car, outre que je suis fort profane, j’ai toujours sur le cœur de n’être point venu me mettre aux pieds de Mgr l’Électeur. L’édition de Corneille, à laquelle il a fallu travailler deux ans et quelques mois, m’a retenu indispensablement auprès de Genève. J’ai été privé de la vue six mois entiers par une fluxion affreuse qui se promène encore sur ma pauvre figure, née très faible, et affligée de soixante et onze ans, qui seront bientôt révolus. Je suis obligé de prendre médecine quatre fois par semaine ; vous jugez bien que dans cet état je suis beaucoup plus digne de la boutique d’un apothicaire que de la cour d’un prince aimable, plein d’esprit et de connaissances. J’ai opposé autant que j’ai pu un peu de gaieté à la tristesse de ma situation ; mais enfin la gaieté cède à la douleur et à la vieillesse. Si je pouvais compter seulement sur un mois d’un état tolérable, je vous assure, mon cher Collini, que je prendrais bien vite la poste, et que vous me verriez venir me mettre au rang des sujets de Son Altesse Sérénissime, c’est-à-dire au nombre des gens heureux. Ce mot d’heureux n’est pas trop fait pour moi. A votre âge, mon cher Collini, on jouit de la vie ; et au mien on la supporte. Je vous embrasse bien tendrement. 

V.»



1 L'original de ce manuscrit est sans doute passé à la vente Sylvestre à Paris le 16 mai 1826 .

29/08/2019

en rassemblant certains points de l’histoire, on peut démêler les véritables sources qu’on nous a longtemps cachées. Cela demande du temps et de la peine, mais l’objet le mérite

... Toujours vrai !

 

« A Etienne-Noël Damilaville

9è juillet 1764 1

Dieu me préserve, mon cher frère, d’avoir la moindre part au Dictionnaire philosophique portatif ! J’en ai lu quelque chose ; cela sent terriblement le fagot. Mais puisque vous êtes curieux de ces ouvrages impies pour les réfuter, j’en chercherai quelques exemplaires, et je vous les enverrai par la première occasion.

Frère Cramer vous a dit qu’il y avait un vieux pédant entouré de vieux in-folio , qui travaillait de tout son cœur à un ouvrage fort honnête 2 ; frère Cramer a raison. Je crois que la meilleure manière de tomber sur l’infâme est de paraître n’avoir nulle envie de l’attaquer, de débrouiller un peu le chaos de l’antiquité ; de tâcher de jeter quelque intérêt ; de répandre quelque agrément sur l’histoire ancienne ; de faire voir combien on nous a trompés en tout ; de montrer combien ce qu’on croit ancien est moderne ; combien ce qu’on nous a donné pour respectable est ridicule ; de laisser le lecteur tirer lui-même les conséquences. Il est certain qu’en rassemblant certains points de l’histoire, on peut démêler les véritables sources qu’on nous a longtemps cachées. Cela demande du temps et de la peine, mais l’objet le mérite 3. L’auteur m’a déjà montré quelques cahiers . Il dit que l’ouvrage sera sage, qu’il dira moins qu’il ne pense, et qu’il fera penser beaucoup. Cette entreprise m’intéresse infiniment . Je suis bien loin de songer à des tragédies. On m’a mandé que les Triumvirs dont vous me parlez sont d’un jeune ex-jésuite qui a du talent. Les jésuites avaient au moins cela de bon qu’ils aimaient la comédie, et qu’ils en faisaient. Les jansénistes sont les ennemis de tout plaisir honnête.

Je vous embrasse de tout mon cœur.

Ecr. l’inf. »

1 Copie par Wagnière ; l'édition de Kehl amalgame cette lettre à celle du 13 juillet 1764 suivant la copie Beaumarchais , suivie par les éditions : voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/08/correspondance-annee-1764-partie-24.html

2 La Philosophie de l'histoire .

3 V* donne là une recette de sa méthode dans le Dictionnaire philosophique, les Questions sur l'Encyclopédie et bien d'autres ouvrages destinés à la lutte anti-religieuse .

De ce grand attentat il se fait trop d'honneur Pour daigner en cacher le motif et l'auteur .

... Jair Bolsonaro ! parle !

De plates excuses ne te rendront pas plus estimable, c'est un minimum que tu dois faire .

https://www.linternaute.com/actualite/personnalites/11991... 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

Le petit jésuite trouve en effet que dans la quatrième scène du cinquième acte on représente Pompée comme incapable de soutenir une longue conversation .

Longtemps faible et mourant, il n'a pu nous parler,

A peine son sang même a cessé de couler .

Le jésuite occupé de ses sermons n'avait pas remarqué ces deux vers .

Il faut mettre, je crois ,

De ce grand attentat il se fait trop d'honneur

Pour daigner en cacher le motif et l'auteur .1

Probablement la pièce est déjà jouée et sifflée . N'importe . Des corrections d'un jour à l'autre prouveront que l'auteur jésuite est à Paris .

Mille tendres respects à mes anges et point de rhumatismes .

V.

7 juillet [1764] 2»

2 Date complétée par d'Argental .

28/08/2019

Une des faiblesses de ce fou est de mentir impudemment

... Le monde irait mieux si effectivement il n'y avait qu'un seul fou menteur, mais le récent G7 a mis en lumière plusieurs de ces zozos malfaisants indignes d'être chefs d'états . Bolsonaro et Trump donnent le goût amer de l'histoire (ah merde l'histoire !) ; Trump félicitant Bolsonaro étant tout à fait logique quand on sait l'inefficacité du premier à éteindre les feux gigantesques qui ont ravagé la Californie l'an dernier, ce Donald, pompier incapable, ne peut être qu'admiratif pour le pyromane brésilien qui entre dans le livre des records . Notre planète est bien mal barrée .

Image associée

Tristement vrai !

 

« A Etienne-Noël Damilaville

6è juillet 1764

Mon cher frère, je ne perds pas le peu de temps qui me reste à vivre. Je me doute bien de ce que frère Cramer vous montrera ; mais je ne crois pas que cet ouvrage doive jamais être vendu avec privilège. Je vous demande en grâce de confondre tout barbare et tout faux frère qui pourrait me soupçonner d’avoir mis la main à ce saint œuvre 1. Je veux le bien de l’Église, mais je renonce de tout mon cœur au martyre et à la gloire éternelle. Sachez que Dieu bénit notre Église naissante . Trois cents Meslier, distribués dans une province , ont opéré beaucoup de conversions. Ah ! si j’étais secondé ! mais les frères sont tièdes, les frères ne sont point rassemblés . Ce malheureux Rousseau n’est fidèle qu’à son caprice et à son amour-propre. C’était assurément l’homme le plus capable de rendre de grands services ; mais Dieu l’a abandonné. Son Vicaire savoyard pouvait faire du bien ; mais cela est noyé dans un roman absurde qu’on ne peut lire. Enfin ce malheureux s’est rendu indigne de la bonne cause. J’ai été très fâché de l’excès de folie qui l’a porté à imprimer que je le persécutais . Il est toujours 2 triste qu’un homme qui a passé quelque temps pour notre frère fasse accroire qu’un de nous le persécute. Mais que voulez-vous ? ce pauvre homme m’ayant offensé, s’est imaginé que je m’étais vengé. Il ne connaît pas les véritables frères. Une des faiblesses de ce 3 fou est de mentir impudemment. Il se vante qu’on a voulu l’engager à écrire contre les jésuites . Quelle pitié ! Les parlements avaient bien besoin de Jean-Jacques ! Ils ont écrit eux-mêmes, et assurément mieux que lui.

Je vous embrasse pieusement, mon cher frère.

Ecr. l’inf »

1 Le Dictionnaire philosophique portatif (note selon Georges Avenel ).

2 Les éditions portent bien au lieu de toujours .

3 Les éditions ajoutent pauvre .

27/08/2019

Je suis à présent à sec, et accablé d’un ouvrage très considérable en faveur de la bonne cause

... Ce que devraient se dire tous les chefs d'états et de gouvernements au retour du G7 .

Ce qu'ils ne se diront pas, trop préoccupés de leur petit train train politique .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

6è juillet [1764] à Ferney 1

Mes divins anges, quoi ! toujours un rhumatisme ! Je conçois bien que nous autres agriculteurs des Alpes nous soyons souvent affligés de ce fléau , mais un ange! une dame de Paris, qui n’est jamais exposée aux malignes influences de l’air ! Non, ce n’est pas là une maladie de dame. Que dit à cela M. Fournier  ?2 Mon cher ange, qui n’a point de rhumatisme, écrit très proprement, quoi qu’il en dise ; et moi aussi, qui ai recouvré la vue jusqu’à ce que je la reperde. Cette vie est pleine de tribulations. Conservez votre santé, mes anges ; cela vaut mieux que des pièces de théâtre, et surtout que les pièces d’aujourd’hui. Je fais donc Pierre-le-Cruel, comme dit très bien M. de Thibouville . Je l’ai même confié à M. de Chimène . Ainsi je ne crois pas qu’on puisse en douter. Pour vous, mes braves conjurés, vous avez employé un jésuite pour faire les Roués. Je ne sais quel nom on donne à la pièce . Je sais seulement qu’elle ne ressemble pas à Bérénice.

Le petit jésuite dit qu’il est très loin de souhaiter qu’on l’imprime sitôt . Il fera tout ce que vous ordonnez pour Lekain . Il désire seulement qu’on donne un honoraire à un jeune homme 3 qui, depuis dix ans, a copié cinq ou six tragédies dix ou douze fois chacune, et à qui le petit jésuite doit quelque attention. Ledit défroqué ne veut jamais être connu, à moins qu’ayant été encouragé l’été par un petit succès, il n’en ait un grand pendant l’hiver, après avoir donné la dernière main à ses Roués.

Vous avez terminé noblement l’affaire du roi de Pologne, et je vous en remercie. Cramer viendra sans doute chez vous, et vous lui recommanderez de presser son correspondant d’Italie de dépêcher les livres qu’il a promis, et alors je les aurai.

Je suis toujours aux ordres de la Gazette littéraire, quoiqu’elle ait mis une certaine note trop flatteuse à l’extrait de Pétrarque, note à laquelle l’abbé de Sade s’obstine, dit-on, à me reconnaître.

Je suis à présent à sec, et accablé d’un ouvrage très considérable en faveur de la bonne cause 4. Mes chers anges, respect et tendresse.

V.

N.B. – Nous sommes perdus maman et moi si M. le duc de Praslin n' a pas décidé l'affaire des dîmes avant la Saint-Martin.

N.B. – J'ai vu le secrétaire parmesan Deleyre 5. Je l'ai reçu comme un homme recommandé par vous . »

1 Date complétée par d'Argental . L'édition de Kehl omet le post-scriptum .

2 Médecin .

3 Wagnière .

5 Alexandre Deleyre : http://dictionnaire-journalistes.gazettes18e.fr/journalis... . Il a écrit l'article Fanatisme de l'Encyclopédie .