08/07/2020
Lisez, jugez, arrangez-vous , et voyez ce qu'il faut que je réponde
... Eric Dupond-Moretti a-t-il consulté ainsi quelqu'un avant de rendre réponse à une offre de poste ministériel ? J'en doute, compte tenu de l'orgueil du bestiau ( ours mâtiné de pitbull , selon moi ), grande gueule par nature et par profession .
« A Théodore Tronchin
[mars-avril 1765]1
Je vous envoie, mon très cher Esculape, la lettre de M. le duc de La Vallière . Lisez, jugez, arrangez-vous , et voyez ce qu'il faut que je réponde . Je ne sais s'il convient à monsieur Tronchin le conseiller d’État de louer les Délices pour quelques mois .
J'ai toujours sur le cœur l'honneur que nous a fait Mme de Gourgue 2 de venir à Ferney . Mme Denis et moi nous étions très malades, et nous ne pûmes peut-être répondre comme nous le voulions aux bontés de Mme de Gourgue . Vous pouvez compter mon cher ami, que je ne passe pas un seul jour sans souffrir . Je ne peux opposer à mes maux qu'une entière résignation ; mais cette résignation ne suffit pas pour bien faire les honneurs de sa maison .
Je vous demande en grâce de vouloir bien faire ma cour à Mme de Gourgue dont je connais tout le mérite, et à la santé de laquelle je m'intéresse infiniment .
Je sais que le bâtard du chien de Diogène n'a pas dit des choses agréables de vous et de moi à Mme de Luxembourg . Esculape était peint avec un serpent à ses pieds . C'était apparemment quelque Jean-Jacques qui voulait lui mordre le talon . Il faut avouer que ce malheureux est un monstre, et cependant, s'il avait besoin de vos secours vous lui en donneriez . Quelle différence, grand Dieu, d'un Tronchin à un Jean-Jacques.
V.
Tâchez, je vous prie, de me rendre une réponse prompte chez M. Souchay, afin que je puisse satisfaire l'impatience de M. le duc de La Vallière . »
1 L'édition Cayrol place la lettre en mars 1765 ; mais le duc ne pouvait alors savoir que V* quittait les Délices . Par ailleurs , le 3 septembre 1766, V* dit à Théodore Tronchin qu'il n'a pas écrit à La Vallière depuis plus d'un an .
2 Voir lettre du 25 mars 1765 à Théodore Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/06/28/sept-cent-mille-tetes-absurdes-l-emporteront-sur-cinquante-tetes-bien-faite.html
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07/07/2020
Voilà un genre nouveau dont vous serez le père ; on en avait besoin, et je suis vivement persuadé que vous rendez service à la nation
... Que déclarer de plus aimable à M. Macron, M. Castex vous qui faites de l'auto-satisfaction en mettant au pinacle ceux que vous venez de choisir ?
https://www.lci.fr/politique/en-direct-remaniement-eric-d...
« A Pierre-Laurent Buyrette de Belloy
31 mars 1765 au château de Ferney 1
A peine je l'ai lu, mon cher confrère, que je vous en remercie du fond de mon cœur . Je suis tout plein du retour d'Eustache de Saint-Pierre et des beaux vers que je viens de lire :
Vous me forcez seigneur , d'être plus grand que vous 2.
Et celui-ci , que je citerai souvent :
Plus je vis l'étranger, plus j'aimai ma patrie 3.
Que vous dirai-je, mon cher confrère ? Votre pièce fait aimer la France et votre personne . Voilà un genre nouveau dont vous serez le père ; on en avait besoin, et je suis vivement persuadé que vous rendez service à la nation . Recevez encore une fois mes tendres remerciements . »
1 L'édition « A M. de Belloy » dans le Mercure de France de mai 1769 donne la lettre précédée des mots suivants : « Nous n'avons qu'en ce moment connaissance d'une lettre de M. de Voltaire, et nous croyons qu'on lira avec plaisir son sentiment sur Le Siège de Calais . »
2 Acte V, sc. 2. Voir : https://books.google.fr/books?id=syFaAAAAcAAJ&pg=PA44&lpg=PA44&dq=si%C3%A8ge+de+calais+Vous+me+forcez+seigneur+,+d%27%C3%AAtre+plus+grand+que+vous&source=bl&ots=g5qWzYQlp6&sig=ACfU3U0esblGkCrBdhqK5-PaabGC7SYh0w&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwin3aHo1LnqAhVS1hoKHQ51ALkQ6AEwAHoECAwQAQ#v=onepage&q=si%C3%A8ge%20de%20calais%20Vous%20me%20forcez%20seigneur%20%2C%20d'%C3%AAtre%20plus%20grand%20que%20vous&f=false
3 Ac. II, sc. 3.Voir : https://books.google.fr/books?id=RMFAAAAAYAAJ&pg=PA16&lpg=PA16&dq=si%C3%A8ge+de+calais+Plus+je+vis+%C3%A0+l%27%C3%A9tranger,+plus+j%27aimai+ma+patrie&source=bl&ots=KevZMOhE7V&sig=ACfU3U1USqbOaxPUHJ_-a2jSrccq-bupOQ&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiZ44Oz1LnqAhUqzIUKHaSDDMEQ6AEwBXoECAgQAQ#v=onepage&q=si%C3%A8ge%20de%20calais%20Plus%20je%20vis%20%C3%A0%20l'%C3%A9tranger%2C%20plus%20j'aimai%20ma%20patrie&f=false
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06/07/2020
le public se lasse bien vite d'être généreux
... Vacances !
« A Etienne-Noël Damilaville
30 mars [1765] 1
Mon cher frère,
Je vous crois instruit des démarches du parlement de Toulouse , qui a défendu qu'on affichât l'arrêt des maîtres des requêtes et qui s'est assemblé pour faire au roi de belles remontrances tendant à faire déclarer bien roués tous ceux qui ont été roués par ledit parlement . Je ne sais pas si ces remontrances auront lieu . J'ignore jusqu’à quel point la cour ménagera le parlement des Wisigoths . C'est dans cette incertitude que j'ai conseillé à la veuve Calas de ne point hasarder la prise à partie, sans faire pressentir les deux ministres dont dépend sa pension ; mais je me rendrai à l'avis que vous aurez embrassé .
J'attends tous les jours à Toulouse la copie authentique de l'arrêt qui condamne toute la famille Sirven ; arrêt confirmatif de la sentence rendue par un juge de village ; arrêt donné sans connaissance de cause ; arrêt contre lequel tout le public se soulèverait avec indignation si les Calas ne s'étaient pas emparés de toute sa pitié . Je ne conseillerais pas à un auteur de donner une seconde pièce patriotique . Il n'y a que le zèle de M. de Beaumont qui soit inépuisable ; le public se lasse bien vite d'être généreux .
Je reçois dans le moment la sentence des Sirven . Je les croyais roués et brûlés, ils ne sont que pendus . Vous m'avouerez que c'est trop s'ils sont innocents et trop peu s'ils sont parricides . Les complices bannis me paraissent encore un nouvel affront à la justice, car s'ils sont coupables d’un parricide, ils méritent la mort . Il n'y a pas le sens commun chez les Wisigoths . Je crois qu’après les Sirven les gens les plus à plaindre sont ceux qui liront ces horreurs .
Je suis bien malade . Tout baisse chez moi hors mes tendres sentiments pour vous ; je me soumets à l'Être de êtres et aux lois de la nature . »
1 Une copie contemporaine la date par inadvertance de 1767 ; l'édition de Kehl, suite à la copie Beaumarchais amalgame cette lettre à celle du 5 avril 1765 : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/09/correspondance-annee-1765-partie-12.html
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05/07/2020
Vos jeunes attraits, vos œillades Ne me rendront pas mon printemps. Quand on a parcouru dix huit olympiades, L’esprit et son étui sont minés par les ans, On ne fait plus de vers galants
... Dit le décrépit Jean-Claude Gaudin à Michèle Rubirola la plantureuse [sic]*, élue maire de Marseille : https://www.francetvinfo.fr/elections/municipales/recit-m...
* NDLR : James ne peut s'empêcher, une fois de plus , de souligner les contrastes chez nos élu-e-s .
Bon courage dans cette ville de fadas
« A Jean-Chrysostome Larcher, comte de La Touraille 1
[Premi]er gentilhomme de S.A.S. Mgr le
Prince de Condé, etc.
à l'hôtel de Condé
à Paris
29è mars 1765 au château de Ferney
par Genève 2
Vous en avez usé avec moi, monsieur, comme une jeune coquette qui se pare de tous ses charmes pour séduire un pauvre vieillard à qui elle donne des désirs inutiles . Vous m'avez cajolé, vous m'avez envoyé de jolis vers ; mais je répondrai à votre muse agaçante :
Vos jeunes attraits, vos œillades
Ne me rendront pas mon printemps.
Quand on a parcouru dix huit olympiades,3
L’esprit et son étui sont minés par les ans,
On ne fait plus de vers galants,
Ou si l'on en veut faire, ils sont durs ou fades .
Des neuf savantes sœurs j'ai force rebuffades,
Du cheval ailé des ruades ,
Et des sourires méprisants
Des belles dames à passades .
Condé même, Condé qui par tant d'estocades
Égala jeune encor les héros du vieux temps,
Et qui dans l'art de vaincre a peu de camarades,
Exciterait en vain mes efforts languissants.
Irai-je répéter dans de froides tirades
Ce qu'on a dit cent fois des illustres parents
Dont la gloire avec lui faisait des accolades
Aux campagnes des Allemands ?
Qu'il soit chanté par vous, par tous vos jeunes gens,
Et non par de vieux malades .
Je m'en tiens donc à vous assurer en prose de toute mon estime et mon respectueux dévouement.
V.
J'ai chez moi un jeune homme infiniment aimable et qui rend justice à ceux qui le p[rotègent ?]4 car il vous est très attaché . C'est M. de Vil[ette]. »
2 L'édition de Kehl est réduite aux vers .
3 V* a changé dix en dix-huit .
4 Le papier est endommagé, ainsi que plus loin .
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04/07/2020
un petit mot de remerciement, dans une lettre chargée à la poste . C'est un usage établi ; moyennant quoi il pourra le consulter sur l'effet de ses remèdes
... Ceci s'adresse bien à Emmanuel Macron et son recours -surement et obligatoirement discret- à son ancien Premier ministre face au nouveau gouvernement qui se pond en ces jours . Bonne couvée ? Après le plumage, on va connaitre le chant de ces oiseaux-là !
Dès que j'ai entendu le nom du nouveau premier ministre, je l'ai directement associé à Surer . Pourquoi , me diront les jeunes générations, et des moins jeunes ? Parce que j'ai été nourri au Castex (Paul ) et Surer (Pierre-Georges), auteurs des Manuels de la littérature française, couvrant tous les siècles du Moyen-Age au XXème siècle , toutes mes années de lycée ( NDLR : en ce temps là, on était lycéen de la 6è à la terminale , et non pas collégien , puis enfin lycéen ). Je me suis régalè à les lire en entier, et pas seulement les parties choisies par les professeurs . Enfin, presque, je butais un peu sur les poèmes .
Jean Castex est-il homme de lettres, ou seulement d'actions ?
« A François de Chennevières
Voici , mon cher confrère, la réponse d'Esculape Tronchin . J'envoie un exprès à la poste de Genève afin que vous l'ayez au plus vite . Si ce chevalier avait instruit M. Tronchin de sa demeure, il aurait été servi plus tôt, mais on a perdu une poste, et il faudra encore que le paquet aille de Paris à Versailles, et de Versailles à Paris . Si M. le chevalier d'Herbain est à son aise, il faudra qu'il envoie un louis ou deux à M. Tronchin en droiture à Genève, avec un petit mot de remerciement, dans une lettre chargée à la poste . C'est un usage établi ; moyennant quoi il pourra le consulter sur l'effet de ses remèdes , et il en recevra en droiture des réponses satisfaisantes .
Avez-vous lu Le Siège de Calais ? Vos yeux ont-ils eu autant de plaisir que vos oreilles ? Mme Denis vous dit des choses très tendres aussi bien qu'à la sœur du pot .
29è mars 1765. »
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03/07/2020
La reine a bu, dit-on , à sa santé, mais ne lui a point donné de quoi boire
... Chère Elisabeth the Second, vous êtes bien dure avec votre petit-fils américain, votre fils Charles the None est désormais obligé de renflouer les caisses de son fils indigne . Haro sur Harry , et ... Megan, of course!
« A Etienne-Noël Damilaville
27è mars 1765
Mon cher frère, je ne sais si vous avez reçu un petit paquet adressé par Lyon à M. Gaudet, avec une seconde enveloppe pour vous . Vous recevrez incessamment un petit ballot pour M. Delahaye 1, fermier général , qui est venu ici mettre sa femme entre les mains de M. Tronchin .
M. d'Argental doit avoir actuellement l’objet de l'inimitié d'Omer . Je ne crois pas qu'il prenne plus de deux ou trois exemplaires pour lui ; tout le reste est pour vous et vos amis . Vous avez dû trouver dans mes paquets fraternels des lettres pour M. de Chimène . En voici encore une que je dois à M. Blin de Sainmore . Voilà un compte fidèle ; parlons à présent d'affaires .
Le mémoire de Sirven que vous devez avoir reçu n'est point à la vérité signé de lui, mais il est écrit de sa main . Il n'y a qu'à renvoyer la dernière page qui est numérotée, je la lui ferai signer à Gex par-devant notaire . Nous verrons s'il y a lieu de demander l'attribution d'un nouveau tribunal . La sentence par contumace qui condamne toute la famille, a été confirmée par le parlement de Toulouse . Il est à présumer que si cette pauvre famille va purger la contumace à Toulouse, elle sera rouée , ou brûlée, ou pendue par provision, sauf à tâcher de les faire réhabiliter au bout de trois années . Je crois qu'il serait bon que vous eussiez la bonté de faire parvenir ma lettre sur les Calas et les Sirven, contresignée, à M. Rousseau, directeur du Journal encyclopédique à Bouillon . Ce Rousseau là n'est pas comme celui de la montagne . Faites-m'en parvenir aussi je vous en supplie, deux exemplaires .
Hélas ! Mon cher frère, ces petites grenades qu’on jette à la tête du monstre, le font reculer pour un moment, mais sa rage en augmente , et il revient sur nous avec plus de furie . Les honnêtes gens nous plaignent quand l'hydre nous attaque, mais ils ne nous défendent pas comme Hercule . Ils disent, pourquoi osaient-ils attaquer l’hydre ?
Je viens de lire Le Siège de Calais ; l'auteur est mon ami ; je suis bien aise du succès inouï de son ouvrage, c'est au temps à le confirmer .
Voici encore une petite lettre pour Mme Calas . Est-ce que je n'aurai pas le plaisir de la féliciter de la pension du roi ? Est-ce que la lettre des maîtres des requêtes aurait été inutile ? La reine a bu, dit-on , à sa santé, mais ne lui a point donné de quoi boire . Gémissons , mon cher ami, et en gémissant écrasons l'infâme . »
1 Ce nom n'apparait pas dans les registres de Tronchin .
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02/07/2020
Je le presserai de me répondre
... dit l'AP-HP à propos du "faux témoignage" de Didier Raoult : https://www.lefigaro.fr/sciences/covid-19-l-ap-hp-accuse-...
« A François de Chennevières, Premier commis
des bureaux de la Guerre etc.
à Versailles
27è mars 1765
J'ai envoyé, mon cher ami, à M. Tronchin votre mémoire . Je demeure à deux lieues de lui ; il est accablé de consultations qui toutes sont chèrement payées, et qui emportent tout son temps . Je le presserai de me répondre, et je vous enverrai son ordonnance, à moins que la personne qui le consulte et dont j'ignore le nom, ne lui ait donné une adresse ; et qu'il ne réponde en droiture ; car on perd une poste , et quelquefois deux lorsqu'il faut envoyer de Genève à Ferney, et de Ferney à Genève .
J'ai lu Le Siège de Calais et je me suis vivement intéressé au succès de l'auteur dont je suis l’ami .
Toute ma petite famille embrasse tendrement la vôtre .
V. »
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