28/09/2020
je préfère votre bonheur à mon plaisir
... En toute franchise, oserais-je toujours dire de même ? Non , s'il faut parler vrai . Ce serait tellement plus simple s'il n'y avait à faire ce choix , et qu'à coup sûr on soit comme on dit maintenant "gagnant-gagnant" . Ami Voltaire tu mets la barre assez haut .
« A Carlo Goldoni
A Genève, 29 Mai 1765.1
Je n’ai reçu, monsieur, le paquet et la lettre dont vous m’avez honoré que depuis deux jours, à mon retour des bains de Suisse, où j’avais été obligé d’aller pour ma très mauvaise santé et pour des fluxions sur les yeux, que je dois au voisinage des Alpes. Vous vous doutez bien que je fais tous mes efforts pour recouvrer la vue, quand j’ai vos ouvrages à lire. Je sens bien que je serai privé de la consolation de vous posséder dans ma retraite suisse ; mais je préfère votre bonheur à mon plaisir. Vous voilà attaché à une grande princesse 2 qui sentira tout votre mérite. Il est connu partout, mais il sera récompensé en France. Le théâtre aura fait votre réputation et vos mœurs aimables contribueront à faire votre fortune.
Comptez, monsieur, sur les sentiments qui m’attacheront à vous tant que je vivrai. Je sais trop combien votre personne est digne de vos ouvrages, pour ne pas vous aimer tendrement.
V.»
1 La lettre de Goldoni n'est pas connue .
2 Goldoni est nommé maître d'italien de madame Adélaïde et des autres filles de Louis XV.
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27/09/2020
j’avertis toujours qu'il est rare de guérir ses malades à cent lieues, et qu'une sœur de la charité fait plus de bien de près qu’Esculape de loin
... Les "Hirondelles" comme disait affectueusement le Dr Plauchu à l'Hôtel-Dieu à Lyon à propos de ces religieuses infirmières et aide-soignantes .
Voir : https://www.persee.fr/doc/adh_0066-2062_1994_num_1994_1_1...
« A Etienne-Noël Damilaville
28è mai 1765
M. Tronchin a le paquet de mon frère, et on lui fera parvenir la réponse dès qu’on l’aura reçue. Mais j’avertis toujours qu'il est rare de guérir ses malades à cent lieues, et qu'une sœur de la charité fait plus de bien de près qu’Esculape de loin 1.
J’ai su qu’on avait encore envoyé un second paquet par M. Gaudet, et probablement ce paquet n’est point parvenu à sa destination . On écrivit 2 depuis une lettre instructive sur l’état des choses, et on se servit de la même voie. Cette lettre partit le 21 ou le 22 du mois. Il serait très triste qu’on l’eût ouverte. On a écrit le 27, par M. Héron, premier commis des bureaux du Conseil, et la lettre a été mise à la poste de Lyon 3.
Je pense qu’il est nécessaire que vous m’écriviez à Genève une lettre signée de vous. Vous y direz que vos occupations vous permettent peu de vous occuper de littérature. Que vous faites, à la vérité, venir quelquefois des livres de Hollande pour un de vos amis, et que vous avez à peine le temps d’y jeter un coup d’œil. Vous pourrez me dire que vous avez parcouru la Philosophie de l’Histoire, et que vous être bien étonné qu’on m’attribue un livre rempli de citations chaldéennes, syriaques, et égyptiennes. Vous pourrez me plaindre, d’ailleurs, d’être en butte à la calomnie depuis cinquante années . Vous me rassurerez en me disant combien le roi est équitable. Si ce canevas vous paraît raisonnable, vous le broderez . Puisqu’on est curieux, vous satisferez la curiosité.
Vous pourrez adresser vos autres lettres sous l’enveloppe de M. Camp, banquier à Lyon, comme je vous l’ai déjà mandé 4.
Je ne vous dis pas combien il est douloureux de recourir à ces expédients. Nous voilà comme un amant et une maîtresse dont les lettres sont interceptées par les jaloux. Aimons-nous en davantage , et écr. l’inf. »
1 V* , tout anticlérical qu'il est, sait reconnaître la valeur des services des sœurs de la charité .
2 Lettre du 22 mai 1765 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/09/17/tout-est-cabale-a-la-cour-tout-est-quelquefois-passion-dans-6263910.html
3 Lettre du 27 mai 1765 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/09/25/la-lettre-est-a-son-adresse-et-je-suis-bien-sur-qu-elle-n-ar-6265806.html
4 Dans la lettre du 27 mai 1765 ci-dessus .
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26/09/2020
c'est le pays de Candide, c'est le pays des gros moutons rouges
... Où voulez-vous que ce soit ? En Chine bien sûr !
« A Etienne-Noël Damilaville
A Rolle, pays de Vaud,
près de Genève, 28è mai 1765
J'achevais, mon cher ami, de prendre les eaux en Suisse, où j'ai encore acheté un petit domaine, lorsque je reçus votre paquet pour M. Tronchin . Je le lui envoyai sur-le-champ ; je vous en donnai avis par un petit billet écrit à la hâte, et que j'ai mis dans une lettre à M. d'Argental . Je vois que votre mal de gorge est opiniâtre . Je vous répéterai ici que les grands médecins ne guérissent pas de loin, et qu'ils ont bien de la peine à guérir de près . En vérité les maladies ne se traitent guère par lettres . Dès que j'aurai la réponse de l'oracle de Genève je vous la ferai parvenir .
Sirven prend le parti d'aller lui-même à Toulouse chercher l'arrêt et les pièces dont M. de Beaumont a besoin pour consommer son entreprise généreuse . Il dit qu'il fera agir ses amis et qu'il saura se mettre à l'abri de tout . Ce pauvre homme et sa famille me fendent le cœur . Ils sont beaucoup plus malheureux que ne le sont aujourd'hui les Calas . Qu'il est beau, mon ami, de faire du bien, et que M. de Beaumont va augmenter sa gloire ! Pour moi, je n'ai à augmenter que ma patience . Je paie un peu chèrement l'intérêt de ma petite réputation ; car Dieu merci, il n'y a presque pas de mois qu'on ne fasse courir quelque ouvrage sous mon nom . Vers et prose, on m'attribue tout . Quelque libraire de Hollande a-t-il l'impertinence de m'attribuer un mauvais livre, aussitôt je reçois vingt lettres de Paris et de Versailles, et on veut que j'envoie sur-le-champ ce bel ouvrage que je ne connais pas . Enfin, on va jusqu'à m'imputer je ne sais quelle Philosophie de l'histoire , ouvrage de quelque rabbin, ou tout au moins d'un savant en us et en es . On parle au roi, et on lui dit que je suis très savant dans les langues orientales . J'ai beau protester que je ne sais pas un mot de l’ancien chaldéen, on ne m'en croit pas sur parole ; et si je suis aveugle, on dit que j'ai perdu les yeux à déchiffrer les livres des anciens brahmanes, et même que je suis prêt à faire une secte de Guèbres 1. Il faut me résoudre à être vexé jusqu'au dernier moment .
Mandez-moi, je vous prie, si M. d’Alembert a la pension de M. Clairault . Je verrai Cramer quand je serai à Genève . Je ne sais si c'est lui qui a imprimé le petit ouvrage en faveur de M. l'abbé Arnaud 2. Cet écrit m'a paru un chef-d’œuvre en son genre ; mais j'ai pensé qu'il ne devait réussir qu'à Paris auprès de ceux qui prennent intérêt à ces disputes littéraires . Puisque la paix est faite, Cramer en sera pour ses frais, aussi bien que pour ceux de la nouvelle édition qu'il a faite de Corneille, et qu'il n'aura pas la permission de débiter dans Paris, à cause du privilège des libraires .
Je vous sais toujours de bon gré de cultiver les lettres au milieu de vos occupations de finance . On dit dans les pays étrangers que les finances du royaume vont fort bien ; mais on n'en dit pas autant de votre littérature .
Il a couru des bruits fort ridicules sur M. le duc de Choiseul 3; je crois qu'il s'en moque ; il sait bien qu'il faut laisser parler, non ponebat enim rumores ante salutem 4.
Je fais toujours des vœux pour le succès de sa colonie , car enfin c'est le pays de Candide, c'est le pays des gros moutons rouges ; et je passerai pour un hâbleur si la colonie ne réussit pas . Il y a d'ailleurs quelques-uns de mes bons amis les Suisses qui sont partis pour la Cayenne, c'est encore un nouveau motif pour moi de m'y intéresser .
Adieu , mon cher ami, je suis trop bavard pour un malade . »
1 Y a-t-il ici une première amorce de l'idée qui aboutira à la composition des Guèbres en 1769 ?
2 Voir la lettre du 2 avril 1765 à Cramer : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/07/13/nous-ne-laisserons-pas-d-etre-assez-embarrasses-cet-ete-fern-6251377.html
Voir aussi une lettre de Choiseul à Montpéroux du 9 mai 1765 : « J'ai déjà prescrit à M. le lieutenant général de la police de faire arrêter un ballot de ces brochures qui doit avoir été expédié pour Paris, et je souhaiterais fort que vous reçussiez ma lettre assez à temps pour faire supprimer le reste des exemplaires qui n’auraient peut-être pas encore été débités dans Genève ... » ; réponse de Montpéroux le 27 mai 1765 : « Les Observations, etc., ont été effectivement imprimées chez le sieur Cramer où on n'a trouvé que six exemplaires qui ont été saisis[...] . On n'a pas trouvé le manuscrit . Je n'ai pu jeter sur cet ouvrage qu'un coup d’œil, mais je n'y ai pas reconnu le style de M. de Voltaire . »
3 Voir lettre du 20 mai 1765 à T. Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/09/12/mon-cher-esculape-vous-etes-entoure-de-vos-devots-et-devotes-6262977.html
4 Il ne mettait pas les rumeurs avant le souci de son salut ; Ennius, Annales, XII, ii, 371 .
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25/09/2020
la lettre est à son adresse, et je suis bien sûr qu'elle n’arrivera pas sans avoir été ouverte
... Sur papier ou sur le Net, même sort pour tout ce qui est écrit . Big brother et dirty hacker , même but .
« A Etienne-Noël Damilaville
27è mai 1765 à Genève 1
J'ai écrit à mon cher frère aujourd'hui, la lettre est à son adresse, et je suis bien sûr qu'elle n’arrivera pas sans avoir été ouverte . Il y a dans le paquet une lettre à M. d'Alembert pour les curieux, mais je suis très en peine de savoir si un petit paquet de Hollande adressé il y a quinze jours à M. Gaudet est arrivé à bon port, et si une lettre sous l'enveloppe dudit M. Gaudet, dans laquelle on s'expliquait avec confiance, a été reçue . J'attends, non sans inquiétude, que mon frère m'éclaircisse de tout cela, et qu'il m'écrive par la voie de Lyon . Je l'embrasse avec la plus grande tendresse . Écr l'inf .
J'adresse ce billet à M. Héron . »
1 Le post scriptum est pris de la copie de Darmstadt .
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24/09/2020
je dois rester dans ce trou ou aller dans un autre, parce que tous les trous sont égaux pour un homme qui pense. Celui qu’on habite pour quelques minutes est si voisin de celui qu’on habitera pour toujours, que ce n’est pas la peine de se gêner
... N'y voyez aucune allusion grivoise, bande de malotrous ! Pensez sans vous méprendre !
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
27 mai 1765 1
Il y a au fond de la Suisse, mes chers anges, des eaux assez bonnes pour les vieillards cacochymes qui ont besoin de mettre du baume et de la tranquillité dans leur sang. Je crois que je vais prendre ces eaux 2, et que je pars incessamment pour avoir de ce baume : car il faut mourir à son aise. Il me semble que c’est une ordonnance du médecin que je suppose être dans la demi-feuille dont Mme de Florian m’a parlé ; il n’y a qu’une chose dont je suis un peu en doute, c’est si cette demi-feuille ou demi-page parle de maladies mortelles. Vous sentez combien il est triste que les consultations d’un pauvre malade soient exposées aux regards de ceux qui ne sont pas de la Faculté, et qu’il est très-bon de changer d’air. Je soupçonne qu’on a joué le même tour à frère Damilaville, qui a grand mal à la gorge, et qui a besoin de régime. Je lui conseille, pour son mal, de prendre, comme moi, de la racine de patience .
Je me trompe peut-être, mais j’imagine qu’on peut, avec quelque sûreté, écrire pour ses affaires sous l’enveloppe de M. de Chauvelin l’intendant, en faisant partir le paquet de Lyon, le dessus écrit d’une main étrangère, et la lettre cachetée d’une tête 3.
Je présume encore que vous pouvez avoir la bonté de m’écrire à Lyon, sous le couvert de M. Camp, banquier, contre-signé Chauvelin. Je ne crois pas non plus compromettre l’intérêt que vous voulez bien prendre à ma situation violente, en insérant ici un petit mot pour frère Damila 4, que je vous supplie de lui faire rendre. Je dois un petit mot à Lekain . Agréez-vous que je le mette aussi dans ce paquet ?5
Dès qu’il partira quelqu’un pour Paris, je ne manquerai pas de le charger de quelques Bazin de Hollande arrivés depuis peu. Je ne sais plus comment le monde est fait. L’ouvrage de feu l’abbé me paraît rempli du plus profond respect pour la religion. Les jansénistes sont comme les provinciaux, ils croient toujours qu’on veut se moquer d’eux ; ou plutôt ils ressemblent aux tyrans, qui supposent continuellement des conspirations contre leur pouvoir. Mes chers et divins anges, j’ai défriché un coin de terre sauvage, je l’ai embelli, j’ai rendu ses grossiers habitants assez heureux ; je quitterai tout le fruit de mes peines comme on sort d’une hôtellerie, sitôt que je pourrai vivre dans cet asile sans inquiétude. Mandez-moi, je vous prie, si je dois rester dans ce trou ou aller dans un autre, parce que tous les trous sont égaux pour un homme qui pense. Celui qu’on habite pour quelques minutes est si voisin de celui qu’on habitera pour toujours, que ce n’est pas la peine de se gêner.
Toute ma famille rassemblée baise très-humblement les ailes de mes anges. Le patriarche pourrait bien aller de Sichem en Égypte, quoiqu’il n’ait point de femme à présenter à des pharaons. »
1 A la suite de la copie Beaumarchais on a placé cette lettre au 29, le second chiffre étant peu lisible . Le 27 rendu presque illisible par les surcharges de Wagnière est plus vraisemblable car la lettre est antérieure au voyage à Rolle . V* y était le 28, mais plus le 29 .
2 V* se rendit à Genève le 21 ou le 22 ; de retour à Ferney le 25 et de nouveau à Genève le 27 et le 29 . entretemps il séjourna à Rolle, moins pour prendre les eaux que pour poster quelques lettres .
3 L'un des cachets de V* porte une tête de Socrate .
4 Lettre du même jour à Damilaville / : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1765/Lettre_6030
5 Lettre du même jour à Lekain :
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23/09/2020
nous avons pensé dans notre petit coin des Alpes comme tous les honnêtes gens de Paris
... Statistiquement, il est vrai qu'on peut trouver quelques Parisiens honnêtes gens , sans plus .
« A Henri-Louis Lekain
[27 mai 1765] 1
Mon cher Roscius vous ne doutez pas du vif intérêt que j'ai pris à votre aventure . Vous savez combien j'aime les grands talents et combien je vous aime . J'imagine que vos communs intérêts vous ont uni avec Mlle Clairon . Si vous la voyez, dites-lui je vous prie que nous avons pensé dans notre petit coin des Alpes comme tous les honnêtes gens de Paris .
Je suis trop malade et trop dérouté 2 pour faire actuellement ce que vous me proposez . Je vous demande en grâce d'attendre . Vous avez un grand intérêt à ne vous pas presser . Les circonstances ne sont point du tout favorables . Attention mon cher ami, je vous en conjure instamment . »
1 La présente lettre est sans doute celle dont il est question dans la lettre du même jour à d'Argental, d'où la date proposée .
2 Au sens premier , comme les chiens de chasse qui s'écartent de la bonne trace ; Ici, V* n'a pas le cœur à faire une tragédie .
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22/09/2020
Voilà le funeste effet du système de l’intolérance
... Les assassins d'il y a cinq ans contre les journalistes de Charlie Hebdo et autres victimes sont bien les fruits véreux d'une intolérance (pseudo) religieuse inacceptable .
Les comparer à des animaux dits cruels serait désobligeant pour ces pauvres bêtes qui n'ont que leurs dents et griffes pour survivre .
« A Etienne-Noël Damilaville
27è mai 1765 à Genève
J’affligerai votre belle âme en vous disant, mon cher ami, que nous ne pourrons pas avoir sitôt l’arrêt de Toulouse. Je supplie, en attendant, le défenseur de l’innocence de tenir toujours son mémoire tout prêt. Il y a trois ans que cette famille est dans les larmes. On a essuyé celles des Calas, c’est à présent le tour des Sirven. Ces horreurs sont d’autant plus effrayantes qu’elles se passent dans un siècle plus éclairé. C’est un affreux contraste avec la douceur de nos mœurs. Voilà le funeste effet du système de l’intolérance. Il y a encore de la barbarie dans les provinces. Je ne plains plus les Calas, après le jugement des maîtres des requêtes, et après les bienfaits du roi ; mais les Sirven sont bien à plaindre. Je les recommande plus que jamais aux bontés de M. de Beaumont.
Après vous avoir parlé des malheurs d’autrui, il faut que votre amitié me permette encore de parler de mes peines.
Je lisais ce matin un livre anglais dans lequel se trouve la substance de plus de vingt chapitres du Dictionnaire philosophique, que l’ignorance et la calomnie m’ont si grossièrement imputé ; et, pour comble de bêtise, il y a dans d’autres chapitres des phrases entières prises de moi mot pour mot. Je me mettrais dans une belle colère, si l’âge et les maladies n’affaiblissaient les passions. Tronchin m’exhorte à la résignation pour les maux du corps et de l’âme ; il me trouve très bien disposé. Comptez que votre amitié fait ma plus chère consolation.
Voltaire. »
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