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27/03/2019

Si avec cela vous avez de la santé, il ne vous manque rien

... Portez-vous bien mesdames, et faites des enfants dont nous soyons les pères !

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Retenez bien l'adresse , on va embaucher d'ici peu à la maternité de Portland

 

 

« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay

[Madame de La Live d'Epinay / place Vendôme / à Paris ]

2è mars 1764 à Ferney

En vous remerciant, madame, de la bonté que vous avez d’informer des gens de l’autre monde du bel établissement que vous faites dans celui-ci 1. Vous serez toujours ma belle philosophe, quand même vous m’auriez oublié. Je me mets aux pieds de madame votre fille, à condition qu’elle sera philosophe aussi.

Savez-vous bien que je suis quelquefois en commerce de lettres avec monsieur votre fils ? Mais je lui demande pardon de n’avoir pas répondu à sa dernière lettre, j’étais extrêmement malade. Je ne sors presque plus du coin de mon feu, tout s’affaiblit chez moi, hors mon respectueux attachement pour vous. La tranquillité dont je jouis est la seule chose qui me fasse vivre. Je crois, madame, que vous avez mieux que de la tranquillité ; vous devez jouir de tout le bonheur que vous méritez ; vous faites celui de vos amis, il faut bien qu’il vous en revienne quelque chose. Si avec cela vous avez de la santé, il ne vous manque rien. Pardonnez-moi, s’il vous plaît, de ne vous pas écrire de ma main ; je deviens un peu aveugle ; mais on dit que quand il n’y aura plus de neige sur nos montagnes, j’aurai la vue du monde la plus nette. Je ne veux pas vous excéder par une longue lettre ; vous êtes peut-être occupée actuellement à coiffer la mariée. Je présente mes très humbles respects à la mère et à la fille.

V. »

1 Mme d'Epinay marie sa fille Angélique-Louise-Charlotte au vicomte Dominique de Belsunce le 10 mars 1764, âgée d'un peu plus de quatorze ans : https://gw.geneanet.org/favrejhas?lang=fr&n=lalive+d+epinay&oc=0&p=angelique+louise+charlotte+pauline

On pourrait déposer les volumes entre les mains de quelque homme intelligent et fidèle , qui moyennant un profit honnête, se chargerait de la vente

... Le problème est bien de trouver cet homme "intelligent et fidèle" qui se contenterait d'un "profit honnête" . L'actualité judiciaire montre que l'honnêteté en affaires, surtout chez les intermédiaires, est denrée rare et l'association Anticor [anticorruption] ne manque pas de grain à moudre .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ArgentaI

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

[vers le 1ermars 1764] 1

Mes anges, protecteurs des deux Pierre, sont priés humblement de considérer,

Que le roi ayant souscrit pour deux cents exemplaires, M. de Laborde ayant favorisé cette entreprise avec toute la générosité possible, et ayant payé d'avance la moitié de la souscription de Sa Majesté, il demande aujourd'hui la délivrance de ces deux cents exemplaires, après nous avoir flatté que le roi n'en prendrait qu'une douzaine .

Il est certain que le roi n'a que faire de ces deux mille quatre cents volumes, qui composent les deux cents exemplaires souscrits par Sa Majesté .

Si le roi en prend 50 c'est beaucoup . Ne pourrait-on pas engager le roi ou ses ayants cause à faire présent de ces 150 exemplaires restants à Pierre Corneille du Pont-Marie 2? Cela pourrait composer une somme de trois cents louis d'or pour ledit Pierre ; mais pour lui procurer cet avantage il ne faudrait pas baisser le prix . On pourrait déposer les volumes entre les mains de quelque homme intelligent et fidèle , qui moyennant un profit honnête, se chargerait de la vente . On pourrait même du produit faire une petite rente sur la tête de M. Pierre et de sa femme . Je soumets ma proposition aux lumières et aux bontés de mes anges, et je leur demande bien pardon de ne leur envoyer aujourd'hui que trois mémoires.

N.B. – Les exemplaires sont en chemin . »

1 Manuscrit original intitulé par Wagnière « Mémoire pour Pierre Corneille du Pont-Marie, au sujet de Pierre Corneille auteur de Cinna » . Le 14 mars 1764 (voir lettre à Damilaville ) , V* exprime sa satisfaction que sa suggestion soit approuvée par les d'Argental : d'où la date proposée ici, cette lettre ayant été toujours datée de décembre 1764 dans les éditions .Voir page 537 : https://books.google.fr/books?id=rZ5fAAAAcAAJ&pg=PA537&lpg=PA537&dq=pierre+corneille+du+pont-marie&source=bl&ots=UHVaAC_jkF&sig=ACfU3U13rUJQEbjgK3SOq8ocPx6xzbYOsA&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiN1sCE8KHhAhUyA2MBHW7cCXgQ6AEwDHoECAgQAQ#v=onepage&q=pierre%20corneille%20du%20pont-marie&f=false

2 Le père de Marie-Françoise ; à propos de cette famille, voir : https://www.persee.fr/doc/annor_0003-4134_1984_num_34_2_5554#annor_0003-4134_1984_num_34_2_T1_0151_0000

 

26/03/2019

Pourriez-vous avoir la bonté de vous informer, sans déplaire à personne, et sans faire rougir personne

... mesdames et messieurs les journalistes -de télévision et de radio en particulier- avant de donner la parole à des fauteurs de trouble , chefs de file autoproclamés des Gilets jaunes , destructeurs dans l'âme ?

Je partage tout à fait , à ce propos, les sentiments de Michel Cymes :

https://www.lepoint.fr/people/michel-cymes-se-paye-les-gi...

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« A Charles-Manoël de Végobre, Avocat

à Genève

Je vous supplie, monsieur, de vouloir bien m'envoyer ce pauvre Sirven dimanche .

Pourriez-vous avoir la bonté de vous informer, sans déplaire à personne, et sans faire rougir personne, si Paul Achard 1, natif de Châtillon, au département de Grenoble, lequel ( par parenthèse) est aux galères depuis l'année 1745, est parent de M. Achard, citoyen de Genève ? Personne n’est plus à portée que vous, monsieur, de vous faire instruire sur ce que j'ai l'honneur de vous demander . Mille tendres respects .

V.

A Ferney 1er mars [1764] 2. »

1 Voir « Les deux deniers galériens protestants, 1775 » de Charles L. Frossard, dans le Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, 1852 . En fait cet Achard ne semble pas avoir été apparenté avec les Achard de Genève .

2 L'édition Desnoiresterres est incomplète et mal datée . La date est complète et endossée sur le manuscrit .

25/03/2019

nous prenons donc à présent nos tragédies chez les Anglais . Quand prendrons-nous ce qu’ils ont de bon ?

... Mais la première question est de se demander s'il y a vraiment quelque chose de bon chez ces britanniques qui après avoir voté pour le Brexit, ne savent plus comment faire pour retarder l'échéance et pour bon nombre voudraient réintégrer l'Europe .

https://www.liberation.fr/planete/2019/03/24/may-ne-sait-...

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« A Etienne-Noël Damilaville

1er mars 1764

Mon cher frère, avez-vous reçu un petit mot de lettre pour M. d'Alembert ? En voici encore un autre . Je tremble toujours que mes paquets ne vous parviennent pas, attendu le nombre de curieux . Cependant, je me flatte d'avoir reçu tous les vôtres .

J'ai lu Blanche 1, nous prenons donc à présent nos tragédies chez les Anglais . Quand prendrons-nous ce qu’ils ont de bon ?

Il y a un petit volume du doux Caveyrac 2, intitulé, Il est temps de parler 3. On ne devrait pas avoir le temps de le lire, mais je suis curieux . J'ai à peu près tout ce qui s'est fait pour et contre les jésuites . Envoyez-moi, je vous prie, le doux Caveyrac .

Savez-vous de qui est la critique judicieuse qu'on a faite dans le Journal encyclopédique de l'insolent ouvrage du lourd Crevier ? »

2 Voir : https://data.bnf.fr/fr/12089922/jean_novi_de_caveirac/

Novi de Caveyrac figure en bonne place parmi les mauvais sur le tableau intitulé Le triomphe de Voltaire au château de Ferney-Voltaire .

24/03/2019

si j’avais des citoyens à persuader de la nécessité des lois, je leur ferais voir qu’il y en a partout, même au jeu qui est un commerce de fripon, même chez les voleurs : Hanno lor legg'i malandrini ancora

... et ce cas particulier des casseurs/ black blocs n'y échappe pas, évidemment . C'est clair , comme on dit chez mes voisins suisses .

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

1 de mars [1764] 1

Je dois vous dire, mon très cher philosophe, que si j’avais des citoyens à persuader de la nécessité des lois, je leur ferais voir qu’il y en a partout, même au jeu qui est un commerce de fripon, même chez les voleurs :

Hanno lor legg'i malandrini ancora 2

C’est ainsi que le bon prêtre, auteur de la Tolérance, a dit aux Velches , nommés Francs et Français 3 : Mes amis, soyez tolérants , car César, qui vous donna sur les oreilles et qui fit pendre tout votre parlement de Bretagne, était tolérant. Les Anglais, qui vous ont toujours battus, reconnaissent depuis cent ans la nécessité de la tolérance. Vous prétendez que votre religion doit être cruelle autant qu’absurde, parce qu’elle est fondée, je ne sais comment, sur la religion du petit peuple juif, le plus absurde et le plus barbare de tous les peuples ; mais je vous prouve, mes chers Velches, que tout abominable qu’était ce peuple, tout atroce, tout sot qu’il était, il a cependant donné cent exemples de la tolérance la plus grande. Or, si les tigres et les loups de la Palestine se sont adoucis quelquefois, je propose aux singes, mes compatriotes, de ne pas toujours mordre, et de se contenter de danser.

Voilà, mon cher philosophe, tout le système 4 de ce bon prêtre. Il voulait dans son texte inspirer de l’indulgence, et rendre dans ses notes les Juifs exécrables. Il voulait forcer ses lecteurs à respecter l’humanité, et à détester le fanatisme. Six personnes des plus considérables  de votre royaume ont approuvé ces maximes, et c’est beaucoup.

On n’aurait pas, il y a soixante ans, trouvé un seul homme d’État, à commencer par le chancelier d’Aguesseau, qui n’eût fait brûler le livre et l’auteur. Aujourd’hui on est très disposé à permettre que ce livre perce dans le public avec quelque discrétion, et je voudrais que frère Damilaville vous en fit avoir une demi-douzaine d’exemplaires, que vous donneriez à d’honnêtes gens qui les feraient lire à d’autres gens honnêtes 5; ces sages missionnaires disposeraient les esprits, et la vigne du Seigneur serait cultivée.

Je sais bien, mon cher maître, qu’on pouvait s’y prendre d’une autre façon pour prêcher la tolérance : eh bien ! que ne le faites-vous ? qui peut mieux que vous faire entendre raison aux hommes ? qui les connaît mieux que vous ? qui écrit comme vous d’un style mâle et nerveux ? qui sait mieux orner la raison ? Mais venons au fait. Cette tolérance est une affaire d’État, et il est certain que ceux qui sont à la tête du royaume sont plus tolérants qu’on ne l’a jamais été ; il s’élève une génération nouvelle qui a le fanatisme en horreur. Les premières places seront un jour occupées par des philosophes ; le règne de la raison se prépare ; il ne tient qu’à vous d’avancer ces beaux jours, et de faire mûrir les fruits des arbres que vous avez plantés.

Confondez donc ce maraud de Crevier ; fessez cet âne qui brait et qui rue.

Vraiment je sais très bien à quoi m’en tenir depuis longtemps sur la personne dont vous me parlez 6 ; mais entre quinze-vingts, il faut se pardonner bien des choses. Vous avez-vous-même à lui pardonner plus que moi ; vous savez d’ailleurs que dans la société on dit du bien et du mal du même individu vingt fois par jour. Pourvu que la vigne du Seigneur aille bien, je suis indulgent pour les pécheurs et les pécheresses. Je ne connais rien de sérieux que la culture de la vigne ; je vous la recommande : provignez, mon cher philosophe, provignez.

Je suis bien aise que les contes de feu Guillaume Vadé vous amusent. Mademoiselle Catherine Vadé, sa cousine en a beaucoup de cette espèce ; mais elle n’ose les donner au public 7. Son cousin Vadé les faisait pour amuser sa famille pendant l’hiver au coin du feu ; mais le public est plus difficile que sa famille. Elle craint beaucoup que quelque libraire ne s’empare de ce précieux dépôt, comparable au chapitre des torche-culs de Gargantua 8. Ce sont de petits amusements qu’il faut permettre aux sages : on ne peut pas toujours lire les Pères de l’Église, il faut se délasser . Riez, mon cher philosophe, et instruisez les hommes. Conservez-moi votre amitié. Ecr. l’inf. »

1 V* répond à une lettre du 22 février 1764 dans laquelle d'Alembert lui livre ses réflexions sur le fanatisme et l'intolérance, et lui apprend qu'il vient de « faire entrer dans l'académie de Berlin Helvétius et le chevalier de Jaucourt » ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/01/correspondance-avec-d-alembert-partie-30.html

2 Même les brigands ont encore leurs lois , d'après La Mérope de Maffei, ac. IV, 3 : https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9rope_(Scipione_Maffei)

4 Mot remplacé par mystère dans les éditions modernes .

5 Ces neuf mots manquent dans les éditions modernes .

6 D'Alembert sans citer de nom a fait allusion aux critiques de certaines personnes à qui V* adresse « prose et vers » à l'égard de ses contes . V* comprend, et sans doute ne se trompe pas en pensant à Mme du Deffand .

7 Il serait intéressant de savoir ce que sont ces contes ; on peut songer au Pot Pourri et peut-être à des ébauches des Lettres d'Amabad, voire à La Princesse de Babylone . On se souviendra aussi des contes plus anciens, et qui ne parurent que posthumes, tels Cosi-Sancta et les charmant Crocheteur borgne .

23/03/2019

On rédige actuellement le contrat

... entre le gouvernement et l'armée qui doit définir l'attitude de celle-ci face aux Gilets jaunes et consorts . A ce propos, Mélenchon donne sa version, sans énervement inutile pour une fois, et fait appel enfin au bon sens des protagonistes : https://www.youtube.com/watch?v=nSO7jAqKGRE

Nous saurons ce soir s'il a été exaucé .

 

 

« A Gabriel Cramer

[février-mars 1764]

M. de Voltaire désire instamment de savoir ces nouvelles de la santé de monsieur Cramer . On rédige actuellement le contrat de Mlle Dupuits 1, par conséquent on a un besoin extrême du petit mot que M. de Voltaire a demandé à monsieur Cramer à qui on fait les plus tendres compliments . »

22/03/2019

je ne croyais pas qu'il l'eût si grosse

... La tête, bien sûr ! what else ?

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Selon moi : non ! on a la grosse tête avant de prendre le pouvoir, et celui-ci ne fait que permettre de gonfler l'ego .

 

 

« A Gabriel Cramer

[février-mars 1764]

Je savais bien que mon cher Caro avait une bonne tête, mais je ne croyais pas qu'il l'eût si grosse . Je me flatte que le beau temps dissipera sa fluxion . Je le remercie de toutes ses peines . Je trouve qu'il a raison en tout, et on suivra entièrement ses idées . »

 

 

« A Gabriel Cramer

Nous ne pûmes pas aller hier à Tournay voir la joue et le pied enflés . Nous espérons y aller aujourd'hui . Nous envoyons savoir comment se portent les deux malades . J'ai bien des choses à dire à monsieur Caro . 

Lundi [février-mars 1764]1

 

 

« A Gabriel Cramer

[février-mars 1764]

Comment va votre face, mon cher Caro ?

Je vous envoie les premières feuilles de cet insipide ouvrage que vous voulez imprimer à toute force .

Je crois que nos allons marier Paté 2. Corneille sera sa dot . Qui l'eût cru !... dans le pays de Gex !

Envoyez-moi je vous prie un pauvre Voltaire complet en feuilles . Si vous voulez le faire déposer chez Souchay je vous serai très obligé .

Combien pouvez-vous donner pour la dot ? Dites-le moi tout naturellement . Je vous embrasse de tout mon cœur . »

1 Datée non sans incertitude d’après la maladie de Cramer ; il est en effet curieux que Cramer soit allé en hiver à Tournay avec une fluxion .

2 Il s'agit de la sœur de Dupuits ( époux de Mlle Corneille ), Marie-Jeanne Dupuits dont le contrat fut signé le 21 mars 1764 pour épouser Pajot de Vaux ; voir : https://gw.geneanet.org/wikifrat?lang=en&pz=honore+gabriel&nz=de+riqueti+de+mirabeau&p=claude+ignace&n=de+pajot+de+vaux+de+gevingey