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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Cette loi, qui est de 1627, me paraît fort sage : c'est ce qui fait qu'elle n'est point exécutée

... Changeons la date, et nous saurons le devenir de la loi sur le travail , au rythme où vont se développer les grèves , qui , c'est bien connu, sont pour certains syndicalistes un travail à plein temps . Pauvre France !

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« A Etienne-Noël Damilaville

Le 19 juin [1761]

En voyant la mine de ce pauvre abbé du Resnel 1, je n'ai pu m'empêcher de dire :

Quoiqu'il eût cette mine, il fit pourtant des vers ;

Il fut prêtre, mais philosophe ;

Philosophe pour lui, se cachant des pervers .

Que n'ai-je été de cette étoffe !

Frère Thieriot n'aura pas autre chose de moi . Il n'y a pas moyen de faire une inscription à moins qu'elle ne soit un peu piquante, et je ne trouve rien de piquant à dire sur l'abbé du Resnel . C'était un homme aimable dans la société ; je le regrette de tout mon cœur, je le suivrai bientôt, et puis c'est tout .

J'ai pris la liberté d'envoyer sous votre enveloppe, une lettre pour M. Héron 2, dans laquelle je lui demande une grâce qui m'est très nécessaire : c'est de vouloir bien me faire parvenir une ordonnance du roi qui défend aux archevêques et aux évêques de prendre des curés pour leurs promoteurs ou officiaux . Cette loi, qui est de 1627, me paraît fort sage : c'est ce qui fait qu'elle n'est point exécutée . Comme j'aime un peu le remue-ménage , j'ai envie de faire quelques niches aux prêtres de mon canton . Rien n'est plus amusant dans la vieillesse .

Je me recommande à tous les frères, en corps et en âme . »

1 Le 9 juin 1761 Thieriot annonçait à V* : « Mme Dupin […] m'a remis deux copies du portrait [par Carmontelle] de l'abbé du Resnel […] qui vous sont destinées, l'une pour vous être envoyée sur-le-champ et qu'on sacrifie à être fripée et gâtée, l'autre que je garde pour vous la transmettre proprement à la première occasion qui se présentera, [elles] vous font assez connaître le désir que l'on a que vous rendiez à la mémoire du défunt abbé [il était mort le 25 février] qui était votre client et votre protégé , le même honneur que vous avez fait à la mémoire de plusieurs autres […] Le portrait de l'abbé du Resnel ne ressemble-t-il pas si fort qu'il en fait rire ? » Voir : http://art.rmngp.fr/fr/library/artworks/jean-francois-du-resnel-du-bellay-l1692-1761-en-1761_eau-forte

Et voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Fran%C3%A7ois_Du_Resnel_du_Bellay

et : http://dictionnaire-journalistes.gazettes18e.fr/journaliste/248-jean-francois-du-bellay-du-resnel

et : http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/jean-francois-du-bellay-du-resnel

2 Héron est le destinataire de la lettre du 23 juin 1761 à Thieriot ; cette dernière lettre à lui adressée ne nous est pas parvenue .Voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/06/23/quand-on-vexe-un-pauvre-auteur-les-dix-neuf-vingtiemes-du-mo.html

 

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16/05/2016 | Lien permanent

Ma philosophie ne fait guère de différence entre une cabane et un palais ; mais j'ai une Parisienne avec moi qui n'est

 

 

Je reviens à l'instant d'une représentation théâtrale de Nanine ou Le Préjugé vaincu, comédie de Voltaire, sise ce jour et demain soir au théâtre du Châtelard à Ferney-Voltaire .

 

Moment très agréable, et par le texte, et par le jeu des acteurs, qui en fait sont cinq actrices , qui jouent tous les rôles, masculins y compris ( messieurs, l'appel est lancé, on manque d'acteurs mâles ).

 

Mise en scène moderne, très enlevée, sur ce que l'on peut appeler de nos jours un scénario sans surprises . Très bonne idée que celle des parties chantées (plutôt bien) accompagnées au piano par le compositeur lui-même – Johann Chauveau-, qui donnent un petit coté comédie musicale . Une trentaine de lycéens/nes doués d'un naturel moqueur (c'est de leur âge) ont écouté ce texte. avec attention et appprécié .

nanine 17 11 2011 chatelard.jpg

http://www.fortheatre.fr/LethleChatelard.htm

http://www.theatrelechatelard.fr/Nanine.htm

 

Bilan : je recommande ce spectacle donné par la compagnie Anima motrix, metteur en scène Laurent Hatat .

 

Pour lire Nanine , voir  : http://www.monsieurdevoltaire.com/categorie-12426031.html

 

 

 

 

 

 

 

 

« A M. Élie Bertrand i

 

premier pasteur à Berne

 

 

 

A Prangins, 31 janvier [1755]

 

 

 

Vous êtes philosophe , monsieur, et vous m'inspirez une très grande confiance . Tout ce que vous me dites, dans la dernière page de votre lettre du 30 janvier, est très vrai et très désagréable pour tous les honnêtes gens .

 

Voici le cas où je me trouve . Mon goût et ma mauvaise santé me déterminent depuis très longtemps à finir ma vie sur les bords du lac de Lausanne ii. Le Conseil d’État de Genève a la bonté de m'offrir toutes les facilités qu'il peut me donner iii. On me propose la maison que le prince de Saxe-Gotha a occupée à la campagne . Les jardins sont dignes du voisinage de Paris, la maison assez jolie, très commode et toute meublée . Mais il se pourrait faire que le dernier article de votre lettre nuisit au marché . Il se peut faire encore qu'il y ait des difficultés pour m'en assurer la possession .

 

On me vend quatre-vingt-dix mille livres de France ce domaine qui est presque sans revenu . C'est un prix assez considérable pour que la possession m'en soit assurée . Ma philosophie ne fait guère de différence entre une cabane et un palais ; mais j'ai une Parisienne iv avec moi qui n'est pas si stoïcienne . On me parle de la belle maison de Hauteville, dans le voisinage de Vevai . On dit que M. d'Hervart pourrait s'en accommoder avec moi, et me passer un bail de neuf années . J'ignore si la maison est meublée . Vous pourriez tout savoir en un moment . M. d'Hervart serait-il d'humeur à la vendre, ou à en faire un marché pour neuf ans ? et pourrait-il dans l'un et l'autre cas, m'en assurer la pleine jouissance ? est-il vrai qu'il y a un inconvénient, c'est qu'on ne peut aborder à Hauteville en carrosse ? Voilà bien des questions ; j'abuse de vos bontés, mais vous me donnez tant de goût pour le pays Roman que vous me pardonnerez . La chose presse un peu ; un autre fois nous parlerons des montagnes v. Si vous étiez curieux de voir une petite dissertation que j'envoyai, il y a quelques années, en italien vi, à l'institut de Bologne, vous verriez que je dois avoir un peu d'amour-propre, car je pense en tout comme vous . Il semble que j'aie pris des leçons de vous et de M. Haller vii; je préfère l'histoire de la nature aux romans .

 

Je vous embrasse sans cérémonie. »


 

 

ii NDLR - A l'heure actuelle, il est très mal vu par les Suisses de tous cantons -excepté celui de Genève, bien sur-, de nommer le lac Léman : lac de Genève ; seul Voltaire osa parler de lac de Lausanne , au grand dam du reste de la Suisse , sans doute .

 

 

iv Marie-Louise Denis, sa nièce et compagne .

 

v Allusion à l'in -4° publié par Bertrand en 1754 : Essais sur les usages des montagnes .http://books.google.com/books?id=zw1bAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

V* n'admettait pas que la présence de fossiles de coquillages sur des crêtes montagneuses fut le signe que celles ci étaient recouvertes de mers autrefois ;

voir pages 583 et suivantes : http://books.google.fr/books?id=xzITAAAAQAAJ&pg=PA583&lpg=PA583&dq=fossiles+voltaire&source=bl&ots=lVX_xq4Dw6&sig=IUL--mmzF94_S4Dui6aZj2-DXrE&hl=fr&ei=DXvFTrq_OInItAay5YXrBg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=6&sqi=2&ved=0CFEQ6AEwBQ#v=onepage&q=fossiles%20voltaire&f=false

 

vi V* n'admettait pas que la présence de fossiles de coquillages sur des crêtes montagneuses fut le signe que celles ci étaient recouvertes de mers autrefois ; il l'écrivit dans la Lettre italienne :

voir pages 583 et suivantes : http://books.google.fr/books?id=xzITAAAAQAAJ&pg=PA583&lpg=PA583&dq=fossiles+voltaire&source=bl&ots=lVX_xq4Dw6&sig=IUL--mmzF94_S4Dui6aZj2-DXrE&hl=fr&ei=DXvFTrq_OInItAay5YXrBg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=6&sqi=2&ved=0CFEQ6AEwBQ#v=onepage&q=fossiles%20voltaire&f=false

 

 

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17/11/2011 | Lien permanent

On souhaite d’être ignoré, mais c’est quand il n’est plus temps. Dès que les trompettes de la renommée ont corné le nom

... C'est vrai éternellement, et le grand Georges Brassens nous le chante: https://www.youtube.com/watch?v=gWRzopyZBSA&ab_channe...

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« A Jean Capperonnier

1er Juin 1768 1

J’ai bientôt fait usage, monsieur, du livre de la Bibliothèque royale que vous avez eu la bonté de me prêter 2. Il a été d’un grand secours à un pauvre feu historiographe de France, tel que moi. Je voulais savoir si ce Montecuculo, que nous appelons mal à propos Montecuculli, accusé par des médecins ignorants d’avoir empoisonné le dauphin François, parce qu’il était chimiste, fut condamné par le Parlement ou par des commissaires ; ce que les historiens ne nous apprennent pas. Il se trouve qu’il fut condamné par le Conseil du roi. J’en suis fâché pour François Ier . La vérité est longtemps cachée ; il faut bien des peines pour la découvrir. Vous ne sauriez croire ce qu’il me coûte de soins pour la chercher à cent lieues dans le Siècle de Louis XIV et de Louis XV. Ce travail est rude. Il y a trois ans qu’il m’occupe et qu’il me tue, sans presque aucune diversion. Enfin il est fini. Jugez, monsieur, si je peux avoir eu le temps de faire toutes les maudites brochures qu’on débite continuellement sous mon nom. Je suis l’homme qui accoucha d’un œuf ; il en avait pondu cent avant la fin de la journée. Les nouvellistes de Paris ne sont pas si scrupuleux en fait d’historiettes que je le suis en fait d’histoire. Ils en débitent souvent sur mon compte, non seulement de très extraordinaires, mais de très dangereuses . C’est la destinée de quiconque a le malheur d’être un homme public. On souhaite d’être ignoré, mais c’est quand il n’est plus temps. Dès que les trompettes de la renommée ont corné le nom d’un pauvre homme, adieu son repos pour jamais.

J’ai l’honneur d’être avec la plus sensible reconnaissance pour toutes vos bontés,

monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Le destinataire n'est pas Jean-Augustin Capperonnier comme le pensait Beuchot, suivi par Moland, mais l'oncle de ce dernier, bibliothécaire de la Bibliothèque royale.

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21/01/2024 | Lien permanent

Il faudra voir de plus ... si un évêque étranger, sous prétexte qu’il n’est pas riche, peut contrevenir à ces lois

... Mgr Di Falco , - simplement "étranger" à la commune de St Etienne-le-Laus- , en toute modestie désire se faire inhumer dans sa cathédrale, se fait botter en touche par le conseil municipal, ce qui n'est que justice, conformément au règlement communal . Tout comme les élus , il veut péter plus haut que sa mitre , plus people que curé, ne pas être avec le commun des mortels , pour qui se prend-il ?

http://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes/hau...

 

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Il en est qui veulent inverser la donne .

 

 

« A Louis-Gaspard Fabry, Maire et

subdélégué

à Gex

17è juin 1761 à Ferney

Je vous réitère, monsieur, mes sincères remerciements. On voit évidemment que toute cette persécution odieuse n’est que la suite de l’aventure du curé Ancian. Si les interrogés ne m’ont point trompé, il n’y a que le nommé Brochu qui ait fait la déposition dont vous m’avez parlé, sans pourtant oser se servir du mot que le sieur Castin 1 allègue. Il est clair que ce Brochu, qui avait accompagné Ancian dans l’assassinat dont ils ont été accusés, n’est qu’un faux témoin complice du curé Ancian, et que son témoignage n’était pas même recevable par le sieur Castin. Tous les autres protestent et jurent qu’ils n’ont pas dit un mot de ce qu’on leur fait dire, et que s’ils avaient fait la déposition qu’on leur impute, ils seraient infiniment coupables 2 .

Je vous supplie, monsieur, de vouloir bien m’éclaircir de ce mystère d’iniquités. Le sieur Castin joue un rôle infâme, et celui qui le lui fait jouer est encore plus méprisable. Des gens qui se portent pour juges, et qui disent qu’ils écriront à M. de Saint-Florentin, ne sont que de malheureux délateurs que je couvrirai d’opprobre, et leurs lâches calomnies ne me font aucune peur. On sera assez instruit qu’ils cherchent à se venger, de la manière la plus lâche, de la protection que j’ai pu donner à de Croze, mais je n’ai rempli en cela que mon devoir, puisque de Croze est mon vassal ; nous verrons alors qui l’emportera d’un seigneur qui a vu son vassal blessé et le crâne entr’ouvert, qui a déposé de ce crime, et qui n’a à se reprocher que de dépenser douze mille francs pour rebâtir une jolie église, ou d’un curé accusé d’un assassinat et déjà convaincu de mille violences, qui fait agir secrètement ses confrères en sa faveur. Il faudra voir de plus, si en effet ses confrères sont en droit de faire les fonctions d’official et de promoteur, malgré les lois du royaume, et si un évêque étranger, sous prétexte qu’il n’est pas riche, peut contrevenir à ces lois. Il n’y a que votre esprit de conciliation, monsieur, qui puisse mettre ces messieurs à la raison. Je suis aussi touché de la noblesse de vos procédés, qu’indigné de la bassesse des leurs.

J’ai l’honneur d’être avec la plus tendre reconnaissance, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Voltaire .»

1 Anthelme Castin, curé de Gex, était official de la partie française du diocèse de Gex ; voir Dictionnaire du clergé séculier et régulier du diocèse de Genève-Annecy, I, de C.-M. Rebord et A. Gavard, 1920, page 148 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65438696/f158.item.r=anthelme%20castin

et voir aussi : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6543664f

 

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15/05/2016 | Lien permanent

Je vois bien que nous n’aurons pas la partie ecclésiastique

... se plaignent les intégristes de tous bords .

"Et on s'en passera volontiers " semble dire Bassirou Diomaye Faye, jeune président du Sénégal : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/05/13/au-sene...

Il sera bon qu'il ne soit pas comme le faux-cul grenouille de bénitier Poutine , orthodoxe qui fait tout de travers .

 

 

 

« A Gabriel-Henri Gaillard

Ferney 2è novembre 1768

Il est vrai, mon cher et illustre ami, que l’Académie de Rouen m’a fait l’honneur de m’écrire 1 qu’elle m’envoyait l’ouvrage couronné 2, sans me dire qu’il était de vous. Vous me comblez de joie en m’apprenant que vous en êtes l’auteur. Ce ne sera donc pas seulement une pièce couronnée, mais une excellente pièce. Le sieur Panckoucke, qui a fait si longtemps la litière de Fréron 3, et qui fait actuellement la mienne 4, était chargé de m’envoyer votre discours ; mais il est devenu un homme si important depuis qu’il débite les malsemaines 5 de ce Fréron, qu’il ne s’est mis nullement en peine de me faire parvenir l’ouvrage après lequel je soupire.

Je suis réduit à vous faire des compliments à vide ; j’ai remercié l’académie normande sans savoir de quoi 6, et je brûle d’envie de vous remercier en connaissance de cause.

Je vois bien que nous n’aurons pas la partie ecclésiastique 7 de ce brave chevalier et de ce pauvre roi François Ier ; cette partie est la honteuse. Charles-Quint, son supérieur en tout, ne faisait pas brûler les luthériens à petit feu ; il leur accordait la liberté de conscience, après les avoir battus en rase campagne. C’est dommage que, de ces deux héros, l’un soit mort fou, et l’autre soit mort de la vérole.

Permettez à l’estime et à l’amitié de vous embrasser sans cérémonie. »

1 Lettre de Du Boullay du 12 octobre 1768 .

2 Éloge de Pierre Corneille, par Gaillard.

3 Il avait été le libraire de l’Année littéraire ; voir lettre du 24 mai 1764 à Panckoucke : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/05/24/si-j-ai-fait-des-romans-j-en-demande-pardon-a-dieu-mais-tout.html

4 Il publiait l’édition in-4° des Œuvres de Voltaire ; voir lettre du 9 juillet 1768 à Panckoucke :

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/02/21/lorsque-je-considere-tous-ces-enormes-fatras-que-j-ai-compos-6486347.html

5 Ce mot déjà rencontré à propos de Desfontaines n'est qu'une création plaisante de V* désignant une feuille hebdomadaire.

Voir lettre du 4 octobre 1735 à d'Olivet : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/10/04/ce-malheureux-qui-veut-violer-tous-les-petits-garcons-et-out.html

7 L’Histoire ecclésiastique forme le livre septième de cette Histoire. Le septième et dernier volume de l'Histoire de François Ier, 1766-1769 , de Gaillard . Les tomes V, VI et VII de la première édition de l’Histoire de François Ier, par Gaillard, ne parurent qu’en 1769.

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14/05/2024 | Lien permanent

On me vole mon bien de tous côtés, et on le dénature pour le vendre

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« A Charles-Jean-François Hénault

 

A Colmar, le 15 octobre [1754]

 

J'apprends, monsieur, que vous avez été quelque temps comme je suis toujours . On me mande que vous avez été très malade . Soyez bien persuadé que personne ne prend plus d'intérêt que moi à votre santé . Si vous êtes actuellement, comme je m'en flatte, dans votre convalescence, permettez que je vous demande votre protection auprès de Royer et pour Royer . Il a fait précisément de la tragédie de Pandore ce que Néaulme a fait de l'Histoire universelle . On me vole mon bien de tous côtés, et on le dénature pour le vendre .

 

Si j'en crois tout ce qu'on m'écrit, le plus grand service qu'on puisse rendre à Royer est de l'empêcher de donner cet opéra . On assure que la musique est aussi mauvaise que son procédé . Je vous demande en grâce de l'envoyer chercher, et de vouloir bien lui représenter ce qui est de son intérêt et de son honneur . M. de Moncrif m'a envoyé la pièce telle qu'on veut la jouer, et telle que M. Royer l'a fait refaire par un nommé Sireuil, ancien porte-manteau du roi . Cette bigarrure serait l'opprobre de la littérature et de la nation . Vous faites trop d'honneur aux lettres, monsieur, pour souffrir cette indignité si vous avez le crédit de l'empêcher . J'ai écrit une lettre de politesse à Royer, avant de savoir de quoi il était question ; mais à présent que je suis au fait, je suis bien loin de consentir à son déshonneur et au mien . Si on ne peut parvenir à supprimer cet opéra, ne pourra-t-on pas , au moins, engager Royer à différer d'une année ? Et si on ne peut différer cet opprobre, je demande à M. le comte d'Argental qu'on ne débite point l'ouvrage à l'Opéra sans y mettre un titre convenable, et qui soit dans la plus exacte vérité . Voici le titre que je propose : Prométhée, fragments de la tragédie Pandore, déjà imprimée, à laquelle le musicien a fait substituer et ajouter ce qu'il a cru convenable au théâtre lyrique, pendant l'éloignement de l'auteur . Je vous demande bien pardon, monsieur, de vous entretenir de ces bagatelles ; mais les bontés dont vous m’honorez me servent d’excuse . Je vous supplie de compter sur les sentiments d'estime, de tendresse, et de reconnaissance, qui m'attachent à vous . Je n'écris point à Mme du Deffant, et j'en suis bien fâché ; mais les maladies continuelles qui m'accablent m'interdisent tous les plaisirs . »

 

 


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28/09/2011 | Lien permanent

La vie est bien courte, et tout ouvrage est bien long

... Et un quinquennat plus que court, mais ce n'est pas une raison pour ne rien entreprendre .

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« A Ivan Ivanovitch SCHOUVALOW
Au château de Tournay par Genève 6 octobre 1759
Monsieur, je vous avais déjà fait compliment sur l'heureux succès de vos armes, lorsque j'ai reçu la lettre dont Votre Excellence m'a honoré 1, avec la relation de la bataille, que M. de Soltikof a bien voulu me communiquer. Vos bontés augmentent tous les jours l'intérêt que je prends à la gloire de l'impératrice et à l'empire de Russie. Le terme d'honneur doit être bien certainement à la mode chez vous, quoi qu'en dise un certain homme 2 qui a mis son honneur à faire bien du mal, et à en dire beaucoup de votre auguste impératrice. Ce n'est pas d'aujourd'hui que j'ai pris part à la gloire de votre nation ; tous les événements ont justifié ma manière de penser. Je vois, avec la plus sensible joie, que la digne fille de Pierre le Grand perfectionne tout ce que son père a commencé. Le bruit a couru dans nos Alpes que sa santé avait été dérangée ; j'en ai ressenti de bien vives alarmes. Nous faisons mille vœux, dans mes retraites, pour la durée et la prospérité de son règne.
Le premier tome de l'Histoire de Pierre le Grand 3 serait déjà parvenu à Votre Excellence si les personnes que j'emploie étaient aussi diligentes que je l'ai été. La vie est bien courte, et tout ouvrage est bien long. Je consacrerai ce qui me reste de vie à travailler au second volume, aussitôt que j'aurai les matériaux nécessaires 4. Il n'y a point d'occupation qui me soit plus précieuse, et, si je suis assez heureux pour seconder vos nobles intentions, je n'aurai jamais si bien employé mon temps. Mais je regretterai toujours de n'avoir pu voir la ville que Pierre le Grand a fondée, et vous, monsieur, qui faites fleurir les arts et les vertus dans le plus grand empire de la terre.
Je serai toute ma vie, avec l'attachement le plus respectueux
et le plus sincère,

monsieur

de Votre Excellence

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1Du 27 août 1759 .

2Frédéric II . Voir ce que rapportait Schouvalov le 14 août 1759, lettre du 18 septembre 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/10/10/ce-qui-n-est-qu-un-eloge-ne-sert-souvent-qu-a-faire-valoir-l-5465527.html

3 Commencé à imprimer dès 1759, il ne sera publié qu'en 1760 .

4 V* se plaignait déjà dans ses précédentes lettres ( 11 septembre 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/10/07/en-disant-la-verite-on-peut-toujours-la-presenter-sous-un-jo-5463148.html

et 18 septembre 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/10/10/ce-qui-n-est-qu-un-eloge-ne-sert-souvent-qu-a-faire-valoir-l-5465527.html ) de ne rien recevoir de Schouvalov . Celui-ci répondra le 27 octobre 1759 : « Je vois avec bien du regret […] la confirmation de ce que l'on m'avait déjà mandé de Königsberg que l'estafette chargée d'un paquet pour vous a été perdue […] Je viens de tirer une copie de tous ces matériaux et des réponses aux questions que vous proposez . »

 

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25/10/2014 | Lien permanent

Vous devriez bien abandonner vos ouailles quelques moments

... pour réfléchir et penser au reste du monde , vous tous, prêtres, pasteurs, imams, rabbins, moines de toutes couleurs et prétendus prophètes  .

Au hasard,  moi l'énergumène (comme le chante le Grand Georges ), j'ai trouvé un cardinal qui fait pencher la balance en faveur des femmes, contrairement à ce détestable Zemmour : https://www.vaticannews.va/fr/vatican/news/2021-12/cantal...

Amen .

 

 

 

« A Jacob Vernes

26è septembre 1766 à Ferney

Voici, monsieur, où en est l’affaire de cette malheureuse et innocente famille des Sirven. Il a fallu deux années de soins et de peines réitérées pour rassembler en Languedoc les pièces justificatives. Nous les avons enfin arrachées. Le mémoire de M. de Beaumont est déjà signé par plusieurs avocats . Nous avons déjà demandé un rapporteur . M. le duc de Choiseul nous protège ; il m’écrit ces propres mots de sa main, dans la dernière lettre dont il m’honore :

Le jugement des Calas est un effet de la faiblesse humaine, et n’a fait souffrir qu’une famille ; mais la dragonnade de M. de Louvois a fait le malheur du siècle. 

Avouez, monsieur le curé huguenot, que M. le duc de Choiseul est une belle âme, et que ces paroles doivent être gravées en lettres d’or. Pour celles de Vernet 1, si on peut les écrire, ce n’est qu’avec la matière dont Ézéchiel faisait son déjeuner 2. Quant à Jean-Jacques, il suffit de vous dire qu’il y avait autrefois à Paris un pauvre homme nommé Chianpot-la-Perruque 3, qui se plaignait que la cour et la ville étaient liguées contre lui. Vous devriez bien abandonner vos ouailles quelques moments, pour venir converser dans un château où il n’y a pas une ouaille. »

1 Lettres critiques d’un voyageur anglais ; voir la note page 492 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome25.djvu/502

2 « … des excréments sortis de l'homme. » , voir Ézéchiel, IV, 12 : https://saintebible.com/ezekiel/4-12.htm

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04/01/2022 | Lien permanent

en France on entend toujours raison bien tard

... Oui, mon pauvre Voltaire, c'est toujours vrai .

On commence par gueuler, casser tout et n'importe quoi, couper la branche sur laquelle on est assis, bêler, emmerder ses concitoyens au prétexte de provoquer une révision de décisions gouvernementales, se comporter impunément en hors-la-loi, se faire récupérer par des dirigeants politiques et syndicaux qui se font mousser, pleurer et gémir sur son sort, et puis, éventuellement, réfléchir à ce qui est possible maintenant, et non plus seulement à ce qui est souhaitable dans un avenir proche . Moins de taxes sur les produits de première nécessité, soit ! c'est juste et nécessaire . A tous ceux qui bloquent les magasins, je dis "ne venez pas râler si les prix augmentent : qui casse paye !"

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Qui fait casser, aussi !

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ArgentaI

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

4 décembre 1763 1

Je présente encore à mes anges, un exemplaire de la Tolérance, et je les supplie de le prêter à mon frère Damilaville . J'en ai fort peu d'exemplaires, et Paris n'en aura de longtemps . Je me flatte que M. le duc de Praslin et mes anges protégeront cet ouvrage .

M. le duc de Choiseul me mande 2 qu'il en est enchanté, ainsi que Mme de Gramont , et Mme de Pompadour . Peut-être qu'un jour ce livre produira le bien dont il n'aura d'abord fait voir que le germe . L'approbation de mes anges, et de leurs amis, sera d'un grand poids . Je ne sais si je leur ai mandé que je connais des millionnaires qui sont prêts à revenir avec leur argent, leur industrie et leurs familles , pour peu que le gouvernement voulût avoir pour eux la même indulgence seulement que les catholiques obtiennent en Angleterre . Mais en France on entend toujours raison bien tard .

J’avais déjà écrit à Marmontel 3 avant que madame Denis eût reçu la lettre du 25 Novembre, et voici ce qui m’est arrivé.

Marmontel m’ayant mandé que M. Thomas s’était désisté en sa faveur, je ne doutai pas qu’il n’eût l’obligation de ce désistement aux bontés de M. le duc de Praslin et aux vôtres 4. Il m’avait juré les larmes aux yeux, dans son voyage aux Délices, qu’il n’avait aucune part aux traits insolents répandus dans cette misérable parodie 5. Je vous écrivis pour lors. S’il avait depuis manqué le moins du monde ou à vous, ou à M. le duc de Praslin, il serait trop coupable et trop indigne de la place qu’il a obtenue. Je ne lui ai écrit qu’une lettre de félicitation fort simple, dans laquelle je lui paraissais persuadé de sa reconnaissance pour ses bienfaiteurs.

Vous devez avoir reçu, mes divins anges, des corrections que je crois nécessaires aux roués . Je ne sais si elles leur paraissent aussi importantes qu’à moi.

Respect et tendresse.

V. »

1L'édition de Kehl est limitée aux deux premiers paragraphes , voir note de la lettre du 9 novembre 1763 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2018/11/01/l-europe-me-suffit-je-ne-me-soucie-guere-du-tripot-de-paris-6101604.html

et la lettre du 4 novembre 1761 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/11/05/vous-demandez-le-secret-aux-cloches-5870039.html

L’Édition Supplément au recueil donne le reste de la lettre, et le tout est dans Moland .

2 Lettre du 27 novembre 1763 .

4 Il n'en était pas ainsi . L'adversaire de Marmontel, Thomas était le secrétaire du duc de Praslin, et le duc l'avait poussé à se présenter contre Marmontel, en représailles d'un incident survenu en 1759 ; voir les Mémoires de Marmontel, ainsi que Collé , et : https://lef-e.org/yahoo_site_admin/assets/docs/Mulryan_December_2012.340125126.pdf

Mais Thomas refusa de se prêter à l'opération et préféra retirer sa candidature . Le duc de Praslin blessé de cette générosité lui retira ses fonctions de secrétaire intime .

5 De la scène de Cinna .

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26/11/2018 | Lien permanent

On s'accoutume à bien parler

 ... Et à écouter ceux qui parlent bien, on prend un grand plaisir, même au delà du sujet traité, souvent .

On s'accoutume aussi à mal parler, pire à mal écrire, c'est-à-dire à écrire aussi mal qu'on parle .

Pourquoi faut-il que les jeunes (et moins jeunes aussi) ne se sentent adoptés par les leurs que s'ils adoptent les tics de langage des plus cons* , d'une nullité écrasante ?

Autant j'aime l'argot, autant je me régale des images et inventions verbales d'un (-des deux-) San Antonio , autant je renacle en entendant des interviews d'adolescents qui en sont encore au stade "pipi-caca-popo" (ce qui m'arrange bien car ça peut se dire facilement en verlan), et tirent gloire à la télévision de montrer leurs culs , culs tristes il faut le souligner , faces de pets ! 

 * NDLR - La sincèrité oblige l'auteur de ces lignes à employer les termes propres à sa pensée, sans censure . Il serait paradoxal d'être privé de la liberté de parole le jour du 14 juillet .

Et vers 22h 30 la poudre a parlé -bellement- au château de Voltaire !

 

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« A Mademoiselle *** 1

Aux Délices, près de Genève, 20 juin 1756.

Je ne suis, mademoiselle, qu'un vieux malade, et il faut que mon état soit bien douloureux puisque je n'ai pu répondre plus tôt à la lettre dont vous m'honorez, et que je ne vous envoie que de la prose pour vos jolis vers. Vous me demandez des conseils; il ne vous en faut point d'autre que votre goût. L'étude que vous avez faite de la langue italienne doit encore fortifier ce goût avec lequel vous êtes née, et que personne ne peut donner. Le Tasse 2 et l'Arioste 3 vous rendront plus de services que moi, et la lecture de nos meilleurs poètes vaut mieux que toutes les leçons; mais, puisque vous daignez de si loin me consulter, je vous invite à ne lire que les ouvrages qui sont depuis longtemps en possession des suffrages du public, et dont la réputation n'est point équivoque. Il y en a peu; mais on profite bien davantage en les lisant qu'avec tous les mauvais petits livres dont nous sommes inondés. Les bons auteurs n'ont de l'esprit qu'autant qu'il en faut, ne le recherchent jamais, pensent avec bon sens, et s'expriment avec clarté. Il semble qu'on n'écrive plus qu'en énigmes. Rien n'est simple, tout est affecté; on s'éloigne en tout de la nature, on a le malheur de vouloir mieux faire que nos maîtres.
Tenez-vous-en, mademoiselle, à tout ce qui plaît en eux. La moindre affectation est un vice. Les Italiens n'ont dégénéré, après le Tasse et l'Arioste, que parce qu'ils ont voulu avoir trop d'esprit; et les Français sont dans le même cas. Voyez avec quel naturel Mme de Sévigné 4 et d'autres dames écrivent comparez ce style avec les phrases entortillées de nos petits romans, je vous cite les héroïnes de votre sexe, parce que vous me paraissez faite pour leur ressembler. Il y a des pièces de Mme Deshoulières 5 qu'aucun auteur de nos jours ne pourrait égaler. Si vous voulez que je vous cite des hommes, voyez avec quelle clarté, quelle simplicité notre Racine 6 s'exprime toujours. Chacun croit, en le lisant, qu'il dirait en prose tout ce que Racine a dit en vers. Croyez que tout ce qui ne sera pas aussi clair, aussi simple, aussi élégant, ne vaudra rien du tout.
Vos réflexions, mademoiselle, vous en apprendront cent fois plus que je ne pourrais vous en dire. Vous verrez que nos bons écrivains, Fénelon 7, Bossuet 8, Racine, Despréaux 9, employaient toujours le mot propre. On s'accoutume à bien parler, en lisant souvent ceux qui ont bien écrit on se fait une habitude d'exprimer simplement et noblement sa pensée sans effort. Ce n'est point une étude il n'en coûte aucune peine de lire ce qui est est bon, et de ne lire que cela; on n'a de maître que son plaisir et son goût.
Pardonnez, mademoiselle, à ces longues réflexions; ne les attribuez qu'à mon obéissance à vos ordres.
J'ai l'honneur d'être avec respect, etc. »

1 Le contenu de cette lettre prouve que la personne à qui elle est adressée n'était pas encore mariée. Les éditeurs de Kehl l'avaient intitulée A Mme Dupuy, femme du secrétaire perpétuel de l'Académie des inscriptions et belles-lettres.
Mme Dupuy s'appelait Mlle Menon ou Manon. La famille de son mari, ne croyant pas que ce fût son véritable nom, a fait des recherches sans rien découvrir qui pût détruire ou confirmer ses soupçons. Mme Dupuy est nommée Louise Menon dans l'acte mortuaire de son mari. (Beuchot.)

4 Marie de Rabutin-Chantal marquise de Sévigné : http://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_de_Rabutin-Chantal_(ma...)

7 François de Salignac de la Mothe-Fénelon : http://fr.wikipedia.org/wiki/F%C3%A9nelon

 

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14/07/2012 | Lien permanent

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