04/07/2013
Dieu veuille avoir son âme ! C'était un horrible mécréant, sicut sunt omnes hujus farinae homines
... Je vois bien cela sur la pierre tombale de la plupart des grands (?) de ce monde , y compris celle de saint Mandela ! Sans oublier saint JeanPaul II, grand fournisseur de miracles -2 , aux dernières nouvelles-, à l'insu de son plein gré .
« A Etienne-Jean de Guimard, baron de Montpéroux
Lausanne , 7 mars [1758]
Puisque vous ne pouvez point, monsieur, venir voir représenter Fanime, et que vous vous en tenez à patipaille 1 avec la vénérable compagnie, avouez du moins que je jouis de la vie à Lausanne . Daignez le certifier à qui il appartiendra . Ajoutez à vos bontés que je fais ma demeure ordinaire tout près de vous , aux Délices, route de Lyon à Genève . Je vous supplie , monsieur de vouloir bien avoir la bonté de donner ce certificat à M. Cathala qui l'enverra sur le champ à mon notaire . Car omne tulit punctum qui miscuit utile dulci 2. En vérité vous auriez omne punctum si vous étiez témoin de la manière dont nous jouons Fanime .
Je perds dans le cardinal de Tencin un très bon ami que je m'étais fait depuis quelques mois . Les choses n'avaient pas toujours été ainsi . On dit que c'est un signe mortel quand les vieillards changent de caractère . Son Éminence ne l'a pas porté plus loin . Dieu veuille avoir son âme ! C'était un horrible mécréant, sicut sunt omnes hujus farinae homines 3. Je vous montrerai choses singulières quand je pourrai avoir l'honneur de diner avec vous à mes petites Délices .
On va donc s'égorger plus que jamais en Germanie ! Pendant ce temps-là nous jouons la comédie, on la joue à Neufchâtel et on m'attendait à Nyon pour me donner Mérope . Il n'y a plus de plaisir qu'en Suisse . Mais le plaisir le plus flatteur est de vivre avec vous, monsieur, et c'est ainsi que pensent vos deux attachés
Voltaire et Denis . »
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03/07/2013
Je persiste mon cher ange à conseiller aux encyclopédistes de s'unir comme des frères et d'être opiniâtres comme des prêtres
... Opiniâtres comme des prêtres !
Ceux d'aujourd'hui paraitraient bien dépourvus de zèle et bien fades aux yeux de Voltaire . Catholiquement parlant .
Les opiniâtres, les véreux, les félés de Dieu sont nettement plus faciles à trouver chez les intégristes de tous bords . Et dire qu'ils s'honorent du titre de frères ! Et dire que chacun d'entre eux ne pense qu'à son pouvoir personnel, sa dictature, son profit ! A quand la fin de cette engeance ?
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
conseiller d'honneur au Parlement
rue de la Sourdière
à Paris
A Lausanne 7 mars [1758]
Mon cher ange, êtes-vous couché sur le testament de M. le cardinal de Tencin 1? A-t-il laissé quelque chose à son Goussault 2? Viendrez-vous à Lyon discuter la succession ? Ce serait là une belle occasion pour Mme d'Argental de venir consulter Tronchin . Nous ferions un feu de joie aux Délices, non pas pour la mort de l'oncle mais pour le joyeux avènement du neveu . J'ai perdu dans cet oncle un homme qui depuis trois mois s’était lié avec moi de la manière la plus intime et la plus extraordinaire . Mais il n'y a pas moyen de vous dire comment .
Il suffit que tout le monde nous redemande Fanime et que nous la rejouons encore demain . Il viendra bientôt un Genevois 3 très aimable qui vous en dira des nouvelles . J'apprends qu'Astarbé 4 n'a pas été aussi bien accueilli qu'Iphigénie . Comment voulez-vous qu'on réussisse quand on s'appelle M. Coquardeau 5?
Je persiste mon cher ange à conseiller aux encyclopédistes de s'unir comme des frères et d'être opiniâtres comme des prêtres, de déclarer qu'ils abandonnent tout et de forcer le public à se mettre à leurs pieds .
Avez-vous vu le vainqueur de Mahon qui ne devait pas aller sur le Vezer ? Est-il encore fâché contre moi de ce que Mme Denis étant très malade des suites de cette ancienne cuisse 6, je ne l'ai pas abandonnée pour aller à Strasbourg dans l'antichambre de M. le maréchal qui en passant le nez haut , au milieu de deux haies d'officiers m'aurait demandé s'il y a une bonne troupe dans la ville ? Ce serait pour vous mon cher ange que je ferais cent lieues .
V. »
1 Mort le 2 mars .Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Gu%C3%A9rin_de_Tencin
2 Goussault est conseiller du parlement et aussi auteur d'ouvrages divers . Ses liens avec Tencin n'ont guère été étudiés .
3 Crommelin ; voir lettre du 3 mars 1758 à d'Argental :http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/06/27/quand-vous-croirez-avoir-trouve-avec-le-public-mollia-fandi.html
4 Astarbé de Charles-Pierre Colardeau fut représentée pour la première fois le 26 février 1758, n'eut que dix représentations et ne fut jamais reprise .
5 V* fait une moquerie avec cet à peu près du nom de l'auteur, sans doute allusion à l'épigramme de Marot , A un poète ignorant : « Qu'on mène aux champs ce cocardeau ... » Ce mot désignait une sot vaniteux, un niais . D'après Littré, il a été employé par Chaulieu -que V* appréciait- au sens de jeune homme qui fait le beau .
6 Le 27 octobre 1754, V* écrivait déjà à Richelieu: « Pour ma nièce … sa maudite enflure de jambe et de cuisse lui a repris de plus belle . Il faut des béquilles à la nièce et une bière à l'oncle . » ; voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/10/09/il-faut-qu-elle-ait-fait-sur-moi-grande-impression-car-j-ai.html
Ce mal est venu suite aux démêlés qu'avaient eu V* et sa nièce avec Freitag en juin 1753 à Francfort . V* a relaté ces évènements dans sa lettre au comte von Ulfeld le 14 juillet 1753 . Sur le mal de Mme Denis, voir les lettres de V* à sa nièce du mois d'août au mois de décembre 1753 ; http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/08/05/il-m-a-fallu-repasser-par-des-palais-apres-avoir-ete-dans-le.html
http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/10/14/les-etrennes-mignonnes-du-president.html
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02/07/2013
Comptez qu'on ne vaut pas mieux à Berlin qu'à Paris, et qu’il n’y a de bon que la liberté
... Pas mieux non plus à Washington et Moscou, Damas et Tel Aviv, Londres et Rio, etc., etc .
Qui dit mieux ?
Sans doute pas Thomas Jefferson, lui-même digne représentant de cette Amérique du Nord, capable du meilleur et du pire .
« A Jean Le Rond d'Alembert
A Lausanne 7 mars [1758]
En réponse de votre lettre du 26 février, homme au-dessus de votre siècle et de votre pays renvoyez-moi mes guenilles . M. d'Argental me les fera tenir comme il pourra à moins que vous ne puissiez encore les faire contresigner Malesherbes . Si on reprend la charrue mal attelée de l'Encyclopédie, et qu'on veuille de ces articles je les renverrais corrigés . Je ne cesse d'exhorter à tout quitter, à déclarer qu'on ne veut point ramer aux galères . Je suis convaincu que trois mille souscripteurs vous redemanderont à grands cris , et que la voix publique sera votre protection . Si vous êtes unis, si on tient ferme, vous serez maîtres absolus . Sinon on sera esclave des libraires, des censeurs et des sots .
Diderot parle de ses engagements avec les libraires . C'est à eux de recevoir vos ordres et les siens . Il parle d'une trentaine de mille livres . Vous en auriez deux cent mille si vous aviez voulu seulement entreprendre l'ouvrage à Lausanne . Et peut-être si on s'entendait, si on avait du courage, si on osait prendre une résolution on pourrait très bien finir ici l'Encyclopédie , l'imprimer ici aussi bien qu'à Paris, envoyer les tomes à Briasson, qui ensuite donnerait aux souscripteurs les volumes des planches qu'on ne peut graver à Paris sans que la Sorbonne et les jésuites s'en mêlent . Si on était assez peu de son siècle et de son pays pour prendre ce parti, j'y mettrais la moitié de mon bien . J'aurais de quoi vous loger tous, et très bien . Je voudrais venir à bout de cette affaire et mourir gaiement .
Berne, Zurik et la Batavie crient que la vénérable compagnie qui s'est fait rendre compte de votre article et qui , ouï le rapporteur, a donné son édit,1 est plus que socinienne, mais cela ne fait aucune sensation . Nous jouons la comédie à Lausanne et , par Dieu, mieux qu'à Paris, et on la joue dans tous les cantons, dans tous les villages . Nous avons établi l'empire des plaisirs et les prêtres sont oubliés .
Plût à Dieu que les encyclopédistes pussent s'établir parmi nous ! Ils seraient reçus à bras ouverts, mais ils n'en sauront jamais jusque là . Ils resteront à Paris, persécutés et mal payés .
Quels sont les cuistres, les faquins, les misérables, les théologiens qui osent dire que j'ai approuvé ce qu'on a vomi contre l'Encyclopédie, c'est-à-dire contre moi ?2 Que tout me fait aimer mon lac et que je sens mon bonheur dans toute son étendue !
A propos vous avez dit je ne sais où dans l'Encyclopédie, ou du moins fait entendre que les lettres de Leibnits produites par Koenig n'étaient pas de Leibnits. Volf les avait vues et reconnues, et il me l'a écrit . Comptez qu'on ne vaut pas mieux à Berlin qu'à Paris, et qu’il n’y a de bon que la liberté .
Qu'est-ce que c'est qu'un citoyen de Genève 3 qui se dit libre et qui va se mettre au pain d'un fermier général dans un bois , comme un blaireau ? Vale et me ama .
V. »
1 « La Compagnie informée que le VIIè tome de l'Encyclopédie imprimé depuis peu à Paris, renferme au mot « Genève » des choses qui intéressent essentiellement notre Église, s'est fait lire cet article ; et ayant nommé des Commissaires pour l'examiner plus particulièrement, ouï leur rapport , après mûre délibération, elle a cru se devoir à elle-même et à l'édification publique, de faire et de publier la Déclaration suivante » (Extrait des registres de la Vénérable Compagnie … du 10 février 1758 ; voir aussi la lettre du 19 janvier 1758 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/03/25/ameutez-vous-et-vous-serez-les-maitres-je-vous-parle-en-repu.html
2 Extrait de la lettre de d''Alembert du 26 février 1758 à laquelle répond V* « On n'oublie rien pour semer la zizanie entre nous . Ne dit-on pas dans Paris que vous avez lu, approuvé, et conseillé d'imprimer une des brochures qu'on a faites en dernier lieu contre nous ? J'ai soutenu que cela n'était pas vrai et je la soutiendrai contre tous . »
3 Jean-Jacques Rousseau s'est installé dans l'ermitage de Mme d'Epinay à Montmorency le 9 avril 1756, il en partira entre le 10 et le 15 décembre 1757 à la suite du fameux « complot », et ira se loger dans une autre maison de Montmorency prêtée par le procureur fiscal du prince de Condé .
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Et la loi du secret nous était imposée
... Comme dit ce malheureux Snowden, dont la grande faute est de dénoncer les agissements de ce grand pays à la démocratie relative les USA .
Alors chantons au nom de la vérité:
http://www.youtube.com/watch?v=jA3hNz5KQ34
La vérité et ses épines est retenue derrière un grillage, on peut la voir, seulement la voir, pas la cueillir .
Le mensonge est derrière de sales volets clos .
« A David-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches
[vers le 5 mars 1758]
Tamire 1 à son dernier couplet au 5 au lieu de dire :
Nous gardions l'un et l'autre un secret nécessaire
dit :
Et la loi du secret nous était imposée .
Il n'y a que ce vers de changé dans son rôle pour donner lieu à Fanime de s'exprimer mieux qu'elle ne faisait .
Mais quel Alonzo 2 aurons-nous aujourd'hui vers les quatre heures ? M. le colonel a-t-il donné l'ordre à ses capitaines ? »
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01/07/2013
il ne m'est pas permis comme à vous de vilipender ma pauvre patrie, et de dire du mal des Français et de leurs alliés
... Mon cher Obama (que ma petite mère s'obstine à nommer Groupama !) , officiellement vous dites du bien de la France, mais tout aussi officiellement vous financez allègrement des services de renseignements de barbouzes aux yeux en trous de serrures . Si c'est ainsi que vous considèrez vos alliés, quel traitement réservez-vous à vos adversaires ?
Sachez-le, je déteste qu'on lise par dessus mon épaule !
Et qu'on me guette partrout
« A monsieur de ministre Jacob Vernes
chez monsieur son père
à Genève
5 mars [1758] à Lausanne
Mon cher confrère vous n'ignorez pas que votre ode au roi de Prusse 1 a été imprimée . Mais vous ignorez peut-être qu'elle l'a été sous mon nom . Ce que vous savez certainement c'est qu'il ne m'est pas permis comme à vous de vilipender ma pauvre patrie, et de dire du mal des Français et de leurs alliés pour dire du bien du roi de Prusse . Vous sentez quels reproches j'aurais à essuyer et à me faire si je me laissais accuser plus longtemps d’avoir écrit contre mon roi qui m'a comblé de bienfaits et qui m'a laissé mes pensions et ma place de gentilhomme ordinaire de sa chambre malgré le parti que j'ai pris de vivre ailleurs que chez lui . Vous n'aurez d'ailleurs qu'à gagner en vous avouant l'auteur de cet ouvrage . Votre amour-propre y trouvera son compte aussi bien que votre équité . Je comptais venir hier aux Délices . Ma santé ne l'a pas permis . Je me flatte de venir vous embrasser dans huit jours . Je suis sans jardinier . C'est une triste situation quand on a un grand jardin à former et à réformer . Mes compliments à l'hébreu 2 . Quand monsieur votre frère 3 viendra nous lui jouerons la comédie .
V. »
1Voir lettre du 3 janvier 1758 à Jacob Vernes : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/03/08/mes-compliments-a-toute-votre-famille-et-a-votre-frere-l-ara.html
2 Abauzit que V* nomme aussi « l'aimable Arabe » : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/03/01/je-ne-veux-que-le-repos-et-je-le-souhaite-a-tous-mes-confrer.html
3 Pierre Vernes (1724-1788) ; Vernes avait eu deux autres frères, Paul et Antoine qui étaient morts, le premier en bas âge, le second à dix-neuf ans . http://gw.geneanet.org/tvagerrer?lang=fr;p=pierre;n=vernes
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