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27/12/2014

Calfeutrez-vous, chauffez-vous bien, madame ; digérez ; jouissez de la société d'une amie charmante, et de la considération personnelle qui doit rendre votre vie agréable

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« À Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de LUTZELBOURG.
Aux Délices, 16 décembre [1759]
Calfeutrez-vous, chauffez-vous bien, madame ; digérez ; jouissez de la société d'une amie charmante, et de la considération personnelle qui doit rendre votre vie agréable. On abrège ses jours dans le tracas des cours ; on les prolonge et on les rend sereins dans la retraite. Si je suis en vie, j'en ai l'obligation à ma campagne. J'ai acheté deux terres belles et bonnes auprès de mes Délices, par reconnaissance du bien que m'a fait la vie champêtre.
J'ai trois ports contre tous les naufrages : c'est là que je plains les folies barbares de ceux qui s'égorgent pour des rois. J'y ris de la folie ridicule des courtisans, et du changement continuel de scènes dans une très-mauvaise pièce. Les vers que vous m'envoyez ne donnent point envie de rire ; ils disent des vérités bien tristes. Il faut s'attendre à peu de gloire et peu d'argent. Passe pour le premier point. Le duc 1 de Lauraguais renonce à la gloire, et garde son argent; mais la France perd le sien.
Bonsoir, et mille respects.

 

V. »

 

1 Louis de Brancas, né en 1714, duc de Lauraguais, était le père du comte de Lauraguais. http://histoire-bibliophilie.blogspot.fr/2013/07/linfatigable-comte-de-lauraguais.html

 

 

 

26/12/2014

In tanto sappia che l'amo e l'amero

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« A Cosimo Alessandro Collini

[Aux Délices 16 décembre 1759]1

Gli auguro un felice viaggio, e piu tosto una certa e felice dimora che un viaggio ; ecco due lettere, l'una per l'altezzza 2, l'altra pel'cameriero, scritte ambedue colla medesima prémura . In tanto sappia che l'amo e l'amero .

V. »3

1 La date a été portée sur le manuscrit par Collini avec la mention « reçu le paquet le 22 décembre »

2 Cette lettre pour l'Electeur palatin ne nous est pas parvenue .La lettre pour le cameriero est la suivante, à Pierron : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/26/mon-cher-ami-je-vous-envoie-mon-precurseur-5520636.html

3 « Je vous souhaite un bon voyage, et plutôt encore qu'un voyage, un séjour agréable ; voici deux lettres, l'une pour l'altesse, l'autre pour le secrétaire, écrites l'une et l'autre avec la même hâte . Je sais seulement que je vous aime et que je vous aimerai . »

Les recommandations de V* avaient abouti à faire engager Collini par l'Electeur palatin, en qualité de secrétaire .

 

Mon cher ami, je vous envoie mon précurseur

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« A Nicolas Pierron 1

Aux Délices 16 décembre 1759 2

Mon cher ami, je vous envoie mon précurseur 3. Mon régime, malgré toutes mes incommodités, me mettra l'été qui vient en état de venir vous remercier de toutes les marques d'amitié qu'il a reçues de vous . Je prends sur moi le bien que vous lui faites et je partage sa reconnaissance . Vous aurez en lui un homme très attaché . Plus vous le connaitrez, plus vous verrez combien il mérite votre bienveillance . Je lui ai donné une lettre pour Son Altesse électorale ; je me flatte que vous lui procurerez l'honneur de la présenter ; il ne veut avoir d'obligation qu'à vous . Je vous prie, mon cher monsieur, de présenter mes respects à M. le baron de Beckers et à tous ceux qui voudront bien se souvenir de moi dans votre aimable cour . Je serai toute ma vie avec l'amitié la plus véritable, votre très humble et très obéissant serviteur .

V. »

2 Copie par Collini ; sur le manuscrit, Collini a porté la mention : « copie d'une lettre de M. de Voltaire à M. Pierron, à Mannheim ; au sujet de M. Collini qui allait partir de Strasbourg pour se rendre à Mannheim . »

3 Collini .

 

 

25/12/2014

Bannissons pour jamais, monsieur, les vaines cérémonies

... C'est un des voeux que je fais en pensant à François Hollande qui se trouve embringué dans une foule de cérémonies qui ne font pas avancer d'un iota le bien être de ses concitoyens ; seuls quelques organisateurs et happy few se souviennent de ces micro-événements, on est bien souvent en dessous du niveau du mouron (les pâquerettes me lassent) et on s'en fait, -du mouron-, pour notre avenir .

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A quoi peuvent bien servir ces voeux aux corps constitués ?

Bla Blaaahh Blaaahhh !

Et combien ça coûte ?

 Un peu de beauté que nous offre un génie, Bach : https://www.youtube.com/watch?v=bFnW_CrPUlA , pour être raccord avec Noël, et aussi : http://pluzz.francetv.fr/videos/bach_concertos_pour_clavi... , je ne m'en lasse pas

 

 

 

« A François Guillet, baron de Monthoux

Bannissons pour jamais, monsieur, les vaines cérémonies . J'ai reçu l'avoine . Mes chevaux et moi nous vous remercions . Plus vous nous gratifierez de semblables envois, plus vous nous ferez plaisir . Je vous supplierai d'envoyer le plus tôt que vous pourrez les papiers absolument nécessaires pour la consommation de notre affaire , je suis d'ailleurs à vos ordres, et je ne souhaite du loisir, de la santé et de beaux jours que pour venir vous assurer de mon sincère respect, vous, monsieur, et madame votre femme .

V.

Jeudi [décembre 1759] »

 

24/12/2014

quid agis dulcissime rerum ? = Que fais-tu toi qui m'est cher entre toutes choses ?

... A l'heure où le très saint pape François dit sa troisième messe de nativité, je lui demande de bien vouloir faire quelque prière pour vous chère Mam'zelle Wagnière et que Voltaire, mon/notre François préféré vous aide en cas de besoin, je me ferai son intercesseur bien volontiers .

Joyeux Noël à tous !

 Chat va ? Bisou !

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 https://www.youtube.com/watch?v=8YtJ1_8ZZu4

dédicace pour LoveVoltaire

 

« A Nicolas-Claude THIERIOT.
15è décembre 1759. 1
Vous ne vous plaindrez pas cette fois-ci, mon cher et ancien ami, que j'épargne les ports de lettres 2. J'ai peur qu'il ne soit ridicule de parler de comédie dans le temps qu'il n'est question que de culs noirs, de bourses vides, de flottes dispersées, et de malheurs en tout genre sur terre et sur mer. L'espérance de la paix est dans le fond de la boîte de Pandore ; mais, pendant que tout l'État souffre, il se trouve toujours des gredins qui impriment, des oisifs qui lisent, et des Frérons qui mordent. Je vous prie de m'envoyer, par M. Bouret ou par quelque autre contresigneur,3 la Femme qui a raison, et la malsemaine 4 dans laquelle Fréron répand son venin de crapaud.
On m'a envoyé la magnifique édition de l'Ecclésiaste 5 : elle est imprimée au Louvre, avec mon portrait à la tête ; mais il y a beaucoup de fautes, et le texte manque au bas des pages. Il en paraîtra une belle édition approuvée par le pape. Il faut apprendre à de petits esprits insolents, qui abusent de leurs places, à quel point on doit les mépriser 6, et à quel point on peut les confondre. On reviendrait à Paris leur marquer tout le dédain qu'on leur doit, si on n'aimait pas mieux être chez soi libre et tranquille.

Sed nil dulcius est bene quam munita tenere
Edita doctrina sapientum templa serena,

unde queas alios passim videre palantes .7
On doit regretter la perte de Madame,8 mais Paris ne regrette que ses annuités et ses billets de loterie . Connaissez-vous Mlle de Bazincour qui est chez moi ? J'ai aussi un géomètre qui traduit l'Arioste en vers . Il a fait un livre de trigonométrie sphérique qu'il a dédié à d’Alembert . Il s'appelle La Valette . En aviez-vous entendu parler ? son nom est-il sur vos tablettes ? Que faites-vous à votre Arsenal ? quid agis dulcissime rerum 9»

1 L'édition de Kehl supprime tout ce qui est après la citation de Lucrèce .

2 Thieriot commençait sa lettre du 28 novembre 1759 ; à laquelle V* a déjà répondu le 5 décembre 1759 ( http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/12/05/je-n-ai-point-de-culs-noirs-xii-et-j-ai-renonce-aux-blancs-q.html ) par : « Est-ce l'augmentation des ports de lettres qui rend les vôtres si rares, mon très illustre ami ? N'ayez aucun égard je vous conjure, à médiocre fortune pour cette dépense qui de toutes celles que j'ai à faire en est la plus agréable . Depuis neuf mois n=bientôt que je me suis retiré ici [à l'Arsenal] vous ne m'avez écrit que deux fois . »

4 Ce mot désignant l'Année littéraire de Fréron, est déjà rencontré dans une lettre à d'Olivet le 4 octobre 1735 à propos des Observations de Chauffour : « Que fait mon abbé des Chauffours (3) ? Il broche, dans ses Malsemaines (4), une satire honnêtement impertinente ,... » : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1735-partie-7-111792805.html

5 C'était sans doute la Pompadour qui avait fait imprimer cette édition. (Clogenson.)

On ne connait pas cette édition, voir lettre du 15 juin 1759 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/06/07/il-n-a-jamais-commence-aucune-de-ses-pieces-par-dire-a-une-f.html

Quand V* parle ensuite d'une « plus belle édition approuvée par le pape » on sent qu'il est ironique .

6 Ceci s'adressait à Omer Joly de Fleury et à l'abbé Terrai, sur le rapport duquel le parlement ordonna que l'on brûlât le Précis du Cantique des cantiques.

7 D'après Lucrèce , De natura rerum , II, 7-10 : Sed nil dulcius est bene quam munita tenere Respicere unde queas alios, passimque videre Errare, atque viam palantes quærere vitre. Mais rien n'est plus doux que d'occuper solidement les hauts lieux fortifiés par la sagesse des philosophes, régions sereines d'où l'on peut voir les autres hommes errer à l'aventure .

9 Que fais-tu toi qui m'est cher entre toutes choses ?

 

 

23/12/2014

Dieu vous donne la paix le plus tôt qu'il pourra ; les gens qui bâtissent en ont autant besoin que ceux qui couchent dans la rue

... C'est vrai , mais quelle paix peut on attendre et atteindre quand on couche dans la rue ?

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« A François de Chennevières

Vos contes sont très jolis, mon cher monsieur . Mlle de Bazincour 1 est une bonne emplette, et de bonne emplette ; je peux en parler ainsi sans conséquence, à mon âge .

Nous savons très bien avant vous toutes les nouvelles du dehors, vous devriez bien nous dire un petit mot du dedans . La confiance est-elle revenue ? mange-t-on toujours sur des cul noirs ? M. de Montmartel aide-t-il encore le ministère de son crédit ? prête-t-il de l'argent ? Vous n'en savez rien . La cour doit être très affligée de la perte de Madame Infante ; mais hélas ! à la cour chacun ne songe qu'à soi . Il faut être bien aveuglé par le préjugé, pour ne se pas faire inoculer quand on n'a pas eu la petite vérole à trente ans . Est-il possible que tant de funestes exemples ne servent à rien à notre malheureuse nation ? On ne fait pas plus de difficulté dans le petit pays où j'ai choisi ma retraite de se faire inoculer 2, que de prendre une médecine de précaution . Mais la raison parle en vain, l'ancienne erreur domine toujours . On dit que vous avez quatorze jésuites à Versailles pendant qu'on en chasse trois cents du Portugal . Dieu vous donne la paix le plus tôt qu'il pourra ; les gens qui bâtissent en ont autant besoin que ceux qui couchent dans la rue ; personne ne paie , on meurt de faim dans le pays de Gex, comme ailleurs ; mauvaise récolte, mauvaises vendanges, mortalité de moutons . Dites-moi quel est l’hôpital le plus voisin, sous votre direction, et j'irai m'y établir moi, ma nièce, un grand petit neveu que j'ai, un homme de lettres qui est venu s'établir chez moi, le secrétaire qui vous écrit, et vingt domestiques, envoyez-nous vite un billet pour être reçus, ou consolez-nous par vos lettres .

Mille respects à la sœur du pot 3.

V.

15 décembre [1759] »

1 Elle logeait chez V* et Mme Denis ; voir lettre du 22 octobre 1759 à Chennevières : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/11/07/on-pretend-que-paris-rit-toujours-autant-qu-il-murmure-5484636.html

2 Allusion à l'inoculation de Mme d'Epinay ; voir lettre du 5 août 1759 à Mme d'Epinay : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/09/06/nous-ne-manquerons-pas-de-venir-admirer-le-courage-et-voir-l-5441715.html

 

22/12/2014

je demande seulement, comme citoyen, si vous pensez que nous aurons la paix. Je la vois nécessaire pour nous. J'ai bien de la peine à la voir glorieuse

... Question ouverte à tout citoyen du monde qui répondra "non" beaucoup trop souvent à mon goût et laissera encore une grande amertume en cette période de fêtes .

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ARGENTAL
Aux Délices, 15 décembre [1759] 1
Je me flatte, mon divin ange, que la mort funeste de la princesse 2 que vous regrettez ne changera rien à votre destinée, et que votre place n'en sera pas moins pour vous une source de choses utiles et agréables. Permettez-moi de vous marquer toute la part que nous prenons, Mme Denis et moi, à ce triste accident. Je suis persuadé que madame l'infante vous avait bien goûté, qu'elle sentait tout ce que vous valez ; et, en ce cas, vous perdez beaucoup. Votre cœur sera affligé ; mais, quoique votre intérêt ne soit pas pour vous un motif de consolation, il faut bien que vos amis envisagent cet intérêt, que vous êtes bien homme à négliger.
Voilà, dit-on, de belles espérances de paix; le roi d'Angleterre l'offre en vainqueur. Je ne veux point demander si cette déclaration de sa part est une suite de certaines démarches; je demande seulement, comme citoyen, si vous pensez que nous aurons la paix. Je la vois nécessaire pour nous. J'ai bien de la peine à la voir glorieuse ; mais j'attends tout des lumières et de la belle âme de M. le duc de Choiseul.

C'est alors que nous pourrons mettre les chevaliers français sur la scène; ils seront à vos ordres comme l'auteur. Cette Femme qui a raison me fait de la peine ; on la dit imprimée, et très-mal : c'est ma destinée, et cette destinée désagréable a été toujours la suite de ma facilité. On ne se corrige de rien ; au contraire, les mauvaises qualités augmentent avec l'âge comme les bonnes. Que vous êtes heureux! et que cette loi de la nature vous est favorable ! Je vous souhaite, et à Mme Scaliger, une jolie année 1760, et cinq ou six bonnes pièces nouvelles. Si j'avais du temps j'en ferais une, bonne ou mauvaise; mais Pierre m'appelle; je ne connais que vous et lui.

V.

Je me flatte encore une fois que M. le duc de Choiseul n'est pas mécontent de moi, et que vous fortifiez les bontés dont il m’honore . Je n'ai point d'autre prétention . »

1 Date complétée par d'Argental ; une tache d'encre sur l'orignal fait interpréter le 15 en 11 pour la copie Beaumarchais, date suivie par les éditions suivantes . Le dernier paragraphe en bas de page est supprimé dans la copie Beaumarchais et manque dans les éditions suivantes .

2 Louise-Élisabeth de France, duchesse de Parme, fille de Louis XV et femme du duc de Parme, morte le 6 décembre, de la petite vérole. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89lisabeth_de_France_%281727-1759%29