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25/01/2020

Tout ce que je puis, c’est de me plaindre

... On parle ici du mal français dont on ne connait aucun remède, plus contagieux que le SRAS chinois et qui fait en réalité beaucoup plus de mal que le virus asiatique , qui sévit depuis une éternité avec des accès ridicules et irraisonnés ; Français vous êtes des niolus  !

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« A François Tronchin

[27 novembre 1764] 1

Mon cher ami, vous me rendrez un vrai service, si vous voulez bien communiquer ce petit billet à l'un de messieurs les scolarques . Je suis indigné de l'effronterie avec laquelle les libraires de Hollande inondent l'Europe de livres sous mon nom . Le stathouder lui-même ne pourrait les en empêcher . Tout ce que je puis, c’est de me plaindre . Faites-moi l’amitié, je vous en supplie, de dire à Esculape combien je m'intéresse à sa gloire .

Ne serez-vous point assez aimable pour venir quelque jour par un beau soleil, sur votre joli petit cheval, dîner chez vos amis de Ferney ? Maman vous embrasse le plus tendrement du monde . »

1 La date est ajoutée par Tronchin sur le manuscrit .

24/01/2020

Je sais très bien, qu’un grand ministre peut faire un détestable ouvrage, même en politique

... Que dire alors de ministres minus habens ? L'espèce n'est pas en voie de disparition, pas même menacée , et les libraires ont bien du mal à écouler leurs productions oiseuses . Ils rejoignent la cohorte des anciens présidents donneurs de leçons à la petite semaine . Il est bien triste qu'on abatte des arbres pour eux .

https://www.lepoint.fr/politique/que-valent-les-romans-ec...

 

 

« A Pierre-Joseph Thoulier d'Olivet, de

l'Académie française, etc.

à Paris

27è novembre 1764

Mon cher maître, non agitur de verbis, sed rebus 1 Je veux que vous me disiez nettement si vous avez rien vu de plus mauvais que ce testament tant vanté par La Bruyère 2. Je sais très bien, qu’un grand ministre peut faire un détestable ouvrage, même en politique. Il ne faut pas être un grand génie pour faire couper le cou au maréchal de Marillac 3, après l’avoir fait juger à Rueil par des fripons en robe vendus à la faveur ; Cartouche en aurait fait autant. Mais pour écrire sur les finances et sur le commerce, on a besoin de connaissances que le cardinal de Richelieu ne pouvait avoir. Je tiens qu’il n’en savait pas assez pour débiter toutes les bêtises qu’on lui attribue.

Au reste, mon cher maître, condamnez-moi si vous voulez sur inconvenance 4 et marginer 5 ; j’aime ces deux mots qui sont expressifs et qui nous sauvent d’une circonlocution. Inconvenance n’est pas Disconvenance ; on entend par disconvenance des choses qui ne se conviennent pas l’une avec l’autre ; et j’entends par inconvenance des choses qu’il ne convient pas de faire. Vous direz que je suis bien hardi ; je vous répondrai qu’il faut l’être quelquefois.

Vivez, vous dis-je, moquez-vous de tout ; vous êtes plus jeune que moi, car vous avez des yeux, et je n’en ai plus. Madame Denis se souvient toujours de vous avec bien de l’amitié ; elle vous fait mille compliments. Nous menons une vie agréable et tranquille avec l’héritière du nom de Corneille et un de vos jésuites défroqués, nommé Adam, qui nous dit tous les dimanches la messe, que je n’entends jamais, et à laquelle il n’entend rien, non plus que vous 6. Vivent Cicéron et Virgile ! Vivez, vale. 

V.»



1 Il ne s'agit pas de mots mais de choses .

2 Voir en effet le Discours prononcé dans l'Académie française par La Bruyère, vers le début : http://www.academie-francaise.fr/discours-de-reception-de-jean-de-la-bruyere-et-preface

5 Le mot apparaît aussi dans cet ouvrage ; V* s'en est servi dès 1761 ; voir lettre du 14 septembre 1761 à Pinot Duclos : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/08/19/il-faut-etre-juste-mais-il-faut-etre-poli-et-dire-la-verite-5837919.html

6 Ces quatre mots ont été fortement biffés sur le manuscrit .

23/01/2020

je ne m’épouvante de rien. Je trouve que plus on est vieux, plus on doit être hardi. Je suis du sentiment du vieux Renaud qui disait qu’il n’appartenait qu’aux gens de quatre-vingts ans de conspirer

... On a là une idée de ce que pense/penserait Vladimir Poutine, qui est pourtant bien loin d'être philosophe .

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

27 novembre 1764

A l'un de mes anges , ou aux deux ensemble.

Les lettres se croisent, et le fil s’embrouille. La lettre du 21 Novembre 1 m’apprend ou qu’on n’avait pas encore reçu les lettres patentes de Mlles Doligny et Luzy, ou qu’elles ont été perdues avec un paquet adressé, autant qu’on peut s’en souvenir, à M. de Courteilles. Tous mes paquets ont été envoyés depuis un mois à cette adresse, excepté un ou deux à l’abbé Arnaud ou à Marin. Il serait triste qu’il y eût un paquet d’égaré. Dans ce doute, voici de nouvelles patentes.

Je vous avais mandé que M. de Richelieu m’avait donné toute liberté sur la distribution de ces bénéfices 2. Si M. de Richelieu change d’avis, je n’en changerai point ; je crois son goût pour mademoiselle d’Epinay passé, et j’imagine que sa fureur de vous contrecarrer sur les affaires du tripot, est aussi fort diminuée.

Je vous supplie, mes divins anges, d’assurer M. Marin de ma très vive reconnaissance. Je voudrais bien pouvoir la lui marquer, et vous me feriez grand plaisir de me dire comment je pourrais m’y prendre.

Il est très vrai que j’avais fait une balourdise énorme, en ajoutant, à la réponse faite à M. de Foncemagne en 1750, les noms du cardinal Albéroni 3 et du maréchal de Belle-Isle 4 ; je fis cette sottise en corrigeant l’épreuve à la hâte. On est bien heureux d’avoir des anges gardiens qui réparent si bien de pareilles fautes. Mais je jure encore, par les ailes de mes anges, que j’ai retrouvé parmi mes paperasses cette lettre de 1750, écrite de la main du clerc qui griffonnait alors mes pensées ; je ne trompe jamais mes anges.

On m’a mandé qu’un honnête homme, qui a approfondi la matière du testament, et qui ne laisse rien échapper, a porté une sentence d’arbitre entre M. de Foncemagne et moi 5. On la dit sage, polie, instructive, et très bien motivée .

Il paraît tous les mois sous mon nom, en Angleterre ou en Hollande, quelques livres édifiants. Ce n’est pas ma faute ; je ne dois m’en prendre qu’à ma réputation de bon chrétien, et mettre tout aux pieds du crucifix.

J’ai bien peur que maître Omer ne veuille me procurer la couronne du martyre. Ces Omer sont très capables de joindre au Portatif la tragédie sainte de Saül et David, que le scélérat de Besogne, libraire de Rouen, a imprimée sous mon nom ; Messieurs pourraient bien me décréter, et quoique je ne fasse cas que des décrets éternels de la Providence, cette aventure serait aussi embarrassante que désagréable. Je connais toute la mauvaise volonté des Omer ; je n’ai jamais été content d’aucun Fleury, pas même du cardinal, pas même du confesseur du roi, auteur de l’Histoire ecclésiastique 6; je ne conçois pas comment il a pu faire de si excellents discours, et une histoire si puérile.

Au reste, je ne me porte pas assez bien pour me fâcher, et mes yeux sont dans un trop triste état pour que je revoie les Roués. Je me sers d’une drogue qui me rendra ou qui m’ôtera la vue tout à fait ; je n’aime pas les partis mitoyens.

Mes chers anges, conservez-moi vos célestes bontés. Toute ma famille se prosterne à l’ombre de vos ailes.

On nous parle aussi d’une petite assignation de notre curé : la robe de tous côtés me persécute ; mais je ne m’épouvante de rien. Je trouve que plus on est vieux, plus on doit être hardi. Je suis du sentiment du vieux Renaud qui disait qu’il n’appartenait qu’aux gens de quatre-vingts ans de conspirer.7 »



1 Cette lettre est conservée .

3 Car le Testament politique du cardinal Alberoni, de Maubert de Gouvest, ne remonte qu'à 1753 : https://books.google.fr/books?id=yHMGAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

. V* pouvait donc difficilement le connaître en 1750, ce qui détruit tout l'édifice qu'il a péniblement élevé pour « vieillir » sa réponse .

4 Le testament du cardinal de Belle-Isle parut en 1761 : https://data.bnf.fr/fr/10739486/charles_fouquet_belle-isle/

; nouvel anachronisme souligné officieusement par d'Argental .

6 V* reviendra sur ce sujet dans une lettre ouverte à Damilaville à la date du 7 mai 1770 .

7 Dans la Conjuration des Espagnols contre la ville de Venise, de Saint-Réal : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62079192.texteImage

et voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/C%C3%A9sar_Vichard_de_Saint-R%C3%A9al

22/01/2020

you set me in flames with your courage

... Voila ce qu'aurait pu déclarer Donald Trump à Greta Thunberg s'il avait été un minimum honnête, mais c'est trop demander à un menteur professionnel . Selon ma brave femme de mère, il n'est qu'une gueule de raie !

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« A John Wilkes, Gentilhomme

anglais etc.

[vers le 25 novembre 1764] 1

Sr ,

I return you many thanks, you set me in flames with your courage, and you charm me with your wit .

Yr most h. ob. s. 2

V. »

1 Wilkes a écrit à V* le 23 novembre 1764 en lui envoyant quelques publications .

2 Monsieur, / Je vous retourne vos remerciements, votre vaillance m'enflamme, et votre esprit me charme . / Votre très humble et très obéissant serviteur. »

21/01/2020

c'est un recueil aussi insipide que si l'on avait imprimé les mémoires de mon tailleur et de mon boucher

... Serait-ce la trêve ou accord commercial entre Macron et Trump ?

https://www.20minutes.fr/economie/2699631-20200121-taxe-gafa-trump-macron-conclu-treve-evitant-guerre-commerciale

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Explique-moi ça !

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

25 novembre 1764

Mon cher frère,

Les auteurs du Portatif dont la plupart sont à Lausanne, sont un peu étonnés du bruit qu'a fait leur livre , ils ne s'y attendaient pas . Je m'attendais encore moins à en être soupçonné ; mais dès que je fus certain qu'on avait parlé au roi en termes très forts 1 et qu'on avait voulu exciter contre moi jusqu'à l'évêque d'Orléans , je fus obligé d'aller au-devant des coups qu'on me portait . Je me trouvais alors dans des circonstances très épineuses, j'y suis encore ; il s'agit d'obtenir de nouvelles lettres patentes du roi en faveur de la terre de Ferney : vous m'avouerez que le Portatif n'était pas une bonne recommandation . Il eût été inutile de la désavouer à la cour si je n'avais pas fait le même désaveu à la ville ; les deux démarches étaient indispensables . Je savais ce que les Omer avaient dit et il valait certainement mieux aller au-devant de la calomnie que d'attendre pour la réfuter quelque aveu tiré du grand escalier . Ne doutez pas que quelque bigot n'eût proposé mon exclusion de l'Académie .

Enfin mon avis sera toujours qu'on écrase l'infâme et qu'elle ignore la main qui l'écrase .

J'attends toujours des Du Marsais, des Saint-Evremond, des Meslier . J'ai reçu des Énoch 2, cela n'est pas publici saporis 3. Je n'ai point vu les lettres de Jean-Jacques 4, on ne les connait point encore dans notre Suisse . On a aussi imprimé sous mon nom des Lettres secrètes . On dit que c'est M. Robinet qui m'a joué ce beau tour 5. Si les lettres sont secrètes, il ne fallait donc pas les rendre publiques, mais on croit que le secret restera entre M. Robinet et son imprimeur ; on m'a mandé que c'est un recueil aussi insipide que si l'on avait imprimé les mémoires de mon tailleur et de mon boucher . Vous voyez qu'on me regarde comme un homme mort, et qu'on vend tous mes effets à l'encan et que Robinet s'est chargé de mon pot de chambre .

Adieu, mon cher frère, adieu, mon cher philosophe. »

1 Cette affirmation souvent répétée de V* fut considérée avec ironie par d'Argental et d’Alembert qui savaient apparemment à quoi s'en tenir . Elle n'en accréditera pas moins une rumeur dont on retrouve des traces, par exemple, dans une lettre du 5 décembre de milord Maréchal à Rousseau : « On dit que le roi de France en ayant ouï parler, dit : Est-ce qu'on ne peut faire taire cet homme ? », voir page 436 : https://books.google.fr/books?id=X1ZixOxS2M8C&pg=PA436&lpg=PA436&dq=lettre+de+milord+mar%C3%A9chal+%C3%A0+rousseau+5+d%C3%A9cembre+1764&source=bl&ots=VBRvWdJmdF&sig=ACfU3U2zJCAgKb-_Qeq4f7xqU3-qGkGJrg&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiL_NqXsJPnAhVRRBoKHST8A10Q6AEwAHoECAIQAQ#v=onepage&q=lettre%20de%20milord%20mar%C3%A9chal%20%C3%A0%20rousseau%205%20d%C3%A9cembre%201764&f=false

3 Du goût du public .

4 Les Lettres écrites de la montagne, 1764 , sont parvenues à Genève quelques jours auparavant ; des exemplaires incomplets avaient été reçus de paris trois semaines plus tôt . Voir : http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/old2/file/rousseau_lettres_de_la_montagne.pdf

20/01/2020

Je le prie notamment de se joindre à moi pour effacer jusqu'aux dernières traces de cette indigne calomnie qui nous outrage tous deux également

... Cette prière peut être celle de Bocuse à Marc Veyrat, triples étoilés rétrogradés par un guide Bibendum en mal de publicité . Une, deux ou trois étoiles, peu importe au fond, quand la cuisine est bonne, elle est bonne, on le dit , on le fait savoir avec ou sans guide . Gourmands de tous pays, à table !

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« A Marc-Michel Rey

Marchand libraire

Amsterdam

Au château de Ferney en Bourgogne

par Genève 24 novembre 1764

Je viens d'apprendre par la chambre syndicale de Paris qu'on s'est servi du nom de Marc-Michel Rey libraire d'Amsterdam 1 pour envoyer un volume in-octavo intitulé Collection complète etc. ouvrages philosophiques de M. de Voltaire 2. On y trouve

Le Testament de Jean Meslier

Le Sermon des cinquante

Le Catéchisme de l'honnête homme

L’Examen de la religion

etc.

La plupart de ces pièces connues depuis plus de vingt années sont un tissu des plus horribles blasphèmes qu'on ait jamais vomis contre la religion chrétienne . Il n'y a point d’homme de lettres à Paris qui ne connaisse le Testament de Jean Meslier, curé d'Étrepigny près de Rocroy en Champagne . Il mourut je crois en 1733 et il laissa trois exemplaires manuscrits de ce malheureux testament par lequel il désavouait la religion dont il avait été le ministre .

Le Sermon des cinquante est un libelle non moins exécrable qui a toujours passé pour être de La Mettrie et qui même a été deux fois imprimé sous son nom .

L’Examen de la religion attribué mal à propos à Saint-Evremond ne peut pas être plus de lui que de moi . C'est un mauvais ouvrage mal écrit, qui a été d'abord imprimé à Hambourg . Je ne connais point le catéchisme mais je sais que les auteurs et les imprimeurs de tous ces ouvrages affreux seraient condamnés au dernier supplice dans tous les tribunaux de l'Europe .

Monsieur Marc-Michel Rey est intéressé plus que personne à faire cesser l'abus criminel qu'on fait de son nom et du mien, et à employer l'autorité des magistrats qui doivent réprimer une licence si infâme . Je le prie notamment de se joindre à moi pour effacer jusqu'aux dernières traces de cette indigne calomnie qui nous outrage tous deux également .

Voltaire

gentilhomme ordinaire

de la chambre du roi. »

1 En réalité le livre ne porte pas la marque de Rey ; mais le fait n'a pas de signification particulière, ni dans un sens ni dans l'autre . Voir J. Vercruysse : « Voltaire et Marc-Michel Rey », 1967 .

2 Ces trois mots sont ajoutés au-dessus de la ligne dans le manuscrit .

19/01/2020

Quel remède à tout cela, s’il vous plaît ? je n’y vois que celui de la patience ; autrefois je m’en fâchais, j’ai pris le parti d’en rire

... Mais je dois avouer que j'en ris jaune quand je vois avec quel aveuglement tant de travailleurs suivent des dirigeants syndicaux obtus et malfaisants .

Vive la France et les patates frites !

 

 

« A François-Louis-Claude Marin

24 novembre 1764 1

Si jamais, monsieur, quelque homme de lettres vient vous dire que son métier n’est pas le plus ridicule, le plus dangereux, le plus misérable des métiers, ayez la bonté de m’envoyer ce pauvre homme. Il y a tantôt cinquante ans que je puis rendre bon témoignage de ce que vaut la profession. Un de ses revenants-bons est que chaque année on m’a imputé quelque ouvrage ou bien impertinent ou bien scandaleux. Je suis dans le cas du célèbre M. Arnoult et de l’illustre M. Lelièvre, deux braves apothicaires, dont on contrefait tous les jours les cachets et le baume de vie. On débite continuellement sous mon nom de plus mauvaises drogues. On a fabriqué une Histoire de la guerre de 1741, avec mon nom à la tête 2. Je ne sais quel fripier 3 prétend avoir trouvé mon portefeuille ; il a donné hardiment un recueil de vers tirés du Mercure, et cela est intitulé mon portefeuille retrouvé.4

M. Robinet, que je n’ai pas l’honneur de connaître,  a fait imprimer mes lettres secrètes, qui, si elles sont secrètes, ne devaient pas être publiques ; et M. Robinet 5 ne fera pas assurément fortune avec mes prétendus secrets.

En voici un autre qui donne mes œuvres philosophiques 6 ; et ces œuvres sont d’abominables rogatons imputé autrefois à La Mettrie, et indignes même de lui.

Quel remède à tout cela, s’il vous plaît ? je n’y vois que celui de la patience ; autrefois je m’en fâchais, j’ai pris le parti d’en rire. Je ne puis imiter les charlatans, qui avertissent le public de se donner de garde de ceux qui contrefont leur élixir. Il faut subir cette destinée attachée à la littérature. Il est très inutile de se plaindre au public, qui n’a jamais plaint personne, et qui ne songe qu’à s’amuser de tout.

Il faut qu’un homme de lettres se prépare à passer sa vie entre la calomnie et les sifflets. Si vous vous plaignez à votre ami d’un libelle fait contre vous, il vous demande vite où on le vend . Si vous êtes affligé 7 qu’on vous impute un mauvais ouvrage, il ne vous répond pas, et il court à l’Opéra-Comique . Si vous lui dites qu’on n’a pas rendu justice à vos derniers vers, il vous rit au nez : ainsi le mieux est toujours de rire aussi.

Je ne sais si votre Duchesne s’appelle André ou Guy, mais, soit Guy, soit André, il a impitoyablement massacré mes tragédies . Il les a imprimées comme je les ai faites, avec des fautes innombrables de sa part, comme moi de la mienne. De toutes les républiques, celle des lettres est sans contredit la plus ridicule. »

1 Minute corrigée par V* . V* a porté en tête du manuscrit « Lettre à M. Marin 24 novembre 1764 » et « concernant les infamies de La Haye ».

2En 1756 .

3Ce mot est ajouté sur le manuscrit d'une autre écriture .

4 Sur Le Porte-feuille trouvé, voir lettre du 24 février 1757 à Pierre Rousseau : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/10/06/calvin-etait-un-tres-mechant-homme-altier-dur-vindicatif-et.html

5 V* a ajouté le nom au dessus de la ligne .

6 L’Évangile de la raison. Ouvrage posthume de M. D. M...y [s.I.,1764] qui fut publié avec des titres ou faux titres tels que : Collection complète des œuvres de M. de Voltaire et ouvrages philosophiques pour servir de preuves à la religion de l'auteur . L'ouvrage contient quatre œuvres de V* : Saül et David, avec une pagination séparée, le Testament de Jean Meslier, le Catéchisme de l'honnête homme et le Sermon des cinquante, suivies par L’Examen de la religion ( voir lettre du 30 décembre 1761 à Cramer : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/12/29/les-francais-commencent-a-se-former-5892505.html ) .

On peut penser avec Bengesco que V* lui-même était responsable de cette publication . La première référence externe qu'on en trouve est fournie par les Mémoires secrets du 12 novembre 1764, mais la lettre du 6 décembre 1763 à Damilaville ( http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2018/11/30/quand-on-peut-servir-son-prochain-sans-risque-on-est-coupable-devant-dieu-d.html ) est déjà remplie d'allusions la concernant ( à Du Marsais notamment ) : ce qui renvoie à décembre 1763 . Voir encore la lettre du 25 décembre 1764 à Pierre Rousseau : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/09/correspondance-annee-1764-partie-41.html

7 vous lui dites corrigé par V* sur le manuscrit en vous êtes affligé .